Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 4
ARRET DU 02 JUILLET 2010
(n° 406 ,4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/07832
Décision déférée à la Cour : ordonnance du 18 Mars 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2009001105
APPELANTE
S.A.R.L. UNION ECONOMIQUE DE CONSOMMATION - UNECO
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par la SCP AUTIER, avoués près la Cour
assistée de Maître Laurent DIXSAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : B1139
INTIMEES
S.A.R.L. BALTAIAN & CIE exploitant sous l'enseigne 'G20"
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour
assistée de Maître Pascal BROUARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P.64
S.A.R.L. CHATEAUDIS exploitant sous l'enseigne 'FRANPRIX'
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL - Caroline HATET-SAUVAL, avoués près la Cour
assistée de Maître Maroun ABINADER, avocat au barreau de PARIS, toque : J 002 substituant Maître CARNEREAU Sandra, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1981
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 Mai 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques LAYLAVOIX, Président de chambre
Madame Catherine BOUSCANT, Conseillère
Monsieur David PEYRON, Conseiller
qui en ont délibéré qui en ont délibéré sur le rapport de Monsieur Jacques LAYLAVOIX.
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jacques LAYLAVOIX, président et par Mlle Fatia HENNI, greffier.
Vu l'ordonnance prononcée le 18 mars 2009 par le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, qui, saisi sur assignation délivrée à la requête de la S.A.R.L. Union Economique de Consommation, ci après dénommée la société Uneco, aux fins de voir condamner sous astreinte la société Chateaudis et la société Baltaian à respecter les règles relatives à la fermeture hebdomadaire dominicale conformément aux disposition des articles L-3132-3 et L3132-12 du code du travail, de voir condamner ces sociétés à lui verser, chacune, la somme provisionnelle de 49200 euros en réparation du préjudice subi par elle du fait de l'entrave à la concurrence constatée et à lui communiquer les extraits de leur grand livre depuis l'exercice 2007, leur registre du personnel et les contrats de travail du personnel, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance et a condamné la société Uneco aux dépens ;
Vu l'appel interjeté de cette ordonnance le 1er avril 2009 par la société Uneco, qui, aux termes de ses conclusions signifiées le 19 janvier 2010, soutient que le juge des référés est compétent pour ordonner les mesures d'interdiction qu'elle sollicite, invoque le trouble illicite résultant des infractions aux règles légales relatives à la fermeture hebdomadaire et à la fermeture dominicale par les sociétés Chateaudis et Baltaian, qui exploitent respectivement des commerces d'alimentation sous l'enseigne Franprix ([Adresse 3]) et G20 ( [Adresse 5]), et caractérisant une concurrence déloyale, prétend aussi que l'ouverture dominicale de son propre commerce est licite, que l'article 2 de arrêté préfectoral du 15 novembre 1990 a été abrogé par les dispositions du code du travail et demande à la cour de :
- infirmer l'ordonnance entreprise,
- condamner la société Baltaian et la société Chateaudis à respecter les règles relatives à la fermeture hebdomadaire dominicale conformément aux dispositions des articles L 3132-3 et L 3132-13 du code du travail, ce sous astreinte de 15 000 euros par infraction constatée,
- condamner chacune de ces sociétés à lui verser la somme de 68 130 euros à titre de provision en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'entrave à la concurrence constatée,
- condamner chacune de ces sociétés à lui communiquer les extraits de leur grand livre depuis l'exercice 2007, ainsi que le registre du personnel et les contrat de travail s'agissant de la société Baltaian, ce sous astreinte de 100 euros par jour de non faire à compter de la signification de la décision à intervenir et dans la perspective d'une instance au fond,
- condamner ces sociétés aux dépens et solidairement à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;
Vu les conclusions signifiées le 26 juin 2009 par la société Baltaian, intimée, qui soulève le défaut d'intérêt à agir de la société Uneco, soutient qu'elle bénéficie d'une dérogation lui permettant d'employer des salariés le dimanche et qu'elle respecte les règles légales, que la société Uneco ne démontre pas le lien de causalité qui pourrait exister entre la baisse prétendue de son chiffre d'affaire et l'ouverture du magasin G20, alors que les produits vendus dans les deux commerces sont totalement différents, et prie la cour de constater le défaut d'intérêt à agir de la société Uneco, de renvoyer celle-ci à se pourvoir devant le juge du fond et de la condamner, outre aux dépens, à lui verser la somme de 5000 euros pour ses frais de procédure hors dépens ;
Vu les conclusions signifiées le 28 janvier 2010 par la société Chateaudis, intimée, qui excipe du défaut de qualité à agir de la société Uneco, prétend que celle-ci ne démontre pas l'existence de l'infraction à la législation relative à la fermeture hebdomadaire invoquée, fait valoir que le commerce exploité par la société Uneco est lui-même ouvert le dimanche et vend exclusivement des produits casher, que cette société ne démontre ni son préjudice, ni le lien de causalité existant entre le préjudice prétendu et la faute qui lui est imputée et demande à la cour de confirmer l'ordonnance de référé, subsidiairement de constater le défaut d'intérêt à agir de la société Uneco, de débouter celle-ci de ses demandes et de la condamner aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;
Considérant que l'exception d'incompétence soulevée en première instance et retenue par le premier juge est devenue sans objet, dés lors que la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, est juridiction d'appel des décisions prononcée tant par le juge des référés du tribunal de commerce que par le juge des référés du tribunal de grande instance ;
Considérant que la société Uneco fonde son action sur le trouble manifestement illicite permettant de prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour le faire cesser, trouble qui serait caractérisé par le non respect de l'obligation de fermeture hebdomadaire dominicale prévue par l'article L3132-3 et L3132-13 du code du travail ;
Considérant que l'inobservation de l'article L3132-3 du travail, qui édicte le principe du repos hebdomadaire dominical dans l'intérêt des salariés, autorise l'inspecteur du travail par application de l'article L3132-31 du code du travail à agir en référé devant le juge judiciaire pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser dans les établissements de vente au détail, comme il s'agit en l'espèce, l'emploi illicite de salariés en infraction aux textes précités ;
Que, si la qualité à agir aux mêmes fins devant le juge des référés a été reconnue aux organisations professionnelles, qui représentent la profession exercée par les commerçants en infraction avec ces textes, du fait que l'emploi ainsi irrégulier des salariés rompait l'égalité au préjudice de ceux qui, exerçant la même activité, respectaient la règle légale, la société Uneco n'est pas en droit d'exciper d'une telle atteinte à l'intérêt collectif de la profession de commerçant en alimentation au détail ; qu'elle-même en outre exerce son activité le dimanche et l'attestation délivrée le 3 mars 2009 par la société d'expertise comptable Fiduciaire Bachaumont suivant laquelle Mme [W] [G], employée en tant que vendeuse à la S.A.R.L. Uneco, est l'épouse du gérant de la société ne suffit pas à établir que cette société n'emploie aucun salarié ;
Qu'il s'ensuit que l'action de la société Uneco aux fins de voir ordonner la fermeture dominicale des commerces exploités par les deux sociétés intimées doit être déclarée irrecevable ;
Considérant que la société Uneco ne peut se prévaloir à l'égard de chacune des sociétés intimés d'une créance incontestable justifiant ses demandes de provision à titre de dommages et intérêts ; qu'en effet, alors qu'elle ne dément pas exploiter un commerce de petite surface spécialisé dans la vente de produits casher et que les commerces alimentaires de moyenne surface Franprix et G20 exploités par les intimées ne sont pas spécialisés dans la vente de tels produits, rien ne permet d'attribuer avec certitude la baisse du chiffre d'affaire de la société Uneco de 480 euros le dimanche depuis le mois de novembre 2007, dont atteste la société d'expertise Comptable Fiduciaire Bachaumont sans autre explication, ni justificatif, à l'ouverture dominicale des magasins Franprix et G20 en cause ;
Qu'en conséquence, la demande de provision de la société Uneco se heurte à une contestation sérieuse ;
Considérant qu'au regard des motifs qui précèdent et en l'absence d'indication sur la procédure au fond pouvant éventuellement être envisagée par la société Uneco, il n'existe pas de motif légitime d'ordonner aux sociétés intimées de lui communiquer les documents comptables ou relatifs à l'emploi du leur personnel, documents susceptibles d'être utilisés à des fins autres que celles entrant dans les prévisions de l'article 145 du CPC ; que cette demande sera donc rejetée ;
Considérant que, compte tenu du sens du présent arrêt, la société Uneco supportera les dépens d'appel outre ceux de première instance, sera déboutée de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du CPC et sera condamnée à payer à chacune des intimées la somme de 2000 euros en application du même texte ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Constate que l'exception d'incompétence est devenue sans objet,
Confirme l'ordonnance déférée quant aux dépens,
Y ajoutant,
Déclare irrecevable l'action de la société Uneco aux fins de voir condamner les sociétés Baltaian et Chateaudis à respecter les règles du repos hebdomadaire des salariés,
Dit n'y avoir lieu à référé quant à la demande de provisions de la société Uneco,
Déboute la société Uneco de sa demande tendant à voir ordonner aux sociétés Baltaian et Chateaudis de lui communiquer des pièces,
Condamne la société Uneco aux dépens d'appel et à payer à la société Baltaian et à la société Chateaudis, chacune, la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du CPC,
Admet la SCP Guizard et la SCP Naboudet-Hatet au bénéfice de l'article 699 du CPC.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT