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20/10/2011 | FRANCE | N°09/05441

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 20 octobre 2011, 09/05441


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 20 OCTOBRE 2011



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/05441



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Février 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2005037525





APPELANTE



SA VIA LOCATION

ayant son siège : [Adresse 3]



représentée par Me Rémi PAMART, avou

é à la Cour

assistée de Me Emmanuel FLEURY, avocat au barreau de PARIS, toque : R169





INTIMEES



XL INSURANCE COMPANY LTD

ayant son siège : [Adresse 13])



représentée par la SCP MONIN ET D...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 20 OCTOBRE 2011

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/05441

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Février 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2005037525

APPELANTE

SA VIA LOCATION

ayant son siège : [Adresse 3]

représentée par Me Rémi PAMART, avoué à la Cour

assistée de Me Emmanuel FLEURY, avocat au barreau de PARIS, toque : R169

INTIMEES

XL INSURANCE COMPANY LTD

ayant son siège : [Adresse 13])

représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier DECOUR de la AARPI GODIN CITRON & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259

CHARTIS EUROPE anciennement dénommée AIG EUROPE SA

ayant son siège : [Adresse 11]

représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier DECOUR de la AARPI GODIN CITRON & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259,

XL LONDON MARKET LTD anciennement dénommée XL BROCKBANK

ayant son siège : [Adresse 13])

représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier DECOUR de la AARPI GODIN CITRON & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259

HDI HANNOVER INTERNACIONAL ESPANA

ayant son siège : [Adresse 6])

représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier DECOUR de la AARPI GODIN CITRON & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259

BANCO VITALICIO DE ESPANA

ayant son siège : [Adresse 8])

représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier DECOUR de la AARPI GODIN CITRON & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259,

Société SECURITAS

ayant son siège : [Adresse 2]

représentée par la SCP ROBLIN CHAIX de LAVARENNE, avoués à la Cour

assistée de Me Didier QUINCHON, avocat au barreau de PARIS, toque : P 202, plaidant pour la SCP Didier QUINCHON & ASSOCIES,

ALTADIS DISTRIBUTION FRANCE venant aux droits de la SOCIETE NATIONALE D'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DES TABACS ET ALLUMETTES (SEITA)

ayant son siège : [Adresse 1]

représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier DECOUR de la AARPI GODIN CITRON & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259,

GENERALI ASSURANCES IARD

ayant son siège : [Adresse 4]

représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU et PELIT JUMEL, avoués à la Cour

assistée de Me Henri JEANNIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P 464, plaidant pour la société d'avocats SCHEUBER JEANNIN,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente chargée d'instruire l'affaire et Madame Patricia POMONTI, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, présidente

Madame Patricia POMONTI, conseillère

Madame Irène LUC, conseillère

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, présidente et par Mademoiselle Anne BOISNARD, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La société Via Location a pour activité la location de véhicules professionnels avec ou sans chauffeur.

A partir du 31 mars 2004, elle a loué à la Société Nationale d'Exploitation Industrielle des Tabacs et Allumettes (SEITA) un véhicule spécialement affecté au transport et à la distribution quotidienne de ses marchandises , au départ de [Localité 12] à destination des détaillants de la région de [Localité 10].

A la demande de la SEITA, ce véhicule a été équipé par la société S2 d'un système de positionnement satellitaire avec détection d'ouverture des portes hors zone définie et d'un système d'autoprotection permettant le déclenchement d'une alarme et la mise en panne immédiate du véhicule ; ce système fonctionnait en mode soit automatique, soit manuel.

Un chauffeur, M.[M] a été formé par la SEITA à ce dispositif ; celui-ci a démissionné de ses fonctions en avril 2004.

Un nouveau chauffeur a été recruté et a été associé au chauffeur démissionnaire participant ainsi au transport réalisé dans la nuit du 22 au 23 avril 2003.

A leur arrivée sue le site de Via Locationvers 5H30, alors qu'ils prenaient de l'essence, les deux chauffeurs ont été agressés par trois hommes cagoulés dont l'un a brandi une arme de poing ; ils ont été ligotés et dépossédés de leur téléphone portable.

Les malfaiteurs ont pris la fuite avec le véhicule chargé de marchandises qui a été retrouvé vide quelques heures plus tard.

Les assureurs XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana aisi que la SEITA ont assigné Via Location et Securitas devant le tribunal de commerce de Paris en paiement des sommes respectives de 83 567,25€ pour les assureurs et de 30 000€ pour la SEITA.

En cours d'instance ceux-ci ont également assigné la société Generali IARD, assureur de Via Location;

Les auteurs du vol ont été interpellés et jugés ; les sociétés SEITA et Via Location ainsi que M.[M] se sont constitués parties civile.

Par jugement en date du 9 octobre 2007 confirmé en appel, le tribunal correctionnel de Reims a condamné les auteurs à des peines d'emprisonnement et au paiement de dommages intérêts aux parties civiles.

Par jugement du 2 février 2009 le tribunal de commerce de Paris a :

- rejeté les demandes de nullité

- constaté que les circonstances du vol ne sont pas constitutives d'un cas de force majeure

condamné Via Location à payer :

- aux assureurs de la SEITA la somme de 83 567,25€

- à la société Altadis venant aux droits de la SEITA la somme de 20 052,05€

- ordonné la capitalisation des intérêts

- condamné les sociétés XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana à payer la somme de 10 000€ à la société G1 au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'appel interjeté le 25 février 2009 par la société Via Location

Vu les conclusions signifiées le 21 juin 2011 par lesquelles la société Via Location demande à la cour de constater :

- la nullité de forme l'acte introductif d'instance,

- la nullité des conclusions d'appel de la société AIG Europe,

- la nullité de fond de l'acte introductif d'instance.

sur la recevabilité des demandes de constater que :

- les faits ont déjà été jugés et que la SEITA ne pouvait pas saisir le tribunal de commerce pour en connaître à nouveau et qu'il convient de faire application du principe de l'estoppel,

que la Seita n'a pas fait diligence pour exécuter la décision rendue par la juridiction pénale

de dire que XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana ne rapportent pas la preuve de leur subrogation ,

et que Altadis ne justifie pas venir aux droits de la SEITA

en conséquence, au fond , à titre principal de constater que :

Via Location et son chauffeur ont été victimes d'un vol, que les circonstances de celui-ci constituent un cas de force majeur, et que le chauffeur n'a as commis de faute,

subsidiairement de dire Via Location ne saurait être tenue pour responsable d'imprudences verbales du chauffeur dans un cadre privé et de débouter les demanderesses de leur demande à son encontre de condamner de dire la SEITA bien fondée à solliciter le remboursement des droits de consommation,

très subsidiairement de constater que le chiffrage du préjudice de la SEITA intégre ces droits et de le ramener à la somme de 17 938,96€,

plus subsidiairement de retenir les limitation de garantie soit un montant de 19 946,52e

de dire que la société Securitas a commis des fautes et que les parts de responsabilité de celle-ci seront retranchées de celle de Via Location,

de rejeter la demande de capitalisation,

de constater que la SEITA, en ne poursuivant pas l'exécution de la décision de la juridiction pénale a commis une faute lui causant un préjudice et la condamner à l'indemniser par les sommes qu'elle pourrait rester devoir aux intimées,

à titre infiniment subsidiaire de dire la procédure abusive, d'écarter des débats tous propos visant à nier le caractère de victime du chauffeur,

de condamner les assureurs à restituer les sommes versées au titre de l'exécution provisoire

de condamner XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana ainsi que la SEITA à lui payer la somme de 15 000E au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions signifiées le 14 octobre 2010 par lesquelles la société Securitas demande à la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur les nullités et moyens d'irrecevabilité,

- dire que le système de sécurité a parfaitement fonctionné et qu'elle n'a pas commis de faute,

- de dire que le vol trouve son origine dans la logistique des tournées mise en place par Via Location,

- dire que la responsabilité de Via Location en tant que transporteur est engagée,

en conséquence confirmer le jugement entrepris,

- subsidiairement constater que ala demande d'indemnisation est de 113 567,24€ alors que le raport d'expertise retient un préjudice de 101 069,30€,

- condamner Via Location à la garantir de toute condamnation,

- condamner Via Location ou toute partie succombante à lui payer la somme de 19 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions signifiées le 28 octobre 2010 par lesquelles la société Generali IARD demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris , de dire irrecevables les sociétés d'assurance XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana , de les débouter , de condamner in solidum Altadis et celles-ci à lui payer la somme de 10 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

subsidiairement confirmer le jugement et y ajouter la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions signifiées le 21 juin 2011 par lesquellesles assureurs XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana et Altadis demandent à la cour de confirmer le jugement sauf en ce qu'il les a condamnés à payer la somme de 3 000€ à la société Generali IARD au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner Via Location à leur payer la somme 55 000€ à ce titre et celle de 10 000€ sur le fondement de l'article 1382 du code civil en raison de sa volonté de nuire.

La société Via Location soulève des moyens de nullité de forme et de fond ; elle conclut à l'irrecevabilité des assureurs.

Elle conclut à la circonstance de la force majeure , l'exonérant de toute responsabilité et à titre subsidiaire à l'application des limitations de responsabilité avec un partage de la responsabilité avec Securitas en raison des fautes de cette dernière , outre une décharge de toute indemnisation en raison de la négligence de la SEITA pour recouvrer les sommes allouées par le juge pénal.

La société Generali IARD conclut à l'irrecevabilité des assureurs et à sa mise hors de cause dès lors que sa police d'assurance excluait les tabacs.

La société Securitas fait valoir qu'elle n'a commis aucune faute dans la mesure où le système de sécurité a fonctionné.

Les sociétés XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana exposent qu'elles sont régulièrement subrogées , que la force majeure n'est pas caractérisée et qu'en revanche le transporteur a commis une faute lourde excluant toute limitation de garantie ; elle ajoute que le préjudice comporte les droits à commission.

SUR CE

Sur les nullités soulevées par Via Location

sur la régularité de forme de l'assignation

Considérant que Via Location observe que l'article 648 du code de procédure civile dispose que « tout acte d'huissier indique , si le requérant est une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement » et que l'assignation ne comporte pas le nom des personnes représentant les demanderesses et pour trois d'entre elles leur forme sociale ;

Qu'il s'agit de vices de forme qui n'ont pas entraîné de préjudice pour Via Location qui a pu organiser sa défense ; que dès lors ils ne sauraient être retenus comme moyens de nullité ;

Considérant que Via Location affirme que l'adresse du 182 et 183 figurant comme étant celle de la SEITA ne correspond pas à son siège social ce qui constituait un obstacle à la signification des actes et lui faisait grief ;

Qu'il s'agit d'une affirmation dénuée de tout fondement dans la mesure où il ressort du Kbis de la SEITA qu'à la date de l'assignation elle avait son siège social à cette adresse et qu'aucune preuve contraire n'est rapportée ;

Que Via Location prétend encore que l'assignation a été délivrée à la société AIG Europe domiciliée à [Localité 7] alors que dans les conclusions des intimées, celle-ci a son siège sociale à [Localité 9] et que le numéro d'immatriculation correspond à une société dénommée Chartis ;

Que la société Chartis justifie venir aux droits de la société AIG Europe ;

Considérant que Via Location expose que deux personnes morales distinctes coexistent sous les raisons sociales de SEITA et d'Altadis et que la démonstration n'est pas faite de ce que cette dernière viendrait aux droits de SEITA à l'occasion du sinistre en cause ;

Qu'il résulte clairement du procès verbal d'assemblée générale du 31 juillet 2007 que la SEITA a procédé à l'apport de sa branche d'activité distribution à la société Altadis Distribution France, créée à cet effet , emportant transmission de plein droit des biens, droits et obligations relatifs à la branche d'activité concernée ; qu'aucune preuve contraire n'est rapportée, l'existence de plusieurs sociétés comportant le nom d'Altadis n'apportant aucune démonstration contraire dès lors que la société est identifiée comme étant Altadis Distribution France ;

Considérant en conséquence que l'ensemble des moyens sont dépourvus de pertinence et ont été à juste titre rejetés par les premiers juges.

sur les nullités de fond

Considérant que Via Location fait valoir qu'une condamnation globale au profit des assureurs a été sollicitée alors qu'il n'existe pas de solidarité entre eux ;

Considérant que les assureurs agissent conjointement en réparation du préjudice subi par leur assurée mais que chacune des compagnies justifie de sa quote part dans le remboursement effectué ; qu'il ne s'agit donc pas d'une demande globale ;

Qu'au titre des nullités de fond, Via Location reprend son moyen tiré de l'inexistence de AIG Europe auquel la cour a déjà répondu ;

Que Via Location affirme que XL London Market est un syndicat leader en matière de réassurance des Lloyd's de Londres et qu'il n' a pas la capacité d'ester en justice ; qu'il convient de relever qu'est produit le « Companie Register Information » équivalent du registre du commerce français qui apporte la preuve de l'enregistrement de la société XL London Market depuis 1980, celle-ci étant enregistrée comme étant « Private Limited Company » sous le n° 0151567 ayant son siège social [Adresse 5] ;

Considérant que ces moyens de nullité ont été à juste titre rejetés par les premiers juges.

sur les fins de non recevoir

Considérant que Via Location et Generali IARD excipent d'une fin de non recevoir tirée du jugement rendu par le tribunal correctionnel de Reims, comme étant revêtu de l'autorité de la chose jugée, faisant valoir que le principe « electa una via non datur recursus ad alteram » interdit, une fois choisie une voie procédurale, d'en engager parallèlement une autre ;

Que si la SEITA a choisi de se constituer partie civile à l'occasion des poursuites pénales et si les auteurs ont été déclarés solidairement responsables de son préjudice, cette réparation repose sur la responsabilité délictuelle ;

Que l'action dont est saisie la cour est une action en responsabilité contractuelle à l'encontre de Via Location en sa qualité de transporteur ;

Qu'il s'agit de deux actions ayant un fondement différent et pour lesquelles les parties ne sont pas les mêmes ;

Que si Via Location fait grief au jugement du tribunal de commerce d'assurer une double indemnisation, il n'est pas démontré que ni la SEITA, ni ses assureurs aient été dédommagés à quelque titre que ce soit ;

Qu'enfin la recherche de la responsabilité, d'une part des auteurs de l'infraction pénale, d'autre part du transporteur ne caractérise, aucune contradiction procédurale; que la juridiction pénale n'a qualité que pour statuer sur les préjudices résultant directement de l'infraction dont elle est saisie ; que dès lors la SEITA et ses assureurs ne pouvaient en aucun cas la saisir de la responsabilité encourue par le transporteur.

Sur la subrogation des assureurs

Considérant que Via Location prétend que les assureurs de la SEITA ne rapportent pas la preuve de leur subrogation faute de justifier d'une police d'assurance et du règlement effectif ;

Qu'elle indique qu'une police d'assurance a été produite couvrant les dommages subis par la SEITA au cours de la période du 31 décembre 2003 au 1er novembre 2004 mais que la SEITA n'en est pas signataire et que la société de droit anglais XL Insurance Company qui figure comme « leading underwriter « n'a pas régularisé cette police, seule la société française dénommée XL Insurance Marine Offshore Energy l'ayant signée ;

Qu'il suffit de relever que la SEITA figure bien comme en étant le bénéficiaire et que la page 5 comporte les signatures des sociétés XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana avec la précision pour chacune du pourcentage de son engagement ;

Que Via Location fait valoir que cette police d'assurance prévoit une franchise qui dispense les assureurs de rembourser leur assurée de ses différents préjudices tant que ceux ci n'ont pas atteint le seuil de 925 000€ et que le paiement de la somme de 83257,25€ ne peut être dissocié du solde réglé à la suite du dépassement de ce seuil ;

Considérant que les assureurs ont produit deux protocoles conclus avec Altadis :

le premier concernant un litige 451 8970 pour lequel il est précisé que l'indemnité d'assurance est fixée conformément aux clauses et conditions de la police à la somme de 257 921,45€ en l'état de l'acompte versé,

le second visant les autres sinistres référencés représentant une somme de 106 750,49€ dont 83 567,25€ au titre du sinistre correspondant ;

Que cette somme est répartie entre les différents assureurs conformément à leur engagement ;

Qu'il est produit copie du compte client portant au débit cette somme, la SEITA ayant signé un reçu relatif aux paiements des compagnies espagnoles et une attestation en date du 30 novembre 2005 mentionnant « total remboursé par l'assureur de la SEITA /83 567,25€ » ;

Qu'il est donc établi que le paiement de la SEITA par ses assureurs est intervenu avant toute décision au fond et que c'est à juste titre que les premiers juges ont dit que XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana étaient légalement subrogés dans les droits de la SEITA.

Sur le moyen de la force majeure

Considérant que le vol porte sur des marchandises extrêmement sensibles ce dont les parties étaient parfaitement conscientes puisqu'était utilisé pour leur transport un véhicule ayant fait l'objet d'aménagements spéciaux permettant sa localisation et sa neutralisation ; que dès lors le vol, fût-il à main armée, était pour ce type de marchandises une hypothèse à ne pas écarter et il appartient au transporteur de démontrer que, pour parer à cette éventualité, il n'a pas été défaillant ;

Qu'en l'espèce le vol a «été commis sur le site de la société Via Location sur lequel le véhicule devait rester stationné avec son chargement entre 5h et 6h15 alors même que le lieu est isolé et le site dépourvu de gardiennage, l'expert relevant au surplus que celui-ci était parfaitement accessible, n'étant pas clos, la clôture ayant été fracturée sur trois côtés et alors que la porte était ouverte , permettant aux malfaiteurs de précéder le camion et de l'attendre ;

Que l'expert conclut que ceux-ci avaient une parfaite connaissance des habitudes du chauffeur dans la mesure où ils ont attendu la neutralisation de l'alarme située près du disjoncteur ;

Que le tribunal correctionnel indique que l'un des auteurs , [O] [T] a été en relations avec le chauffeur de Via Location et que lors de sa garde à vue il a déclaré que, quelques jours avant, il s'est rendu sur place avec un dénommé [X] et qu'ils avaient dû quitter les lieux après avoir été surpris par le vigile d'une société voisine ;

Que si le chauffeur de Via Location a été qualifié de victime par le tribunal correctionnel, il n'en demeure pas moins que le tribunal mentionne que la ligne téléphonique d'un des auteurs, [Y] [K] révèle que les deux hommes ont été en relations et M.[M] a reconnu avoir fourni des précisions sur son travail au dénommé [X] ;

Que l'expert note que « les circonstances du vol requéraient une information interne à Via qui sorte pour l'organisation du vol » ;

Considérant que le rappel de ces éléments dans les conclusions de Securitas n'est que la reprise du jugement du tribunal correctionnel; que ceux-ci ne visent pas à nier la qualité de victime du chauffeur ; qu'il n'y a donc pas lieu de les écarter ;

Que ces éléments mettent en évidence les manquements du transporteur dans l'organisation du transport lequel n'était pas sécurisé du fait de l'organisation logistique mise en place tant en ce qui concerne les horaires que les lieux ; que le manque de discrétion du chauffeur s'inscrit dans ce même shéma d'imprudences caractérisant le mode de fonctionnement du transporteur, l'ensemble rendant prévisible les faits ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté la circonstance de la force majeure.

Sur la responsabilité et les limitations de garantie

Considérant que Via Location fait état de manquements de Securitas à ses obligations, celles-ci ne se limitant pas à l'installation de l'équipement de sécurité mais comportant aussi celle de prévenir les services de police en cas de vol, qui n'a pu l'être en temps utile en raison de la désactivation du système d'autoprotection qui devait permettre de stopper le véhicule dès son premier ralentissement ;

Qu'il n'est pas contesté que le système d'autoprotection automatique a été désactivé en raison de défaillances répétées, d'un commun accord entre la SEITA et Securitas ; qu'il a été remplacé par le système manuel qui a pour seule conséquence d'introduire une étape supplémentaire à la mise en panne consistant pour l'opérateur de Securitas à opérer une levée de réserves auprès du chauffeur après déclenchement de l'alarme ;

Que dès 5h41 l'alarme d'ouverture de porte s'est déclenchée, Securitas a alors immédiatement tenté par plusieurs appels de joindre le chauffeur ; qu'à 5h50 Securitas a donné la position du véhicule aux services de police ;

Que si elle a différé l'arrêt du véhicule jusqu'à 6h26, c'est en raison de son incertitude sur la situation du chauffeur ; que de plus ce différé n'a eu aucune incidence, le véhicule ayant été retrouvé au point signalé dès l'origine par Securitas;

Qu'il s'ensuit qu'il n'est démontré aucun manquement de la société Securitas à ses obligations et qu'elle doit être mise hors de cause.

Sur l'évaluation du préjudice

Considérant que la société Via Location conteste le montant retenu par le tribunal aux motifs que celui-ci comprend les droits à consommation ;

Que les prix du tabac sont réglementés et, à la date des faits, fixés par arrêté ministériel du 23 décembre 2003 ;

Que l'article 302 D du code général des impôts dispose que « l'impôt est exigible lors de la muse à la consommation et que le produit est mis à la consommation lors de la constatation des manquants » ;

Qu'il n'est pas contesté que les marchandises volées ont été mises sur le marché ce que le tribunal correctionnel a effectivement constaté ;

Que dès lors le préjudice de la SEITA comporte le montant de ces droits qui ont été retenus par l'expert qui a chiffré à 101 069,30€ le préjudice de la SEITA ; que les premiers juges ayant chiffré celui-ci à la somme de 103619,30€, il y a lieu de réformer la décision entreprise ;

Que les assureurs ayant versé à Altadis la somme de 83 567,25€, le solde du préjudice restée à charge de la SEITA sera donc fixé à 17 502,05€.

Sur la mise en cause de la société Generali IARD

Considérant que la police d'assurance souscrite par Via Location stipule au titre des conditions particulières que « sont assurées toutes les marchandises transportées dans le cadre d'un contrat de transport à l'exclusion des marchandises suivantes : animaux vivants, titres de toute nature ...tabacs, cigares, cigarettes... » ;

Que c'est donc à juste titre que IARD a été mise hors de cause par les premiers juges et qu'il n'y a pas lieu d'examiner les demandes au titre des limitations de garantie dès lors que la société Via Location n'était pas assurée.

Sur les demandes pour procédure abusive

Considérant que ni Via Location, ni son assureur, ni Generali IARD ne démontrent avoir fait l'objet d'une procédure abusive ; qu'il y a lieu de rejeter toute demande à ce titre.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Et considérant que les sociétés Securitas, XL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana , Seita et Generali IARD ont engagé des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif et de rejeter la demande de la société Via Location à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris sauf à dire que le solde à payer par la société Via Location à Altadis est de 17 502,05€,

Y ajoutant,

Condamne la société Via Location à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

- la somme de 20 000 € aux sociétésXL Insurance Company Limited, Aig Europe, XL London Market Company, HDI Hannover International Espana, Banco Vitalico de Espana et à la société Altadis Distribution France,

- la somme de 8 000 € à la société Securitas,

- la somme de 5000 € à la société Generali IARD,

Rejette toute autre demande , fin ou conclusion,

Condamne la société Via Location aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier

A. BOISNARD

La Présidente

C. PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 09/05441
Date de la décision : 20/10/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°09/05441 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-10-20;09.05441 ?
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