Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRET DU 20 SEPTEMBRE 2011
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10689
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Mars 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2008040590
APPELANT
Monsieur [M] [C]
demeurant [Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par la SCP LAGOURGUE ET OLIVIER, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me Sybille ADE, du barreau de PARIS, B491
INTIMÉES
SOCIÉTÉ GE CAPITAL EQUIPEMENT FINANCE
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU et PELIT JUMEL, avoués à la Cour
assistée de Me François LIREUX, avocat au barreau de PARIS, C495
SOCIÉTÉ MERCEDES-BENZ FRANCE exercant sous l'enseigne TRUCKSTORE prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assistée de Me Hubert DELVAZ, avocat au barreau de PARIS, P151
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 juin 2011, en audience publique, devant Madame MORACCHINI, Conseillère, et Madame DELBES, Conseillère, chargées d'instruire l'affaire,
Un rapport a été présenté à l'audience conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile.
Ces magistrats ont rendu compte dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Nicole MAESTRACCI, Présidente
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Conseillère
Madame Evelyne DELBES, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claude HOUDIN
ARRÊT :
- contradictoire
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne DELBES, conseillère, par suite de l'empêchement de la présidente, et par Madame HOUDIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 24 novembre 2005, M. [M] [C] a acquis, auprès de la société Mercedes Benz France, exerçant sous le nom commercial Truckstore, trois véhicules d'occasion Mercedes, type fourgon (Vito 108 CDI et Sprinter 416). Pour financer cette acquisition, il a souscrit, auprès de la société GE Capital Equipement Finance, un prêt n° 902 720 901.
Les 25 avril, 11 mai et 16 juin 2006, M. [C] a choisi, chez le même fournisseur, sept véhicules d'occasion et a conclu, pour financer cette nouvelle acquisition, six contrats de crédit-bail avec la société GE Capital Equipement Finance (n° 988 695, A 16 034 901, A 01 513 9091, A 20 556 901, A 20 551 901, A 20 548 901).
Prêt et contrats de crédit-bail ont été aussitôt mis en place et le prélèvement des échéances et des loyers a débuté.
Le 13 septembre 2007, M. [C] a demandé à sa banque de suspendre tout prélèvement sur son compte, au motif qu'il n'avait pas reçu livraison de tous les véhicules concernés par les opérations de crédit.
Le 20 décembre 2007, la société GE Capital Equipement Finance a mis M. [C] en demeure de régler les loyers impayés. Le 18 février 2008, elle l'a assigné en référé pour voir constater la résiliation des six contrats de crédit-bail et obtenir la restitution des véhicules et le paiement d'indemnités de résiliation. M. [C] a attrait la société Mercedes Benz France dans cette procédure.
Par ordonnance du 30 mai 2008, le juge des référés a dit n'y avoir lieu à référé en raison de l'existence de contestations sérieuses et, vu l'urgence, a renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du le 31 mars 2009, celui-ci a condamné M. [C] à payer à la société GE Capital Equipement Finance la somme de 98 985,08 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 février 2008, à restituer à la même le matériel loué dans les huit jours de la signification du jugement et sous astreinte de 80 euros par jour de retard et par matériel pendant un délai de 30 jours, et à payer à la société GE Capital Equipement Finance et à la Mercedes Benz France-Truckstore la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 7 mai 2009, M. [C] a interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance du 22 février 2011, le magistrat chargé de la mise en état a invité Monsieur le Préfet de Police de [Localité 4] et la société Mercedes Benz France à communiquer à M. [C] copie des demandes d'immatriculation et des cartes grises concernant les véhicules suivants :
- Mercedes Sprinter, n° de chassis WDB903662 1R 476060,
- Mitsubishi Canter, n° de chassis TYB FB83BB 4D T00511,
- Mercedes Vito, n° de chassis 639601 13 0117004,
- Mercedes Sprinter, n° de chassis WDB 902662 1R 427555.
Dans ses dernières écritures signifiées le 7 juin 2011, M. [C] demande à la cour de déclarer son appel recevable, de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale par lui introduite à l'encontre de la société Mercedes Benz-Truckstore pour abus de confiance, d'infirmer le jugement entrepris, de dire nul et de nul effet les contrats de crédit-bail, de condamner solidairement la société GE Capital Equipement Finance et la société Mercedes Benz France à lui rembourser les sommes indûment perçues, de débouter la société GE Capital Equipement Finance de toutes ses demandes, de condamner la société Mercedes Benz France-Truckstore à le relever et garantir de toutes condamnations éventuelles, de débouter ladite société de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice qu'elle lui a causé et la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 1er juin 2011, la société GE Capital Equipement Finance demande à la cour de débouter M. [C] de toutes ses demandes, de confirmer le jugement déféré, y ajoutant, d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 18 février 2008, et de condamner M. [C] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions signifiées le 21 janvier 2011, la société Mercedes Benz France- Truckstore demande à la Cour de confirmer le jugement dont appel, de débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes et de condamner la partie succombante à lui payer la somme de 3 500 euros en remboursement de ses frais non taxables.
SUR CE
Considérant que M. [C], qui se borne à produire copie de la plainte avec constitution de partie civile qu'il a déposée le 7 février 2011 entre les mains du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Pontoise, à l'encontre de la société Mercedes Benz France du chef d'abus de confiance, sans justifier du dépôt de la moindre consignation ou d'une quelconque dispense à ce titre, n'établit pas la mise en oeuvre d'une instance pénale ; qu'il doit être débouté de sa demande de sursis à statuer ;
Considérant que l'appelant conteste la livraison de quatre des véhicules de sa seconde commande, laquelle a donné lieu à la conclusion des six contrats de crédit-bail souscrits auprès de la société Ge Capital Equipement Finance ; qu'il argue de la nullité de ces contrats en ce qu'ils comportent une clause de renonciation du locataire à tout recours contre le bailleur du chef de la non livraison du matériel, qui les prive de toute cause dès lors qu'est ainsi abolie l'obligation essentielle pesant sur le bailleur en contrepartie du paiement des loyers ; qu'il fait valoir qu'en toute hypothèse, cette clause, limitative et même exclusive de la responsabilité du bailleur, doit être réputée non écrite ; qu'il oppose, subsidiairement, à la société GE Capital Equipement une exception d'inexécution du chef de la non livraison des véhicules commandés ;
Considérant que l'article 1 des conditions générales des contrats de crédit-bail en cause prévoit que 'Le locataire agissant en qualité de mandataire du bailleur et tenu, à ce titre, d'une obligation de résultat, a choisi sous sa seule responsabilité le matériel, objet de la location, de la marque et du type qui lui conviennent, en fonction des qualités techniques requises, du rendement souhaité et de ses propres besoins d'utilisateur chez le fournisseur de son choix avec lequel il est convenu des délais, conditions, modalités et lieu de livraison sans aucune intervention du bailleur'; que l'article 2-2 stipule : 'Le locataire autorise le bailleur à régler le fournisseur dès présentation par le fournisseur de la facture et d'un avis de réception signé par le fournisseur attestant de la bonne réception du matériel par le locataire et l'absence de toute contestation pour non conformité' ; que l'article 2-1 précise que 'Le matériel est livré aux frais et risques et sous la responsabilité du locataire. En qualité de mandataire du bailleur, le locataire s'oblige, à ses frais, à prendre livraison du matériel, objet de la location (...)' ; que l'article 6 stipule : 'En raison de la nature financière du contrat, le locataire, qui a choisi sous sa seule responsabilité le fournisseur et le matériel, décharge le bailleur de toute obligation d'entretien et de garantie du matériel. En conséquence, le locataire renonce à tout recours contre le bailleur, quelle qu'en soit la nature, pour quelque motif que ce soit, notamment pour inexécution de l'obligation de livraison... Le locataire s'interdit expressément d'invoquer l'exception d'inexécution pour différer le paiement de ses loyers, s'abstenir de les acquitter, en réduire le montant, ou opérer toute compensation' ;
Considérant que la renonciation expresse à un droit est juridiquement efficiente en l'absence de fraude et d'abus, en l'espèce, non établis ; que la clause contestée par M. [C], parfaitement conforme à la cohérence et à l'économie du contrat, n'abolit en rien l'obligation du crédit-bailleur, qui consiste dans le paiement de la facture du fournisseur et la mise en place du contrat de location, sur justification de la livraison du matériel concerné ;
Considérant que doivent, dès lors, être rejetées les demandes de M. [C] tendant à voir dire nuls, pour absence de cause, les contrats de crédit-bail et réputée non écrite la clause de renonciation du locataire à tout recours contre le bailleur du chef de la non livraison du matériel loué ;
Considérant que l'appelant ne conteste pas avoir reçu livraison des trois véhicules suivants : Sprinter 311 CDI n° de chassis WDB 903663 1R 708417 et WDB 903663 1R 707209, objets du contrat de crédit-bail n° 988 695 901 du 25 avril 2006, Sprinter 308 CDI n° de chassis WDB 903663 1R 625513, objet du contrat de crédit-bail n° A 16 034 901 du 16 juin 2006 ;
Considérant que s'il prétend que les quatre autres véhicules (Mercedes Sprinter, n° de chassis WDB 903662 1R 476060, Mitsubishi Canter, n° de chassis TYB FB83BB 4D T00511, Mercedes Vito, n° de chassis WDB 639601 13 0117004, Mercedes Sprinter, n° de chassis WDB 902662 1R 427555) ne lui ont pas été livrés, il ne le démontre pas ; qu'il a signé les avis de livraison-réception de chacun d'eux et ne conteste pas sa signature ; que le fait que ces avis aient été signés concomitamment à la signature de la commande des véhicules concernés est sans portée, la prise de possession de véhicules d'occasion pouvant être immédiate chez le vendeur ; que le fait qu'il n'ait pas été procédé aux formalités d'immatriculation et d'assurance des véhicules en litige, démarches dépendant de la seule diligence de M. [C], ne saurait constituer, non plus, la preuve de la non livraison invoquée ; que la cour observe enfin que l'appelant a réglé les loyers des contrats de crédit-bail portant sur ces quatre véhicules durant un an et demi avant d'arguer de leur non livraison ;
Considérant que M. [C], qui n'établit le défaut de livraison d'aucun des véhicules objet des six contrats de crédit-bail en litige, ne peut échapper à l'exécution de ceux-ci ;
Considérant que le locataire ayant cessé de payer les loyers à compter du mois de septembre 2007, il y a lieu de constater la résiliation des contrats de crédit-bail, en application de leur article 10-1 ; que M. [C] doit restituer les véhicules, en application de l'article 10-2, et payer à la société GE Capital Equipement Finance la somme totale de 98 985,08 euros, correspondant au montant des loyers impayés, des indemnités de résiliation et pénalités contractuelles prévues par l'article 11 des contrats ; que les intérêts au taux légal courront à compter du 18 février 2008 ; que leur capitalisation, prévue à l'article 4-4 des contrats, s'opérera à compter de la même date ;
Considérant que l'appel en garantie formé par M. [C] à l'encontre de la société Mercedes Benz France n'est pas fondé en l'absence de preuve de la non livraison des véhicules ;
Considérant qu'il y a lieu, dès lors, de débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes et de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Considérant que l'équité commande de condamner l'appelant à payer à chacune des intimées la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Dit que les intérêts au taux légal se capitaliseront dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter du 18 février 2008,
Condamne M. [C] à payer à la société GE Capital Equipement, d'une part, à la société Mercedes Benz France, exerçant sous l'enseigne Truckstore, d'autre part, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. [C] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA CONSEILLÈRE
M.C HOUDIN E. DELBES