Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 6
ARRET DU 28 OCTOBRE 2011
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/02896
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Janvier 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/17085
APPELANT
REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS (RATP)
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 4]
représentée par la SCP ALAIN RIBAUT ET VINCENT RIBAUT, avoués à la Cour
assistée de Maître Denis GANTELME, avocat au barreau de Paris (R32)
INTIMEES
SA GROUPAMA
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 5]
GAN ASSURANCES VIE COMPAGNIE FRANCAISE D'ASSURANCES VIE MIXTE
prise en la personne des ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 5]
représentées par la SCP PETIT LESENECHAL, avoués à la Cour
assistées de Maître Gérard PERRIN, avocat au barreau de Paris (R209)
COMPOSITION DE LA COUR :
Rapport ayant été fait conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile,
L'affaire a été débattue le 30 Septembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Louis MAZIERES, Président
Monsieur Paul André RICHARD, Conseiller
Monsieur Claude TERREAUX, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Camille RENOUX
ARRET :
-contradictoire
-rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Monsieur Jean-Louis MAZIERES, président et par Mademoiselle Camille RENOUX, greffier.
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La RATP a assigné devant le Tribunal de Grande Instance de Paris la SA GROUPAMA venant aux droits de la GAN SA et la SA GAN ASSURANCES VIE COMPAGNIE D'ASSURANCES MIXTES en paiement d'une somme en principal de 977.511,53 euros, au titre de travaux réalisés par la société demanderesse en vue de réduire les troubles anormaux causés au voisinage par l'impact sonore et vibratoire du métro, outre le remboursement de frais d'investigation. Ces demandes sont fondées en droit sur l'article 1382 du Code Civil et en fait sur la circonstance, non contestée et constatée notamment par plusieurs expertises successives, que des travaux d'aménagement de deux nouveaux sous-sols effectués par le GAN en avril 1977 dans un immeuble lui appartenant au [Adresse 3] a conséquemment accru les nuisances acoustiques et vibratoires provoquées par le passage des rames de la Ligne 13 du métropolitaine mise en service en 1973. La RATP ayant été condamnée par les juridictions administratives à indemniser les riverains et à effectuer certains travaux exerce une action récursoire contre le GAN.
Suivant jugement dont appel du 5 janvier 2010 le Tribunal de Grande Instance de Paris a déclaré recevable l'action à l'encontre de SA GROUPAMA pouvant venir aux droits de la SA GAN ASSURANCES VIE propriétaire de l'immeuble au moment des travaux, rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de la RATP contre la SA GROUPAMA et débouté la RATP de ses demandes contre la SA GROUPAMA.
Vu les dernières écritures des parties :
LA REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS a conclu à l'infirmation du jugement, à la responsabilité pour faute de la SA GAN ASSURANCES VIE COMPAGNIE FRANCAISE D'ASSURANCE SUR LA VIE en sa qualité de maître d'ouvrage et repris ses demandes indemnitaires formulées en première instance en sollicitant la condamnation solidaire des sociétés GROUPAMA et GAN ASSURANCES VIE COMPAGNIE FRANCAISE D'ASSURANCES VIE MIXTE, et ajouté subsidiairement un fondement nouveau à ses demandes : celui des troubles anormaux de voisinage.
La SA GROUPAMA et la SA GAN ASSURANCES VIE COMPAGNIE FRANCAISE D'ASSURANCES VIE MIXTE (ci-après GAN VIE) ont conclu, au terme du dispositif de ses écritures à la confirmation du jugement et au débouté de l'appelante quant au fondement nouveau invoqué.
SUR CE
Considérant que la Cour adopte l'exposé des faits et des moyens des parties des premiers juges ainsi que leurs motifs non contraires au présent arrêt, que ce jugement a sur le fond, retenu l'existence d'un lien partiel de causalité entre l'exécution des travaux en sous-sol de l'immeuble du [Adresse 3] appartenant à la société GAN VIE et les nuisances sonores subies par le voisinage mais a cependant rejeté les demandes de la RATP au motif que n'était pas rapportée la preuve d'une faute quasi-délictuelle du GAN-VIE.
Considérant que le litige se présente devant la Cour dans les mêmes termes qu'en première instance sauf la question de la prescription de l'action de la RATP qui n'est plus débattue, que par contre, malgré qu'il n'en est rien dit dans le dispositif des écritures respectives un litige demeure quant à la mise en cause ou hors de cause de la société GROUPAMA comme venant aux droits de GAN SA.
Considérant qu'il est constant que les travaux faits dans l'immeuble du [Adresse 3]-[Adresse 2] l'ont été sous la maîtrise d'ouvrage de la société GAN VIE COMPAGNIE D'ASSURANCES SUR LA VIE.
Considérant que GROUPAMA-GAN VIE concluent à la mise hors de cause de GROUPAMA tandis que la RATP conclut à la condamnation des deux sociétés solidairement ou l'une à défaut de l'autre, que le Tribunal a jugé que la SA GROUPAMA venait aux droits de la société GAN VIE (nom commercial).
Considérant que devant la Cour la RATP a subsidiairement introduit un nouveau fondement à ses demandes à savoir le trouble anormal de voisinage : 'les nuisances sonores apparues brutalement en 1977 après les travaux du GAN constitueraient des troubles anormaux de voisinage pour les habitants du [Adresse 1]. La RATP a subi les conséquences de ces nuisances puisqu'elle a dû réaliser de gros travaux pour en compenser les effets.'
Considérant que les troubles anormaux de voisinage consistent dans les nuisances sonores causées au habitants du [Adresse 1] dont par son arrêt du 23 avril 1986 le Conseil d'Etat a reconnu la RATP responsables du fait des bruits et vibrations provoquées par l'exploitation de la ligne N° 13 du métropolitain entre les stations [6] et [7], que ces troubles anormaux de voisinage pouvaient constituer le fondement d'une action des habitants contre la RATP - éventuellement aussi contre le GAN VIE - mais en aucun cas d'une action récursoire de la RATP à l'encontre du GAN VIE, que la RATP tente seulement de faire juger que les nuisances résultant incontestablement de son activité propre - la réalité de ces nuisances, bruits, vibrations au passage du métro, résultent des constats de différents experts judiciaires- n'auraient pris le caractère de troubles anormaux de voisinage que du fait des travaux réalisés par le GAN VIE, que la RATP est dans la situation d'un auteur de troubles anormaux de voisinage, reconnus comme tels de manière définitive par les juridiction administratives, exerçant ensuite ses recours en garantie contre d'autres parties estimées par elle responsables, que ce recours ne peut être fondé en l'espèce que sur l'article 1382 du Code civil, qu'il appartient bien à la RATP d'établir un lien de causalité entre les frais qu'elle a engagé afin de faire cesser les nuisances sonores subies par les habitants du [Adresse 1] et une faute du propriétaire de l'immeuble situé [Adresse 3].
Considérant qu'il y a peu à ajouter aux motifs détaillés développés dans le jugement dont appel qui a repris en les citant précisément les conclusions de M [T] [X] qui se résument en ceci que 'l'importance des bruits et vibrations résultent de la conjonction de sept facteurs', qu'il énumère, dont le 7è est 'l'approfondissement de l'immeuble du GAN VIE, [Adresse 3] /[Adresse 2], qui a amené les nouvelles fondations à moins de trois mètres de l'extrados de la voûte du tunnel, dans la zone qui a pu avoir été injectée lors des travaux de construction de l'ouvrage RATP'.
Considérant que l'expert [M] a de même conclu que 'les vibrations du métro seraient transmises de la voûte au traitement de la consolidation (injection de béton) dans lequel les nouvelles fondations viennent vraisemblablement s'imbriquer, puis des fondations aux structures des bâtiments mitoyens et enfin des structures aux planchers et cloisons, rayonnant l'énergie vibratoire. L'ampleur des niveaux sonores constatés est une preuve quasi certaine d'une liaison directe existant entre les nouvelles fondations de l'immeuble du GAN mitoyen du [Adresse 1], et le tunnel du métro'.
Considérant que l'expert [N] a de même conclu à la création d'un pont phonique à l'origine des nuisances sonores... 'les travaux réalisés par le GAN en 1977 entre le tunnel de la RATP et le radier du bâtiment du [Adresse 2] en contact avec le 10, ont augmenté la dureté des matériaux et donc les niveaux acoustiques reçus dans les bâtiments d'habitation.'
Considérant que c'est donc tout à fait à bon droit et conformément à l'avis des experts successifs que les premiers juges ont conclu à la preuve d'un lien de causalité entre les travaux au sous-sol de l'immeuble appartenant alors à GAN ASSURANCES VIE et les nuisances subies par les riverains, qu'il reste cependant que ces nuisances sont d'abord la conséquence du passage des rames de métro, cause sine qua non indiscutable, directement génératrice des bruits et vibrations incriminées et que s'agissant du préjudice invoqué par la RATP, les travaux réalisés en 1987, dont le remboursement est demandé, l'ont été sur les installations du métropolitain en vue de réduire l'impact sonore et vibratoire du métro, qu'en tout état de cause on ne voit pas comment la RATP pourrait rejeter sur la Société GAN la totalité de la responsabilité de ces désordres et lui répercuter ainsi le coût de travaux qui tendent à préserver l'environnement des conséquences de son activité propre, que c'est tout au plus à un concours de cause qu'il serait possible de conclure, les travaux du GAN VIE ayant eu un effet aggravant des nuisances par l'accentuation de la propagation des bruits et vibrations nées de l'exploitation du métro.
Considérant qu'il reste à démontrer dans la présente instance que le maître de l'ouvrage du [Adresse 1] a commis des fautes en relation de causalité avec le préjudice invoqué à savoir le montant des travaux que la RATP a dû engager pour faire cesser les troubles de voisinage.
Considérant que la RATP soutient que la faute quasi délictuelle du mâitre d'ouvrage GAN serait caractérisée par 'le défaut de précautions prises au niveau des travaux, avec des études insuffisantes sur la nature des sols et leur remplacement par des matériaux rigides et le non respect du projet initial tel que présenté à la RATP avec une implantation des fondations des ouvrages un mètre plus bas qu'annoncé'.
Considérant que la RATP ne peut cependant citer aucune conclusion ou observation des experts successifs affirmant que les travaux du GAN auraient été conduits d'une manière contraire aux règles de l'art ou aux documents contractuels que M [X] écrit au contraire que 'cette rénovation comporte en particulier un approfondissement des fondations de l'immeuble. Nous estimons que les entreprises chargées de la réalisation des travaux ont pris toutes les précautions nécessaires pour éviter au maximum les désordres aux immeubles voisins'.
Considérant qu'il n'est pas contesté que la RATP a été parfaitement informée des travaux entrepris par le GAN conformément aux dispositions de l'acte du 30 avril 1974 par lequel la RATP faisait l'acquisition du tréfonds de l'immeuble litigieux, qu'à l'époque il était clairement apparu que la présence du tunnel avait pour conséquence de réduire la possibilité de construire des parkings initialement prévus, d'où paiement d'une indemnisation, que l'acte en question prévoyait à la charge du GAN VIE que tous travaux au dessus du tréfonds serait soumis pour accord à l'acquéreur 'avant tout commencement...' afin que la RATP puisse 'vérifier que la conception et le mode d'exécution du futur bâtiment ne compromettent pas la stabilité du tunnel métropolitain', qu'il est constant que le GAN a transmis à la RATP une note technique sur la création des nouveaux sous-sols, que la RATP n'a formulé aucun objection et précisé le 21 avril 1977 n'avoir 'pas d'observation à formuler au plan technique' et donc quant au fait, évident, que les terres enlevées pour la création de nouveaux sous-sols seraient remplacées par les ouvrages nouveaux, qu'il n'est aucunement rapporté la preuve d'un manquement du GAN relativement à la question de la profondeur des fondations, qu'en conséquence c'est à juste titre que les premiers juges ont conclu que la RATP ne rapportait pas la preuve d'une faute commise par le GAN qui engagerait sa responsabilité vis à vis d'elle, que le jugement sera réformé en ce qu'il a débouté la RATP de ses demandes.
Considérant qu'en conséquence du débouté au fond de la RATP la question du maintien dans la cause de GROUPAMA n'a aucun intérêt.
Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisse à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS :
CONFIRME le jugement entrepris,
REJETTE toutes autres demandes des parties,
CONDAMNE la RATP aux dépens d'appel avec distraction au profit des avoués de la cause.
LE GREFFIER LE PRESIDENT