Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRÊT DU 14 MAI 2010
(n° , 04 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/12741
Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Décembre 2007 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006001450
APPELANTE
Société de droit américain MARC JACOBS INTERNATIONAL
constituée selon les lois de l'Etat du DELAWARE
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 2]
[Localité 4]
[Localité 4] (ETATS UNIS)
représentée par la SCP MENARD - SCELLE-MILLET, avoués à la Cour
assistée de Me Julien BLANCHARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L 280
plaidant pour la SELARL MARCHAIS DE CANDÉ
INTIMÉES
S.A.S. EUROLINE
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
assistée de Me Evelyne AVAKIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1019
S.A.S. DUO LINX
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
assistée de Me Evelyne AVAKIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1019
S.A. WYLSON
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
assistée de Me Evelyne AVAKIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1019
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Mars 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Alain GIRARDET, Président et Madame Dominique SAINT-SCHROEDER, conseillère, chargés d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Alain GIRARDET, président
Madame Sophie DARBOIS, conseillère
Madame Dominique SAINT-SCHROEDER, conseillère
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Christelle BLAQUIERES
ARRÊT :- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Alain GIRARDET, président et Mademoiselle Christelle BLAQUIERES, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
***
La société de droit américain MARC JACOBS INTERNATIONAL a pour activité la création et la commercialisation de vêtements et d'accessoires de mode sous les marques MARC JACOBS et MARC BY MARC JACOBS. Elle commercialise depuis l'année 2000 un modèle de sac dénommé VENETIA.
Ayant appris qu'un modèle qu'elle considère comme reproduisant servilement les caractéristiques du sac VENETIA était proposé à la vente dans le magasin parisien de la société GALERIES LAFAYETTE, la société MARC JACOBS INTERNATIONAL a fait procéder le 26 octobre 2005 dans les locaux de cette société et dans ceux de la société WYLSON à un constat d'huissier qui a révélé que le sac litigieux vendu dans le magasin GALERIES LAFAYETTE portait une étiquette comportant la mention EUROLINE.
La société MARC JACOBS INTERNATIONAL a alors fait assigner les sociétés GALERIES LAFAYETTE et EUROLINE en concurrence déloyale et parasitisme devant le tribunal de commerce de Paris. La société GALERIES LAFAYETTE a fait assigner en intervention forcée la société WYLSON et la société DUO LYNX afin de la garantir.
Par jugement contradictoire du 6 décembre 2007, le tribunal de commerce a joint les causes, débouté la société MARC JACOBS INTERNATIONAL de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à verser aux sociétés GALERIES LAFAYETTE et EUROLINE la somme de 5.000 euros chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société MARC JACOBS INTERNATIONAL a fait appel de cette décision.
Par ordonnance du 18 juin 2009, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement partiel de la société MARC JACOBS INTERNATIONAL à l'encontre de la société GALERIES LAFAYETTE et l'extinction de l'instance dirigée contre cette société.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 1er février 2010, la société MARC JACOBS INTERNATIONAL prie la cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire et juger que les sociétés EUROLINE, WYLSON et DUO LYNX ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à son encontre, de les condamner in solidum à lui payer à ce titre la somme de 150.000 euros outre celle de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et de prononcer des mesures d'interdiction, de destruction et de publication,
Les sociétés EUROLINE, WYLSON et DUO LYNX, intimées, concluent dans leurs dernières écritures du 5 mars 2010, à la mise hors de cause des sociétés EUROLINE et WYLSON, de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions et de condamner la société MARC JACOBS INTERNATIONAL en tous les dépens ainsi qu'à verser à la société DUO LYNX la somme de 15.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il est renvoyé aux dernières conclusions précitées des parties en date des 1er février et 5 mars 2010 pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions et ce, conformément aux dispositions des articles 455 et 753 du Code de procédure civile.
SUR CE
Sur la demande de mise hors de cause des sociétés EUROLINE et WYLSON
Considérant que les factures versées aux débats établissent que la société EUROLINE a acquis auprès d'un fabricant chinois des sacs qui reproduisent selon l'appelante les caractéristiques de son modèle de sac VENETIA et qui ont été commandés et commercialisés par la société GALERIES LAFAYETTE; que la société EUROLINE sera donc déboutée de sa demande de mise hors de cause;
que s'agissant de la société WYLSON, la société MARC JACOBS INTERNATIONAL, qui au demeurant n'a pas répondu à la demande dont s'agit, ne produit aucune pièce démontrant que cette société est impliquée ni dans la fabrication ni dans la commercialisation des sacs litigieux;
qu'il sera dès lors fait droit à la demande de mise hors de cause de cette société étant relevé que le tribunal a omis de statuer sur ce chef de demande.
Sur les actes de concurrence déloyale
Considérant que la société MARC JACOBS INTERNATIONAL fait grief aux premiers juges d'avoir rejeté son action en concurrence déloyale et parasitaire en méconnaissance des données de fait et des règles qui régissent la matière;
qu'elle incrimine à l'encontre des sociétés intimées la reprise servile des caractéristiques du modèle VENETIA, soit la forme rectangulaire, la présence de deux poches frontales à rabat ornées de surpiqûres comprenant un fermoir métallique de forme ronde orné dans sa partie supérieure d'un cercle gravé dans le métal, une lanière centrale se fermant par une boucle rectangulaire métallique et comportant deux passants, l'un étant libre et l'autre fixé au sac par deux rivets, ainsi que deux anses rattachées au sac par des anneaux métalliques attachés à un double empiècement placé en superposition.
Considérant, cependant, que le simple fait de copier la prestation d'autrui ne constitue pas comme tel un acte de concurrence fautif, le principe étant qu'une prestation qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle peut être librement reproduite et ce, en vertu du principe de liberté du commerce et de la concurrence ; qu'il appartient à la société MARC JACOBS INTERNATIONAL qui incrimine un comportement fautif de la part des sociétés intimées de caractériser la faute de ces dernières et de démontrer qu'elles ont cherché à créer un risque de confusion avec le sac qu'elle commercialise sous la dénomination VENETIA.
Considérant que les parties exerçant leur activité dans le même domaine économique, distribuant leurs produits notamment dans des grands magasins concurrents tels que le PRINTEMPS et le BON MARCHE pour la société appelante et les GALERIES LAFAYETTE pour la société EUROLINE, et se trouvant ainsi en situation de concurrence, il y a lieu de rechercher si les éléments de la concurrence déloyale sont réunis, la notion de parasitisme n'étant pas applicable aux circonstances de la présente espèce du fait même de la situation de concurrence existant entre les parties.
Considérant qu'outre l'absence sur le sac vendu sous la dénomination EUROLINE d'une lanière centrale faisant le tour du sac et la taille plus petite de ce dernier, l'apparence d'ensemble des deux produits en cause exclut tout risque de confusion dans l'esprit de la clientèle indépendamment du prix de vente de chacun des modèles, 29,90 euros après réduction (45 euros au prix d'origine) pour le sac commercialisé par les sociétés intimées et environ 750 euros pour le sac vendu par la société MARC JACOBS INTERNATIONAL ;
qu'en effet, outre la forme générale plus ramassée du sac EUROLINE, la matière, cuir noir souple légèrement grainé pour le VENETIA et PVC de couleur violine imitant grossièrement des écailles de serpent ou de crocodile pour le sac attaqué, les boucles, rivets et fermoirs en métal blanc pour le premier et en métal jaune pour le second ainsi que l'apposition apparente de la marque MARC JACOBS sur le devant du sac à l'emplacement des fermoirs et reprise sur la tige en métal qui accompagne la fermeture à glissière alors que le sac ayant fait l'objet du constat réalisé aux Galeries Lafayette supporte une étiquette revêtue de la dénomination EUROLINE, la doublure en peau et les poches intérieures du sac VENETIA dont la qualité des finitions ne se retrouve nullement sur celles des poches intérieures de forme rudimentaire du sac litigieux dont la doublure est en textile enduit, excluent que le public puisse se méprendre sur l'origine des deux produits lesquels sont, de plus, vendus dans des conditions qui diffèrent, le sac EUROLINE étant placé dans des bacs au contraire des sacs de l'appelante qui, comme tout produit de luxe, sont offerts à la vente sur des présentoirs;
qu'il suit que faute pour la société MARC JACOBS INTERNATIONAL de démontrer la réalité du risque de confusion, le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
Considérant que l'équité commande d'allouer à la société DUO LYNX la somme de 5.000 euros au titre de ses frais irrépétibles, les sociétés EUROLINE et WYLSON ne formant aucune demande de cette nature.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris et y ajoutant,
Met hors de cause la société WYLSON.
Condamne la société MARC JACOBS INTERNATIONAL à verser à la société DUO LYNX la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La condamne aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT