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15/12/2010 | FRANCE | N°09/03446

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 15 décembre 2010, 09/03446


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 15 Décembre 2010



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/03446



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Mars 2009 par le Conseil de Prud'hommes de CRETEIL- Section Activités Diverses - RG n° 08/00339





APPELANTE

SAEML STUDIO 66

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Jean-Louis PERU, avoca

t au barreau de PARIS, K087 substitué par Me Corinne ASFAUX, avocate au barreau de PARIS, K0087





INTIMÉ

Monsieur [R] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Oli...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 15 Décembre 2010

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/03446

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Mars 2009 par le Conseil de Prud'hommes de CRETEIL- Section Activités Diverses - RG n° 08/00339

APPELANTE

SAEML STUDIO 66

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Jean-Louis PERU, avocat au barreau de PARIS, K087 substitué par Me Corinne ASFAUX, avocate au barreau de PARIS, K0087

INTIMÉ

Monsieur [R] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Olivier BONGRAND, avocat au barreau de PARIS, K.136

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Novembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Geneviève LAMBLING, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Geneviève LAMBLING, Présidente

Madame Anne DESMURE, Conseillère

Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller

GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Madame Geneviève LAMBLING, Présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Suivant contrat à durée indéterminée du 22 février 2007, M.[R] [D] a été engagé par la SAEML Studio 66, représentée par Mme [L], président directeur général, en qualité d'assistant directeur, responsable hall, coefficient Agirc-Arco 240, échelon 1, indice 297 de la convention collective des entreprises d'expression cinématographique.

Après deux avertissements, la SAEML Studio 66 l'a convoqué à un entretien préalable fixé le 22 janvier suivant au cours duquel il a été victime d'un malaise et transporté aux urgences.

Son licenciement pour faute grave lui a notifié par lettre recommandée du 29 janvier suivant.

Contestant la rupture de son contrat de travail, M.[R] [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil qui, par jugement du 12 mars 2009 a :

- dit que ce licenciement était nul,

- condamné la SAEML Studio 66 à verser au salarié les sommes de

14'188 euros à titre indemnité pour licenciement nul,

1100 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire,

110, 10 euros au titre des congés payés afférents,

2383 euros à titre indemnité de préavis,

238, 30 euros , montant des congés payés incidents,

800 euros au titre de l'article 7 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions et condamné l'employeur aux dépens.

Régulièrement appelante, la SAEML Studio 66, dans ses conclusions déposées et soutenues lors de l'audience du 16 novembre 2010, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, prie la cour d'infirmer ce jugement sauf en ce qu'il a considéré que la prétendue mise à pied disciplinaire du 26 décembre 2007 n'avait pas lieu d'être annulée, de dire fondé le licenciement de M.[R] [D], de débouter celui-ci de toutes ses demandes et de le condamner à lui verser la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M.[R] [D], dans ses écritures soutenues dans les mêmes conditions auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, conclut au débouté et forme appel incident pour voir annuler la mise pied du 26 décembre 2007 et la SAEML Studio 66 condamner à lui verser les sommes de 20 000 euros à titre d'indemnité « de licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse », 476 euros à titre d'indemnité de licenciement ainsi que celle complémentaire de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur le licenciement

M.[R] [D] a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 janvier 2008 alors que victime d'un malaise lors de l'entretien préalable qui avait eu lieu le 22 janvier précédent, il était en arrêt de travail jusqu'au 1er février suivant.

Comme il le rappelle, selon l'article L 1226-7 du code du travail, le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie, l'article L 1226-9 du même code énonçant que 'Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie'.

Dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, la SAEML Studio 66 reproche à M.[R] [D] les faits fautifs qualifiés de graves suivants :

'Avec la complicité de Monsieur [O] [E], vous exercez sur l'intégralité du personnel des pressions répétées constitutives d'un véritable harcèlement moral.

Par ailleurs, par courrier du 12 décembre 2007, je vous indiquais que j'avais été interpellé par des spectateurs et des responsables associatifs concernant votre attitude lors de deux initiatives organisées au STUDIO 66 en partenariat avec la municipalité.

Le 17 novembre 2007, alors même que vous étiez en poste au STUDIO 66, vous vous êtes permis d'intervenir dans le débat qui a suivi le film d'une manière critique, sortant de vos fonctions de salarié.

Le 5 décembre 2007, une altercation violente avec une autre employée du STUDIO 66, Madame [RY] [J], dans le hall au milieu des spectateurs a éclaté. Après cet événement, la salariée a dû être hospitalisée, victime d'un malaise.

C'est dans ces circonstances que le 12 décembre 2007, je vous adressais une correspondance aux termes de laquelle je vous rappelais que vous aviez déjà fait l'objet d'un avertissement l'été dernier en raison du même type de comportement à l'égard de spectateurs, et que je sollicitais en conséquence de Monsieur [E], directeur de l'établissement, une mise à pied d'une journée pour ces faits.

Si aucune sanction n'a été prise alors, c'est uniquement en raison du refus que Monsieur [E] m'a opposé.

Au cours du mois de décembre 2007, j'ai reçu plusieurs courriers au siège social émanant de salariés se plaignant encore de l'ambiance délétère que vous entreteniez.

Dans ces circonstances, j'ai reçu Monsieur [E] le 3 janvier 2008 afin d'obtenir des explications quant aux faits dénoncés.

De retour au STUDIO 66, celui-ci, en votre présence, a convoqué les salariés afin d'exiger de manière pressante des attestations en votre faveur, faisant notamment état de l'absence de tout harcèlement.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés et de la perturbation grave qui en découle, votre maintien dans la Société s'avère impossible, y compris pendant la durée de votre préavis....'

C'est en vain que la SAEML Studio 66 soutient que le malaise dont le salarié a été victime au cours de l'entretien préalable alors que celui-ci avait été mis à pied à titre disciplinaire 'est sans lien aucun avec l'exécution de son contrat de travail' dès lors que convoqué à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement, il était à cette date sous la dépendance et l'autorité de l'employeur et que le malaise survenu est ainsi un accident du travail.

Il appartient à l'employeur de prouver les faits fautifs invoqués dans la lettre de licenciement, et de démontrer en quoi ils rendaient immédiatement impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Les faits survenus les 17 novembre et 5 décembre 2007 sont contestés par M. [R] [D] qui fait, par ailleurs, valoir qu'ils ont été d'ores et déjà sanctionnés par une mise à pied disciplinaire prononcée par M.[E], directeur du studio 66, par lettre remise en main propre le 26 décembre suivant, dont il demande l'annulation, le prononcé de cette mise à pied étant contestée par l'appelante qui soutient que M.[E], apparenté au salarié, s'y est opposé et qu'aucune retenue de salaire n'a été effectuée.

Pour établir que le 17 novembre 2007, M.[R] [D] se serait ' permis d'intervenir dans le débat qui a suivi le film d'une manière critique, sortant de vos fonctions de salarié', la SAEML Studio 66 produit une attestation de Mme [S], salariée ayant remplacé l'intimé, qui est formellement contredite par celle de Mme [Y], professeur de français, qui déclare que celui-ci n'a émis aucune critique et que, 'bien au contraire, sa seule intervention a été de constater que les élèves NF du collège [C] [ZU] bénéficiaient d'un dispositif qui leur permettaient de bien s'intégrer dans la société française'.

S'agissant des faits du 5 décembre 2007 soit l' altercation violente avec une autre employée du STUDIO 66, Madame [RY] [J], si cette dernière en atteste, M. [X] [B] précise au contraire 'J'ai vu la femme de ménage, africaine, se précipiter en hurlant vers M. [D] et M.[A] qui lui ont demandé de se calmer. Elle s'en est pris tout particulièrement à M.[D] en l'insultant ce dernier ne répondant pas. C'est alors vers 18H30 que le directeur, M.[E] est descendu dans le hall et a demandé à son tour à la femme de ménage de ne pas faire de scandale devant les clients et les partenaires de l'association. Mme [G] [RY] n'a pas eu de malaise et a quitté son poste immédiatement.'

M. [A] [T], employé de la SAEML Studio 66 depuis le mois d'août 2003, confirme avoir demandé à Mme [G] 'hurlant sur M.[D]' de se calmer et que celle-ci n'a pas eu de malaise.

Ces faits fautifs qualifiés de graves ne sont ainsi pas établis.

En ce qui concerne les faits de décembre 2007 et janvier 2008, la SAEML Studio 66 produit deux courriers de Mme [G] [RY] du 9 décembre 2007 et de Mme [F] du 12 décembre adressés à Mme [L], président directeur général, dans lesquels la première se plaint du comportement de 'Mr [R], qui fait beaucoup de désordres dans le cinéma studio 66...nous traite comme ces esclaves ou ses domestiques' et demande la prise de sanction, la seconde fait également état tant du comportement de M.[R] [D] que de celui de M. [E] qui les font 'travailler comme des esclaves'.

Elle verse également aux débats une lettre adressée 'comme convenu' par quatre autres salariés soit Mmes [P] [W], [AR] [H] et MM.[K] [U] et [JB] [N] dans laquelle notamment il est précisé que '[R] [D] harcèle le personnel de ménage, abuse de son autorité, ce qui a occasionné des arrêts de travail.Monsieur [E] couvre [R] [D] sur toutes ses fautes...'

M.[Z] [YF] atteste avoir été témoin d'insultes proférées par M.[R] [D] envers M.[M], son supérieur hiérarchique, mais sans précision de dates, M.[M] ne faisant cependant pas état dans son attestation de pression et de faits de harcèlement moral, contrairement à ce que soutient l'appelante.

Monsieur [I] déclare avoir fait l'objet le 3 janvier 2008 de pressions continuelles de la part de M.[R] [D] afin qu'il atteste de l'absence de pression ou de harcèlement de ce dernier auprès du personnel, tout en précisant être à bout et avoir déjà saisi l'inspection du travail, comme d'autres membres du personnel 'pour des faits similaires'.

Monsieur [V] a également attesté le 4 janvier 2008 avoir été convoqué la veille, ainsi que d'autres salariés, par MM.[E] et M.[R] [D] qui lui ont demandé de témoigner de l'absence de harcèlement et de pression de leur part envers le personnel du cinéma.

Si M.[R] [D] produit des attestations de clients réguliers du cinéma exploité par la SAEML Studio 66 mentionnant sa gentillesse, son implication et son professionnalisme, son attitude à l'égard des autres salariés, alors qu'il avait des responsabilités d'encadrement, était inacceptable, caractérise une faute grave et devait être sanctionnée par l'employeur tenu d'une obligation de sécurité à l'égard de ses employés, étant observé que M.[E] a également fait l'objet d'un licenciement disciplinaire.

Il en résulte que le licenciement pour faute grave de M. [R] [D] était justifié et pouvait être prononcé pendant la suspension de son contrat de travail.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a jugé nul ce licenciement et, la faute grave étant privative des indemnités de rupture et de licenciement, en ce qu'il a condamné la SAEML Studio 66 au paiement des sommes de 14'188 euros à titre indemnité pour licenciement nul,1100 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire,110, 10 euros au titre des congés payés afférents, 2383 euros à titre indemnité de préavis,238, 30 euros , montant des congés payés incidents, 800 euros au titre de l'article 7 du code de procédure civile.

Il s'ensuit que M.[R] [D] sera débouté de ses demandes de ses chefs.

Sur la demande d'annulation de la mise à pied conservatoire du 26 décembre 2007

Si la SAEML Studio 66 conteste qu'une mise à pied ait été notifiée à cette date afin de sanctionner les faits des 17 novembre et 5 décembre 2007, en soutenant que M.[E] s'y est opposé, M.[R] [D] produit cependant une lettre portant la mention 'remise en main propre' par laquelle M.[E] lui a notifié une mise à pied disciplinaire d'une journée pour ces faits, qui, ainsi qu'il l'a été ci-dessus précisé, n'étaient pas établis.

Il s'ensuit que cette mise à pied sera annulée et la décision déférée infirmée en ce qu'elle a débouté M.[R] [D] de sa demande à ce titre, étant observé que son salaire lui a été payé ce jour là et qu'il ne formule aucune demande autre que l'annulation de cette sanction.

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Aucune circonstance d'équité n'appelle l'application de ces dispositions en faveur de l'une ou l'autre des parties.

Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de M. [R] [D].

PAR CES MOTIFS

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

ANNULE la mise à pied disciplinaire notifiée à M.[R] [D] le 26 décembre 2007,

DIT fondé le licenciement pour faute grave de M.[R] [D],

DÉBOUTE M. [R] [D] de ses demandes de rappels de salaire, d'indemnités de rupture et d'indemnité de licenciement 'nul et sans cause réelle et sérieuse',

DÉBOUTE les parties de leur demande respective fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [R] [D] aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 09/03446
Date de la décision : 15/12/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°09/03446 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-12-15;09.03446 ?
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