RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 8
ARRET DU 28 Janvier 2011
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/11254 - IL
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Juin 2006 par le conseil de prud'hommes d'EVRY section activités diverses RG n° 05/00058
APPELANTE
1° - Association VERS LA VIE POUR L'EDUCATION DES JEUNES dite AVVEJ
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Michèle EPELBEIM, avocat au barreau de CRETEIL, toque : PC 390
INTIME
2° - Monsieur [N] [T]
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparant en personne, assisté de Me Swéta PANNAGAS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0409
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/031733 du 11/08/2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Décembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Irène LEBE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire en présence de Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Pierre DE LIEGE, Présidente
Mme Irène LEBE, Conseillère
Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère
Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Mme Irène LEBE, Conseillère, par suite d'un empêchement de la présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour statue sur les appels régulièrement interjetés par l'association Vers la Vie pour l'Education des Jeunes, ci-après dénommée AVVEJ, et, à titre incident, par M. [N] [T], du jugement rendu le 15 juin 2006 par le Conseil de Prud'hommes d'Evry, section Activités Diverses, qui a condamné l'AVVEJ à verser à M. [N] [T] sommes suivantes, en déboutant les parties du surplus de leurs demandes :
- 555,98 Euros au titre des indemnités pour dimanches et jours fériés travaillés,
- 667,39 Euros au titre des heures complémentaires 2000,
- 962,64 Euros au titre des heures supplémentaires 2002,
- 1.472,80 Euros au titre des heures de nuit,
- 310,28 Euros au titre des congés payés incidents,
et ce, avec intérêt au taux légal à compter de la date de réception par le défendeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud'hommes,
- 305 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un bref exposé des faits et de la procédure, il suffit de rappeler que M. [N] [T] a été embauché par contrat à durée indéterminée écrit en date du 5 février 1999, à compter du 15 février 1999 à temps partiel, pour un travail à mi-temps de 84,5 h, en qualité d'éducateur scolaire faisant fonction d'éducateur, coefficient 423, moyennant un salaire mensuel brut de 4.836,93 F, majoré d'une indemnité de sujétion spéciale à hauteur de 8,21% du salaire brut indiciaire, soit 397,11 F, et ce, par l'AVVEJ, association ayant pour objet de s'occuper d'enfants et d'adolescents ainsi que d'adultes en difficulté, montrant essentiellement des troubles du comportement et /ou de la personnalité.
L'association, qui relève de la convention collective nationale du Travail des Établissements et Services pour Personnes Inadaptées et Handicapées à but non lucratif du 15 mars 1966, comprend un certain nombre d'établissements et services, parmi lesquels 'le [8]', internat situé à [Localité 6] dans l'Essonne, dans lequel était affecté le salarié.
Cet établissement emploie des équipes pluridisciplinaires, dont des éducateurs comme M. [N] [T], et comprend 5 structures différentes, sous forme de pavillons, M. [N] [T] étant affecté au pavillon dénommé '[Adresse 5], qui est un service d'accompagnement éducatif de 34 studios, hébergeant des jeunes en difficulté, âgés de 12 à 21 ans, dont la scolarité et la formation professionnelle sont assurées à l'extérieur de l'établissement.
Par avenant du 29 juin 2000, la durée du travail du salarié évoluait vers un travail à temps complet du 3 juillet au 31 août 2000, soit 9 semaines d'été, puis de nouveau à temps partiel de 116, 84 heures, du 6 novembre au 31 décembre 2000, par avenant de régularisation du 26 janvier 2001.
Enfin, par avenant du 6 juillet 2001, M. [N] [T] passait à un travail à temps complet du 1er juillet 2001, à sa demande.
Par courrier du 15 décembre 2004, l'AVVEJ l'informait de ce que, dans le cadre de la régularisation des salariés à temps partiel, il serait procédé à la régularisation de sa situation pour les heures de travail en chambre de veille, effectuées entre le 1er janvier et le 1er juillet 2001 sur la base d'un rappel de 36 heures.
Le 26 décembre 2004, M. [N] [T] a réclamé la régularisation de sa situation salariale depuis son embauche.
Le 28 janvier 2005, l'AVVEJ lui proposait de lui verser un rappel de salaire évalué sur la base de 46 nuits, représentant 184 heures.
Non satisfait de cette proposition et réclamant en outre le paiement des dimanches et jours fériés travaillés, et relevant que des fiches de modulation des mois d'avril, mai, juin, septembre et octobre 2000 étaient manquantes, M. [N] [T] a saisi le Conseil de Prud'hommes le 17 janvier 2005 de demandes en paiement d'heures complémentaires et d'heures supplémentaires, de dimanches et de jours fériés travaillés.
Depuis la décision du Conseil de Prud'hommes, M. [N] [T] a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 30 octobre 2010 au motif du non-respect par l'employeur des règles relatives à la durée et à l'amplitude maximale journalière du travail.
En cause d'appel, l'AVVEJ sollicite l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions.
Elle demande, statuant à nouveau, au visa de l'article 11 de l'annexe 3 de la convention collective applicable, de l'article 29 de la loi Aubry II du 19 janvier 2000, promulguée le 20 janvier 2000, du décret du 31 décembre 2001 pris pour l'application de l'article L. 212- 4 du code du travail, du décret du 29 janvier 2007, ainsi que des arrêts rendus le 13 juin 2007 par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation, de l'avenant n° 235 de la convention collective applicable, de l'article 1315 du code civil, et de l'avenant au contrat de travail du 6 juillet 2001 :
- de lui donner acte de ce qu'elle accepte la proposition de remboursement de M. [N] [T] au titre des heures de surveillance de nuit en chambre de veille,
- en conséquence, de le débouter de ses demandes plus amples ou contraires en rapport avec l'appel principal qu'elle a formé contre le jugement déféré et l'accord intervenu entre les parties sur l'application du régime d'équivalence pour les périodes de travail à temps complet du salarié et sa non application pour les périodes de travail à temps partiel.
Sur l'appel incident du salarié, relatif à sa prise d'acte de rupture :
- de juger que celle-ci n'est pas justifiée et produit en conséquence les effets d'une démission,
- de le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre de demande reconventionnelle, l'AVVEJ demande à la Cour de condamner M. [N] [T] à lui verser les sommes suivantes :
- 1.169,84 Euros à titre de dommages-intérêts pour brusque rupture,
- 3.000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à régler les entiers dépens.
M. [N] [T] demande à la Cour de confirmer le jugement déféré dans le principe des condamnations prononcées à son profit à l'encontre de l'AVVEJ au titre des heures complémentaires, heures supplémentaires et indemnités pour dimanches et jours fériés travaillés non rémunérés ainsi qu'au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en en ramenant le montant à la somme de 3.329,20 Euros tel qu'accepté par l'association dans ses précédentes conclusions de mars 2010.
Relevant appel incident, M. [N] [T] demande à la Cour :
- de juger que sa prise d'acte de rupture de son contrat de travail du 30 octobre 2010 aux torts de l'employeur est justifiée et, la rupture étant imputable à l'AVVEJ, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- de condamner en conséquence l'AVVEJ à lui verser les sommes suivantes:
* 8.000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 5.950,60 Euros à titre d'indemnité de licenciement,
* 2.462,32 Euros à titre de dommages - intérêts pour mention inexacte du motif de rupture sur l'attestation du Pôle Emploi,
* 5.000 Euros à titre de dommages - intérêts en réparation du préjudice distinct résultant du risque encouru en matière de santé,
* 2.462,32 Euros à titre d'indemnité de préavis,
* 246,23 Euros au titre des congés payés incidents,
* 800 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, concernant les frais engagés à l'issue du jugement déféré dans le cadre de la tentative de rapprochement entre les parties,
* 5.000 Euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle, à recouvrer directement par le conseil du salarié, Me S. Pannagas.
SUR CE, LA COUR,
Vu le jugement déféré ainsi que les conclusions régulièrement communiquées par les parties au soutien de leurs observations orales auxquels il convient de se référer pour de plus amples développements.
Sur les demandes de rappels de salaires aux titres des heures de nuit, heures complémentaires, heures supplémentaires et dimanches et jours fériés travaillés :
L'employeur demande à la Cour de lui donner acte de ce qu'elle accepte la proposition de remboursement de M. [N] [T] au titre des heures de surveillance de nuit en chambre de veille.
En cause d'appel, il ressort en effet des conclusions des parties et des débats que les parties conviennent de ce que le régime d'équivalence, dont l'application était contestée par le salarié pour l'ensemble de ses périodes travaillées, et compte tenu des évolutions réglementaires et jurisprudentielles, rappelées par les parties, est applicable en ce qui concerne les périodes pendant lesquelles il travaillait à temps complet et fait en conséquence obstacle à ses demandes de ces chefs, concernant ces mêmes périodes, demandes basées sur la prise en compte, heure pour heure, des heures de travail de nuit, passées par l'intéressé en chambre de veille.
Il convient à cet égard, de rappeler de façon brève qu'aux termes du régime d'équivalence applicable dans ce secteur d'activité, l'article 11 de l'annexe 3 de la convention collective applicable précitée, avait institué un régime d'équivalence pour les heures de surveillance de nuit en chambre de veille effectuées par le personnel éducatif, et ce, sur les bases suivantes :
- les 9 premières heures étaient assimilées à 3 heures de travail effectif et rémunéré comme tel,
- entre 9 et 12 heures de travail, chaque heure est assimilée à 1/2 heure de travail effectif et rémunérée comme telle.
Il n'est cependant pas contesté par les parties que ce régime d'équivalence n'est pas applicable durant les périodes de travail à temps partiel.
Il convient dans ces conditions de donner acte aux parties de leur accord consistant à régler pour l'AVVEJ la somme de 3329,20 Euros aux titres des heures de veille ainsi que pour l'ensemble des demandes, formées par le salarié à des titres intégrant celles-ci dans ses demandes, à savoir rappel d'heures de travail de nuit, heures complémentaires et heures supplémentaires ainsi qu'indemnités pour dimanches et jours fériés travaillés.
Le salarié ayant reçu à ces titres la somme de 3969,09 Euros, devra en conséquence rembourser à ces titres à l'AVVEJ la somme de 640 Euros.
Sur le bien fondé de la prise d'acte de rupture du contrat de travail par M. [N] [T] :
M. [N] [T] soutient que l'employeur n'a pas respecté les dispositions légales relatives à la durée maximale quotidienne du travail, du repos ainsi qu'à l'amplitude hebdomadaire maxima du travail, que ce soit dans le cadre des horaires à temps complet relevant du régime d'équivalence ou en temps partiel.
En ce qui concerne, la durée maximale quotidienne de travail effectif, il fait valoir que lorsqu'il effectuait un travail de nuit, c'est à dire entre 21 h et 6 h, ses interventions dépassaient systématiquement les 10 heures et même les 12 heures de travail effectif maximum, autorisées au demeurant à titre dérogatoire, selon des conditions non réunies en l'espèce selon lui.
Pour les périodes de travail de nuit en chambre de veille, il distingue selon qu'il était à temps partiel ou à temps complet.
En temps partiel, soit de février 1999 à juin 2001 et à compter du 22 octobre 2007 au 31 octobre 2008, il souligne que doivent être comptées toutes les heures en chambre de veille pour le calcul de la durée du travail effectif pendant cette période dans la mesure où le régime des équivalences ne s'applique pas en temps partiel
Or, il relève qu'en 2000, où il travaillait donc en temps partiel, par exemple du jeudi 20 au 21 avril, il avait effectué 25 heures d'affilées de travail effectif, en démarrant sa journée à 11 h le jeudi et en finissant le vendredi à 12h, inclus les 4 heures de travail effectif en chambre de veille non comptées par l'employeur qui ne comptait que 3 h de travail effectif compte tenu des régimes des équivalences, pourtant non applicable en temps partiel.
De même, du samedi 8 au dimanche 9 janvier 2000, 25 heures de travail effectif d'affilée, avec un début de service le samedi à 12 h et une fin de service le dimanche à 13h, l'employeur ne comptant pas les heures en chambre de veille au motif erroné du régime des équivalences.
Il fait valoir qu'en 2001 les emplois du temps prévisionnels montrent les mêmes dépassements des limites de la durée du travail.
Il relève que de même en 2007, où il travaillait à temps partiel à compter du 22 octobre 2007 à décembre 2007, pendant 5 services à temps partiel de nuit, il a subi une durée quotidienne du travail supérieure à 10 h, la durée appliquée allant de 20 à 24 heures d'affilée de travail effectif.
*Ainsi, la nuit du 25 au 26 novembre 2007 : 20 heures d'affilée de travail effectif (début de service le dimanche à 16 heures et fin le lundi à 12 heures)
* de même la nuit du 13 au 14 décembre 2007, 21 heures de travail effectif d'affilée, (début de service à 16 heures et fin le lendemain vendredi à 13 heures) ;
- en 2008 : 24 services à temps partiel où il a effectué un travail effectif supérieur à 10 heures, soit de 19 à 24 heures de travail effectif d'affilée, soit toutes les nuits jusqu'à sa prise d'acte de rupture :
* par exemple : du jeudi 10 janvier 2008 à 16 heures au vendredi 11 janvier 12 heures,
* de même du 18 janvier à 12h au lendemain 19 janvier à 12 heures ;
De même, il soutient que durant ses périodes de travail à temps complet, soit de juillet 2001 au 21 octobre 2007, l'employeur ne lui comptait que 3 heures de travail effectif pour la durée du travail en chambre de veille en application du régime des équivalences.
M. [N] [T] soutient que la durée du service de jour, c'est à dire jusqu'en fin de soirée 23 heures, était également illicite de 2000 à 2008, car supérieure aux 10 heures légales, voire même supérieure à 12 heures, sauf dérogation non applicable en l'espèce, en raison du cumul de réunions d'équipe hebdomadaires et de service d'internat jusqu'à 23 heures.
Il cite en exemple :
- le 8 mars 2000: sur la base des fiches de modulation du 28 développement au 9 avril 2000: 12 heures d'affilée de travail effectif ;
le 18 septembre 2001: 11 heures d'affilée de travail effectif ;
le 30 janvier 2003: 13 heures de travail effectif d'affilée.
- en 2004 :12 journées ont excédé la durée légale quotidienne de travail de 10 heures de travail effectif.
- en 2005, 6 journées,
- en 2006 : 10 journées,
- en 2007 :26 journées,
- en 2008 ; 8 journées (jusqu'au 22 octobre 2008, date de sa prise d'acte de rupture) ;
De même, il soutient que l'employeur violait systématiquement les dispositions légales sur l'amplitude journalière maximale de travail, celle-ci devant inclure les périodes d'équivalence.
Il soutient bénéficier des dispositions prévoyant une amplitude journalière maximale de travail de 12 heures, qui doit s'apprécier en outre sur deux journées civiles, s'agissant d'un travail de nuit, dans la mesure où il effectuait un service en chambre de veille, conformément à la jurisprudence communautaire et à la jurisprudence de la Cour de Cassation depuis 2001 ainsi qu' aux dispositions de la convention collective applicable et du décret du 31 décembre 2001,et de l'article R.314-203 du code de l'action sociale et de la famille, sauf pour l'employeur à appliquer la règle du repos quotidien entre deux services, soit 11 heures.
M. [N] [T] fait valoir que ce mode de décompte devait s'appliquer donc à tout le moins depuis 2001 en faisant valoir que le décret du 29 janvier 2007 n'a apporté aucune modification sur ce point à l'article 3 du décret du 31 décembre 2001 qui disposait déjà que ' la période de présence en chambre de veille s'étend du coucher au lever des personnes accueillies tels que fixés par les tableaux de service sans que sa durée puisse excéder 12 heures. '.
Il soutient que ses horaires de travail dépassaient systématiquement cette limite de 12 heures d'amplitude journalière maximale de travail, l'employeur ne distinguant en outre pas les heures de nuit dans les fiches comptables.
Il cite en exemple :
- la nuit du 25 au 26 septembre 2001 avec 21 heures de travail effectif dans une amplitude de 25 heures d'affilée,
- la nuit du 22 au 23 décembre 2001 avec 22 heures de travail effectif dans une amplitude de 25 heures d'affilée, avec l'ensemble du temps de présence en chambre de veille ;
De même, il cite deux exemples en février et décembre 2002, puis en janvier et avril 2003.
En 2004, il soutient que le même problème se posait, tous les services de nuit, soit 50, comprenant une amplitude journalière de travail excédant systématiquement les 12 heures légales, car située entre 19 et 29 heures, et ce, en se basant sur les emplois du temps prévisionnels (voir pièces 44 et 45 du salarié) en citant en exemples du 7 au 8 janvier 2004, avec une amplitude horaire de 28,50 heures d'affilée (en y incluant l'ensemble du temps de présence en chambre de veille) et de 25 heures du 7 au 8 février 2004.
En 2005, il expose qu'il a effectué 53 services de nuit, soit toutes les nuits de 2005 avec une amplitude horaire de 21 heures d'affilée au minimum et même jusqu'à 31 heures (pièces 42 et 43).
En 2006, toutes les nuits, soit 57 nuits, excèdent l'amplitude journalière maximale de travail de 12 heures par une amplitude horaire de 16,50 heures et même 30 heures d'affilée.
En 2007, période de travail à temps complet jusqu'au 22 octobre 2007, 36 nuits excédaient l'amplitude journalière maximale de travail autorisée de 12 heures, en allant de 18 heures au minimum à 29 heures de travail d'affilée.
Pour sa période à temps partiel, à compter du 22 octobre 2007 jusqu'à la prise d'acte de rupture, il fait grief à l'employeur du non respect de la durée quotidienne maxima de travail, étant rappelé qu'en l'absence de régime des équivalences la durée maxima d'un service de nuit devait être de 10 heures de travail effectif.
Il souligne que l'employeur avait appliqué une organisation du travail illicite car dépassant systématiquement les 12 heures de travail dès lors qu'il y avait un service de nuit alors qu'il avait connaissance des règles applicables en matière de durée du travail, dont certaines étaient anciennes, avant le décret du 31 janvier 2007.
Il souligne que ces dysfonctionnements ont été dénoncés à l'employeur par les représentants du personnel et que lui - même s'était joint à un courrier collectif le 14 mai 2008 pour demander le respect de la durée quotidienne maximale du travail, l'annulation du décret du 31 décembre 2001 par celui précité du 31 janvier 2007 n'ayant été qu'un élément ayant poussé les salariés à adresser des réclamations, le problème s'étant posé avant.
Il fait valoir que l'employeur n'a ainsi pas respecté son obligation de résultat en matière de sécurité des salariés concernés, dont lui - même.
Il en conclut que sa prise d'acte était fondée sur ce statu quo en matière de durée du travail, et plus particulièrement de la durée maximale quotidienne du travail dont les règles étaient connues de l'employeur à tout le moins depuis le décret du 31 décembre 2001, qui n'a été annulé que partiellement par le Conseil d'Etat, dont la décision du 28 avril 2006 a seulement permis une réflexion générale sur ces questions d'organisation du travail, décret dont l'article 3 régulait déjà les dépassements de la durée journalière du travail.
Il en conclut que sa prise d'acte de rupture du 30 octobre 2008 est justifiée et produit en conséquence les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L'AVVEJ s'oppose à ses demandes en faisant valoir que, compte tenu de l'évolution de la réglementation et de la jurisprudence, l'éventuel non respect des seuils et plafonds communautaires sur la durée et l'amplitude du travail, ne saurait être examinés que pour la période de février 2007 à octobre 2008, c'est à dire à compter du décret du 29 janvier 2007 sur le travail de nuit, consécutif à l'arrêt du Conseil d'Etat du 28 avril 2006 qui avait annulé le précédent décret du 31 décembre 2001 qui ne contenait aucune disposition restrictive en ce sens.
Il souligne que pour la période antérieure au 1er février 2007, date d'entrée en vigueur du décret précité du 31 janvier 2007, il n'y avait pas de réglementation imposant de tenir compte du travail effectué dans le cadre des horaires d'équivalence et que la jurisprudence de la Cour de Cassation, du 23 septembre 2009, prévoyant une indemnisation des salariés en cas de non respect des dispositions communautaires sur les limites de la durée du travail est postérieure au départ du salarié de l'association.
L'employeur soutient que le salarié ne peut se prévaloir d'une jurisprudence postérieure à son départ de l'association et que, dans ces conditions, il n'avait pas l'obligation de tenir compte des heures de travail de surveillance de nuit en chambre de veille pour déterminer l'amplitude du temps de travail ni pour calculer la durée du travail, et ce, avant le 1er février 2007, en relevant qu'en tout état de cause, M. [N] [T] ne réclame pas de rappel de salaires pour la période travaillée avant le 1er février 2007.
Il en conclut que le non respect des seuils et plafonds communautaires avant le 1er février 2007 ne justifiait pas la prise d'acte de rupture de l'intéressé.
Pour la période postérieure au 1er février 2007, date à partir de laquelle le salarié a été affecté au [7] à temps partiel, à mi-temps, à sa demande, il souligne que le salarié n'a émis aucune réclamation personnelle sur ses conditions de travail et ses horaires, sinon dans le cadre d'une lettre collective du 15 mai 2008 de l'équipe de [7], mais sans signature ainsi qu'une lettre du 14 mai 2008 dont les signatures ne sont pas identifiables, relative en outre au licenciement d'un salarié.
L'employeur relève que le salarié n'a jamais émis de réclamation personnelle, notamment de rappel de salaires ou d'heures supplémentaires en rapport avec un non respect des dépassements des limites de travail.
L'employeur souligne que, par leur volume et leur répétition, les dépassements des seuils et plafonds communautaires ne sont pas suffisamment généralisé vis à vis du salarié pour justifier sa prise d'acte.
L'employeur conteste la méthode de calcul du salarié pour les week ends en relevant que l'établissement calculait l'amplitude horaire journalière sur une période de 0 heure à 24 heures en l'absence de réglementation à cette date et non de la prise de poste au début du repos journalier suivant la méthode glissante retenue par le salarié sur deux journées civiles, résultant d'une jurisprudence de la Cour de Cassation du 23 septembre 2009, donc postérieure au départ du salarié.
Il souligne que les éléments produits par le salarié ne démontrent pas une telle violation pour les années 2007 et 2008, postérieures au décret susvisé, dans la mesure où l'intéressé se base sur des plannings prévisionnels dans le cadre du dispositif de modulation du travail mis en place dans les établissements concernés
L'employeur fait valoir que, même avec la méthode de comptabilisation sur deux jours, ce non respect des seuils et plafonds communautaires n'était pas généralisée et s'est même amélioré entre 2007 et 2008.
En effet, l'employeur relève que, si pour 2007, le salarié se plaint d'un dépassement de la durée quotidienne maximale de 10 heures, et ce, à 26 reprises pour 106 jours de travail, pour les dix premiers mois de l'année 2008, à temps partiel, ce dépassement tombe à 8 reprises pour 60 jours de travail et qu'en outre, à partir de juillet 2008 à octobre 2008, aucun dépassement n'a été relevé par le salarié.
Si pour les règles concernant le calcul de l'amplitude horaire pour les services de nuit, le salarié se plaint de dépassements à 24 reprises, donc 2,4 nuits par mois pendant 10 mois, et surtout pendant l'été 2008,l'employeur, qui relève que la méthode de calcul du salarié sur deux jours glissants aggrave les dépassements, souligne que les dépassements sont passés de 36 reprises en 2007 à 24 reprises en 2008.
Il en déduit que la situation du salarié s'était améliorée et qu'en tout état de cause, les dépassements reprochés sont trop insignifiants pour justifier sa prise d'acte de rupture et ce, alors qu'étant financée en quasi totalité par des fonds publics, l'association a de grandes difficultés à obtenir des créations de postes de veilleurs de nuit ;
Cependant, si les seuils et plafonds communautaires à la durée du travail, issus de la directive n° 93/104 du 22 novembre 1993, ont été introduits de façon non contestée en droit interne dans le régime des équivalences des éducateurs par le décret du 29 janvier 2007, qui, modifiant l'article R.314-203-1 du code de l'action sociale et de la famille, disposait que le recours au régime d'équivalence ne peut avoir pour effet dans ces établissements de porter à plus de 48 heures la durée hebdomadaire moyenne de travail des salariés, décomptée heure par heure, sur une période quelconque de 4 mois consécutifs, ni de porter à plus de 12 heures la durée de travail des travailleurs de nuit, décomptée heure par heure, sur une période quelconque de 24 heures, les salariés devant bénéficier d'une période de repos d'une durée au moins équivalente au nombre d'heures qui sont effectuées au-delà de la 8 ème heure, force est de constater que l'employeur ne conteste pas utilement les dépassements de ces seuils et plafonds communautaires de la durée du travail relevés avec exactitude par le salarié pendant les périodes pendant lesquelles il travaillait à temps partiel.
En effet, durant ces périodes, aucun régime des équivalences n'était applicable, étant observé que la contestation de la méthode de calcul du salarié sur deux jours ' glissants ' par l'employeur est inopérante, alors que cette méthode a été retenue comme adéquate, peu important que la jurisprudence à ce sujet ait été confirmée postérieurement à la prise d'acte de l'intéressé.
Or, pendant ces périodes de temps partiel, soit de février 1999 à juin 2001 et d'octobre 2007 au 31 octobre 2008, date de sa prise d'acte de rupture, l'employeur n'a pas réintégré dans le calcul des heures de travail de M. [N] [T] les heures de travail de nuit que celui-ci effectuait en chambre de veille alors qu'aucun régime des équivalences n'était alors applicable, s'agissant d'un travail à temps partiel et qu'il s'agissait donc d'un temps de travail effectif.
De même, l'employeur n'a pas respecté la durée limitée de 12 heures d'amplitude journalière maximale de travail alors que celle -ci était applicable dès l'entrée en vigueur du décret du 31 décembre 2001 dont l'article 3,non annulé par la décision précitée du Conseil d'Etat, disposait déjà que ' la période de présence en chambre de veille s'étend du coucher au lever des personnes accueillies tels que fixés par les tableaux de service sans que sa durée puisse excéder 12 heures. '.
D'autre part, à compter de l'arrêt du 1er décembre 2005 de la CJCE, et a fortiori des décrets des 31 janvier 2001 et 29 janvier 2007, l'employeur n'ignorait pas que ces limites, objet même de ce dernier texte, étaient applicables même dans le cadre d'un travail à temps complet et que pour les évaluer, il y avait lieu de comptabiliser l'ensemble des heures de travail, y compris celles effectuées dans le cadre des permanences en chambre de veille, même considérées comme des équivalences au niveau de leur rémunération.
A fortiori, ces limites devaient être appliquées par l'employeur pendant la période durant laquelle le salarié est passé à nouveau au travail à temps partiel, à savoir à compter du 22 octobre 2007.
Or, il ressort éléments tirés par le salarié des pièces de la procédure et en particulier des fiches de modulation de ses horaires de travail, fiches signées par son chef d'équipe et le directeur de l'établissement, éléments exposés par le salarié dans ses écritures avec une précision non utilement contredite par l'employeur que M. [N] [T] a effectivement dépassé les limites légales du travail lorsqu'il était en service de nuit en chambre de veille, tant quotidienne de 10 heures que journalière maximale de 11 heures, ainsi qu'il l'a exposé dans ses écritures, non utilement contestées par l'employeur sur ce point.
C'est à cet égard en vain que l'employeur oppose le caractère prévisionnel des plannings communiqués par le salarié alors qu'il lui appartient, au vu de ces mêmes plannings, de contredire le salarié en produisant les plannings définitifs.
C'est également en vain que l'employeur prétend que le salarié n'a pas émis de réclamations avant sa prise d'acte de rupture ou que les dépassements constatés étaient en voie de régression ou avaient même disparu à cette date alors que ces baisses de dépassements étaient manifestement consécutives aux réclamations des salariés des établissements concernés.
En effet, force est de constater que le salarié a réclamé une régularisation de sa situation dès le 26 décembre 2004, en ce qui concerne les heures d'équivalence et le paiement de ses heures de permanence en chambre de veille, notamment en périodes de temps partiel, sa prise d'acte de rupture étant justifiée également par ce manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles.
En outre, la circonstance que le salarié n'ait pas émis de réclamation individuelle au sujet de la durée du travail, ne saurait enlever le caractère de gravité de ces manquements, dans la mesure où il ressort du document communiqué, daté du 14 mai 2008 que l'intéressé était nécessairement compris dans le personnel de l'établissement de Mainville, auteur de cette réclamation dont le caractère collectif accentue au contraire la force.
Ces manquements répétés de l'employeur alors que jusqu'au jugement déféré, il n'avait pas régularisé la situation du salarié depuis sa réclamation de décembre 2004 sur la prise en compte erronée du régime des équivalences dans le calcul de son temps de travail et donc de sa rémunération en ce qui concerne les périodes de temps partiel, point sur lequel n'existait aucune confusion ni imprécision, notamment juridique, ainsi que pour les périodes de travail à temps complet à compter du 1er décembre 2005, date de l'arrêt rendu par la CJCE et au plus tard à compter du décret du 29 janvier 2007, revêtaient un caractère suffisamment graves dans la mesure où ils portaient sur un domaine touchant à la santé au travail des salariés.
Ces manquements justifiaient dès lors la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. [N] [T] aux torts de l'employeur, prise d'acte qui produit en conséquence les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En considération du préjudice subi par l'intéressé, compte tenu de son ancienneté, de son salaire mensuel brut évalué de façon non utilement contestée par l'intéressé à 1.213 Euros, de sa situation professionnelle peu précise postérieurement à la rupture, l'intéressé déclarant s'être reconverti dans un domaine tout à fait différent, l'AVVEJ sera condamnée à lui verser la somme de 7.500 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application des dispositions de l'article 1235-3 du code du travail, l'association employant plus de dix salariés.
En l'absence de cause réelle et sérieuse, M. [N] [T] a droit au règlement de l'indemnité de préavis et des congés payés incidents, ainsi que de l'indemnité conventionnelle de licenciement qu'il réclame, pour des montants non utilement contestés.
Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice subi en matière de santé :
M. [N] [T] soutient que le comportement fautif de l'employeur était en outre contraire aux obligations légales pesant sur l'association en matière de protection de la santé des salariés soumis à de tels dépassements de la durée légale du travail.
Il expose qu'en dehors des risques pour sa santé, créant une perte de chance de rester en bonne santé, résultant de tels horaires excessifs, ceux-ci avaient nécessairement des répercussions négatives sur sa vie privée et familiale, par le surmenage qu'ils induisaient et le manque de disponibilité pour sa vie familiale, notamment par les 24 heures systématiques le week end deux fois par mois, ce qui caractérise selon lui une faute inexcusable de l'employeur et à tout le moins une faute grave, lui ayant causé un préjudice important dont il demande réparation.
L'employeur s'oppose à sa demande en soutenant que l'intéressé ne démontre pas la réalité du préjudice subi.
Cependant, dans la mesure où les dépassements des seuils et plafonds de durée du travail sont établis que ce soit durant les périodes de travail à temps complet ou de temps partiel jusqu'en juillet 2007, fut ce de manière dégressive, ils ont nécessairement fait courir un risque pour la santé du salarié, compte tenu de l'importance des amplitudes horaires imposées à M.[N] [T].
Dans ces conditions, le préjudice allégué par le salarié, fut ce sous forme de risque dans la mesure où celui-ci était accru par ces dépassements, en l'absence de preuve d'un préjudice supérieur au niveau de sa santé, sera suffisamment réparé par la condamnation de l'AVVEJ à lui verser la somme de 2.000 Euros à titre de dommages-intérêts.
Sur la demande de dommages-intérêts pour mention inexacte du motif de la rupture sur l'attestation Assedic, à savoir 'démission' :
Il résulte de l'examen de l'attestation Assedic remise au salarié par l'employeur que celle-ci comportait un motif effectivement inexact, à savoir ' démission ' alors que l'intéressé avait pris acte de la rupture de son contrat de travail.
Or, l'employeur ne pouvait anticiper de la nature de la rupture, la qualification de démission relevant de la compétence des juridictions saisies. Cette mention inexacte a causé un préjudice au salarié dans la mesure où elle entraînait l'exclusion de sa prise en charge par les Assedic, préjudice que la Cour estime suffisamment réparé par la condamnation de l'AVVEJ à lui verser la somme de 1.000 Euros à titre de dommages-intérêts.
Les circonstances de la cause et l'équité justifient l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. L'AVVEJ sera condamnée à verser à ce titre la somme de 2.500 Euros, en ce compris les frais engagés par l'intéressé dans le cadre de la tentative de médiation.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement déféré dans le principe des condamnations prononcées,
Le réforme sur le quantum de celles-ci,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Donne acte aux parties de leur accord sur la somme de 3.329,20 Euros versée par l'AVVEJ à M. [N] [T] aux titres des rappels d'heures de travail de nuit, heures complémentaires et heures supplémentaires ainsi qu'indemnités pour dimanches et jours fériés travaillés,
Donne en conséquence acte aux parties de leur accord pour le remboursement par M. [N] [T] de la somme de 640 Euros à ce titre, sur la somme totale de 3969,09 Euros, condamnation prononcée à ces titres de l'AVVEJ au bénéfice de M. [N] [T], par le jugement déféré,
Dit que cette somme sera compensée avec les sommes ci après dues au salarié par l'AVVEJ,
Dit que la prise d'acte de rupture de M. [N] [T] est justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 31 octobre 2008,
Condamne l'AVVEJ à verser les sommes suivantes à M. [N] [T] :
- 7.500 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2462,32 Euros à titre d'indemnité de préavis,
- 246,23 Euros au titre des congés payés incidents,
- 5.950,60 Euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 2.000 Euros à titre de dommages-intérêts en réparation du risque subi en matière de santé du fait des dépassements de la durée du travail,
- 1.000 Euros à titre de dommages-intérêts pour mention inexacte portée sur l'attestation Assedic par l'employeur au titre du motif de la rupture du contrat de travail,
- 2.500 Euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne l'AVVEJ aux entiers dépens.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,