La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2011 | FRANCE | N°09/04431

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 10 février 2011, 09/04431


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 10 Février 2011

(n° 4 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/04431



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Février 2009 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY Section INDUSTRIE RG n° 08/01086





APPELANTE

S.A.S LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Catherine GUILLOTIN LE JO

UAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1119





INTIME

Monsieur [X] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne

assisté de Me Sophie DEBRAY, avocat au barreau de MEAU...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 10 Février 2011

(n° 4 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/04431

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Février 2009 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY Section INDUSTRIE RG n° 08/01086

APPELANTE

S.A.S LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Catherine GUILLOTIN LE JOUAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1119

INTIME

Monsieur [X] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne

assisté de Me Sophie DEBRAY, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Décembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise FROMENT, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise FROMENT, président

Mme Claudette NICOLETIS, conseiller

Mme Marie-Ange LEPRINCE, conseiller

Greffier : Madame Violaine GAILLOU, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Mme Françoise FROMENT, Président et par Mme Violaine GAILLOU, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[X] [V] a, selon contrat de travail signé le 28 janvier 2002, été engagé par la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE à compter du jour même en qualité de chauffeur-livreur, la relation contractuelle étant soumise aux dispositions de la convention collective nationale des entreprises et de l'industrie et de commerces de gros en viande.

Il a été promu au poste de réceptionniste courant 2007.

Il a été licencié pour faute grave par lettre du 22 février 2008 pour avoir enfreint la procédure de commande de viande pour bénéficier de 8 kg de marchandise sans avoir à payer une quelconque facture.

Estimant que son licenciement était nul pour violation de son statut protecteur en tant que membre suppléant de la délégation unique du personnel , il a, le 20 mars 2008, saisi le Conseil de Prud'hommes de Bobigny, lequel, par jugement du 5 février 2009, a :

- condamné la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE à payer à [X] [V] :

- 2 078,38 € de rappel de salaires de février à septembre 2007 et 207,84 € de congés payés afférents

- 1 709,67 € au titre de la mise à pied conservatoire et 170,96 € de congés payés afférents

- 5 609,62 € d'indemnité de préavis et 560,96 € de congés payés afférents

- 1 706,26 € d'indemnité de licenciement

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 25 mars 2008

- 30 000,00 € de dommages-intérêts pour nullité du licenciement avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement

- 750,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile

- débouté [X] [V] du surplus de ses demandes

- condamné la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE aux entiers dépens.

Cette dernière qui a régulièrement interjeté appel le 17 avril 2009 de cette décision qui lui avait été notifiée le 25 mars précédent a, lors de l'audience du 17 décembre 2010, développé oralement ses conclusions, visées le jour même par le greffier, aux termes desquelles elle sollicite l'infirmation de la décision attaquée en ce qu'elle a fait droit à une partie des demandes de [X] [V] et demande le rejet de toutes les demandes et sa condamnation à lui rembourser les sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire.

[X] [V] a, lors de l'audience du 17 décembre 2010, développé oralement ses conclusions, visées le jour même par le greffier, aux termes desquelles il sollicite la confirmation de la décision déférée sauf à réparer une omission matérielle et entend voir :

- à titre principal, condamner la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE à lui payer :

- 2 078,38 € de rappel de salaires de février 2007 à septembre 2007 et 207,84 € de congés payés afférents

- 117 054,00 € de dommages-intérêts pour violation du statut protecteur

- 1 709,67 € au titre des salaires de la mise à pied et 170,96 € au titre des congés payés afférents

- 5 609,62 € au titre de l'indemnité de préavis et 560,96 € de congés payés afférents

- 1 753,00 € au titre de l'indemnité de licenciement

- 506,69 € de dommages-intérêts pour perte des DIF

- 30 000,00 € au titre des indemnités pour licenciement nul

- à titre subsidiaire :

- 2 078,38 € de rappel de salaires de février 2007 à septembre 2007 et 207,84 € de congés payés afférents

- 1 709,67 € au titre des salaires de la mise à pied et 170,96 € au titre des congés payés afférents

- 5 609,62 € au titre de l'indemnité de préavis et 560,96 € de congés payés afférents

- 1 753,00 € au titre de l'indemnité de licenciement

- 506,69 € de dommages-intérêts pour perte des DIF

- 30 000,00 € au titre des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- en tout état de cause :

- ordonner la remise d'un certificat de travail , d'une attestation ASSEDIC et de bulletins de salaires conformes à l'arrêt

- condamner la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE à lui payer 3 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS ET DECISION DE LA COUR

Considérant, sur la demande de rappel de salaires, que [X] [V] fait valoir que, bien qu'il ait été promu au poste de réceptionniste à compter du 14 février 2007, ce n'est qu'en juillet 2007 que cette qualification a figuré sur ses bulletins de salaires et ce n'est qu'à compter d'octobre 2007 que le nouveau salaire correspondant lui a été versé ; que la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE réplique que ce n'est qu'à partir du mois de juin 2007 que [X] [V] a été promu comme réceptionniste car de février à mai 2007, il avait suivi une formation pour accéder à ce poste et que, par ailleurs sa rémunération était supérieure au minimum conventionnel, l'augmentation qui lui a été allouée en octobre 2007 étant une augmentation individuelle de salaire, sans lien avec sa nouvelle qualification ni effet rétroactif, le calcul du rappel sollicité étant de surcroît erroné ;

Considérant qu'il résulte du programme de formation versé aux débats par [X] [V] que la formation qui lui a été prodiguée pour devenir réceptionniste a duré une semaine à compter du 17 février 2007, ce programme prévoyant l'acquisition d'une complète autonomie après 4 mois ; que l'employeur a validé cette formation en précisant qu'il y avait lieu à changement de libellé d'emploi et à changement de salaire ;

Considérant que la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE ne justifie aucunement que, passée la première semaine de formation, [X] [V], dont il n'est pas contesté qu'il a alors exercé des fonctions de réceptionniste, ait bénéficié de la moindre assistance et ait reçu, sur le terrain, une formation complémentaire ; que si la rémunération qu'il a perçue était supérieure aux minima conventionnels, cette situation était la même avant sa promotion ; que, par ailleurs, l'augmentation dont il a bénéficié en juin 2007, était une augmentation annuelle, dont les salariés bénéficiaient pour un montant variable en fonction de leur activité ;

Considérant qu'en réalité l'augmentation de salaire, prévue par le directeur lui-même dans la fiche de formation du 17 février 2007, du fait du changement de fonction de [X] [V], aurait dû être appliquée dès que ce dernier a exercé ses fonctions ; qu'il a été fait droit à juste titre à sa demande de ce chef ;

Considérant, sur le statut de salarié protégé, qu'il résulte des pièces versées aux débats et des explications des parties que :

- [X] [V] a été élu membre suppléant CGT de la délégation unique du personnel le 1er février 2007

- il a, par courrier du 20 février 2007, démissionné de ses fonctions de 'secrétaire de la CGT au sein de la BIF'

Considérant que la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE soutient que ce faisant, [X] [V] a nécessairement démissionné de son mandat de membre suppléant CGT de la délégation unique du personnel et qu'il n'était plus protégé lorsqu'elle a prononcé son licenciement ; que [X] [V] réplique qu'il n'a, par ce courrier, aucunement démissionné de ses mandats électifs ;

Considérant toutefois que les seules fonctions de secrétaire qui pouvaient être visées par le courrier de démission, étaient celles de secrétaire du comité d'entreprise, aucun autre poste de secrétaire, au titre de la CGT, n'existant au sein de la société ;

Considérant qu'il résulte d'ailleurs d'une attestation de [M] [Y], délégué syndical CGT, élu comme titulaire, en date du 3 mars 2008 que :

- lors de la première réunion du comité d'entreprise suivant les élections , il devait être procédé à la désignation du secrétaire du comité et que [X] [V] avait été pressenti pour ce poste

- le directeur de la société, Mr [R], avait demandé à [X] [V] de renoncer à ce poste, ce dernier ayant alors écrit sa lettre de démission ;

Considérant que le fait que [M] [Y] ait cru devoir, le 10 mai 2007, alors que cela n'entrait, au regard tant du Code du Travail que de la convention collective, aucunement dans ses pouvoirs, désigner [W] [S] pour remplacer [X] [V] dans ses fonctions de suppléant de la CGT au comité d'entreprise, ne saurait impliquer que [X] [V] avait démissionné de ces fonctions, étant de surcroît observé que la délégation unique du personnel implique l'exercice cumulatif des fonctions de délégué de personnel et de membre du comité d'entreprise et qu'une désignation partielle est impossible ;

Considérant par ailleurs qu'il ne saurait être tiré aucune conséquence du fait que [X] [V] n'ait pas assisté aux réunions des délégués du personnel ou du comité d'entreprise dès lors que la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE ne l'y a jamais convoqué, pas plus d'ailleurs que son prétendu remplaçant qui aurait été désigné par [M] [Y] ;

Considérant enfin que la prétendue démission de [X] [V] n'a, à la différence de ce qui s'est passé pour un autre élu suppléant, pas été inscrit à l'ordre du jour des réunions du comité d'entreprise ;

Considérant qu'il en résulte que [X] [V] n'a pas démissionné de ses fonctions de membre suppléant élu CGT de la délégation unique du personnel, étant observé que :

- les fonctions de secrétaire du comité d'entreprise sont indépendantes de celles de membre, titulaire ou suppléant, de ce comité

- le fait de renoncer aux fonctions de secrétaire du comité n'implique aucunement une renonciation à celles de membre élu de ce comité ;

Considérant dès lors que la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE aurait dû, pour procéder au licenciement de [X] [V], salarié protégé, solliciter l'autorisation de l'inspecteur du travail ; que faute d'avoir ainsi procédé, le licenciement dont l'intéressé a fait l'objet est nul ;

Considérant que [X] [V] prétend donc à bon droit à l'octroi :

- de dommages-intérêts pour la violation de son statut protecteur d'un montant égal à la rémunération qu'il aurait perçue de la date de son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection en cours, soit en l'espèce 117 054,00 €

- du salaire de la mise à pied et des congés payés afférents, dont il a été fait une juste évaluation en première instance

- d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents, dont il a été fait une juste évaluation en première instance

- d'une indemnité de licenciement qu'il convient, compte-tenu du préavis, de fixer à 1 753 €

- d'une indemnité réparant l'intégralité de son préjudice résultant de l'illicéité du licenciement, qu'il convient de fixer en l'espèce, en l'absence de tout élément démontrant un préjudice supérieur, à la somme de 16 828,86 €, soit six mois de salaires, indemnité minimale due , aucun lien entre le licenciement et les fonctions syndicales exercées par [X] [V] n'étant démontré ;

- d'une indemnité pour perte des D.I.F.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision attaquée sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité de licenciement, celui de l'indemnité pour licenciement illicite et le rejet des dommages-intérêts pour violation du statut protecteur ;

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Condamne en outre la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE à payer à [X] [V] :

- 1 753,00 € d'indemnité de licenciement, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 25 mars 2008

- 16 828,86 € d'indemnité pour licenciement illicite

- 117 054 € pour violation du statut protecteur

- 506,59 € pour perte du DIF

- 2 000,00 € au titre des frais irrépétibles d'appel

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision

Dit que la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE devra, dans les deux mois de la notification de la présente décision, adresser à [X] [V] un certificat de travail, une attestation ASSEDIC et des bulletins de salaires tenant compte du salaire de la mise à pied et du préavis ;

Déboute la SAS LES BOUCHERIES D'ILE DE FRANCE de ses demandes et la condamne aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 09/04431
Date de la décision : 10/02/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°09/04431 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-02-10;09.04431 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award