Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 6
ARRET DU 14 OCTOBRE 2011
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/19841
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Août 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 98
APPELANTES
SNC [Adresse 13] représentée par M. [T] [B] ès qualités de liquidateur amiable
ayant son siège social [Adresse 12]
Société SOGERIM
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 2]
représentées par la SCP MENARD SCELLE MILLET, avoués à la Cour
assistées de Maître COPEDE, avocat au barreau de Lyon (C201)
INTIMES
Société ACTE IARD
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 5]
représentée par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour
assistée de Maître Gérald LAGIER pour la SELARL ALERION, avocat au barreau de Paris (K126)
Maître [G] [M] de la SCP [M] THIERRY ès qualités de liquidateur de la société ICS ASSURANCE SA
demeurant [Adresse 8]
M. [Y] [L] ès qualités de liquidateur de la société ICS ASSURANCE SA
demeurant [Adresse 3]
représentés par Me Chantal-rodene BODIN-CASALIS, avoué à la Cour
assistés de Maître Olivier GRANDGIRARD plaidant pour la SCP RAFFIN, avocat
REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE PARIS (RIVP)
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 10]
représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assistée de Maître Florence FAUCHON, avocat au barreau de Paris (A790)
SMABTP
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 4]
représentée par Me Jean-yves CARETO, avoué à la Cour
assistée de Maître Georges MORER, avocat (K143)
Maître [Y] [C] ès qualités de mandataire liquidateur de la société EGT DTP
demeurant [Adresse 1]
assigné à personne le 9 septembre 2009, n'ayant pas constitué avoué suite à la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif le 4 décembre 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
Rapport ayant été fait conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile,
L'affaire a été débattue le 16 Septembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Louis MAZIERES, Président
Monsieur Paul André RICHARD, Conseiller
Monsieur Claude TERREAUX, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Camille RENOUX
ARRET :
-réputé contradictoire
-rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Monsieur Jean-Louis MAZIERES, président et par Mademoiselle Camille RENOUX, greffier.
****
La SNC SI du [Adresse 13] a entrepris à cette adresse la réalisation d'un immeuble collectif à usage d'habitation destiné à être vendu en l'état futur d'achèvement.
La société SOGERIM, gérante de la SNC [Adresse 13], a assumé en outre une mission de maîtrise d'oeuvre d'exécution sur le chantier.
Ont notamment participé à cette opération de construction :
la société EGT DTP chargée du lot terrassement et voile en sous-sol
la société DEMOUTY chargée du lot gros oeuvre
le bureau d'études OGIF chargé d'une partie des études techniques et intervenant au côté de la SOGERIM pour une assistance à la maîtrise d'oeuvre de conception de certains lots techniques
le BUREAU VERITAS en qualité de contrôleur technique.
La SNC SI du [Adresse 13] a souscrit auprès de la compagnie ACTE IARD une police dommages-ouvrage et CNR.
La société SOGERIM a souscrit auprès de la compagnie ACTE IARD :
une police dite 'Prolibat' garantissant la responsabilité des professions libérales du BTP
une police de responsabilité des professions commerciales du bâtiment à effet au 3 août 1992.
Elle a également souscrit auprès de la compagnie SPRINKS ASSURANCE devenue ICS ASSURANCE :
une police de responsabilité civile professionelle
une police garantissant lea responsabilité des maîtres d'ouvrage, du promoteur et des professions assimilées.
La compagnie ICS ASSURANCE a fait l'objet d'un retrait d'agrément par décision de la Commission du Contrôle des Assurances du 16 juillet 1999 et désigné en qualité de mandataire liquidateur Me [U] remplacé par Me [M], par jugement du 20 novembre 2002.
La société EGT DTP avait souscrit auprès de la SMABTP une police garantissant sa responsabilité civile.
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 6], se plaignant en cours de chantier de l'apparition de fissures, obtenait la désignation d'un expert judiciaire en la personne de M. [S].
Le 25 mai 1992, le mur séparant les propriétés du [Adresse 6] et du [Adresse 13] s'est effondré, emportant une partie du mur séparant cette fois, le chantier litigieux d'un pavillon situé [Adresse 11] et appartenant à la RIVP.
Les opérations d'expertise de M. [S] ont été rendues communes à la RIVP par ordonnance de référé en date du 9 avril 1993.
Suite au pré-rapport déposé le 6 juin 1994 ayant évalué à 529288 franc HT les travaux de reprise des désordres subis par la RIVP, celle-ci a assigné en référé la société SOGERIM, la SNC du [Adresse 13] et la compagnie ACTE IARD. Cette dernière a été condamnée à payer cette somme à la RIVP à titre de provision.
L'expert judiciaire a déposé son rapport définitif le 13 juin 1997 en reprenant, outre le montant des travaux retenus dans son pré-rapport, des travaux complémentaires.
Une ordonnance de référé du 8 avril 1998 a débouté la RIVP d'une nouvelle demande de provision.
Par actes des 16 et 22 septembre 1998, la RIVP a fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Paris la SNC, la SOGERIM, ACTE IARD, SPRINKS, Me [U] et la société ALBINGIA aux fins d'indemnisation de ses préjudices.
La société ICS ASSURANCE a appelé en garantie Me [C], OGIF, AZUR ASSURANCES et la SMABTP.M. [B] ès qualités de liquidateur amiable de la SNC [Adresse 13] a appelé en garantie le BUREAU VERITAS.
Le Tribunal de Grande Instance de Paris s'est prononcé le 26 août 2008, il est renvoyé à la lecture de son dispositif (pages 23 à 25 du jugement dont le RG est le 98/20756).
Vu les dernières écritures des parties,
La SNC SI du [Adresse 9] représentée par M [B] son liquidateur amiable et la SOGERIM, le 7 septembre 2011 ont conclu à la confirmation du jugement sauf en ce qui était contraire à leurs demandes. Elles demandent notamment l'infirmation de la décision :
-quant à leur condamnation au coût de reconstruction du mur de clôture [Adresse 7]
-quant à la mise hors de cause de la compagnie d'assurance ACTE IARD et de dire que cet assureur doit la garantir du sinistre ayant causé des dommages à la RIVP.
La SMABTP a conclu le 26 juillet dans les mêmes termes que la SNC et la SOGERIM.
La RIVP a conclu au débouté de l'appel de la SOGERIM, et subsidiairement en cas d'infirmation sur la question du coût de reconstruction du mur de clôture, à la condamnation de la SOGERIM au paiement de la somme de 16 241,00 €.
La société ACTE IARD a conclu le 8 août 2011 à la confirmation du jugement dont appel.
Me [M] et M. [Y] [L] ès qualités de liquidateurs de la société ICS ASSURANCE SA ont conclu à la confirmation du jugement en ce qu'il a constaté que la RIVP ne justifiait d'aucune déclaration de créance entre les mains des organes représentant la liquidation judiciaire d'ICS ASSURANCES, à sa réformation en ce qu'il a prononcé une condamnation à l'encontre de la SCP [M] THIERRY au titre de l'article 700 et des dépens, et en ce qu'il n'a pas retenu la garantie d'acte malgré son aveu judiciaire.
Me [Y] [C] liquidateur judiciaire de la société EGT DTP n'a pas constitué avoué bien que régulièrement assigné.
L'ordonnance de clôture est du 15 septembre 2011.
SUR CE :
Considérant que le 15 septembre 2011, jour de la clôture, la RIVP a conclu en ajoutant à ses demandes fondées sur le trouble de voisinage le visa de l'article 1382 du Code Civil, ajoutant ainsi un fondement nouveau qui n'a pas pu être discuté par ses adversaires, que ce fondement sera tout simplement écarté des débats et l'affaire jugée sans qu'il soit nécessaire de procéder à son renvoi, le fondement du trouble de voisinage, visé par la RIVP depuis le début du litige, retenu à juste titre par le tribunal - et la Cour dans ses arrêts antérieurs concernant le même chantier - à l'encontre du maître d'oeuvre d'exécution, étant bien suffisamment contraignant pour la SOGERIM.
Considérant que la Cour est saisie au terme des écritures explicites des parties de deux questions :
-celle de la garantie d'ACTE IARD au profit de la SNC et de SOGERIM
-celle du préjudice de la RIVP au titre de la destruction du mur séparatif [Adresse 7].
Considérant que la Cour adopte l'exposé des faits et des moyens des parties des premiers juges ainsi que leurs motifs non contraires au présent arrêt, que s'agissant des points litigieux devant la Cour, le tribunal a jugé concernant la garantie d'ACTE que :
- la police DO et CNR d'ACTE garantit les dommages à l'ouvrage objet du projet de construction et nullement ceux aux avoisinants résultant du trouble anormal de voisinage
- la police PROLIBAT souscrite par la SOGERIM et garantissant sa responsabilité professionnelle est limitée à l'activité de maîtrise d'oeuvre pour les seuls dommages aux ouvrages avant ou après réception et ne couvre donc pas les dommages survenus sur la propriété de la RIVP
- l'application de la police d'assurance des professions commerciales du bâtiment n'est pas requise
- 'par ailleurs aux termes des dispositions des articles 1355 et 1356 du Code civil, d'une part la déclaration faite par une partie ne peut être retenue contre elle à titre d'aveu judiciaire que si elle porte sur un fait et non sur un point de droit, d'autre part la déclaration faite dans une autre instance n'a pas le caractère d'un aveu judiciaire et n'en produit pas les effets. En l'espèce les déclarations qui auraient été faites dans le cadre d'une procédure orale s'agissant d'une précédente instance en référé, par le conseil de la Cie ACTE, ne sauraient valoir dans le cadre de la présente instance comme aveu judiciaire à l'encontre de cette partie et il ne peut donc en être déduit que la garantie des dommages dont il est demande l'indemnisation dans le cadre du présent litige serait acquise à son assuré de ce seul fait. Force est donc de constater qu'aucune des garanties souscrites auprès de la société ACTE IARD n'a vocation à s'appliquer dans le cadre du présent litige'
Considérant que la police de responsabilité des professions commerciales du bâtiment n'est pas invoquée dans le présent litige.
Considérant que l'analyse de la police dommages-ouvrage ou de son volet CNR qui conformément à son objet garantit les dommages à l'ouvrage objet du projet de construction, ne peut que conduire à la confirmation de la décision du Tribunal.
Considérant que seule peut donc éventuellement être concernée la police PROLIBAT garantissant la responsabilité des professions libérales du BTP laquelle toutefois comme jugé par le Tribunal comporte une clause 6.2 selon laquelle la police ne garantit que les seuls dommages aux ouvrages - objet de construction - avant et après réception à l'exclusion des dommages causés aux tiers et des dommages immatériels.
Considérant que ces limites aux polices s'expliquent par le fait que les dommages causés aux tiers étaient couverts au titre du chantier litigieux par la police souscrite par la SOGERIM auprès de la SPRINKS.
Considérant que contrairement à ce qu'il a été soutenu la RIVP est bien un tiers dès lors qu'elle n'est ni l'assurée, ni un associé ou un préposé de l'assuré.
Considérant que la RIVP et la SOGERIM ainsi que la SMABTP et les liquidateurs de ICS concluent qu'il importe peu que les polices ne s'appliquent pas au litige dès lors qu'il aurait été judiciairement constaté qu'ACTE IARD ne contestait pas sa garantie, que l'aveu judiciaire résulte d'une ordonnance de référé du 3 octobre 1994 rendue entre la RIVP et SOGERIM-SNC et ACTE, laquelle constate dans ses motifs que 'la Cie ACTE IARD déclare ne pas contester sa garantie' et 'la Cie ACTE IARD qui n'invoque à l'encontre de son assurée aucune exclusion ni limite de garantie devra garantir son assurée la SNC SI des condamnations prononcées contre elle'.
Considérant que les premiers juges ont exactement répondu sur ce point dans les motifs de leur décision que l'aveu invoqué ne portait pas sur un fait mais sur un point de droit, qu'il était intervenu au cours d'une autre instance - et devenait de ce fait extra-judiciaire dans le cadre de la présente instance au fond - , qu'il avait été invoqué à l'occasion d'une procédure orale et non de la procédure écrite actuelle, qu'il sera ajouté qu'il est constant que l'assureur n'a, à l'occasion d'aucune procédure, ni en référé ni au fond, déposé des écritures reconnaissant que sa garantie était acquise pour les sommes réclamées et qu' un tel aveu ne résulte d'aucune annotation au registre d'audience d'une juridiction, qu'il ne peut être déduit des seuls motifs d'une ordonnance du juge des référés.
Considérant qu'ACTE IARD qui a versé la somme de 80.689,44 euros en exécution de l'ordonnance du 3 octobre 1994 est fondée à en réclamer la restitution, le jugement étant encore confirmé sur ce point.
Considérant que le partage de responsabilité entre les intervenants a déjà été jugé définitivement par des arrêts précédents de cette Cour antérieurs au jugement entrepris qui en a repris les termes, qu'il a de même été jugé par la Cour que la SMABTP devait sa garantie à la société EGT DTP, que celle de la compagnie AZUR qui n'est pas dans la présente instance n'était pas due à OGIF, qu'en l'état, le jugement qui a pris en compte ces décisions, sera confirmé.
Considérant que les liquidateurs de ICS ASSURANCES demandent à raison la réformation du jugement en ce qu'il les a condamné au paiement d'un article 700 au profit de la RIVP, que par contre la condamnation au dépens, ès qualités, est justifiée par la fixation de créance prononcée au profit de la SNC et de SOGERIM, que la demande de garantie d'ACTE IARD est rejetée pour les motifs plus haut.
Considérant que s'agissant de la question de la reconstruction du mur séparatif [Adresse 7], que le Tribunal a condamné in solidum la SNC SI du 131, la SOGERIM et la SMABTP assureur de EGT DTP à payer à la RIVP, sur la somme totale de 91.352,72 telle que détaillée au dispositif du jugement une somme de 7.226,71 euros HT (8.719,81 euros TTC) au titre de 'la reconstruction du mur de clôture entre le 133 et le [Adresse 13], que cette condamnation est contestée par la SNC et la SOGERIM ainsi que par la SMABPT et les liquidateurs d'ICS, au motif que la RIVP ne reconstruira jamais le mur car la parcelle sur lequel il était construit a été vendue et qu'un bâtiment a été édifié à sa place, qu'il n'existe donc aucun préjudice lié à la destruction du mur, qu'en outre la RIVP ayant revendu la dite parcelle à la SOGERIM n'est plus propriétaire et n'a plus intérêt à agir.'
Considérant que c'est à l'occasion de cette question en litige que la SOGERIM soutient à tort qu'elle ne saurait être condamnée au titre de la théorie du trouble de voisinage, que tout intervenant à l'acte de construire, entreprise titulaire de lots, sous-traitants ou maître d'oeuvre d'exécution comme dans le cas d'espèce pour la société SOGERIM, peut se voir appliquer, dès lors que l'imputabilité est établie, la présomption de responsabilité qui frappe les voisins, même occasionnels, du chantier à l'origine des désordres de voisinage.
Considérant que la RIVP conclut au rejet de l'appel et à titre subsidiaire, reprenant une demande formulée en première instance et rejetée par le Tribunal, fait valoir qu'elle a fait exécuter des travaux pour un coût supérieur à l'évaluation de l'expert.
Considérant que le préjudice d'une partie s'évalue au moment où la juridiction statue, que l'évolution du litige a fait qu'aucun préjudice ne résulte plus pour la RIVP, compte tenu de ses conventions avec la SOGERIM, de la destruction du mur séparatif [Adresse 7], ce mur ne devant pas être reconstruit, que le jugement ne peut donc qu'être infirmé comme demandé par la SNC SI et la SOGERIM, que la demande subsidiaire de la RIVP ne peut qu'être rejetée dans la mesure où le seul préjudice vérifié et admis par l'expert était le coût de reconstruction du mur effondré, que d'autre part la preuve n'est pas rapportée que le préjudice maintenant invoqué par la RIVP ait été en relation causale directe avec les seuls agissements de la SNC et de la SOGERIM et ne résulte pas des propres erreurs de la RIVP commises dans ses relations commerciales avec la SOGERIM, que la demande subsidiaire de la RIVP sera rejetée.
Considérant qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Considérant que les dépens d'appel seront supportés par la SA SOGERIM et la SMAPTB qui succombent dans leur appel.
PAR CES MOTIFS :
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions SAUF :
La condamnation de la SNC SI du [Adresse 13], de la société SOGERIM et de la SMABT au paiement à la RIVP de la somme de 7.226,71 euros HT au titre de la reconstruction du mur de clôture entre le 133 et le [Adresse 13]
La condamnation de la Cie ICS ASSURANCES prise en la personne de son mandataire liquidateur la SCP [M] THIERRY à payer à la RIVP la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
En conséquence,
REFORMANT et AJOUTANT,
DIT n'y avoir lieu aux condamnations susvisées ou à fixation de créance pour la somme de 7.226,71 euros HT au passif de ICS ASSURANCES,
REJETTE toutes autres demandes parties,
CONDAMNE in solidum la SA SOGERIM et la SMABTP aux dépens d'appel avec distraction au profit des avoués de la cause.
LE GREFFIER LE PRESIDENT