RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 19 Mai 2011
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/08857 JD
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Juillet 2009 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS - PARIS RG n° 08-02909
APPELANTE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE ET MARNE (C.P.A.M. 77)
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 5]
représentée par Mme [B] [I], en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMÉE
Madame [M] [W]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Carole SIRAT, avocate au barreau de PARIS, P0176
Monsieur le Directeur Mission nationale de contrôle et d'audit des organismes de sécurité sociale (anciennement DRASSIF)
Service juridique
[Adresse 3]
[Localité 4]
régulièrement avisé - non représenté
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 31 Mars 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Jeannine DEPOMMIER, Présidente
Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Conseiller
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Jeannine DEPOMMIER, Présidente et par Madame Michèle SAGUI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
[E] [W], victime d'un malaise survenu le 23 mai 2002 à son travail, est décédé le [Date décès 1] suivant. Son conjoint survivant, Madame [M] [W], a obtenu le 30 mai 2006 du tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun la reconnaissance du caractère professionnel du décès.
Par lettre du 10 janvier 2007, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de SEINE et MARNE, ci-après désignée la caisse, a notifié à Madame [M] [W] l'attribution de la rente d'ayant droit avec effet au 5 juin 2002 sur la base d'un taux de 60 %.
Suite au rejet le 18 janvier 2008 par la commission de recours amiable de sa contestation relative au calcul de la dite rente, Madame [M] [W] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, lequel, par jugement contradictoire en date du 7 juillet 2009, a accueilli favorablement sa demande, jugé que la rente d'ayant droit ne pouvait pas être calculée sur la base d'un salaire plafonné et l'a renvoyée devant la caisse pour liquidation en ordonnant l'exécution provisoire.
La caisse a régulièrement interjeté appel par lettre recommandée postée le 16 octobre 2009 de cette décision qui lui avait été notifiée le 21 septembre précédent.
À l'audience du 31 mars 2011, la caisse, par la voix de sa représentante, développe oralement ses écritures reçues à la cour le 14 janvier 2011, visant à voir infirmer le jugement du 7 juillet 2009. Elle précise qu'en exécution du jugement entrepris, elle a versé à l'intimée un rappel d'arrérages pour la période du 5 juin 2002 au 15 septembre 2009 d'un montant de 131'924, 38 euros, le montant trimestriel de la rente qu'elle conteste s'élevant à ce jour à 12'295,44 euros.
Elle soutient que la rente du conjoint survivant doit être calculée sur la base du salaire plafonné et ce, en application des articles L 434-16 et R 434-28 du code de la sécurité sociale, pour les raisons suivantes :
* ces deux articles sont insérés dans le titre III chapitre IV section III intitulée : «dispositions communes»,
* l'alinéa 3 de l'article L 434-16 ne doit pas être lu isolément des autres alinéas et notamment du deuxième qui renvoie aux articles L 434-7 et suivants ainsi qu'à un décret fixant les règles de plafonnement , en l'espèce l'article R 434-28.
Elle en conclut que la rente ne peut être calculée que sur la base du salaire brut annuel réduit à 44'556,86 euros, [ le double du salaire minimum (30'342,48 euros) +1/3 de l'excédent du salaire brut annuel de la victime par rapport au double du salaire minimum].
Madame [M] [W] fait plaider par son conseil les conclusions déposées le jour de l'audience tendant à la confirmation du jugement du 7 juillet 2009 et à la condamnation de la caisse à lui payer 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Elle fait valoir que l'article L 434-15 n'évoque pas de plafonnement du salaire annuel, et que le troisième alinéa de l'article L 434-16, qui prévoit le calcul de la rente sur la base d'un salaire réduit n'est applicable qu'à la victime de l'accident elle-même. Elle ajoute que l'article R. 434-28 reprend à l'identique les termes de l'article L 434-16 .
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Le désaccord des parties ne porte que sur le salaire devant servir de base au calcul de la rente du conjoint survivant.
Les articles L 434-16 et R434-29 du code de la sécurité sociale sont ainsi rédigés :
* l'article L 434-16 : ' La rente due aux ayants droit de la victime d'un accident mortel ou à la victime d'un accident ayant occasionné une réduction de capacité égale ou supérieure à un taux minimum ne peut être calculée sur un salaire annuel inférieur à un minimum déterminé d'après les coefficients de revalorisation fixés pour les pensions d'invalidité par les arrêtés pris en application de l'article L. 341-6 compte tenu des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 434-2.
Dans tous les cas où l'article L. 434-2 et les articles L. 434-7 et suivants déterminent en fonction du salaire annuel une rente individuelle ou collective, ou la limite assignée à l'ensemble des rentes dues aux ayants droit de la victime, le salaire annuel est le salaire réduit, le cas échéant, par application de l'alinéa suivant.
Lorsqu'il s'agit de la victime de l'accident, quelle que soit la réduction de capacité subie, si son salaire annuel est supérieur au salaire minimum déterminé à l'alinéa précédent, le calcul de la rente est effectué selon une formule dégressive dont les modalités sont déterminées par un décret en Conseil d'Etat.'
* l'article R434-29 :
'Le salaire annuel sur lequel est calculée la rente prévue au troisième alinéa de l'article L. 434-16, s'il est supérieur au salaire minimum prévu au premier alinéa dudit article, et lorsqu'il s'agit de la victime de l'accident, quelle que soit la réduction de capacité subie, n'entre intégralement en compte pour le calcul de la rente que s'il ne dépasse pas le double de ce salaire minimum. S'il le dépasse, l'excédent n'est compté que pour un tiers. Toutefois, il n'est pas tenu compte de la fraction excédant huit fois le montant du salaire minimum.'
La rente du conjoint survivant -ainsi que le complément de rente lorsque celui-ci est âgé de 55 ans comme au cas présent- est prévue par l'article L 434-8 du code de la sécurité sociale ; elle est donc expressément visée par le deuxième alinéa de l'article L 434-16 qui impose un calcul sur la base du salaire réduit.
La première partie de l'expression employée dans ce deuxième alinéa ' le cas échéant, par application de l'alinéa suivant.' doit être analysée au regard du salaire minimum à retenir comme le prévoit le premier alinéa et n'applique la réduction que dans l'hypothèse d'un salaire annuel supérieur à ce minimum.
La formule « Lorsqu'il s'agit de la victime de l'accident » au début du troisième alinéa signifie seulement que cette disposition a été prise, en premier lieu pour la victime elle-même mais n'a pas pour effet d'en interdire l'application au calcul des rentes des ayants droit prévues par les articles L 434-7 et suivants dans la mesure où le législateur par le deuxième alinéa y fait un renvoi express ; par voie de conséquence, il en est de même de l'article R 434-29 pris en application de ce troisième alinéa de l'article L 434-16, l'expression «et lorsqu'il s'agit de la victime de l'accident, quelle que soit la réduction de capacité subie» utilisée démontre bien que ce texte ne s'applique pas qu'à la seule victime mais également en cas de décès aux ayants droit.
L' argument de l'intimée tiré de ce que l'article L 434-15 n'évoque pas le plafonnement du salaire annuel n'est pas pertinent ; en effet d'une part il vise aussi la rente due à la victime atteinte d'une incapacité permanente dont Madame [W] reconnaît qu'elle est calculée sur la base d'un salaire réduit et d'autre part il fait état d'un calcul «d'après le salaire annuel de la victime» ce qui n'exclut pas que ce salaire soit réduit.
Il en est de même de celui pris de la possibilité de cumul d'une rente et d'un salaire puisque celle-ci existe tant pour la victime survivante que pour l'ayant droit de la victime décédée.
C'est en conséquence à tort que les premiers juges ont dit que la rente d'ayant droit de Madame [M] [W] ne pouvait pas être calculée sur la base d'un salaire plafonné et le jugement entrepris doit être infirmé.
Madame [M] [W] , qui succombe en ses prétentions, ne peut pas voir prospérer sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Déclare la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de SEINE et MARNE recevable et bien fondée en son appel ;
Infirme le jugement rendu le 7 juillet 2009 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris ;
Déboute Madame [M] [W] de l'ensemble de ses prétentions.
Le Greffier, Le Président,