Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2011
( n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/24732
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Septembre 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/04009
APPELANT
Monsieur [X] [D]
[Adresse 2]
[Localité 7]
représenté par la SCP OUDINOT-FLAURAUD, avoués à la Cour
assisté de Maître Patrick BAUDOUIN, avocat au barreau de Paris, Toque : P0056
INTIME
SNC STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL prise en la personne de son gérant
[Adresse 1]
[Localité 8]
représenté par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assisté de Maître Roland BONNEFOY, avocat au barreau de Paris, Toque : E0445.
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 27 avril 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean DUSSARD, président
Madame Marie-Paule RAVANEL, conseiller
Madame Anne BOULANGER, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Monsieur Dominique FENOGLI
ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean DUSSARD, président et par Monsieur Dominique FENOGLI , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par jugement du 15 septembre 2009, le Tribunal de Grande Instance de Paris a :
- déclaré irrecevable les demandes formées par Monsieur [X] [D] au titre de la réfection du ravalement, de la réalisation d'un solin entre les bâtiments E et H, du rehaussement des conduits de cheminée du bâtiment E, de la création d'un châssis en toiture du bâtiment E, du remplacement de l'escalier du bâtiment E avec travaux de peinture, du rétablissement de la liaison entre le rez de chaussée et les étages du bâtiment E, de la perte du droit de surélévation et d'excavation au droit de l'escalier et des troubles de jouissance du fait de l'escalier dangereux non-conforme,
- déclaré recevable le surplus de ses demandes,
- rejeté l'exception de prescription soulevée par la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL,
- condamné la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL à verser à Monsieur [X] [D] la somme de 1 012, 53 euros (valeur décembre 2005), au titre du coût de réfection de l'isolation des murs intérieurs du rez de chaussée du bâtiment E et de leurs peintures et celle de 1 578, 80 euros (valeur décembre 2005), au titre de la reprise des dégradations et peintures dans la cuisine,
- dit que ces sommes seront actualisées selon la variation de l'indice BT01 du coût de la construction au jour du jugement et augmentées des intérêts au taux légal à compter du jugement,
- condamné la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL à verser à Monsieur [X] [D] la somme de 1 000 euros au titre des troubles de jouissance subi,
- ordonné l'exécution provisoire, sauf en ce qui concernait les dépens et l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- condamné la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL à payer 2 000 euros à Monsieur [X] [D] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Cour est saisie de l'appel formé à l'encontre de cette décision.
Vu la déclaration d'appel du 3 décembre 2009.
Vu les conclusions :
- de la SNC STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL, du 8 juin 2010,
- de Monsieur [X] [D], du 10 février 2011.
SUR CE, LA COUR,
La copropriété du [Adresse 5] comportait plusieurs immeubles :
- 3 bâtiments d'habitation côté [Adresse 4]
- 3 bâtiments côté [Adresse 3]
- entre les deux, un bâtiment E.
Le règlement de copropriété a été établi le 20 mars 1962.
Lors de son assemblée générale du 19 mai 1989, la copropriété a adopté une résolution aux termes de laquelle la SARL [Adresse 10] pouvait construire un immeuble 'H' après démolition des constructions existant C, F, G, autorisation en contrepartie de laquelle la société [Adresse 10] s'engageait à réaliser des travaux d'aménagement et de réfection du hall d'entrée du bâtiment A, les travaux de ravalement des façades de tous les bâtiments ainsi que des travaux de peinture sur menuiseries bois extérieures.
Par actes des 26 juillet 1989 et 7 septembre 1990, la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL est devenue propriétaire de l'ensemble des lots composant les bâtiments C, F, G et de divers lots dépendant du bâtiment A.
Les travaux ont été réalisés sous la maîtrise d'ouvrage de la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL et la maîtrise d'oeuvre de Messieurs [Y] et [W], architectes.
Ils ont fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 29 juillet 1992 avec réserves pour certains lots.
Monsieur [X] [D] est devenu propriétaire de la totalité des trois lots du bâtiment E les 26 avril 1996, 7 octobre 1998 et 1er avril 2003.
Le syndicat des copropriétaires des bâtiments A, [Adresse 9] a, faisant état de diverses malfaçons, fait, le 8 mars 2002, assigner la SNC STIM ILE DE FRANCE et le syndicat des copropriétaires du bâtiment H en référé expertise.
Le 17 avril 2002, Monsieur [B][R]y a été désigné comme expert.
Monsieur [X] [D] est intervenu aux opérations d'expertise et par assignation du 18 août 2003 a demandé que les opérations d'expertise lui soient opposables, qu'elles soient étendues à l'examen du bâtiment E et que ces opérations soient désormais opposables à Messieurs [W] et [Y] et au Cabinet Petit Jean, syndic.
Par ordonnance du 23 septembre 2003, il a été fait droit à ses demandes.
Monsieur [R] a clos son rapport le 9 décembre 2005.
SUR LA RECEVABILITÉ DES DEMANDES.
Monsieur [X] [D] justifie par la production de ses titres de propriété qu'il détient tous les lots du bâtiment E.
Aux termes de l'article 15 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, tout copropriétaire peut exercer seul les actions relatives à son lot en vue de sa sauvegarde, chaque lot étant composé d'une partie privative et d'une quote-part des parties communes.
Toute atteinte à ces derniers retentit sur le lot tout entier.
Les demandes formées par Monsieur [X] [D] sont donc recevables et le jugement sera infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables ses demandes relatives aux désordres affectant les parties communes, le fait que le syndic n'ait pas été informé antérieurement à l'action étant sans incidence sur la recevabilité de l'action.
En tout état de cause, Monsieur [X] [D] était justifié à agir en l'absence de diligences du syndicat des copropriétaires.
La Société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL conteste la décision des premiers juges qui ont écarté son moyen pris de la prescription.
Elle soutient que si la prescription n'a pu être interrompue n'ayant pas été délivrée par celui qui entend bénéficier de son caractère interruptif, l'assignation aux fins de désignation d'expert des 7 et 8 mars 2002 émanant du syndicat des copropriétaires des bâtiments A, B, D et E.
Il sera observé que Monsieur [X] [D] a obtenu une ordonnance lui rendant communes les opérations d'expertise de Monsieur [R] le 23 septembre 2003.
Dans la mesure où il était partie à l'expertise engagée par le syndicat et où il a continué l'instance commencée par celui-ci et dans celle où il a lui-même délivré une assignation en référé à la société STIM, le 18 août 2003, la prescription ne saurait être acquise à l'égard de l'appelant dont les demandes sont recevables.
SUR LES PRÉJUDICES.
Dans un rapport très complet, l'expert a dressé la liste des désordres affectant le bâtiment E.
L'expert retient la mauvaise qualité et la trop grosse épaisseur de l'enduit hydraulique de la façade dont la nature bloque tout échange gazeux entre l'intérieur et l'extérieur des murs, favorisant la condensation intérieure et le ravalement incomplet de bâtiment E, ainsi que l'isolation imparfaite des murs en façade et la non isolation intérieure du pignon laissé en pierres apparentes. Il indique que la STIM a proposé un ravalement non conforme au protocole d'accord.
Il évalue les travaux nécessaires pour remédier aux carences du ravalement à 38 273 euros TTC et l'isolation des murs intérieurs du rez de chaussée du bâtiment E et la réfection des peintures à 5 062, 67 euros.
Ces sommes seront retenues, observation faite que dès lors que la demande d'indemnisation a été faite dans le délai légal, les travaux sont indemnisables.
La réalisation d'un solin entre les bâtiments E et H s'avère nécessaire et a été chiffrée par l'expert à 3 973, 67 euros TTC et la reprise des peintures de la cuisine à 1 578, 81 euros.
Il sera observé que l'expert a constaté que le solin existant qui assure l'étanchéité entre les bâtiments E et H a été réalisé de façon provisoire aux frais avancés de la copropriété. Il se trouve au droit du mur de la cuisine de Monsieur [X] [D] où des dégradations ont été constatées.
Les estimations de l'expert seront retenues, sans qu'il y ait lieu de suivre la STIM dans son argumentation aux termes desquelles Monsieur [X] [D] ne démontrait pas n'avoir rien reçu de son assureur.
L'expert indique que le bâtiment E possède trois souches de cheminées dont deux corps A et B, comportant chacun trois conduits, sont situés côté bâtiment H à moins de 8 mètres des ouvertures de celui-ci et ne sont donc pas conformes à la réglementation alors que la STIM, maître d'ouvrage du bâtiment H aurait du assurer cette conformité.
L'expert chiffre les exhaussements des conduits de fumée à la somme de 31707, 71 euros TTC, somme qui sera également retenue.
L'expert relève aussi que l'accès à la couverture du bâtiment E se fait par un châssis parisien mis en place dans la cage d'escalier aux frais avancés de Monsieur [X] [D], non réalisé par la STIM alors qu'il était prévu sur ses plans et était obligatoire, en application de l'article 31.6.2 du règlement sanitaire départemental.
Le fait que les travaux aient été effectués après réception en l'état alors que l'absence de châssis d'accès à la couverture constituait un vice particulièrement apparent à la réception n'est pas de nature à empêcher l'indemnisation de ce préjudice, étant observé qu'il n'est pas là, fait état d'une malfaçon mais d'une non façon qui n'a pu être révélée à Monsieur [X] [D] que par l'examen des plans postérieurs à la réception.
Le coût des travaux avancé par Monsieur [X] [D] s'élève à 753, 80 euros TTC, montant qui participe également de son préjudice.
S'agissant de l'escalier du bâtiment E, l'expert indique qu'avant la construction du bâtiment H par la STIM, les deux étages du bâtiment E étaient desservis par une escalier à la française à quartiers tournants empiétant dans les étages sur les deux bâtiments E et F.
La démolition de bâtiment G a entraîné la démolition de cet ancien escalier et la construction d'un nouvel escalier en bois non conforme aux plans de l'état futur, la largeur indiquée de 1 mètre dans le hall à 80 cms dans les étages variant selon les étages de 49 centimètres à 85 centimètres et les marches balancées étant très irrégulières dans leur largeur.
Cet escalier n'est pas conforme aux normes applicables à la date du permis de construire.
L'escalier, selon l'expert, à la largeur sensiblement réduite, diminue le niveau de sécurité antérieur et ne respecte pas la circulaire du 13 décembre 1982.
Les contestations élevées par la STIM sur le degré de sécurité de l'escalier sont dès lors inopérantes.
La réfection totale en est évaluée par l'expert à 20 941, 75 eurox TTC et la peinture de la cage d'escalier à 6 756, 01 euros TTC.
La STIM produit aux débats une notre de Monsieur [H], économiste de la construction estimant que les travaux de réfection de l'escalier ne devraient pas excéder la somme de 17 987, 75 euros TTC.
Il sera observé que cette lettre adressée à la société Bouygues Immobilier vise un immeuble '[Adresse 6]', ce qui est en fait, l'adresse de l'entreprise de menuiserie, ce qui démontre que l'économiste de la construction consulté ne s'est pas rendu sur les lieux et a seulement raturé et minoré les postes de devis.
L'évaluation de l'expert sera retenue.
La STIM sera ainsi condamnée à payer au titre de la réparation des désordres la somme de 109 047, 42 euros TTC à Monsieur [X] [D].
Ces sommes évaluées à la date du rapport de l'expert (décembre 2005) seront indexées à ce jour et augmentées des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt de réformation, s'agissant d'une créance indemnitaire.
Monsieur [X] [D] demande la condamnation de l'intimé à lui payer 2 787 euros TTC au titre des travaux de réfection de l'entrée du bâtiment E.
L'expert écarte ce poste de préjudice indiquant que si la porte d'entrée est inesthétique, ce désordre n'a fait l'objet d'aucune réserve lors de l'instruction du permis de construire par les architectes des bâtiments de France.
Ce chef de demande sera rejeté.
L'appelant conclut à l'attribution d'une somme de 1 677, 39 euros pour la création d'un oculus et d'un garde-corps.
L''expert indique qu'aucune obligation ou norme ne fait état de la nécessité d'un oculus.
La décoration et la lumière apportées par un oculus n'apparaissent pas avoir été prévues par le protocole d'accord et les plans, ni un garde-corps.
Ce chef de demande sera également rejeté.
Monsieur [X] [D] demande la condamnation de l'intimée à lui payer 8 418, 90 euros pour la réouverture de la liaison entre le rez de chaussée et les étages du bâtiment E.
Ce chef de préjudice qui n'a pas été retenu par l'expert sera rejeté.
Monsieur [X] [D] subit, du fait des désordres ci-dessus évoqués (humidité, peintures dégradées, escalier incommode et dangereux) un trouble de jouissance depuis 1996 qui sera indemnisé par l'attribution d'une somme de 8 000 euros au paiement de laquelle la société STIM sera condamnée.
L'appelant soutient que la construction par la société STIM de mètres carrés supplémentaires a entraîné sa privation de surélever le bâtiment E de trois étages ou de créer des sous-sols grâce à la réserve de COS et à la disposition spécifique des lieux.
Il est justement observé par l'expert, en réponse à un dire du conseil de Monsieur [X] [D] que le syndicat des copropriétaires a donné son accord sur les dossiers de permis de construire et de démolir.
Par la conclusion de la transaction, le syndicat des copropriétaires a renoncé à la possibilité de surélévation et la demande indemnitaire formée par Monsieur [X] [D] sera rejetée.
Il apparaît, en revanche, inéquitable de lui laisser la charge de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel et la société STIM sera condamnée à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de chacune des deux procédures.
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société STIM ILE DE FRANCE,
Statuant à nouveau et ajoutant au jugement,
CONDAMNE la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL à payer à Monsieur [X] [D] la somme de 109 047, 42 euros TTC, valeur décembre 2005 avec indexation sur l'indice BT01 de la construction à la date du présent arrêt et intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, ainsi que 8 000 euros à titre d'indemnité de jouissance,
REJETTE les demandes autres, contraires ou plus amples,
CONDAMNE la société STIM ILE DE FRANCE RESIDENTIEL à payer à Monsieur [X] [D] la somme de 8 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,
LA CONDAMNE aux dépens de première instance et d'appel,
DIT que ceux-ci seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,
[F] [P] [C] [E]