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18/10/2011 | FRANCE | N°10/10091

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 18 octobre 2011, 10/10091


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 18 OCTOBRE 2011

(no 309, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 10091

Décision déférée à la Cour :
jugement du 10 mars 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08/ 15836

APPELANTE

SARL DEJA, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
4-6 rue Pierre Demours
75017 PARIS
représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avo

ués à la Cour
assistée de Me François MICHELET de la SCP SIMON ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P 411

INTIM...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 18 OCTOBRE 2011

(no 309, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 10091

Décision déférée à la Cour :
jugement du 10 mars 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08/ 15836

APPELANTE

SARL DEJA, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
4-6 rue Pierre Demours
75017 PARIS
représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assistée de Me François MICHELET de la SCP SIMON ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P 411

INTIMEE

Madame Martine X...
...
75008 PARIS
représentée par la SCP BOMMART FORTSER FROMANTIN, avoués à la Cour
assistée de Me Louis VERMOT de la SCP CORDELIER et Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 6 septembre 2011, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre
Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller
Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :

- contradictoire
-rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******************

La Cour,

Considérant que, par acte authentique du 14 octobre 1999, la société Deja s'est portée adjudicataire d'un fonds de commerce de bar-brasserie situé 6, rue Dupuytren à Paris (6ème arrondissement) et mis en vente par le liquidateur de la société Le Carabin ; que cet acte informait l'adjudicataire d'un congé délivré le 13 octobre 1999 par la bailleresse pour le 31 août 2000 « avec refus de renouvellement pour motifs graves », à savoir la réalisation, sans accord préalable, d'un deuxième escalier situé entre le rez-de-chaussée et le sous-sol ;
Que, se prévalant d'un procès-verbal de constat dressé par un huissier de justice le 24 octobre 2000, la bailleresse a fait assigner la société Deja, qui avait Mme Martine X... pour avocat, en résolution du bail devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 13 mai 2003, l'a déboutée de ses demandes tandis qu'il condamnait la société Deja à exécuter des travaux de remise en état ; que, par arrêt du 2 février 2005, la Cour a sursis à statuer jusqu'à l'issue d'une procédure engagée par la société Le Carabin sur le fondement du congé délivré pour faute grave et non contesté dans le délai de deux ans prévu par l'article L. 145-9 du Code de commerce ;
Que, par jugement du 12 décembre 2006, le Tribunal de grande instance de Paris a dit que le congé avait produit tous ses effets et que la société Deja était occupante sans droit ni titre et prononcé son expulsion ; que, par arrêt du 6 février 2008, la Cour a confirmé le jugement et qu'en conséquence, la société Deja a restitué les locaux et transféré son siège social dans un immeuble sis 4-6, rue Pierre Demours à Paris (17ème arrondissement) ;
Que, reprochant à Mme X... de ne lui avoir pas conseillé d'introduire une action en contestation de congé avec refus de renouvellement alors qu'une telle action aurait été couronnée de succès dès lors que la mise en demeure prévue par l'article 9-1 du décret du 30 septembre 1953 ne lui avait pas été notifiée, la société Deja a fait assigner Mme X... en responsabilité professionnelle devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 10 mars 2010, l'a condamnée à lui payer la somme de 200. 000 euros en réparation de son préjudice et la somme de 3. 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens de l'instance ;

Considérant qu'appelante de ce jugement, la société Deja, qui en poursuit l'infirmation, demande que Mme X... soit condamnée à lui payer la somme de 270. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Que, limitant son recours au montant de la réparation allouée, la société Deja critique la motivation retenue par les premiers juges afin que lui soit accordée une somme égale au préjudice évalué par l'expert amiable dès lors que la chance de voir la bailleresse exercer son droit de repentir et de consentir au renouvellement du bail était faible, voire invraisemblable ; qu'à titre subsidiaire, la société Deja sollicite une mesure d'expertise ;

Considérant que Mme X..., qui forme appel incident, demande que la société Deja soit déboutée de ses réclamations ;
Que, ne contestant pas la matérialité de la faute retenue par les premiers juges, Mme X... fait valoir que la bailleresse n'avait aucunement l'intention de verser à la société Deja une indemnité d'éviction alors surtout que le droit au bail était dépourvu de valeur et que, de même, le fonds de commerce, n'avait aucune valeur réelle ;
Que l'intimée et appelante incidente fait encore valoir que la société Deja ne démontre pas qu'elle aurait gagné son procès contre la société Le Carabin qui avait de nombreux reproches à lui faire et qu'elle aurait obtenu une indemnité de 270. 000 euros et ce, alors que la bailleresse était en droit de poursuivre la résiliation du bail ; qu'elle souligne qu'en réalité, la société Deja ne justifie pas d'une perte de chance réelle et sérieuse indemnisable dès lors que, même si la société Le Carabin avait perdu son procès, la société Deja aurait conservé son fonds difficilement cessible en raison notamment de la faiblesse des résultats et des litiges l'opposant à la bailleresse ; qu'elle en déduit que la société Deja n'était, en réalité, assurée ni d'être indemnisée par la bailleresse, ni d'être rétablie dans ses droits ;

SUR CE :

Considérant qu'il est constant que Mme X... n'a pas informé la société Deja de la faculté d'introduire, dans un délai de deux ans, une action en contestation du congé qui lui a été délivré le 13 octobre 1999 alors que, si une telle procédure avait été engagée, le succès en était certain dès lors que ledit congé n'avait pas été précédé de la mise en demeure obligatoire édictée par l'article 9-1 du décret du 30 septembre 1953 aux termes duquel « le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité … 1o S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant … », si l'infraction commise par le preneur « s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après une mise en demeure du bailleur à la faire cesser » ;
Que Mme X... ne conteste pas l'omission qui lui est reprochée ;
Considérant qu'au surplus, le congé délivré le 13 octobre 1999 par la bailleresse pour le 31 août 2000 « avec refus de renouvellement pour motifs graves », à savoir la réalisation, sans accord préalable, d'un deuxième escalier situé entre le rez-de-chaussée et le sous-sol, avait d'autant moins de chances de prospérer contre la société Deja que, seule, la société Le Carabin était responsable de la réalisation de l'escalier ;
Qu'il suit de là qu'il convient d'approuver les premiers juges qui ont retenu l'existence d'une faute professionnelle imputable à Mme X... ;

Considérant que, s'agissant du préjudice, il y a d'abord lieu de relever, comme l'a fait le Tribunal, que Mme X... ne démontre pas que la société bailleresse aurait eu des chances sérieuses d'obtenir la réformation du jugement rendu le 13 mars 2003 en vertu duquel elle a été déboutée de sa demande de résiliation du bail ;
Que, sur ce point, Mme X... ne saurait être admise à développer en l'espèce une argumentation contraire à celle qu'elle soutenait dans le litige jugé le 13 mars 2003 ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 145-58 du Code de commerce, « le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en forcé de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité, à charge pour lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions, en cas de désaccord, sont fixées conformément aux dispositions réglementaires prises à cet effet » ; qu'en l'occurrence, la faute commise par Mme X... a eu pour effet de priver la société Deja, soit d'une indemnité d'éviction, soit du bénéfice du droit de repentir accordé à la bailleresse qui, en réalité, s'est trouvée en droit de reprendre possession des lieux sans avoir à verser la moindre indemnité ;
Considérant que, toutefois, dès lors qu'en cas d'action en contestation du congé, il existait un aléa, non pas sur la décision qui serait rendue par la juridiction, mais sur l'attitude qu'aurait adoptée la bailleresse après le prononcé de la décision, le préjudice subi par la société Deja ne consiste qu'en une perte de chance ;

Considérant qu'à l'appui de sa réclamation, la société Deja verse aux débats un rapport dressé le 17 juin 2008 par le cabinet Vaz da Cruz et intitulé « Estimation de la valeur actuelle d'un fonds de commerce de restaurant, à l'enseigne L'Avantseine dans le cadre d'une résiliation judiciaire du bail » ; que, même établi non contradictoirement, ce document détaillé et circonstancié, qui a été soumis à la libre discussion des parties, n'est pas utilement critiqué par Mme X... ; qu'il y a donc lieu de le regarder comme étant au nombre des éléments de preuve pertinents ;
Que, quant à la valeur marchande du fonds, le Cabinet Vaz da Cruz retient une somme comprise entre 200. 000 euros et 250. 000 euros correspondant à 109 % du chiffre d'affaires moyen des trois derniers exercices et une somme de 44. 700 euros au tire des préjudices accessoires, pour aboutir aux sommes de 225. 000 euros + 44. 700 euros, soit 269. 700 euros, arrondie à 270. 000 euros ; que, compte tenu de cet avis ainsi que du montant du loyer qui s'élevait en 2008 à la somme de 22. 800 euros, hors taxe, par an, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée, il convient d'arrêter la réparation de la perte de chance subie par la société Deja à la somme de 200. 000 euros ;
Que, par voie de conséquence, le jugement querellé sera confirmé ;

Considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ni en faveur de la société Deja, ni en faveur de Mme X... ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme, en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 mars 2010 par le Tribunal de grande instance de Paris au profit de la société Deja ;

Déboute la société Deja et Mme Martine X..., chacune de sa demande d'indemnité fondée sur article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Mme X... aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la S. C. P. Monin et d'Auriac de Brons, avoué de la société Deja, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/10091
Date de la décision : 18/10/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-10-18;10.10091 ?
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