RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRÊT DU 29 juin 2010
(n° 4 , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/09109
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 16 juin 2008 par le conseil de prud'hommes de Bobigny - section encadrement - RG n° 05/00234
APPELANTE
SOCIÉTÉ LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Michel PEIGNARD, avocat au barreau de VANNES
INTIMÉE
Madame [Z] [N] épouse [X]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Charlotte BELLET, avocate au barreau de PARIS, toque : P166
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 mai 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Elisabeth PANTHOU-RENARD, présidente
Madame Michèle MARTINEZ, conseillère
Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, conseillère
Greffier : Madame Danièle PAVARD, lors des débats
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Elisabeth PANTHOU-RENARD, présidente, et par M. Eddy VITALIS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
Faits et procédure
Mme [Z] [N] ep. [X] et la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher ont signé, le 15 octobre 1996, un contrat de franchise pour l'exploitation d'un centre de beauté situé dans le centre commercial 'les Beaudottes' à [Localité 5].
Par courrier du 16 octobre 2000, la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher a dénoncé ledit contrat pour le 23 mai 2001. Toutefois, les relations commerciales se sont poursuivies.
Mme [N] a adressé à la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher, un courrier du 2 octobre 2002, aux termes duquel 'le contrat de franchise ayant expiré le
24 mai 2001, je vous confirme que je souhaite cesser nos relations commerciales le
30 novembre 2002". La Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher ne s'est pas opposée à la décision de Mme [N] mais a exigé l'application d'un délais de préavis de 6 mois en invoquant l'application du contrat de franchise, dont Mme [N] conteste l'existence.
Les parties sont en désaccord sur la nature du contrat les liant et sur celle d'entre elles qui a pris l'initiative de la rupture.
Se prévalant de l'application de l'article L 781-1.2 du code du travail ainsi que l'existence d'un lien de subordination avec la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher, caractérisant l'existence d'un contrat de travail et affirmant que la rupture de leurs relations s'analysaient en un licenciement, Mme [N] ep. [X] a saisi le conseil des Prud'hommes de Bobigny aux fins de se voir payer un rappel de salaire, d'heures supplémentaires et les congés payés afférents, une indemnité de préavis et les congés payés afférents, une indemnité de licenciement, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la remise des documents sociaux conformes, une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, le tout avec exécution provisoire et intérêts au taux légal. la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher a soulevé l'incompétence de la juridiction saisie au profit du tribunal de commerce. A titre reconventionnel, elle a réclamé le paiement d'une indemnité pour procédure abusive et d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par décision en date du 16 juin 2008, le conseil des Prud'Hommes, a reconnu sa compétence. Décidant de l'application à l'espèce en cause de l'article L781-1.2 du code du travail, et faisant partiellement fait droit à la demande de Mme [N] ep. [X] , le conseil a condamné la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher à lui payer les sommes suivantes :
- 2 380 € à titre de rappel de salaire
- 2 850 € à titre d'indemnité de licenciement
- 10 000 € à titre de dommages et intérêts
ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 2005, date de la saisine du conseil.
Il a, en outre ordonné, la remise à Mme [N] ep. [X] des documents sociaux conformes, le paiement à Mme [N] ep. [X] d'une indemnité de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, condamné la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher aux dépens et ordonné l'exécution provisoire de droit. Le conseil des Prud'Hommes a débouté les parties pour le surplus.
La Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher a fait appel de cette décision dont elle sollicite l'infirmation. Elle conclut à l'incompétence de la juridiction sociale au profit du tribunal de commerce de Vannes puis, subsidiairement au débouté de Mme [N] ep. [X] et à sa condamnation à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile. Subsidiairement, elle estime que la rupture des relations entre les parties est imputable à Mme [N] ep. [X] . Encore plus subsidiairement, elle soutient qu'en cas d'application de la convention collective de la parfumerie esthétique, il conviendra de débouter Mme [N] ep. [X] de ses demandes au titre des heures supplémentaires en prenant compte des BIC qu'elle a perçus pendant la période en cause.
Mme [N] ep. [X] conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a fait droit à ses demandes et à l'infirmation de ses dispositions l'ayant débouté de ses demandes. Elle demande à la cour de :
- Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que Mme [N] ep. [X] remplissait les conditions posées par l'article L. 781-1.2 du code du travail, s'est déclaré compétent et a rejeté l'exception d'incompétence formulée par la société Yves Rocher, et a condamné la société Yves Rocher à verser à Mme [N] ep. [X] un rappel de salaires, une indemnité de licenciement et des dommages et intérêts,
Statuant à nouveau,
- Dire et juger que Mme [N] ep. [X] réunit toutes les conditions posées par les articles L.781-1.2 et L.121-1 du code du travail,
- En conséquence : requalifier le contrat de franchise en contrat de travail,
- Dire et juger que la rupture du contrat est imputable à la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher,
- Requalifier la rupture du contrat en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
- Condamner la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher à verser à
Mme [N] ep. [X] les sommes suivantes :
- 29 138 € au titre de rappel de salaires,
- 83 366 € au titre du rappel d'heures supplémentaires,
- 4 032 € au titre de l'indemnité conventionnelle licenciement,
- 10 080 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,
- 96 732 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Dire que ces condamnations seront assorties des intérêts au taux légal avec capitalisation à compter du 25 janvier 2005, date de la saisine du conseil de prud'hommes,
- Condamner la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher à remettre à
Mme [N] ep. [X] les bulletins de paie correspondant à la période de préavis, un certificat de travail et l'attestation Assédic,
- Condamner la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher à verser à Mme [N] ep. [X] la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société Laboratoires de Biologie Végétale Yves Rocher aux entiers dépens.
Pour plus ample exposé des faits et de la procédure, la cour se réfère aux conclusions des parties visées par le greffier et reprises à l'audience du 10 mai 2010.
Motivation
- sur la compétence
En application de l'article L781-1.2 du code du travail, les dispositions de ce code sont applicables aux personnes dont la profession consiste essentiellement soit à vendre des marchandises ou denrées de toute nature, des titres, des volumes, publications, billets de toute sorte qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise industrielle ou commerciale, soit à recueillir les commandes ou à recevoir des objets à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d'une seule entreprise industrielle ou commerciale lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposées par ladite entreprise.
L'application de l'article L 781-1.2 du code du travail relève de la compétence des juridictions sociales, lesquelles sont également exclusivement compétentes pour connaître de l'existence d'un contrat de travail.
Il s'ensuit que la demande de Mme [N] ep. [X] qui revendique à la fois l'application de l'article précité et l'existence d'un contrat de travail relève de la compétence de la juridiction sociale.
C'est donc à juste titre que le conseil des prud'Hommes s'est déclaré compétent pour en connaître.
Le jugement doit donc être confirmé sur ce point.
- sur l'existence d'un contrat de travail
Il appartient aux juges de porter la juste qualification aux relations établies entre les parties, quand bien même celles-ci seraient-elles liées par un contrat de franchise.
Il convient donc de vérifier l'existence des quatre conditions cumulatives énoncées à l'article L781-1.2 précité.
* sur le caractère essentiel de la vente des produits
Il ressort des débats que Mme [N] ep. [X] exploitait dans son commerce à la fois une activité de vente de produits et une activité de soins en cabine, l'activité de vente générant un chiffre d'affaires supérieur à celui résultant de l'exploitation de l'activité de soins.
En l'espèce, ainsi que le précisent les premiers juges, pour l'année 1999 le chiffre d'affaires de Mme [N] ep. [X] pour la vente de produits a été de 209 503 € et pour les soins de 81 930€ ; pour l'année 2000, cette activité a dégagé un chiffre d'affaires de 215 880 € pour un chiffre d'affaires de 79 357 € pour l'activité de soins ; pour l'année 2001 l'activité de vente de produits a généré un chiffre d'affaires de 218 894 € pour un chiffre d'affaires de 81 316 € pour l'activité de soins.
Dans la présente analyse et contrairement à ce que soutient la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher , la marge réalisée par l'entreprise importe peu, l'importance de l'activité poursuivie étant mesurée par son chiffre d'affaires qui constitue très concrètement ce qu'elle rapporte.
En l'espèce, il se déduit des chiffres d'affaires non contestés des activités en cause, que le chiffre d'affaire tiré de la vente des produits Yves Rocher représente près du triple de celui généré par l'activité de soins. En conséquence, l'activité de vente des produits Yves Rocher a un caractère essentiel au sens de l'article L 781-1.2 précité qui n'impose pas que l'activité litigieuse ait un caractère exclusif, contrairement à ce que semble soutenir la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher pour contester l'applicabilité du texte invoqué.
La première condition requise est donc vérifiée.
* sur l'exclusivité de fournitures
Il n'est pas contesté par les parties que l'article 5 du contrat litigieux oblige la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher à vendre directement ou indirectement au franchisé les produits Yves Rocher.
Il est constant par ailleurs que Mme [N] ep. [X] commercialisait uniquement les produits Yves Rocher que ce soit dans son activité de vente ou dans son activité de soins pour lesquels elle n'utilisait que ces produits.
Il importe peu dans ces conditions, comme le fait valoir la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher , que Mme [N] ep. [X] aurait pu commercialiser des produits d'autres marques, puisque, comme le reconnaît elle-même la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher , Mme [N] ep. [X] n'a pas fait usage de cette possibilité.
La deuxième condition requise est donc vérifiée.
* sur le local
En l'espèce, il n'est pas contesté par les parties que le local a été fourni par la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher pour permettre l'exercice par Mme [N] ep. [X] de son activité. Il importe peu dans ces conditions que Mme [N] ep. [X] ait refusé le changement de local proposé par la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher puisque le fait que celle-ci subordonne le maintien de leurs relations à ce changement le local traduit bien le fait que le choix du local relève de la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher et s'impose au cocontractant.
La troisième condition requise est donc vérifiée.
* sur les conditions d'exploitation de l'activité en cause et sur les prix
Mme [N] ep. [X] fait valoir que toutes les conditions d'exploitation de son fonds lui étaient imposées par le contrat de franchise et que la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher en contrôlait la bonne exécution.
La Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher oppose que Mme [N] ep. [X] ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle avance et fait valoir que le respect de l'ensemble des normes relatives à l'identité propre et à l'uniformité du réseau impliquait nécessairement pour la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher d'appliquer les instructions lui venant de la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher notamment s'agissant de la décoration du centre de beauté, la présentation des produits, la qualité des services, etc, ce conformément aux dispositions du droit communautaire.
Il ressort du contrat de franchise, en particulier de ses articles 5 et 6, notamment que :
- tous les centres Yves Rocher doivent exercer dans des 'conditions uniformes, en particulier pour la décoration, les signes, les aménagements, les méthodes opérationnelles et les procédures'.
- l'ouverture du centre de beauté exploité par Mme [N] ep. [X] devait ouvrir le 24 mai 1996
- la société de sa propre initiative et périodiquement avisera le franchisé sans que cela puisse être considéré comme limitatif les procédures, les produits autorisés, les services, l'achat de produits et de fournitures, les délais de commande, la publicité et les programmes promotionnels, l'administration générale, la comptabilité, la formation, etc...
- la société se réserve le droit d'entreprendre de sa seule initiative des actions publicitaires, ..des instructions publicitaires seront données au franchisé, une initiative du franchisé , en matière promotionnelle devant être préalablement soumise à l'approbation préalable de la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher .
- la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher à sa seule initiative se réserve le droit de pratiquer les taux de remises promotionnelles plus élevés pour des produits et pour des périodes qu'elle détermine.... ce qu'elle a fait ainsi qu'en attestent les mails produits aux débats.
- l'inobservation de l'une de ses obligations découlant du contrat pouvait en entraîner la résiliation à l'initiative de la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher
En outre, il n'est pas contesté que des catalogues étaient adressés chaque mois à Mme [N] ep. [X] sur des sujets aussi divers que les règles du merchandising, les périodes de promotions, les partenaires commerciaux, mais également des guides de procédures comportant des instructions sur les commandes, les prix imposés notamment par catalogue ou à la suite d'une opération promotionnelle, l'agencement de l'institut de beauté, les modes opératoires concernant les soins, l'organisation des salariés et l'agencement du local, le contrat de location de matériel de sonorisation de la surface de ventes et des cabines, le partenaire pour la dératisation, sans compter des mails quotidiens que Mme [N] ep. [X] versent aux débats par lesquels la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher lui délivre des instructions sur ses méthodes , ses occupations, sur la marche commerciale de l'institut, lui délivrent ses 'objectifs du mois', lui rappellent l'obligation d'un 'strict respect des consignes du Scénario'et 'des plans commerciaux'.
Certes le contrat de franchise affirme que le franchisé est un entrepreneur indépendant et la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher fait valoir la totale liberté de Mme [N] ep. [X] pour choisir ses assurances et ses partenaires commerciaux.
Les éléments qui précèdent démentent cependant pour partie cette affirmation et établissent au contraire qu'en ce qui concerne la marche commerciale de son institut de beauté, basée sur la commercialisation des produits Yves Rocher, Mme [N] ep. [X] , enserrée dans cette exclusivité, à la fois soumise aux conditions contractuelles, aux divers guides qui lui sont régulièrement fournis et les instructions qui lui sont adressées quotidiennement ne dispose d'aucune marge de manoeuvre pour exploiter l'institut de beauté dont elle a la charge et sur les prix pratiqués. En outre, agissant sous le contrôle de la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher , le franchisé encourt la résiliation du contrat, par lettre recommandée, en cas de violation du contrat de franchise, ce qui constitue une sanction.
Il ressort de ces éléments que les instructions de la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher conditionnent l'action commerciale de Mme [N] ep. [X] et les soins qu'elle pratique, au-delà des seuls besoins d'identification propre de la marque Yves Rocher et d'uniformité du réseau dont se prévaut la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher . la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher dispose en outre d'un pouvoir de contrôle et de sanction.
Il s'ensuit que les relations entre les parties caractérisent l'existence d'un lien de subordination de Mme [N] ep. [X] envers la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher .
Il s'en déduit l'existence d'un contrat de travail entre les parties.
Il convient en conséquence d'examiner les demandes de Mme [N] ep. [X] découlant de l'application dudit contrat de travail.
- sur les conséquences tirées de l'existence d'un contrat de travail
* sur la convention collective applicable
Mme [N] ep. [X] revendique l'application de la convention collective nationale de la parfumerie esthétique.
Se plaçant dans l'hypothèse de l'existence d'un contrat de travail, la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher fait valoir que seules les dispositions applicables de la convention collective nationale de la parfumerie esthétique s'imposent et précise que l'accord n° 6 ayant été annulé par le conseil d'Etat n'est donc pas applicable.
Il ressort des débats que l'activité exercée par Mme [N] ep. [X] relève de la catégorie de l'esthétique corporelle qui entre dans le champ d'application de la convention collective de la parfumerie esthétique, en conséquence applicable, en dehors de l'accord n°6 qui a fait l'objet d'une annulation.
* sur le statut de Mme [N] ep. [X] et sur la rémunération de référence
Mme [N] ep. [X] revendique le statut de directrice d'institut. la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher ne formule pas d'opposition sur cette demande.
En tout état de cause, Mme [N] ep. [X] à qui a été confiée la responsabilité d'un institut de beauté pris en toutes ses composantes, humaines, commerciales, comptables,...répond à la définition du statut de cadre telle qu'elle ressort de la convention collective applicable.
Compte tenu des éléments produits aux débats, Mme [N] ep. [X] justifie bénéficier du statut de directrice ayant entre 7 et 11 employés sous ses ordres, coefficient 270, ce qui correspond sur la période considérée à un salaire brut mensuel de référence s'élevant à 1 900 € et non de 2 687 € comme le soutient Mme [N] ep. [X] .
Au vu de la grille des salaires déterminés par la convention collective applicable, le salaire de référence applicable à Mme [N] ep. [X] s'élève à 1 900 € et non de 2 687 € comme le soutient à tort Mme [N] ep. [X] sur la base du seul exemple d'une collègue directrice, qui est insuffisant à établir le bien fondé de sa réclamation.
* sur le rappel de salaire
Il suit de ce qui précède qu'ayant constaté à juste titre que Mme [N] ep. [X] avait perçu sur la période considérée une rémunération brute mensuelle de 1 830 €, le conseil des Prud'Hommes a exactement évalué le rappel du à Mme [N] ep. [X] sur la base du salaire de référence retenu, à la somme de 2 380 €.
* sur le paiement des heures supplémentaires et les congés payés
En application de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utile.
Mme [N] ep. [X] expose avoir effectué des heures supplémentaires pour avoir travaillé 65 heures par semaine, correspondant à l'amplitude horaire d'ouverture de l'institut (60 heures) auxquelles s'ajoutent 5 heures hebdomadaires consacrées aux tâches administratives et de comptabilité.
L'amplitude horaire de l'ouverture de l'institut ne constitue pas un élément suffisant, en raison de l'existence de salariées permettant à Mme [N] ep. [X] de ne pas y être toujours présente. En outre, Mme [N] ep. [X] qui produit au soutien de ses allégations de nombreuses attestations concernant toutes d'autres directrices d'institut ne met pas la cour en mesure d'admettre l'existence des heures supplémentaires alléguées.
Il s'ensuit que l'existence des heures supplémentaires alléguées n'est pas établie. Il convient donc de débouter Mme [N] ep. [X] de cette demande.
Par ailleurs aucun élément probant n'est produit aux débats justifiant la demande de
Mme [N] ep. [X] au titre des congés payés. Elle ne peut donc qu'être déboutée de ce chef.
* sur la rupture de la relation de travail
Les parties ont échangé de nombreux courriers sur le devenir de leurs relations contractuelles, sachant que le contrat de franchise, à effet au 24 mai 1996 était prévu pour une durée de 5 ans puis renouvelable expressément par année :
- par courrier du 16 octobre 2000, la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher a adressé à Mme [N] ep. [X] un courrier l'informant que le contrat de franchise venant à échéance le 23 mai 2001, il ne serait pas renouvelé.
- En réponse, Mme [N] ep. [X] a adressé à la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher un courrier le 29 novembre 2000 lui confirmant son souhait d'arrêter son activité et de céder son centre de beauté Yves Rocher.
- Pour autant, par courrier du 12 septembre 2001, la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher a posé les conditions 'd'une poursuite de nos relations' qu'elle décrit précisément et qui devait passer notamment par un réaménagement et une modernisation du centre de beauté tenu par Mme [N] ep. [X] .
- Par courrier du 2 octobre 2002, Mme [N] ep. [X] annonce à la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher 'le contrat de franchise ayant expiré le 24 mai 2001" son intention de 'cesser nos relations commerciales le 30 novembre 2002".
- En réponse datée des 11 et 25 octobre 2002, la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher acquiesce dans le principe à cette décision sous réserve du respect d'un préavis de 6 mois qui porte la cessation des relations entre les cocontractants à la date du 9 mars 2003 et non du 30 novembre 2002.
- Par courrier du 25 octobre 2002, estimant que le contrat a été dénoncé par la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher par son précédent préavis du 16 octobre 2000 pour le 23 mai 2001, Mme [N] ep. [X] affirme que depuis cette date il n'y a donc plus de contrat de franchise entre les parties qui entretiennent depuis lors 'simplement des relations commerciales'.
- Par courrier en réponse du 20 novembre 2002, pour soutenir l'exigence d'un préavis de 6 mois précédant la rupture, la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher, faisant valoir qu'en dépit du courrier de dénonciation qu'elle a adressé à Mme [N] ep. [X] en octobre 2000, les relations contractuelles se sont poursuivies depuis normalement dans le cadre du même contrat, devenu, selon elle, à durée indéterminée.
Il ressort de ce qui précède que la rupture des relations entre les parties résulte des termes clairs et non équivoques du courrier en date du 16 octobre 2000 adressé par la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher à Mme [N] ep. [X] par lequel il lui annonce le non renouvellement du contrat de franchise, passé un délai de préavis de 6 mois qui s'est prolongé au-delà de ce délai, vraisemblablement en raison de négociations en cours entre les parties sur le devenir de leurs relations, négociations qui n'ont pas abouti.
Les relations entre les parties se sont donc poursuivies dans le cadre de ce préavis, auquel Mme [N] ep. [X] a mis un terme par courrier du 2 octobre 2002 .
Il résulte de ce qui précède que la rupture des relations entre les parties est imputable à la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher .
Cette rupture non motivée d'un contrat de travail s'analyse en un licenciement non motivé ne comportant pas de cause réelle et sérieuse.
Cette situation donne droit à Mme [N] ep. [X] au paiement d'une indemnité de licenciement, que la cour est en mesure d'évaluer, sur la base de la convention collective applicable, à la somme de 2 850 € exactement évaluée par les premiers juges.
En outre, Mme [N] ep. [X] dont l'ancienneté est supérieure à 2 ans a droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Compte tenu de ce que la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher compte plus de 10 salariés, et des éléments produits aux débats la cour est en mesure d'évaluer le préjudice résultant du licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse à la somme de 30 000 €.
- sur la remise des documents sociaux
Il convient enfin de faire droit à la demande de Mme [N] ep. [X] et d'ordonner à la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher la remise des bulletins de salaire et des documents sociaux, ce sous astreinte prononcée d'office de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
- sur les dommages et intérêts pour procédure abusive
Il ressort de ce qui précède que la procédure engagée initialement par Mme [N] ep. [X] n'était en rien abusive. Il convient donc de débouter la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher de sa demande de ce chef.
Par ces motifs,
la cour,
- confirme partiellement le jugement déféré, en ses dispositions relatives à la compétence, au rappel de salaire, à l'indemnité conventionnelle de licenciement, aux heures supplémentaires et au congés payés, aux dommages et intérêts pour procédure abusive, aux intérêts au taux légal, à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
- l'infirme pour le surplus. Statuant à nouveau :
- condamne la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher à payer à
Mme [Z] [N] ep. [X] la somme de 30 000 € , outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision pour le préjudice subi résultant du licenciement, en application de l'article L 1235-3 du code du travail.
Y ajoutant :
- ordonne à la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher la remise des bulletins de salaire et des documents sociaux, ce sous astreinte prononcée d'office de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
- condamne la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher aux dépens
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne la Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher à payer à
Mme [N] ep. [X] la somme de 9 000 €
- la déboute de sa demande de ce chef.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE