Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 23 JUIN 2010
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/09473
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Janvier 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/01454
APPELANTS
1°) Madame [J], [A] [Y] épouse [L]
[Adresse 2]
[Localité 7]
2°) Monsieur [K], [V] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentés par la SCP BLIN, avoués à la Cour
assistés de Me Francis TISSOT de l'Association TISSOT-PIQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : R 134
INTIMÉE
Madame [W], [H] [Y]
[Adresse 9]
[Localité 4]
représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assistée de Me Francine DEPREZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D 265
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 25 Mai 2010, en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Pascal CHAUVIN, président,
Madame Isabelle LACABARATS, conseiller
Madame Dominique REYGNER, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Pascal CHAUVIN, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
[N] [M] et [T] [Y] sont décédés respectivement les 12 novembre et 26 décembre 1999 en laissant pour leur succéder les trois enfants issus de leur union : [W], [V] et [J].
Par acte du 23 novembre 1978, Madame [W] [Y] avait reçu de sa mère donation, en avancement d'hoirie, d'un appartement situé [Adresse 10].
Par acte du 21 avril 1980, les époux avaient fait donation à leurs trois enfants, à titre de partage anticipé, de la nue propriété de divers biens immobiliers dans les proportions de :
* 567/1501èmes indivis à Monsieur [V] [Y],
* 567/1501èmes indivis à Madame [J] [Y],
* 367/1501èmes indivis à Madame [W] [Y] qui avait rapporté la somme de 200 000 francs représentant la valeur du bien objet de la donation du 23 novembre 1978, le montant de son rapport lui ayant été attribué en totalité par confusion sur elle-même.
Par acte du 27 octobre 1989, les époux [Y] ont fait donation, en avancement d'hoirie, à Madame [J] [Y], d'une somme de 200 000 francs.
Par jugement du 16 mai 2002, le tribunal de grande instance de Paris a :
- débouté Madame [W] [Y] de sa demande de révocation de la donation partage du 21 avril 1980,
- ordonné le partage des successions de [N] et [T] [Y],
- dit que Madame [W] [Y] était redevable à l'indivision d'une indemnité d'occupation à compter du 11 décembre 2000 pour l'appartement situé [Adresse 9],
- commis un expert afin d'estimer la valeur des immeubles situés [Adresse 9] et [Adresse 6] ainsi que l'indemnité due pour l'occupation de l'appartement situé [Adresse 9] et un commissaire priseur pour estimer les meubles et objets mobiliers dépendant de l'indivision,
Par arrêt du 1er juillet 2003, devenu définitif par suite du rejet du pourvoi par arrêt de la cour de cassation du 4 octobre 2005, la cour d'appel a confirmé ce jugement sauf en ce qui concerne la date à partir de laquelle l'indemnité d'occupation était due, fixée au 1er janvier 2000.
L'expert a déposé son rapport le 2 février 2004.
Le notaire commis a dressé procès-verbal de difficultés le 10 janvier 2006.
Par jugement du 31 janvier 2008, le tribunal de grande instance de Paris a :
- dit qu'il n'y avait pas lieu de désigner un notaire en remplacement de Maître [P],
- dit que Madame [W] [Y] devrait produire les talons de chèque et les souches de chéquier en sa possession pour la période 1989 à 1999,
- commis Madame [C] [I] en qualité d'expert afin d'estimer les biens situés [Adresse 9] et à [Localité 8], ainsi que le montant de l'indemnité d'occupation, sans remettre en cause les conclusions de l'expert déjà désigné pour les périodes qu'il avait considérées, déterminer les dépenses exposées par Madame [W] [Y] pour le compte de ses parents, déterminer les sommes réglées par elle pour le compte de l'indivision, rechercher les soins apportés par elle à ses parents et donner son avis sur l'indemnité à laquelle elle pouvait prétendre à ce titre,
- attribué à titre préférentiel l'appartement situé [Adresse 9] à Madame [W] [Y],
- dit que Monsieur [V] [Y] devrait rapporter à la succession les sommes de 381,1 euros, 4 268,57 euros et 11 616,61 euros, cette dernière donation devant être évaluée conformément aux dispositions de l'article 860 du code civil,
- dit que Madame [W] [Y] se verrait attribuer par tirage au sort un lot de meubles et objets mobiliers, ainsi qu'un lot de bijoux parmi les trois constitués par Maître [Z], commissaire-priseur, à charge pour elle, si nécessaire, de verser une soulte tenant compte de cette attribution,
- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,
- renvoyé les parties devant le notaire,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- ordonné l'emploi des dépens, y compris les frais d'expertise, en frais généraux de partage, dit qu'il seraient supportés par les co-partageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision et pourraient être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions déposées le 3 mai 2010, Madame [J] [Y] épouse [L] et Monsieur [V] [Y], appelants, demandent à la cour, infirmant le jugement, de :
- désigner un notaire en remplacement de Maître [P] et ordonner la restitution de la provision versée sous déduction des frais d'enregistrement,
- débouter Madame [W] [Y] de sa demande d'attribution préférentielle,
- dans l'hypothèse où elle ferait la preuve de sa capacité financière à payer la soulte due à ses coïndivisaires, fixer la valeur de l'appartement objet de l'attribution préférentielle à 800 000 euros,
- subsidiairement, désigner un expert afin de déterminer la valeur du bien à la date la plus proche du partage,
- dans l'hypothèse où elle ne ferait pas la preuve de sa capacité financière à payer la soulte due à ses coïndivisaires, ordonner la licitation de l'immeuble sur la mise à prix de 560 000 euros,
- subsidiairement, désigner un expert avec mission de déterminer la mise à prix et ordonner la licitation sur la mise à prix déterminée par l'expertise,
- fixer l'indemnité d'occupation due par Madame [W] [Y] sur la base de 2 100 euros par mois, valeur 2006 depuis le 1er janvier 2000,
- subsidiairement, donner mission à l'expert de déterminer la valeur locative depuis l'occupation des lieux par Madame [W] [Y],
- dire que Madame [W] [Y] doit rapporter à l'indivision la donation de fruits de la jouissance qui lui a été consentie, pendant 26 ans, jusqu'au 1er janvier 2000, pour l'avantage d'avoir été logée, nourrie, blanchie par ses parents dans l'appartement situé [Adresse 9],
- dire que le notaire devra appliquer les disposition des articles 815-2 et 815-3 du code civil pour établir les comptes d'administration des parties,
- faire injonction à Madame [W] [Y] de verser aux débats l'ensemble des talons de chèque et les souches de chéquier en sa possession pour la période 1989 à 1999,
- la débouter de toute demande de remboursement de dépenses engagées,
- la débouter de sa demande tendant à voir dire que Maître [P] a repris à bon droit l'ensemble des dépenses faites par elle pour le compte de l'indivision,
- la débouter de ses diverses demandes de remboursement ou de dédommagement de prétendues créances à l'égard de ses parents ou services rendus à ceux-ci,
- infirmer la décision entreprise sur la réévaluation des sommes données à Monsieur [V] [Y] au regard des dispositions de l'article 860 du code civil,
- condamner Madame [W] [Y] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile et au paiement à Monsieur [V] [Y] et à Madame [J] [Y] d'une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du même code.
Par dernières conclusions déposées le 10 mai 2010, Madame [W] [Y] entend voir :
- débouter Madame [J] [Y] et Monsieur [V] [Y] de l'ensemble de leurs demandes,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf à :
* fixer sa créance envers les successions de [N] et [T] [Y] à la somme de 30 000 euros,
* fixer le remboursement qui lui est dû pour les frais avancés pour le compte de [N] et [T] [Y] à la somme de 18 790,34 euros,
* fixer l'indemnité d'occupation due par elle à compter du 1er janvier 2000 pour l'appartement de la [Adresse 9] sur la base de 71 m² d'occupation,
* retenir les dépenses exposées par elle à la somme de 106 496,97 euros au lieu de 69 983,37 euros,
après avoir constaté l'accord des parties pour que la donation du 23 novembre 1978 dont elle a été gratifiée soit réévaluée conformément aux dispositions de l'article 860 du code civil et que les droits de chaque héritier dans les immeubles de [Localité 8] et de [Adresse 9] soient fixés à 500,33/1501èmes pour chacun,
* ordonner au notaire commis de procéder conformément à l'accord de tous les héritiers en écartant la donation partage du 21 avril 1980 à simple valeur fiscale,
à défaut,
- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné une expertise pour :
* déterminer les dépenses exposées par elle pour le compte de ses parents,
* déterminer les sommes réglées par elle pour le compte de l'indivision,
* rechercher les soins apportés par elle à ses parents et déterminer l'indemnité à laquelle elle est fondée à prétendre,
y ajoutant,
- dire que l'expert devra déterminer la surface réellement occupée par elle à titre privatif dans l'appartement de la [Adresse 9] ou, à défaut, le montant de l'indemnité qui lui est due pour son activité de garde meuble pour le compte de l'indivision et ce, depuis le 1er janvier 2000, les conclusions de l'expert [U] restant valables quant à la valeur du m²,
en toute hypothèse,
- ordonner que lui soient remis les deux pianos [Y] et les tableaux [D], lots 4, 75, 111, 166, 167, 214, 215, 227, 240, 241, 257, 261, 280, et 281, qui constituent des souvenirs de famille, à charge pour elle de les conserver,
- condamner Madame [J] [Y] et Monsieur [V] [Y] à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage que Maître OLIVIER pourra recouvrer en application de l'article 699 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR,
Considérant, sur le remplacement du notaire, qu'à l'appui de leur demande de ce chef, les appelants reprochent à l'officier ministériel une inertie de deux ans, le non-respect des décisions de justice intervenues, une méthodologie de partage ignorante de la technique applicable, la fantaisie de la prise en compte des éléments indiscutables des comptes d'administration et son refus de considération des avis, dires et observations des parties ;
Que Madame [J] [Y] et Monsieur [V] [Y], qui invoquent de multiples appels téléphoniques, courriers et mises en demeure demeurées infructueuses, ne se réfèrent spécialement à aucune pièce communiquée qui témoignerait de leurs démarches et de l'inertie de l'officier ministériel ;
Que l'un des héritiers sollicitant l'attribution du bien immobilier, le notaire pouvait, dans son projet d'état liquidatif, proposer l'attribution des lots de meubles et bijoux aux deux autres héritiers qui demeuraient libres de modifier ou refuser ce projet, sans violer l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 16 mai 2002 qui s'était limité, dans les termes de la loi, à donner mission au commissaire priseur de constituer ' autant de lots sensiblement égaux que nécessaire, eu égard aux droits des parties ' ;
Que plus généralement, la méthodologie appliquée n'apparaît pas critiquable, étant observé que l'état liquidatif concerne le partage de l'indivision résultant de la donation partage du 21 avril 1980 et des successions confondues ; que la donation consentie par [N] [Y] à Madame [W] [Y] le 23 novembre 1978 ayant été rapportée à la donation-partage du 21 avril 1980 n'avait pas à être rapportée à la succession, et que, si la distinction faite par les appelants entre donation-partage ' au sens notarial ' et donation-partage ' à finalité exclusivement fiscale ' n'apparaît pas pertinente, Madame [W] [Y] ne justifie pas d'un accord exprès des parties pour que la donation du 23 novembre 1978 soit réévaluée et les droits de chacun des héritiers sur les immeubles de [Localité 8] de [Adresse 9] fixés à 500,33/1501èmes ; qu'il demeurait loisible aux parties auxquelles le projet était soumis de présenter leurs observations et critiques et de refuser de le signer et que, s'il appartenait au notaire de recueillir les avis, dires et observations des parties qu'il a dûment annexés à l'acte, il ne saurait lui être reproché, compte tenu des multiples critiques formulées et des désaccords majeurs constatés entre les parties, qu'il ne lui incombait pas de trancher, d'avoir dressé procès-verbal de difficultés afin qu'il en soit judiciairement décidé ;
Que le procès-verbal, qui met en évidence l'ampleur du contentieux opposant les parties et la multiplicité des points de désaccords constatés et qui doivent être tranchés, ne traduit pas une carence ou une partialité du notaire commis qui justifierait son remplacement et la restitution de la provision versée, étant à cet égard observé que Maître [P] n'a pas été appelé en la cause ; qu'au delà des dispositions des décisions de justice intervenues dont le notaire devra tenir compte, il n'y a pas lieu de lui dicter plus avant la méthode à adopter pour la poursuite des opérations de comptes, liquidation et partage ;
Que le jugement doit en conséquence être confirmé de ce chef ;
Considérant, sur l'hébergement de Madame [W] [Y] par ses parents, que Madame [J] [Y] et Monsieur [V] [Y], qui affirment que leur soeur a eu, depuis sa majorité, sa résidence principale dans l'appartement de la [Adresse 9] où elle a même exercé son activité professionnelle d'avocat, estiment qu'elle doit rapporter à la succession la donation de fruits que constitue cet avantage ;
Que selon l'article 894 du code civil, la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée, en faveur du donataire qui l'accepte ;
Que l'hébergement de l'intimée par ses parents, dans l'appartement qu'ils occupaient eux-mêmes, n'entraînant aucun dessaisissement de ceux-ci au profit de leur fille et ne les privant d'aucun revenu, ne constitue pas un avantage indirect dont Madame [W] [Y] devrait rapport à la succession, peu important qu'elle y ait exercé pour partie son activité professionnelle d'avocat ;
Que le jugement doit également être confirmé de ce chef ;
Considérant, sur l'indemnité d'occupation due par Madame [W] [Y] à compter du décès de [T] [Y], qu'en vertu de l'article 815-9 du code civil, ' l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ' ;
Que par son arrêt du 1er juillet 2003, devenu définitif par l'effet de l'arrêt de rejet rendu le 4 octobre 2005 par la cour de cassation, cette cour en a décidé le principe à compter du 1er janvier 2000 ;
Que, dès lors que, dans le dispositif de son arrêt, la cour, qui s'est limitée à dire que l'expert devrait donner son avis sur le montant de cette indemnité, ne l'a pas fixé, la discussion des parties sur le montant de l'indemnité d'occupation ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée ;
Que les appelants, qui, dans le dispositif de leurs conclusions, entendent voir fixer l'indemnité d'occupation sur une base mensuelle de 2 100 euros depuis le 1er janvier 2000, ne se réfèrent à aucun élément ; que l'intimée ne peut sérieusement soutenir que la présence du mobilier ayant appartenu à leurs parents dans l'appartement lui en interdirait la jouissance à hauteur de la moitié de la surface ni davantage prétendre à l'allocation d'une indemnité de stockage ;
Qu'aux termes de ses conclusions, Monsieur [U], expert, qui a tenu compte de l'inadaptation du bien pour l'occupant, de l'état d'usage de l'appartement et des éléments de confort présents dans l'appartement suivant les périodes, propose de fixer l'indemnité d'occupation à la somme de 70 024 euros pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2003 ;
Qu'il y a lieu de suivre ces conclusions, qui ne sont pas utilement critiquées, et, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une nouvelle expertise sur ce point, de dire que l'indemnité d'occupation sera calculée à compter de cette date sur la base de 1 400 euros par mois ;
Que le jugement doit en conséquence être réformé de ce chef ;
Considérant, sur l'attribution préférentielle de l'appartement, qu'à l'appui de leur appel de ce chef, Madame [J] [Y] et Monsieur [V] [Y] objectent que l'intimée ne justifie pas de sa capacité à acquitter la soulte qui serait mise à sa charge en cas d'attribution préférentielle ;
Que Madame [W] [Y], qui avait effectivement sa résidence dans l'appartement de la [Adresse 9] à l'époque du décès de ses parents, remplit les conditions pour en solliciter l'attribution préférentielle mais que, cette attribution n'étant pas de droit, il appartient à la cour d'en apprécier l'opportunité selon les intérêts en présence ;
Que, si le montant de la soulte à devoir par Madame [W] [Y] en cas d'attribution préférentielle ne peut pas, en l'état des opérations de liquidation, être déterminé avec précision, il apparaît dores et déjà qu'eu égard au montant de l'actif successoral et de ses droits dans les successions, l'intéressée, qui se borne à répliquer qu'il lui est difficile de faire la preuve de sa capacité à régler une somme indéterminée sans donner aucune indication sur ses facultés financières, ne justifie pas être en mesure de faire face au paiement de la soulte qui serait mise à sa charge ;
Que le jugement doit donc être infirmé de ce chef, Madame [W] [Y] déboutée de sa demande d'attribution préférentielle et la licitation de l'immeuble ordonnée conformément à la demande des intimés, la mise à prix pouvant être fixée, au vu des éléments en possession de la cour, à la somme de 500 000 euros ;
Considérant, sur le rapport des donations dont Monsieur [V] [Y] a bénéficié, que ce dernier qui, en cause d'appel, accepte de rapporter à la succession les sommes reçues de son père, conteste qu'il y ait lieu de faire application de l'article 860 du code civil à la somme de 76 200 francs ;
Qu'en vertu des articles 860 et 869 du code civil, lorsque la somme donnée a servi à acquérir un bien, le rapport est dû de la valeur de ce bien et, si le bien a été aliéné avant le partage, de la valeur qu'il avait à l'époque de l'aliénation et, si un nouveau bien lui a été subrogé, de la valeur de ce nouveau bien à l'époque du partage ;
Que Madame [W] [Y], qui verse aux débats copie de l'acte d'acquisition par Monsieur [V] [Y] et son épouse d'un appartement à Boulogne en janvier 1978 au prix de 150 000 francs, ne rapporte cependant pas la preuve de ce que les sommes données par leur père, pour un montant total de 76 200 francs, en plusieurs versements échelonnés entre décembre 1977 et septembre 1980, auraient servi à acquérir ce bien dont la cour observe qu'il a été payé comptant ;
Que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a dit que la donation de 11 616,61 euros reçue par Monsieur [Y] devrait être évaluée conformément aux dispositions de l'article 860 du code civil ;
Considérant, sur les créances envers les successions invoquées par Madame [W] [Y], que les appelants reprochent au tribunal d'avoir commis un expert afin de déterminer les sommes dues à l'intimée pour les soins apportés à leurs parents durant les dernières années de leur vie, les dépenses exposées pour leur compte et celles engagées pour le compte de l'indivision dont cette dernière se prétend créancière ;
Considérant, s'agissant des soins apportés à ses parents, que le devoir moral d'un enfant envers ses parents n'exclut pas qu'il puisse obtenir indemnité pour l'aide et l'assistance apportées dans la mesure où, ayant excédé les exigences de la piété filiale, les prestations librement fournies ont réalisé à la fois un appauvrissement pour l'enfant et un enrichissement corrélatif des parents ;
Que cependant, en l'espèce, Madame [W] [Y] ne démontre pas l'enrichissement de ses parents, dont les pièces qu'elle verse elle-même aux débats démontrent qu'ils ont eu recours à l'assistance de tiers rémunérés, et ne rapporte pas davantage la preuve de son appauvrissement par la production de ses déclarations de revenus alors qu'exerçant une profession libérale, leur irrégularité peut avoir des causes diverses et qu'elle a, par ailleurs, bénéficié d'un hébergement au domicile de ses parents depuis sa majorité ; qu'au demeurant le tableau de ses activités et du temps passé, qu'elle a elle-même établi, ne présente aucune valeur probante ;
Considérant, en ce qui concerne les dépenses engagées pour leur compte, que, de même, l'état des sommes payées de 1988 au décès de ses parents, qui n'est accompagné d'aucun justificatif de paiement, est dépourvu de toute valeur probante ; qu'il est en outre peu crédible qu'elle n'ait pas été remboursée de ces dépenses par ses parents depuis plus de 10 ans alors qu'elle verse elle-même aux débats un chèque de 518 francs établi par sa mère à son profit en remboursement d'un chèque URSSAF le 8 novembre 1999 ;
Qu'en vertu des dispositions de l'article 146 du code de procédure civile une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve ;
Qu'il convient en conséquence, infirmant le jugement en ce qu'il a ordonné une mesure d'instruction à cet égard, de débouter Madame [W] [Y] de ces chefs de demandes ;
Considérant, sur les dépenses engagées pour le compte de l'indivision, que Madame [W] [Y] demande également qu'il lui soit tenu compte de dépenses engagées pour le compte de l'indivision successorale pour un montant total de 106 496,97 euros, prises en considération dans son projet d'état liquidatif par le notaire à hauteur de 69 983,37 euros et omises par lui à hauteur de 37 513,60 euros ;
Qu'en application de l'article 815-2 du code civil, tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis, employer à cet effet les fonds de l'indivision détenus par lui et, à défaut, obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires et qu'en vertu de l'article 815-13, lorsqu'un indivisaire a avancé de ses deniers les sommes nécessaires à la conservation et à la gestion des biens indivis, il doit lui en être tenu compte, à moins qu'il n'ait commis une faute ou ait été imprudent d'engager de telles dépenses ;
Qu'en l'espèce, les appelants, reprochant , pour l'essentiel, à Madame [W] [Y] d'avoir agi sans mandat et sans concertation, ne visent aucun acte d'administration accompli par l'intimée qui entrerait dans les prévisions de l'article 815-3 dont ils invoquent l'application ;
Qu'ils ne portent précisément leurs critiques que sur les dépenses de téléphone, électricité, gaz et assurance pour les maisons de [Localité 8], qu'ils affirment avoir été inoccupées, et de location des emplacements de parking et d'assurance des deux véhicules de leurs parents, qu'ils considèrent comme non roulants, ainsi que sur les dépenses d'entretien et de soins du chat ; que cependant, outre que l'assurance des maisons de [Localité 8] constitue une mesure de conservation nécessaire, quand bien même elles resteraient inoccupées, la poursuite des abonnements de téléphone, électricité et gaz de ces maisons, de la location des emplacements de stationnement des véhicules comme de l'entretien du chat de leur parents, en l'attente d'une décision des héritiers sur le sort de ces biens indivis, n'apparaît pas caractériser une faute de la part de l'intimée, en l'absence de demande précise de ses cohéritiers de mettre fin à ces contrats et dépenses dont ils ne pouvaient ignorer l'existence ;
Que la créance de Madame [W] [Y] envers l'indivision doit en conséquence être admise pour le montant de 69 983,37 euros retenu par le notaire ;
Qu'en revanche, faute de justificatif et même de relevé des dépenses prétendument omises par ce dernier, elle doit être déboutée du surplus de ses demandes ;
Considérant, sur la garde des souvenirs de famille, que Madame [J] [Y] et Monsieur [V] [Y] ne contestant pas le caractère de souvenirs de famille des deux pianos [Y] et des tableaux de [S] [D] et n'émettant aucune objection à la demande formée par leur soeur à cet égard, il y a lieu de faire droit à la demande de Madame [W] [Y] de ce chef ;
Considérant que les autres dispositions du jugement, qui ne sont pas critiquées, doivent être confirmées ;
PAR CES MOTIFS
INFIRMANT PARTIELLEMENT le jugement,
FIXE l'indemnité due par Madame [W] [Y] au titre de l'occupation de l'appartement de la [Adresse 9] à 70 024 euros pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2003 et à 1 400 euros par mois à compter du 1er janvier 2004,
DIT N'Y AVOIR LIEU à expertise sur ce point,
DÉBOUTE Madame [W] [Y] de sa demande d'attribution préférentielle de l'appartement de la [Adresse 9],
ORDONNE la licitation, devant le tribunal de grande instance de Paris, sur les clauses et conditions du cahier des charges déposé au greffe des criées par le conseil des appelants, des lots 4 et 27 dépendant de l'immeuble situé [Adresse 9], et cadastré section AF n° [Cadastre 3] pour une contenance de 2 a ca , d'une superficie de 142 m2, sur une mise à prix de 500 000 euros avec faculté, en l'absence d'enchères, de baisse du quart puis du tiers,
DÉBOUTE Madame [W] [Y] de ses demandes au titre des soins apportés à ses parents et des dépenses engagées pour leur compte,
DIT que Madame [W] [Y] dispose d'une créance envers l'indivision de 69 983,37 euros au titre des dépenses engagées pour le compte de l'indivision,
DIT n'y avoir lieu à expertise de ces chefs,
DIT N'Y AVOIR LIEU à faire application de l'article 860 du code civil au rapport par Monsieur [V] [Y] de la somme de 11 616,61 euros,
CONFIRME pour le surplus le jugement,
Y AJOUTANT,
DIT que les deux pianos [Y] et les tableaux [D], lots 4, 75, 111, 166, 167, 214, 215, 227, 240, 241, 257, 261, 280, et 281, seront confiés en dépôt à Madame [W] [Y], à titre de souvenirs de famille et à charge pour elle de les conserver,
DIT que chacune des parties conservera la charge des dépens et frais non compris dans les dépens par elle exposés.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,