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27/05/2010 | FRANCE | N°08/09302

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 27 mai 2010, 08/09302


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 27 Mai 2010

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/09302



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS - Section Commerce - RG n° 06/03527





APPELANTE



SA AIGLE INTERNATIONAL

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Pierre LEMAIRE, avocat au

barreau de POITIERS substitué par Me Matthias WEBER, avocat au barreau de POITIERS





INTIME



Monsieur [P] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Isabelle BONNET, avocat au ba...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 27 Mai 2010

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/09302

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS - Section Commerce - RG n° 06/03527

APPELANTE

SA AIGLE INTERNATIONAL

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Pierre LEMAIRE, avocat au barreau de POITIERS substitué par Me Matthias WEBER, avocat au barreau de POITIERS

INTIME

Monsieur [P] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Isabelle BONNET, avocat au barreau de PARIS, toque : D 602

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mars 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Ange LEPRINCE, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise FROMENT, président

Mme Claudette NICOLETIS, conseiller

Mme Marie-Ange LEPRINCE, conseiller

Greffier : Madame Pierrette BOISDEVOT, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Mme Françoise FROMENT, Président et par Madame Pierrette BOISDEVOT, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [P] [B] a été engagé en qualité de vendeur caissier par la société AIGLE par contrat à durée indéterminée en date du 7 juillet 2003 effet au 11 Août 2003, pour une rémunération comprenant une partie fixe et une partie variable, son lieu de travail étant fixé au corner AIGLE du magasin des Galeries LAFAYETTE ; les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective du commerce de caoutchouc ;

Par lettre recommandée en date du 20 Décembre 2005, il a été licencié pour motif économique ;

Contestant le bien fondé de son licenciement, M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS, lequel a rendu son jugement le 17 juin 2007 par lequel il a condamné la société AIGLE payer M. [B] les sommes de :

- 26 000€ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

- 1500€ sur le fondement de l'article 700 du CPC,

Ordonné le remboursement par la société AIGLE INTERNATIONAL aux organismes sociaux des indemnités de chômage versées M. [B] après son licenciement dans la limite de six mois ;

Ordonné l'exécutions provisoire,

Débouté la société AIGLE INTERNATIONAL de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du CPC et l'a condamnée aux dépens.

Par lettre recommandée postée le 16 juillet 2008 , la société AIGLE INTERNATIONAL a interjeté appel du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 17 Juin 2008, à elle notifié aux parties le 1er juillet précédent.

Par conclusions visées par le greffe et soutenues oralement l'audience, la société AIGLE INTERNATIONAL demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de débouter M.[B] de l'ensemble de ses demandes, de le condamner à lui payer la somme de 2 000 € en vertu de l'article 700 du CPC ;

Par conclusions visées par le greffe et soutenues oralement à l'audience, M. [B] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a qualifié le licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L1235-3 du code du travail et lui a alloué 26 000,00 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- condamner en outre la société AIGLE INTERNATIONAL au paiement d'une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du CPC,

- constater que les sommes allouées en première instance ont d'ores et déjà été versées M. [B] et que celui-ci a été rempli de ses droits,

- dire et juger la SA AIGLE mal fondée en son appel,

- débouter la SA AIGLE de toutes ses demandes , fins et conclusions,

MOTIFS ET DECISION

Considérant que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit énoncer, lorsqu'un motif économique est invoqué, à la fois la raison économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi ou le contrat de travail ; que, pour avoir une cause économique, le licenciement doit , ainsi que le dispose l'article L1233-1 du code du travail, être prononcé pour un motif non inhérent à la personne du salarié et être consécutif soit à des difficultés économiques, soit à des mutations technologiques, soit une à une réorganisation de l'entreprise, soit à une cessation d'activités, que la réorganisation, si elle n'est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ;

Considérant par ailleurs qu'en application de l'article L1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont t réalisés, et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure, ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient et dont l'activité permet la permutabilité du personnel, que les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises ;

Considérant en l'espèce que la lettre de licenciement en date du 29/12/2005 est ainsi libellée :

'Par courrier en date du 13 décembre 2005, nous vous avons convoqué à un entretien préalable sur le projet de licenciement économique vous concernant.
Vous vous êtes présenté à cet entretien le 20 Décembre 2005 au cours duquel nous vous avons indiqué les motifs économiques de la décision que nous envisageons de prendre votre égard.

Par la présente, nous avons le regret de vous signifier votre licenciement.

Les motifs économiques de cette décision, nous vous le rappelons, sont les suivants :

Afin d'optimiser le rentabilité de ses magasins ( dont les Galeries Lafayette et le BHV), le groupe Galeries Lafayette nous impose à compter du 1er Janvier 2006 de nouvelles conditions commerciales très contraignantes, dont nous avons été informés en avril 2005, entraînant pour AIGLE des surcoûts importants de gestion et de fonctionnement pour les corners.
En effet, avec les nouvelles conditions commerciales imposées au 1er Janvier 2006, nous prévoyons une perte de 12 points au niveau de la rentabilité du stand AIGLE rayon sport.

Aussi, dans le but de conserver les corners, ces conditions ont conduit la société AIGLE à réduire les frais de fonctionnement, par révision de la rémunération de l'ensemble du personnel des corners, sans distinction de magasin de rattachement, afin d'éviter les inégalités de traitement entre salariés d'un même secteur.

Votre rémunération constitue principalement d'un fixe et d'une partie variable, a été revue de la façon suivante à compter du 1ER janvier 2006, révision que nous vous avons remise en mains propres par avenant le 9 novembre 2005 :

Appointements fixes : 1360€

Taux d'intéressement de 1,50% sur le chiffre d'affaires HT du corner AIGLE rayon Sport.

Ce dernier stipulait que vous disposiez d'un délai d'un mois pour accepter cette proposition et qu'une fois ce délai passé, vous êtes réputé avoir accepté les modifications.

En date du 7 décembre 2005 , vous nous avez fait parvenir en recommandé avec accusé de réception une lettre de refus de l'avenant N'4.

Dans le cadre du projet de licenciement économique dont vous faites l'objet , nous vous rappelons qu'au cours de l'entretien préalable du 20 Décembre 2005, nous vous avons proposé d'adhérer à une convention de reclassement personnalisée conformément à l'article L321-4-2 du code du travail.

Vous disposez d'un délai de 14 jours , courant depuis le 20 décembre 2005, date de votre entretien préalable, jusqu'au 2 janvier 2006 inclus, pour nous faire part de votre volonté de bénéficier de ce dispositif.

Si vous maintenez votre accord pendant ce délai, votre contrat de travail sera rompu d'un commun accord des parties, aux conditions qui figurent dans le document d'information remis le 20 décembre 2005, à l'expiration du délai de rflexion , soit le 2 janvier 2006.

En outre, une proposition interne de reclassement vous a été faite le 20/12/05 avec un délai de réflexion jusqu'au 02/01/06.

Si vous refusez expressément d'adhérer à la convention de reclassement personnalisée, ou à défaut de réponse au terme de ce délai de réflexion, et si vous n'avez pas manifesté votre acceptation expresse de la proposition interne de reclassement, à la date du 2 janvier 2006, vous serez licencié pour motif économique, la présente lettre valant notification de licenciement . sa date de première présentation fixera le point de départ du préavis de deux mois au terme duquel votre contrat de travail sera définitivement rompu.

Votre solde de tout compte vous sera versé au terme de votre contrat.

Si vous n'acceptez pas la convention de reclassement personnalisée, vous pouvez faire valoir les droits que vous avez acquis au titre du droit individuel à la formation( DIF), sous réserve d'en formuler la demande avant l'expiration de votre préavis. A dfaut d'une telle demande dans le délai imparti , ce droit sera définitivement perdu

Durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de votre contrat de travail, vous bénéficierez, conformément à l'article L321-14 du code du travail, d'une priorité de rembauchage dans notre entreprise à condition de nous faire part dans l'année qui suit la fin du contrat, de votre désir de faire valoir cette priorité' ;

Considérant que, par courrier en date du 2 janvier 2006, M. [B] a fait part à son employeur qu'il n'acceptait pas sa proposition de reclassement interne, en sachant que cela le déplacerait loin de sa région et surtout lui ferait perdre de manière significative une bonne partie de son salaire actuel, et qu'il n'adhérait pas non plus à la convention de reclassement personnalisée car celle-ci mettrait fin à son contrat de travail d'un commun accord , or, il réfutait les motifs et les raisons de son licenciement économique car le chiffre d'affaires du CORNER dont il s'occupe a progressé de près de 50% depuis Août 2003, date à laquelle il a pris ses fonctions ;

Considérant que la SA AIGLE INTERNATIONAL produit notamment à l'appui des motifs allégués par elle pour justifier le licenciement économique de M. [B] :

- le courrier recommandé des GALERIES LAFAYETTE adressé le 28 Avril 2005 à la SA AIGLE INTERNATIONAL lui confirmant leur « accord qui a pour but de favoriser la promotion de votre marque AIGLE dans le magasin d'HAUSSMANN au rayon Sport selon les modalités et conditions ci après » et notamment - l'achat des produits AIGLE sous condition de les revendre aux clients des Galeries Lafayette et du BHV',

- la prise en charge par la SA AIGLE de la démarque inconnue et de l'assurance ' ,

- prélèvement à partir du 1er janvier 2006 d'une marge HT minimale garantie annuelle de 346 500 € HT'.

- le courrier de la société BHV la SA Aigle international en date du 20 juin 2005 fixant les nouvelles conditions commerciales concernant 5 magasins,

- le Compte-rendu de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise de la Sa Aigle du 19/11/05,

- les Bilan et comptes de résultats des années 2002, 2004 et 2005,

- son registre du personnel ,

- des courriers entre le DRH et les magasins Aigle

- le résultat d'exploitation par réseaux de la société aigle fin dcembre 2005

- les comptes sociaux de 2007 et 2008,

- des documents contractuels de 14 autres salariés d'Aigle, qui ont accepté les nouvelles conditions de rémunération ;

Considérant que suite au refus par M. [B] de voir modifier son contrat de travail, il s'est vu remettre un projet de convention de reclassement personnalisé et que, en vue de son reclassement, la société Aigle international lui a, par courrier du 20 décembre 2005, proposé un poste de responsable adjoint au magasin Aigle de [Localité 5] dans l'Isère, catgorie ETAM coefficient 190, la rémunération étant composée d'une base brute mensuelle sur 13 mois de 1300€ à laquelle s'ajoutait un intéressement de 0,30% calculé sur le chiffre d'affaires hors taxes du magasin, prévu à 915.550€ en 2006, proposition à laquelle M.[B] n'a pas donné suite ;

Considérant que la société Aigle international indique qu'elle était contrainte de mettre en place une nouvelle organisation de son entreprise afin de sauvegarder sa compétitivité et que par la suite tous les nouveaux démonstrateurs de la société ont été engagés selon les nouvelles modalités de rémunération ; que la sauvegarde de sa compétitivité rendait nécessaire cette politique qui a en fait obtenu l'adhésion de la majorité des employés concernés ;

Considérant toutefois qu'il n'apparaît pas des pièces produites par la société Aigle International que sa situation économique était telle qu'elle justifiait une reorganisation pour la sauvegarde de sa competitivité, la recherche d'un rendement superieur ne constituant pas une telle cause ; que, de plus, M. [B] a ete t remplace a son poste de corner par un employe nouvellement engage , la proposition de remplacement qui lui a ete faite n'étant pas sétieuse au regard de ses conditions financières notamment; qu ily a lieu de constater que la volonte de reduire les couts salariaux a été la cause du licenciement afin d obtenir une meilleure rentabilite, ce qui ne constitue pas un motif economique de licenciement ;

Qu'en conséquence, le licenciement de M. [B] se trouve dépourvu de cause reelle et sérieuse ;

Considérant que, compte tenu de l'anciennete de deux ans et six mois, il sera alloué une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse de 26.000 €, avec intérêts au taux légal à compter du jugement du conseil des prud hommes ;

Qu'en application de l'article l1235 4 du code du travail, il y a lieu de condamner la société aigle à rembourser aux organismes sociaux les indemnités de chômage payées à M. [B] à concurrence de six mois .

PAR CES MOTIFS

La cour confirme le jugement du conseil de prud hommes de paris du 17 juin 2008,

Condamne en outre la société AIGLE INTERNATIONAL à verser à M. [B] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme allouée en première instance,

Déboute la société AIGLE INTERNATIONAL de ses demandes,

La condamne aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/09302
Date de la décision : 27/05/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°08/09302 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-05-27;08.09302 ?
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