RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRET DU 30 septembre 2010
(n° 11 , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/12095 (J.M D)
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 septembre 2008 par le conseil de prud'hommes de Paris (2° Ch) - section commerce - RG n° 07/01217
APPELANT
Monsieur [D] [K]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Fiodor RILOV, avocat au barreau de PARIS, toque : P 157 substitué par Me Fatima AAZIZ-PEREZ, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, t
INTIMEE
S.A. NATURE ET DECOUVERTES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Christine PFAUDLER, avocat au barreau de PARIS, toque : C.1635
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 juin 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président
Madame Evelyne GIL, conseiller
Madame Isabelle BROGLY, conseiller
Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Séverine GUICHERD, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel régulièrement interjeté par Madame [D] [K] à l'encontre d'un jugement prononcé le 9 septembre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS ayant statué sur le litige qui l'oppose à la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE sur ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail.
Vu le jugement déféré qui a débouté Madame [D] [K] de toutes ses demandes.
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :
Madame [D] [K], appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré et sollicite la condamnation de la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE au paiement des sommes de 52 523,26 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
La S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE, intimée, conclut à la confirmation du jugement et requiert une indemnité de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
CELA ÉTANT EXPOSÉ
Par contrat écrit à durée indéterminée en date du 20 septembre 2004 ayant pris effet le 27 septembre 2004, Madame [D] [K] a été engagée par la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE en qualité de responsable adjointe de magasin moyennant une rémunération mensuelle fixée en dernier lieu à la somme de 2 188,50 €.
Le 10 octobre 2006, la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE convoquait Madame [D] [K] pour le 19 octobre 2006 à un entretien préalable à un éventuel licenciement.
Cette mesure était prononcée par lettre du 24 octobre 2006 pour cause réelle et sérieuse se fondant sur le refus de la salariée de son reclassement dans un nouveau magasin après fermeture de celui dans lequel elle était précédemment affectée.
SUR CE
Sur la qualification du licenciement.
Après plusieurs affectations successives, Madame [D] [K] exerçait ses fonctions dans un magasin situé dans les locaux du [4] à [Localité 5]. La convention d'occupation du domaine public au sein de cet établissement ayant été dénoncée par le concédant le 27 septembre 2006 avec échéance au 12 octobre suivant, la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE a dû fermer ce magasin et réaffecter le personnel qu'elle y employait.
La proposition faite à Madame [D] [K] consistait en une mise à disposition temporaire au profit d'un magasin à l'enseigne EXPLORUS situé à [3]. Il n'est pas contesté que ce magasin est exploité par une société PODIENSIS distincte de la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE, même si l'une et l'autre forment une unité économique et sociale et sont dirigées par la même personne physique.
Selon les termes de la lettre du 6 octobre 2006 accompagnant l'avenant au contrat de travail soumis à la signature de la salariée, il était précisé que celle-ci se trouverait "sous la responsabilité hiérarchique de Mr [G] [P] directeur du magasin". L'avenant fixait la durée du détachement provisoire 'à compter du 17 octobre 2006 et jusqu'au retour de congé de maternité de Madame [V] [T]'.
Il s'ensuit que Madame [D] [K] se trouvait soumise au pouvoir de direction et potentiellement au pouvoir disciplinaire d'un salarié d'une société distincte de son employeur et que l'échéance de la mesure envisagée n'était pas fixée d'une manière précise, soit par une date prédéterminée soit par la référence à un événement certain, tel que 'le terme du congé de maternité', alors que la survenance du 'retour' de la salariée remplacée était nécessairement affectée d'un aléa, ce retour pouvant ne pas coïncider avec la fin du congé de maternité en raison de multiples circonstances sur lesquelles la salariée n'avait aucune prise.
Dans ces conditions, et en l'absence de toute indication sur les conventions intervenues entre la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE et l'entreprise utilisatrice, la mesure présentée comme une simple mise à disposition temporaire constituait en réalité une mutation opérant une modification du contrat de travail que Madame [D] [K] pouvait refuser sans encourir un licenciement.
La volonté de la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE d'imposer cette mesure et d'en faire découler la rupture du contrat de travail est d'autant plus contestable qu'elle disposait d'une solution alternative puisque Madame [D] [K] a été amenée à effectuer son préavis dans un magasin NATURE ET DÉCOUVERTE du boulevard Haussmann où son 'détachement provisoire' n'aurait suscité aucune difficulté.
Il convient donc, infirmant le jugement de première instance, de déclarer le licenciement de Madame [D] [K] dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur les incidences financières.
Au vu des pièces justificatives produites et des dispositions de l'article L. 1235-3 alinéa 2 du code du travail, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle-ci, il convient de fixer les dommages-intérêts devant revenir à Madame [D] [K] en réparation du préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 13 500 €.
Sur l'application d'office de l'article L. 1235-4 du code du travail.
Madame [D] [K] ayant plus de deux ans d'ancienneté et la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE occupant habituellement au moins 11 salariés, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur fautif au P LE EMPLOI des indemnités de chômage payées au salarié licencié pour une durée qu'il y a lieu de fixer à 2 mois au regard des éléments propres à l'espèce, notamment les circonstances du licenciement, l'ancienneté de Madame [D] [K] et la situation économique de la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE.
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens.
Succombant au principal, la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.
La somme qui doit être mise à la charge de la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Madame [D] [K] peut être équitablement fixée à 1 000 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Déclare le licenciement de Madame [D] [K] dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Condamne la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE à payer à Madame [D] [K] la somme de 13 500 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Condamne la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE à rembourser au P LE EMPLOI les indemnités de chômage payées à Madame [D] [K] pour une durée de 2 mois.
Condamne la S.A. NATURE ET DÉCOUVERTE aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Madame [D] [K] la somme de 1 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :