RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRET DU 5 mars 2010
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/07857
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 avril 2008 par le conseil de prud'hommes de Melun - section encadrement - RG n° 06/00779
APPELANT
Monsieur [Z] [N]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Olivier GANEM, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1404
INTIMEES
SARL DISTRICOLD
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Loïc DUSSEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P 187 substitué par Me Thomas CUQ, avocat au barreau de PARIS,
SARL [T] [L] MEUBLES
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Loïc DUSSEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P 187 substitué par Me Thomas CUQ, avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 janvier 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle BROGLY, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président
Madame Evelyne GIL, conseiller
Madame Isabelle BROGLY, conseiller
Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Francine ROBIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel régulièrement interjeté par Monsieur [Z] [N] à l'encontre du jugement prononcé le 15 avril 2008 par le Conseil de Prud'hommes de MELUN, section Encadrement, statuant en formation de jugement, sur le litige l'opposant à la SARL DISTRICOLD et à la SAS LE [T] [L] MEUBLES.
Vu le jugement déféré aux termes duquel le Conseil de Prud'hommes :
- a condamné la SAS [T] [L] MEUBLES à verser à Monsieur [Z] [N] la somme de 463,55 € à titre e rappel de salaire pour avantage en nature non fourni, ainsi que la somme de 46,35 € au titre des congés payés y afférents.
- a condamné la SARL DISTRICOLD à verser à Monsieur [Z] [N] les sommes suivantes :
* 579,30 € à titre de rappel de salaire pour ajustement d'horaire.
* 57,93 € à titre d'indemnité de congés payés y afférente.
* 499,61 € à titre de rappel de salaire pour avantage en nature non fourni.
* 49,96 € à titre d'indemnité de congés payés y afférentes.
- a ordonné l'exécution provisoire du jugement.
- a rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties.
- a condamné la SARL DISTRICOLD et la SAS [T] [L] MEUBLES aux dépens.
Vu les conclusions visées par le Greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles :
Monsieur [Z] [N], appelant, poursuit l'infirmation du jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes en ce qu'il l'a débouté de ses demandes non admises et demande en conséquence à la Cour :
- de condamner la SAS [T] [L] MEUBLES à lui payer les sommes suivantes :
* 2 386,06 € à titre de rappel de salaire sur la période du 1er au 23 mars 2003.
* 238,60 € au titre des congés payés y afférents.
* 2 202,06 € au titre d'heures supplémentaires du 23 mars au 23 septembre 2003.
* 220,20 € au titre des congés payés y afférents.
* 5 020,35 € au titre des heures supplémentaires du 23 mars au 23 septembre 2003 au-delà de la 38,5ème heure.
* 502,03 € au titre des congés payés y afférents.
* 2 292,45 € à titre d'indemnité pour perte de droit à repos compensateur.
* 229,24 € à titre de congés payés y afférents.
* 21 781,08 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé.
et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes.
subsidiairement, pour le cas où la convention de forfait ne serait pas déclarée nulle :
* 5 110,23 € au titre des heures supplémentaires au-delà de la 38,5ème heure.
511,02 € au titre des congés payés y afférents.
- de condamner la SAS [T] [L] MEUBLES à lui remettre un certificat de travail et une attestation ASSEDIC rectifiés mentionnant comme date d'entrée le 1er mars 2003, et ce, sous astreinte de 150 € par jour de retard et par document à compter de la décision à intervenir, la Cour se réservant le droit de liquider l'astreinte.
- de condamner la SARL DISTRICOLD à lui payer :
* 36 394,64 € à titre d'heures supplémentaires d'octobre 2003 à octobre 2006.
* 3 639,46 € au titre des congés payés y afférents.
* 23 731,32 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé.
* 1 702,74 € à titre de rappel de salaire du 7 au 20 octobre 2006 (mise à pied).
* 51,12 € au titre du complément de la prime d'ancienneté au titre du mois d'octobre 2006.
* 175,38 € au titre des congés payés afférents à la demande de rappel de salaire et de prime d'ancienneté.
* 1 423,87 € à titre d'indemnité de licenciement.
* 11 865,66 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis.
1 186,56 € au titre des congés payés y afférents.
* 47 462,64 € à titre dommages-intérêts pour rupture abusive.
et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes.
- de condamner in solidum la SAS [T] [L] MEUBLES et la SARL DISTRICOLD aux dépens ainsi qu'à lui verser la somme de 8 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La SARL DISTRICOLD et la SAS [T] [L] MEUBLES poursuivent la confirmation du jugement déféré en ce :
- qu'il a débouté Monsieur [Z] [N] de ses demandes relatives au paiement d'heures supplémentaires et de ses accessoires formulés à leur encontre.
- qu'il l'a débouté de ses demandes d'indemnisation relatives au travail dissimulé.
- qu'il l'a débouté de ses demandes d'indemnisation relatives à son licenciement pour fautes graves et ses accessoires formulées à l'encontre de la société DISTRICOLD.
Les sociétés demandent à la Cour :
à défaut,
- de dire et juger à tout le moins que le licenciement de Monsieur [Z] [N] pour cause réelle et sérieuse est justifié.
à titre infiniment subsidiaire.
- de faire une juste appréciation de son préjudice.
statuant à nouveau :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS [T] [L] MEUBLES à verser à Monsieur [Z] [N] la somme de 463,55 € à titre de rappel de salaire pour avantage en nature non fourni et 46,35 € au titre des congés payés y afférents.
- d'infirmer le jugement entrepris en ca qu'il a condamné la SARL DISTRICOLD à verser à Monsieur [Z] [N] la somme de 579,30 € à titre de rappel de salaire pour ajustement d'horaire et 57,93 € au titre des congés payés y afférents.
- d'infirmer le jugement entrepris en ca qu'il a condamné la SARL DISTRICOLD à verser à Monsieur [Z] [N] la somme de 499,61 € à titre de rappel de salaire pour avantage en nature non fourni et 49,96 € au titre des congés payés y afférents.
ajoutant.
- de condamner Monsieur [Z] [N] à payer à la SAS [T] [L] MEUBLES la somme de 5 000 au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- de le condamner à verser à la SARL DISTRICOLD la somme de 5 000 € sur le même fondement.
- de le condamner aux dépens.
CELA ETANT EXPOSE.
La SAS [T] [L] MEUBLES (anciennement dénommée PRO-SYSTEM GROUP) exerce une activité de location de meubles frigorifiques.
Le 6 décembre 2002, Monsieur [Z] [N] a conclu une convention de stage avec la société PRO-SYSTEM GROUP, pour la période du 10 décembre 2002 au 15 janvier 2003. Il a suivi une formation aux techniques d'encadrement commercial d'action marketing.
Par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 24 mars 2003, Monsieur [Z] [N] a été engagé en qualité de Cadre commercial par la société PRO-SYSTEM GROUP.
A compter du 24 septembre 2003, Monsieur [Z] [N] a fait l'objet, avec son accord, d'une mutation au sein de la société DISTRICOLD, filiale de la société PRO-SYSTEM GROUP.
La convention collective nationale applicable à la SARL DISTRICOLD est celle des commerces de gros.
La SARL DISTRICOLD a fait signer le 29 décembre 2004 à Monsieur [Z] [N] un avenant à son contrat de travail prévoyant à partir du 1er janvier 2005 :
- une revalorisation de son salaire mensuel brut, qui passait à 3 690 € (une prime d'ancienneté de 110,70 € venant s'y ajouter à compter du mois de mars 2006).
- une rémunération variable sur objectifs pour l'exercice allant du 1er septembre 2004 au 30 août 2005.
Le 30 mai 2006, la SARL DISTRICOLD et la société PRO-SYSTEM GROUP ont fait l'objet d'une cession à la SAS [T] [L] MEUBLES.
Par lettre remise en main propre le 6 octobre 2006, la société DISTRICOLD a remis à Monsieur [Z] [N] une convocation à un entretien préalable fixé au 16 octobre 2006, avec mise à pied à titre conservatoire.
Lors de l'entretien préalable où il était assisté d'un conseiller extérieur, Monsieur [Z] [N] a été reçu par Monsieur [E], directeur général de la SAS PRO-SYSTEM et Monsieur [B], Directeur des Ressources Humaines de PRO-SYSTEM.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 19 octobre 2006, Monsieur [Z] [N] a été licencié pour faute grave. négligences et fautes professionnelles, opposition systématique aux ordres et à la politique de sa hiérarchie, doublée d'un dénigrement de sa hiérarchie et d'une attitude injurieuse, refus d'exécuter les consignes conformes à sa mission.
SUR CE
Sur les demandes formulées à l'encontre de la SAS [T] [L] MEUBLES (anciennement dénommée PRO-SYSTEM).
1ère) sur la demande de rappel de salaire du 1er mars au 23 mars 2003.
Au soutien de son appel, Monsieur [Z] [N] fait valoir que la société PRO-SYSTEM lui a demandé de revenir travailler pour elle à compter du lundi 3 mars 2003, en lui faisant miroiter une embauche, et estime que les trois éléments caractéristiques du contrat de travail sont établis en l'espèce. Il expose à cet effet :
- qu'il a effectué une prestation de travail pour PRO-SYSTEM du 3 au 23 mars,
- qu'en contrepartie du travail effectué avant son embauche, il a perçu une rémunération à hauteur de la somme de 400 € versée par chèque le 17 mars 2003.
- que le fait d'avoir travaillé début mars 2003 en tant que responsable de stands sur les salons professionnels puis dans les locaux de PRO-SYSTEM n'aurait pu être possible sans les instructions et directives de son seul supérieur hiérarchique, Monsieur [P], PDG de PRO-SYSTEM.
En l'absence de définition légale, la jurisprudence considère qu'il y a contrat de travail quant une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre moyennant rémunération. Le contrat de travail suppose donc le réunion de trois éléments.
- une prestation de travail.
- une rémunération, contrepartie de cette prestation.
- la subordination juridique caractérisée par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a pouvoir de donner des ordres et directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Il appartient à celui qui se prévaut de l'existence d'un contrat, d'en établir l'existence.
En l'espèce, le contrat de travail écrit à durée indéterminée conclu entre les parties et adressé à Monsieur [Z] [N] le 19 mars 2003 prenait effet à compter du lundi 24 mars 2003.
Pour tenter de justifier l'existence d'une relation de travail dès le 3 mars 2003, Monsieur [Z] [N] prétend avoir été présent sur différents stands lors de salons professionnels entre le 1er et le 24 mars 2003 et produit à cet effet deux attestations dont il ressort qu'ail aurait été responsable de stands.
Cependant d'une part, il y a lieu de constater que ces attestations sont à elles-seules insuffisantes à établir l'existence d'un contrat de travail à partir du 3mars 2003, puisque datées respectivement des 15 février 2007 et 3 décembre 2007, soit plus de quatre ans après les faits et après plusieurs dizaines d'autres salons auxquels leurs auteurs ont participé, de sorte qu'il est peu crédible que ceux-ci se souviennent précisément de la présence et de la fonction de Monsieur [N] sur une si courte période.
D'autre part et surtout, Monsieur [Z] [N] verse lui-même aux débats une attestation qu'il a établie le lundi 17 mars 2003 en ces termes : 'Je soussigné, [Z] [N], déclare terminer les conclusions du stage effectué chez PRO-SYSTEM du 10 décembre 2002 jusqu'au 16 janvier 2003, lors de la semaine 12 (du lundi 17 au vendredi 21 mars 2003), et ce, à titre bénévole.
De son propre aveu, Monsieur [Z] [N] est revenu au sein de la société pour terminer son rapport de stage à titre bénévole, ce qui réduit à néant son affirmation selon laquelle il aurait effectivement réalisé une prestation de travail pour le compte de PRO-SYSTEM.
Monsieur [Z] [N] n'établit pas davantage que le versement par PRO-SYSTEM de la somme de 400 €par chèque émis le 17 mars 2003 s'analyserait en un salaire, la société prétendant que cette somme lui a été versée en remboursement de frais exposés durant son stage.
La subordination juridique n'est pas davantage caractérisée dès lors que Monsieur [Z] [N] avait décidé d'achever la rédaction de son rapport de stage durant la période litigieuse et l'avait clairement exprimé dans son attestation du 17 mars 2003.
Par suite, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [N] de sa demande de rappel de salaire pour la période du 3 au 23 mars 2003 comme ne rapportant aucun élément probant de nature à justifier l'exécution d'une prestation de travail pour le compte de la société PRO-SYSTEM.
2ème) sur la demande en paiement d'heures supplémentaires.
Monsieur [Z] [N] soutient encore avoir effectué, sans être rémunéré, près de 200 heures supplémentaires pendant 7 mois, soit entre mars et septembre 2003, correspondant à la somme de 9 514,86 €, outre 951,47 € au titre des congés payés y afférents.
Monsieur [Z] [N] ne justifie pas avoir sollicité le paiement de ces heures à l'occasion du transfert de son contrat de travail, ni à l'occasion de la contestation du bien-fondé de son licenciement le 19 octobre 2006.
Au soutien de son appel, Monsieur [Z] [N] remet en cause la validité de la convention individuelle de forfait conclue avec la société PRO-SYSTEM GROUP au motif qu'elle aurait dû être nécessairement être passée par écrit.
Le contrat de travail de Monsieur [Z] [N] stipulait :
- en son article 4 : Horaires de travail.
'L'horaire de travail est celui de la catégorie professionnelle à laquelle le salarié appartient, conformément à l'accord d'entreprise applicable à compter du 1e septembre 1999".
- en son article 7 : Rémunération.
' en conséquence de son travail, le salarié percevra un salaire brut annuel forfaitaire de 36 000 € , soit un salaire mensuel de 3 000 €.
La société [T] [L] MEUBLES (anciennement dénommée PRO-SYSTEM GROUP) justifie que l'accord d'entreprise mentionnée par erreur dans le contrat est en réalité une convention de réduction collective du temps de travail qu'elle verse aux débats et qui a été conclue le 13 octobre 1999 entre la société PRO-SYSTEM GROUP et l'Etat, avec effet au 1er septembre 1999.
Cette convention stipule en son article 1 que l'horaire de travail sera maintenu en moyenne 39 heures par semaine soit 1770 heures par an, notamment pour les Cadres, catégorie à laquelle appartenait Monsieur [Z] [N].
Cette convention renvoie elle-même à l'accord de branche du 22 janvier 1999, ainsi qu'il ressort de la notice explicative remise aux Délégués du personnel versée aux débats et visant expressément en son article 14 la possibilité de recourir à une rémunération forfaitaire pour le personnel Cadre.
Les articles 13 et 14 de l'accord de branche donnant la possibilité aux entreprises d'en appliquer directement ses dispositions, la convention prévoyait une durée de travail de 10% supérieure à la duré légale, soit 38,5 heures hebdomadaires ou 166,83 heures mensuelles), alors que l'accord finalement signé avec la DDTEF maintenait la durée du travail antérieure à savoir 169 heures mensuelles ou 1770 heures annuelles pour les cadres, ainsi qu'il ressort de la pièce 20 produite par la société [T] [L] MEUBLES.
En signant son contrat de travail, Monsieur [Z] [N] a donc accepté une convention individuelle de forfait d'horaires stipulant une durée hebdomadaire de 38,5 heures pour une rémunération forfaitaire annuelle de 36 000 € bruts.
Monsieur [Z] [N] ne saurait sérieusement soutenir que la convention de forfait serait nulle faute pour la société d'avoir porté à sa connaissance l'accord de branche, préalablement à son embauche dès lors que son contrat de travail renvoie expressément à la convention de réduction collective du temps de travail, laquelle fait référence à l'accord de branche.
Enfin s'il en est besoin, la société [T] [L] MEUBLES justifie que la rémunération perçue par Monsieur [Z] [N] (3000 € bruts) est supérieure à celle minimum imposée par la convention collective nationale applicable de laquelle il ressort que pour un salarié de même qualification ( coefficient 450) elle est fixée à 2 123,97 € bruts pour 35 heures, soit 2 399,97 € bruts pour 38,5 heures.
Ainsi, Monsieur [Z] [N] qui a accepté une convention de forfait, ne peut prétendre à indemnisation de ses heures supplémentaires et repos compensateurs que s'il démontre avoir effectivement réalisé des heures au-delà de celles prévues par son contrat de travail.
Aux termes de l'article L 3171-4 du Code du Travail : 'En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.
S'il résulte des dispositions de l'article L 3171-4 du Code du Travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa décision.
En l'espèce, les pièces produites par Monsieur [Z] [N] à savoir un décompte d'heures qu'il a lui-même dressé unilatéralement sont insuffisantes à établir d'une part le travail qu'il prétend avoir effectué et le fait que la société lui aurait demandé l'exécution de telles heures, ni même le fait qu'elle en aurait été informée, alors même qu'elle le conteste formellement.
Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [N] de ses demandes d'heures supplémentaires, de congés payés y afférents, d'indemnité pour perte de droit au repos compensateur et aux congés payés y afférentes, ainsi que de l'indemnité pour travail dissimulé.
4ème) sur le rappel de salaire au titre de l'avantage en nature non fourni.
Monsieur [Z] [N] sollicite l'allocation de la somme de 463,55 € à titre de rappel de salaire pour avantage en nature non fourni pour la période comprise entre le 23 juin 2003 (date d'expiration de sa période d'essai) et le 23 septembre 2003 (date du transfert de son contrat de travail) ainsi que la somme de 46,35 € au titre des congés payés y afférents.
La société [T] [L] MEUBLE soutient que c'est sur la base d'une analyse erronée que le Conseil de Prud'hommes l'a condamnée à un rappel de salaire à ce titre. Elle rappelle que si l'article 6 du contrat de travail de Monsieur [N] stipulait que serait mise à sa disposition, à titre d'avantage en nature, une voiture de fonction à l'issue de la période d'essai, rien dans la rédaction de cet article ne permet d'affirmer que cette fourniture devrait avoir lieu immédiatement dès le lendemain du dernier jour de la période d'essai. Elle ajoute qu'elle a mis à sa disposition un véhicule de société.
La période d'essai ayant pris fin le 23 juin 2003, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Monsieur [Z] [N] la somme de 463,55 € au titre de l'avantage en nature contractuellement prévu mais dont il n'a pas bénéficié ainsi que la somme de 46,35 € au titre des congés payés y afférents.
Sur les demandes formulées à l'encontre de la SARL DISTRICOLD.
1ère) sur le rappel de salaire pour la période comprise entre octobre 2003 et décembre 2004.
Monsieur [Z] [N] poursuit la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné la SARL DISTRICOLD à lui verser la somme de 579,30 € de ce chef, ainsi que la somme de 57,93 € au titre des congés payés y afférents.
La SARL DISTRICOLD prétend qu'en apposant la mention 'Bon pour accord' et sa signature sur la lettre en date du 22 septembre 2003, Monsieur [N] a donné son accord exprès au transfert de son contrat de travail dont il était indiqué dans le courrier qu'il s'effectuait aux mêmes conditions de qualification et de rémunération que le contrat initial. Elle précise que la rémunération convenue au sein de la société PRO-SYSTEM GROUP étant forfaitaire et annuelle, Monsieur [N] en acquiesçant au transfert, a donc accepté également que sa rémunération soit maintenue à 36 000 € bruts par an, et assise sur un forfait annuel en heures.
Cependant, l'horaire hebdomadaire de la SARL DISTRICOLD étant supérieur à celui de la société PRO-SYSTEM GROUP, la société [T] [L] MEUBLES ne justifie nullement que Monsieur [Z] [N] ait accepté le maintien de son salaire antérieur qui revenait en réalité à une diminution de salaire.
Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Monsieur [Z] [N] la somme de 579,30 € à titre de rappel de salaire pour ajustement d'horaire ainsi que la somme de 57,93 € au titre des congés payés y afférents.
2ème) sur le rappel de salaire au titre de l'avantage en nature.
En l'absence d'éléments nouveaux soumis à son appréciation, la Cour estime que les premiers juges, par des motifs pertinents qu'elle approuve, ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Monsieur [Z] [N] la somme de 499,61 € à titre de rappel de salaire pour avantage en nature non fourni, ainsi que la somme de 49,96 au titre des congés payés y afférents.
3ème) sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, sur l'indemnité pour perte de droit à repos compensateur, et sur l'indemnité pour travail dissimulé.
Pour les mêmes motifs que ceux ci- dessus exposés dans le cadre des demandes formulées à l'encontre de la société [T] [L] MEUBLES, le jugement déféré doit également être confirmé en qu'il a débouté Monsieur [Z] [N] comme mal fondé dans les mêmes demandes formulées à l'encontre de la SARL DISTRICOLD.
Sur le licenciement.
1ère) Sur la régularité du licenciement.
Au soutien de son appel, Monsieur [Z] [N] invoque pour la première fois en cause d'appel l'irrégularité de son licenciement au motif que Monsieur [E], Directeur général de la société PRO-SYSTEM GROUP n'aurait pas été habilité par le Gérant de la société DISTRICOLD, Monsieur [L], à conduire la procédure de licenciement.
La société DISTRICOLD justifie qu'elle est une filiale à 100 % de la société PRO-SYSTEM GROUP devenue la SAS [T] [L] MEUBLES.
A ce titre, un salarié d'une maison mère ayant pour tâche d'animer celle-ci ainsi que les filiales, peut valablement procéder au licenciement d'un salarié attaché à cette filiale, quand bien même aucune délégation de pouvoir n'aurait été passée par écrit.
En l'espèce, il est acquis aux débats que Monsieur [E], Directeur Général de la société PRO-SYSTEM GROUP devenue la SAS [T] [L] MEUBLES, était également à la demande de Monsieur [L], Gérant et animateur de la SARL DISTRICOLD, les deux sociétés ayant le même siège social et les mêmes locaux d'exploitation.
Le contrat de travail de Monsieur [E] stipule par ailleurs expressément qu'il exercera ses fonctions pour toutes les sociétés du groupe à ce jour : PRO SYSTEM GROUP, CHRONOCOLD, DISTRICOLD et LUCIMMO.
Il y a lieu de dire et juger régulière la procédure de licenciement diligentée par Monsieur [E].
2ème) Sur la qualification du licenciement.
Monsieur [Z] [N] conclut également à l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et soutient à cet égard que la véritable cause serait liée à l'acquisition de la société PRO-SYSTEM GROUP dont la société DISTRICOLD est une filiale par la SAS [T] [L] MEUBLES. Il fait plaider que l'inexactitude du motif allégué dans la lettre de licenciement entraîne nécessairement l'illégitimité du licenciement.
La lettre de licenciement en date du 19 octobre 2006 qui fixe les limites du litige fait état de nombreux griefs formulés à l'encontre de Monsieur [Z] [N] :
- Négligences et fautes professionnelles.
- Opposition systématique aux ordres et à la politique de sa hiérarchie, doublée d'un dénigrement de sa hiérarchie et d'une attitude injurieuse.
- Refus d'exécuter les consignes conformes à sa mission.
La cause du licenciement invoquée doit être réelle, ce qui implique que le motif existe, qu'il soit exact et objectif. Elle doit être également sérieuse.
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits, imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur. Il appartient à ce dernier, qui s'est placé sur le terrain disciplinaire, de prouver les faits fautifs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, et de démontrer en quoi ils rendaient immédiatement impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
C'est au juge qu'il incombe de qualifier le degré de gravité de la faute.
Sur les négligences et fautes professionnelles.
Sur l'absence de remise de plannings hebdomadaires.
Il ressort des pièces versées aux débats par la SAS [T] [L] MEUBLES qu'à la suite d'un entretien du 15 septembre 2006, confirmé par courriel du 18 septembre 2006, Monsieur [E] a demandé à Monsieur [Z] [N] de lui fournir un planning hebdomadaire mentionnant les visites des clients envisagées, ainsi que les actions de ventes prévues, outil de son activité de Responsable Commercial.
Cette demande n'était pas nouvelle ainsi qu'il ressort d'un courriel en date du 28 avril 2004 produit aux débats émanant de Monsieur [G] [P].
Pour combattre ce grief, Monsieur [Z] [N] se borne à produite trois plannings hebdomadaires pour les périodes du 25 au 29 septembre 2006, du 2 au 6 octobre 2006 et du 9 au 13 octobre 2006 susceptibles selon lui d'établir qu'il se serait conformé aux directives de sa hiérarchie.
Cependant de l'examen de ces plannings, il ressort qu'ils concernent trois semaines qui se succèdent, qu'aucune rendez-vous n'y est mentionné, et qu'à la rubrique 'grand compte', ils reprennent les mêmes données commerciales de semaines en semaine, ce qui démontre à l'évidence l'absence de toute activité commerciale.
Ce grief qui est fondé, relève donc d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Sur l'absence de gestion de la balance client.
Il est également reproché à Monsieur [Z] [N] de n'avoir pas respecté le principe de vente applicable au sein de la société DISTRICOLD, dit de Cash and Carry (paiement à la remise des biens achetés).
Pour tenter d'échapper à sa responsabilité de ce chef, Monsieur [Z] [N], sans contester ce grief, fait valoir que l'ancienne direction autorisait des dérogations à ce principe.
En l'espèce, la SAS [T] [L] MEUBLES justifie que Monsieur [Z] [N] a contrevenu à cette règle en occasionnant de nombreux impayés qu'il n'a pas été en mesure de résorber. Elle établit en outre que la société DISTRICOLD l'avait rappelé à l'ordre par courriels des 25 janvier et 24 mars 2005, puis par courrier du 22 avril 2005, la violation de la procédure ayant été à l'origine d'un important découvert de 98 374,49 €.
Monsieur [Z] [N] ne justifie pas avoir sollicité la moindre autorisation de sa hiérarchie pour accorder des facilités de paiement.
Ce grief est donc fondé.
Sur l'absence de mise en place d'un calendrier.
Il est également acquis aux débats que Monsieur [Z] [N], en sa qualité de Responsable Commercial, a été dans l'incapacité de mettre en place et de gérer les stocks de matériels, ainsi qu'il l'a reconnu lui-même à l'occasion d'un échange de courriels du 29 septembre 2006 avec Monsieur [E].
Il ne saurait sérieusement contester ce reproche par le fait de l'insuffisance des outils informatiques mis à sa disposition dont il ne s'est jamais plaint.
Sur l'absence de gestion du dépôt de meubles EBERHARDT FRERES.
Il est également constant que Monsieur [Z] [N] n'a pas été en mesure de gérer les meubles mis en vente par la société EBERHARDT FRERES, ainsi qu'en atteste la fait qu'il n'a pas pu indiquer à son employeur combien de meubles avaient été vendus à tel point que le décompte n'a pu être fait que lors de l'inventaire du 13 octobre 2006, lequel a révélé que la société DISTRICOLD avait vendu mais non provisionné le prix de 10 appareils, soit la somme de 15 650,88 € HT.
Pour contester ce manquement, Monsieur [Z] [N] fait valoir qu'il a perdu le compte de meuble à la suite d'un cambriolage survenu le 17 juin 2005 mais ne justifie pas pour autant avoir avisé sa direction de ce vol jusqu'à son licenciement intervenu en octobre 2006.
Ce grief doit également être retenu.
Sur les fautes graves reprochés à Monsieur [Z] [N].
Refus réitéré d'exécuter les consignes conformes à sa mission.
La SAS [T] [L] MEUBLES reproche à Monsieur [N], malgré de nombreuses demandes formalisées dans deux courriers électroniques datés respectivement des 18 juillet 2006 et 18 septembre 2006, de ne pas avoir pris de rendez-vous 'grands comptes' avec des prospects de 5 à 10 mois, avec établissements de plannings de visite.
Sans contester ce grief, Monsieur [N], pour tenter de s'exonérer de toute responsabilité, fait valoir que cette tâche était difficile à réaliser. Il soutient que la société ne lui a pas laissé le temps d'obtenir 5 à 10 rendez-vous 'grands comptes' par mois puisque cette nouvelle exigence a été formulée le 18 septembre 2006 et qu'il a été mis à pied à titre conservatoire le 6 octobre 2006 avant d'être licencié le 16 octobre suivant. Il ajoute que la difficulté était d'autant plus grande qu'il n'avait plus d'assistante qui avait démissionné, qu'il n'avait plus de stagiaires commerciaux, et qu'en sus des tâches commerciales, il devait se charger des tâches administratives de la société DISTRICOLD.
Cependant, il y a lieu de faire observer que la tâche qui lui est reprochée de n'avoir pas accomplie constitue l'essentiel de son activité de Responsable Commercial qu'en cette qualité il devait exécuter dès son embauche.
En outre, il est acquis aux débats, ainsi que déjà exposé ci-dessus que Monsieur [Z] [N] a délibérément, et de façon récurrente, refusé d'exécuter les consignes et directives qui lui avaient été données par sa hiérarchie.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé justifié le licenciement pour faute grave dont Monsieur [Z] [N] a fait l'objet et en ce que par suite il l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.
Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Succombant en son recours, Monsieur [Z] [N] sera condamné aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'il a exposés, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la SARL DISTRICOLD et à la SAS [T] [L] MEUBLES la charge les frais de procédure par elles exposés dans le cadre de la présente procédure et non compris dans les dépens, elles doivent donc être déboutées de leur demande formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS.
LA COUR
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Déboute la SARL DISTRICOLD et la SAS [T] [L] MEUBLES de leur demande formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamne Monsieur [Z] [N] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :