Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 19 MAI 2011
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/22641
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Septembre 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007033880
APPELANTE
S.C.I. [Adresse 7] agissant en la personne de son Liquidateur amiable Maître [Z] [M] [X] [D]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par la SCP SCP MONIN D AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assistée de Me Emilie HIBERT, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMES
S.A. BANQUE GALLIERE prise en la personne de son Liquidateur Monsieur [R] [S]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour
assistée de Me Hubert DUGUEYT, avocat au barreau de PARIS, toque : P 238
Maître Maître [V] [P] es qualités de Mandataire Liquidateur de la SCI [Adresse 7]
[Adresse 5]
[Localité 2]
assigné et défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Février 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie-Josèphe JACOMET, conseillère, et devant Mme Caroline FEVRE, conseillère , chargées d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Claude APELLE, présidente
Mme Marie-Josèphe JACOMET, conseillère
Mme Caroline FEVRE, conseillère
Greffier, lors des débats : M. Sébastien PARESY
ARRÊT :
- réputé contradictoire
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Josèphe JACOMET, Conseillère au lieu et place de Madame Marie-Claude APELLE, Présidente empêchée et par M. Sébastien PARESY, greffier auquel la minute de l'arrêt a été remise par le magistrat signataire.
Le 26 octobre 1990, la société banque Gallière exerçant sous l'enseigne Banque Finindus a consenti à la SCI [Adresse 7] un prêt de 6 millions de francs à échéance du 25 octobre 1992.
Par jugement en date du 29 juin 1993, le tribunal de grande instance de Nice a condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la banque la somme de 6.908.880,07 francs avec intérêts au taux légal à compter du 30 juin 1992 au titre du prêt.
Le 21 mai 1997 la SCI [Adresse 7] a été placée en redressement judiciaire avant d'être mise en liquidation judiciaire par jugement du 21 janvier 1999.
Par acte d'huissier en date du 14 mai 2007, Maître [V] en sa qualité de mandataire liquidateur de la SCI [Adresse 7] a fait assigner la société Banque Gallière en paiement de la somme de 49.526,39 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 1993 en répétition de l'indû.
Par jugement en date du 22 septembre 2007, le tribunal de grande instance de Nice a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire de la SCI [Adresse 7] pour extinction du passif.
Par jugement du 18 septembre 2008, le tribunal de commerce de Paris a dit que l'action de Maitre [P] [V], en sa qualité de mandataire liquidateur de la SCI [Adresse 7], est irrecevable étant manifestement prescrite conformément aux dispositions de l'article 110- 4 du Code de commerce, l'a condamné à payer à la banque Gallière prise en la personne de son liquidateur Monsieur [S] la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.
La SCI [Adresse 7], agissant en la personne de son liquidateur amiable Monsieur [Z] [D], a interjeté appel contre ce jugement par déclaration remise au greffe de la Cour le 1er décembre 2008.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 16 octobre 2010, la SCI [Adresse 7] prise en la personne de Monsieur [Z] [D] en sa qualité de liquidateur demande de condamner la banque Gallière à lui payer la somme de 49.526,39 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 1993, outre la somme de 5.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et sa condamnation à supporter les dépens.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 5 aout 2010, la Banque Gallière prise en la personne de Monsieur [R] [S] en sa qualité de liquidateur demande la confirmation du jugement déféré et subsidiairement que la demande de la SCI [Adresse 7] est irrecevable en ce qu'elle se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à la décision d'admission de la créance de la banque intervenue le 26 janvier 2000 et, encore plus subsidiairement, que la demande de la SCI [Adresse 7] est mal fondée et infiniment subsidiairement qu'il existe des créances réciproques entre les parties et que la SCI [Adresse 7] lui doit la somme de 15.185,80 euros au titre de frais impayés et de 15.790,23 euros représentant le solde de sa dette impayée et en tout état de cause de la condamner à lui payer la somme de 4.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 1er février 2011.
CELA ETANT EXPOSE,
LA COUR,
Considérant que la SCI [Adresse 7] soutient que la banque Gallière ne conteste pas lui devoir la somme de 49.526,39 euros au titre d'un trop perçu ; que la banque a commis une erreur sur le décompte des intérêts en majorant le taux de l'intérêt légal de 5 points à l'expiration d'un délai de 2 mois à compter du 30 juin 1992 alors que la décision de condamnation est intervenue le 27 juin 1993 et est devenue définitive deux mois après la signification ;que les deux sommes réclamées par la banque Gallière ne sont pas justifiées et n'ont pas à être prises en compte ; que la société MCS avait renoncé à la somme de 15.790,23 euros au titre de frais qui ne sont pas justifiés laquelle est de plus éteinte faute d'avoir été déclarée ; que la somme de 15.185,80 euros est constituée d'intérêts qui sont contestés et qui sont l'objet du litige ; que sa demande n'est pas prescrite puisque le paiement indu a été effectué le 27 juillet 1993 en exécution d'un jugement du 29 juin 1993 et que la prescription relative à l'exécution d'un jugement est de 30 ans ; que l'action en répétition de l'indu se prescrit elle-même par 30 ans; que l'exception d'incompétence soulevée par l'intimée est tardive et comme telle irrecevable; que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour statuer sur une demande en répétition de l'indu; que l'article L.110- 4 du code de commerce ne s'applique pas puisqu'elle n'est pas une société commerciale ; que le prêt a été consenti dans le cadre de son activité et que c'est le tribunal de grande instance qui l'a condamnée en paiement ; que la prescription a été interrompue par la déclaration de créance contestée et qu'il n'y a pas d'autorité de chose jugée en l'absence de décision du juge commissaire sur cette créance ; qu'un autre état des créances déposé le 22 janvier 2007 démontre que la créance de la banque a été rejetée et que la société Finin Limited a renoncé à sa déclaration de créance par la suite ;que l'article 2277 du Code civil ne s'applique pas non plus puisqu'il ne s'agit pas pour elle d'obtenir le recouvrement des intérêts mais d'un paiement indû ;
Considérant qu'en réponse la Banque Gallière fait valoir que sa créance déclarée le 26 mars 1999 a été admise le 11 janvier 2000 par le juge commissaire pour 15.790,23 euros et que cette décision d'admission lui a été notifiée le 26 janvier 2000 ; que l'action de la SCI [Adresse 7] est prescrite en application de l'article L.110 - 4 du Code de commerce et que cette prescription s'applique à l'action en répétition de l'indu entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants ; que le paiement indu est intervenu le 27 juillet 1993 et que la société [Adresse 7] l'a mise en demeure le 6 novembre 2006 et l'a assignée le 9 mai 2007 au-delà du délai de 10 ans ; qu'il ne peut lui être opposé la prescription trentenaire attachée à l'exécution d'un jugement pour une action en répétition de l'indu ; que le paiement d'intérêts se prescrit par 5 ans en application de l'article 2277 du code civil même s'il s'agit d'un remboursement ; que seul le juge de l'exécution est compétent pour statuer sur les difficultés inhérentes à l'exécution d'un jugement ; qu'elle a été assignée devant le tribunal de commerce de Paris ce qui démontre le caractère commercial de l'action ; que la prescription ne peut avoir été interrompue par la déclaration de créance dont se prévaut la société [Adresse 7] ; que subsidiairement l'action de la SCI [Adresse 7] se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'admission de sa créance et qu'une décision d'admission définitive non contestée dans les délais ne peut plus être remise en cause sur le fondement de la répétition de l'indu ; que le 26 janvier 2000 sa créance a été admise par la ratification de l'état des créances par le juge commissaire ; que l'état des créances du 22 janvier 2007 dont se prévaut la partie appelante émane de Maître [V] et n'est pas ratifié par le juge commissaire et ne rejette pas la créance mais prend acte de l'abandon de la créance par la société Finin Limited ; qu'en tout état de cause la demande de la SCI [Adresse 7] est mal fondée puisque le paiement a une cause et n'a pas été effectué par erreur ayant été fait en exécution d'une décision de justice;
Considérant que la Banque Gallière soulève pour la première fois en cause d'appel la compétence exclusive du juge de l'exécution pour connaître du litige ; que cette exception d'incompétence qui doit être soulevée avant toute défense au fond est irrecevable ;
Considérant qu'elle soulève en second lieu une fin de non recevoir tirée de la prescription;
Considérant qu'en application de l'article L.110 - 4 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 applicable en l'espèce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants se prescrivent pas dix ans si elle ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes ;
Considérant que la prescription commerciale est applicable dès lors qu'une des parties est commerçant et que l'acte qu'elle a passé a été fait pour les besoins de commerce ;
Considérant que la Banque Gallière remplit les conditions et que le fait que son cocontractant soit une société civile est sans incidence sur l'application de l'article L.110 - 4 susvisé ;
Considérant que l'obligation de rembourser résultant du paiement de l'indû quelqu'en soit la cause entre un commerçant et un non commerçant est soumise à la prescription décennale et non à la prescription trentenaire comme le soutient à tort la SCI [Adresse 7] ;
Considérant qu'il est constant que la SCI [Adresse 7] a payé à la Banque Gallière une somme de 509.357,64 francs après la mise en demeure qui lui a été adressée le 16 décembre 1992 et qu'elle lui a payé une somme de 7.437.915,63 francs en principal, intérêts et accessoires le 27 juillet 1993 en exécution du jugement du 29 juin 1993 la condamnant au paiement de la somme de 6.908.880,07 francs avec intérêts au taux légal à compter du 30 juin 1992 au titre du prêt consenti par acte du 26 octobre 1990 ;
Considérant que le point de départ de la prescription décennale est la date où le paiement est devenu indû, soit le 27 juillet 1993 dans les circonstances de l'espèce ;
Considérant que la SCI [Adresse 7] se prévaut d'une interruption de la prescription sur le fondement de l'article 2244 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 applicable en l'espèce ;
Considérant qu'elle excipe de la déclaration de créance de la Banque Gallière du 26 mars 1999 au passif du redressement judiciaire de la SCI [Adresse 7] ;
Considérant que s'il est exact qu'une déclaration de créance au passif vaut demande en justice et est de nature à constituer un acte interruptif de prescription, il est nécessaire qu'elle concerne la créance indue ;
Considérant que la déclaration de créance en cause de la CTP pour le compte de la société Finin Limited en date du 26 mars 1999 porte sur la somme de 103.577,11 francs, soit 15.790,23 euros, représentant le solde restant dû de sa créance au titre du prêt du 26 octobre 1990 en vertu du jugement du tribunal de commerce de Nice du 29 juin 1993 ;
Considérant que cette déclaration de créance ne porte pas sur la somme de 7.437.915,63 francs été payée par la société [Adresse 7] le 27 juillet 1993 laquelle n'est pas incluse dans le passif déclaré et vérifié, mais porte sur un solde d'intérêts impayés qui a été contesté par le mandataire liquidateur et a fait l'objet d'une admission au passif puisqu'elle figure sur un état des créances ratifié par le juge commissaire ; que cette déclaration de créance n'a pas pu avoir d'effet interruptif puisqu'elle ne porte pas sur la créance d'indû réclamée par le mandataire liquidateur ;
Considérant qu'en l'absence d'acte interruptif de prescription, l'action de la SCI [Adresse 7] intentée plus 13 ans après le paiement indû du 27 juillet 1993 par une assignation du 14 mai 2007 est prescrite ;
Considérant que la Banque Gallière est fondée en sa fin de non recevoir et le jugement déféré qui a déclaré l'action de la SCI [Adresse 7] irrecevable comme étant prescrite en application de l'article L.110 - 4 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 sera confirmé en toutes ses dispositions;
Considérant que l'équité commande de faire application en application de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'il convient de condamner la SCI [Adresse 7] à payer à la Banque Gallière la somme de 2.000,00 euros au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel ;
Considérant que la SCI [Adresse 7] qui succombe supportera ses frais irrépétibles et les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Déclare la Banque Gallière irrecevable en son exception d'incompétence,
Confirme le jugement du tribunal de commerce du 18 septembre 2008,
Y ajoutant,
Condamne la SCI [Adresse 7], prise en la personne de son liquidateur Monsieur [Z] [D], à payer à la SA Banque Gallière, prise en la personne de son liquidateur Monsieur [R] [S], la somme de 2000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne la SCI [Adresse 7], prise en la personne de son liquidateur Monsieur [Z] [D] aux dépens d'appel avec distraction au profit de l'avoué concerné dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ