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15/12/2011 | FRANCE | N°09/10026

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 15 décembre 2011, 09/10026


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 15 Décembre 2011

(n° 6 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/10026



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 08/12573









APPELANT

Monsieur [B] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Sylvain

ROUMIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2081 substitué par Me Rachel SPIRE, avocat au barreau de PONTOISE







INTIMÉE

SA FRANCE TELEVISION

Pôle FRANCE 3

[Adresse 2]

[Adresse 2]

repr...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 15 Décembre 2011

(n° 6 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/10026

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 08/12573

APPELANT

Monsieur [B] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Sylvain ROUMIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2081 substitué par Me Rachel SPIRE, avocat au barreau de PONTOISE

INTIMÉE

SA FRANCE TELEVISION

Pôle FRANCE 3

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Aline JACQUET DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : E2080

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente

Monsieur Thierry PERROT, Conseiller

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

-signé par Madame Marie HIRIGOYEN, Président et par Madame Caroline SCHMIDT, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l'appel relevé par M. [B] [Z] du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris en date du 9 octobre 2009 l'ayant débouté de ses demandes en réparation de harcèlement moral et disparité de traitement et de toutes autres demandes,

Vu les conclusions de l'appelant visées et reprises à l'audience des débats,

Vu les conclusions de la société France Télévisions visées et reprises à l'audience des débats,

SUR CE

La cour est saisie du litige qui oppose M. [Z] à son employeur, désormais la société France Télévisions, auquel le salarié reproche, d'une part, des faits de harcèlement moral, d'autre part, une différence de traitement injustifiée par rapport à une collègue et en général aux femmes de son service en ce qui concerne l'évolution de sa carrière ce dont il recherche réparation sous forme d'indemnités, de rappel de salaires et d'une reconstitution de carrière par le positionnement au niveau B-expert N6 indice 2928 à compter du 11 mars 2004 et B-expert N7 indice 3048 à compter du 1er janvier 2008.

Engagé par la société Radio France en mars 1981 en qualité d'agent technique énergie climatisation, électricien, niveau B09, M. [Z] est devenu en 1989 technicien supérieur de spécialité, placé au niveau indiciaire B17.

Il a effectué de l'assistance logiciel bureautique puis s'est orienté vers les activités de graphiste PAO (publication assistée par ordinateur) qu'il a exercées au sein de la société France 3, en premier lieu, dans le cadre d'un détachement.

Puis, il a été embauché par la société France 3 suivant contrat à effet du 1er juin 1996 en qualité de technicien supérieur de gestion qualification B18 selon la classification de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles.

Dès février 1996, il a fait partie du service PAO dépendant de la direction de la communication de France 3. A la suite d'un audit de ce service en 1998, il a été affecté aux relations avec les fournisseurs.

C'est à ce stade de sa carrière que M. [Z] situe le début de ce qu'il estime être un processus de mise à l'écart et de dévalorisation constitutif de harcèlement de la part de sa hiérarchie en soulignant que sa position est particulière puisqu'il est, à l'exception d'un collègue travaillant dans un secteur totalement différent, le seul homme dans un environnement presque exclusivement féminin.

- Sur le harcèlement moral

Aux termes des articles L.1152-1 et L.1152-2 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1154-1 du même code, en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers au harcèlement.

En l'espèce, M.[Z] produit pour l'essentiel deux attestations de Mmes [N] et [J] relatant des propos injurieux tenus par Mme [V] sur son compte en 1998, une attestation de M. [S] rapportant que Mme [M], administrateur, ne lui adressait pas la parole, les lettres dénonçant son exposition au tabac du fait de son voisinage avec Mme [M] qui travaillait dans le bureau le plus proche, les avis du médecin du travail de l'audiovisuel à ce sujet, la lettre de ce médecin du travail en date du 2 févier 2004 informant l'employeur de l'exposition au tabagisme de collègues et l'invitant à faire respecter la loi Evin, des courriers de sa hiérarchie lui notifiant deux avertissements dont l'un rapporté pour vice de forme, les lettres adressés à ses supérieurs pour dénoncer les traitements vexatoires et humiliants dont il était l'objet. Il fait état de sa 'placardisation' dans un bureau excentré, de sa privation d'un vrai poste de janvier 2000 à novembre 2001, du rabaissement de ses compétences, des reproches répétitifs dans un déferlement de courriers électroniques, de menaces de sanctions et sanctions réitérées, d'affectation à des tâches dévalorisantes, étant par exemple le seul homme à être sollicité pour remplir des enveloppes le 30 mars 2004, de l'organisation de la surcharge de son poste, d'une manière générale, du mépris où il a été tenu depuis 2000, de la non fourniture de travail dans le cadre de la réorganisation depuis le 4 janvier 2010 et ce pendant plusieurs mois entraînant la dégradation de son état de santé. Il verse aux débats divers courriers du représentant de la CFDT à la directrice de la communication dont l'un en date du 19 décembre 2007 évoque l'acharnement de la direction à propos de la suppression d'une indemnité de sujétion et un autre du 24 janvier 2008 dénonce la stagnation salariale subie par M. [Z], un certificat du docteur [O], psychiatre, en date du 15 juillet 2008 certifiant voir M. [Z] en consultation depuis le 17 janvier 2000 ' motivé par des soucis professionnels', un certificat du médecin du travail du 2 avril 2010 mentionnant une anxiété liée à 'une situation professionnelle difficile (restructuration) ' et indiquant que M. [Z] serait sans activité depuis début 2010 ainsi qu'un certificat d'admission aux urgences de l'hôpital Ambroise Paré Boulogne Billancourt du 15 janvier 2000 ne précisant pas le motif.

Ces éléments dans leur ensemble sont de nature à laisser présumer des faits de harcèlement.

Pour sa part, la société France Télévisions produit des pièces établissant en premier lieu que le conflit avec Mme [V] qui avait tenu des propos inacceptables à l'endroit de M [Z] a été résolu par M. [L], alors directeur de la communication, qui a exigé des excuses de la salariée fautive, et auquel M. [Z] a fait connaître dans une lettre en date du 24 novembre 1998 qu'il avait perdu confiance en lui en raison de son soutien à Mme [Y], son assistante, indiquant lui avoir fait confiance car le fait qu'il s'agisse d'un homme rendait leurs discussions 'plus simples, plus claires', ensuite que le même directeur a relevé des manquements professionnels du salarié comme cela ressort en particulier d'une lettre de recadrage en date du 21 juin 1999 reprochant à M. [Z] d'avoir procédé à un envoi répété de courriers au nom du CHSCT dont il était élu mais pour des problèmes personnels et de déployer une activité extrêmement réduite au sein du bureau PAO. Il est, en outre, justifié d'un premier incident survenu en 1998. Il était alors reproché à M. [Z] d'avoir communiqué sans autorisation depuis son adresse personnelle avec le ministère des affaires étrangères. D'autres manquements professionnels ont été relevés ensuite par Mmes [D] et [T], les deux directrices de la communication ayant succédé à M. [L], entre mars 2000 et novembre 2006 qui reprochaient à M. [Z] de ne pas remplir l'intégralité de ses missions vis à vis des fournisseurs.

Les reproches n'émanent donc pas exclusivement de supérieurs hiérarchiques femmes comme le suggère M.[Z] en se prétendant dans une situation particulière car seul homme du service et reposent sur la mauvaise qualité du travail qui autorisait les supérieurs à user de leur pouvoir de direction et disciplinaire.

Par ailleurs, la société France Télévisions explique que loin d'avoir été éloigné géographiquement, M. [Z] disposait d'un bureau près d'autres collègues en particulier Mme [M] dont il se plaint du tabagisme, souligne que l'application de la loi Evin a été respectée dans sa progressivité, l'interdiction totale datant de 2007, verse aux débats un courrier électronique convoquant non seulement M. [Z] mais plusieurs salariés du service à l'opération exceptionnelle imprévue de mise sous pli le 30 mars 2004 en demandant un mot d'excuses pour les absents ainsi que la lettre de M. [Z] expliquant son refus dont il a envoyé copie notamment à M. [F], directeur général, et au DRH, ce dernier lui ayant répondu par lettre du 28 juin 2004 énumérant toutes les initiatives prises pour aplanir les difficultés, lui suggérant une demande de mutation et notant l'absence de communication de sa lettre à Mme [D], directrice de la communication, supérieure directe.

Quant à l'absence de fourniture de travail dont se plaint M. [Z] à partir de 2010, il est constant qu'à la faveur de la nouvelle organisation de France Télévisions, le salarié a changé d'affectation et a été nommé au service finances des domaines marketing et gestion. A compter de mars 2010, il été placé en arrêt de travail puis il a dénoncé sa situation au responsable des ressources humaines . Dans sa lettre en réponse en date du 29 juillet 2011, Mme [K], RRH du secteur finances et juridique, manifeste sa surprise ( 'depuis votre affectation au service finances des domaines marketing et gestion, vous seriez sans activité') et convoque le salarié à un entretien sur sa situation pour envisager les moyens de '[le] motiver', lui rappelant que cette affectation fait suite à sa demande de mutation, tous éléments qui tendent à établir une difficulté d'intégration.

Dans ces conditions, la société France Télévisions justifie par des éléments objectifs étrangers au harcèlement les agissements incriminés.

C'est donc par une juste appréciation que les premiers juges ont dit le harcèlement non caractérisé et débouté M. [Z] de ses demandes de ce chef.

- Sur l'inégalité de traitement

Au soutien de sa demande de ce chef, M. [Z] invoque la violation à la fois de la règle d'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes énoncée à l'article. 3221-2 du code du travail et du principe d'égalité professionnelle qui renvoie au principe 'à travail égal, salaire égal' en vertu duquel l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération et de traitement entre ses salariés pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique et effectuent un même travail ou un travail de valeur égale.

Il appartient au salarié qui invoque une rupture d'égalité à son détriment de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement à charge pour l'employeur de rapporter la preuve de raisons objectives matériellement vérifiables justifiant cette différence.

M. [Z] fait valoir que, salarié masculin parmi un personnel féminin dans sa très grande majorité, il a subi un traitement distinct particulièrement injustifié par rapport à ses collègues femmes prenant comme comparaison Mme [I] laquelle exerçait le même métier que lui (photocompositeur) en 1996 au moment où il était recruté à France 3, avec une ancienneté comparable, classée comme lui technicien supérieur de gestion de 1993 à 2001, bénéficiant du même niveau B18 en 1996, en sorte qu'ils auraient dû faire la même progression de carrière alors que Mme [I] est classée au niveau B25 depuis le 1er janvier 2004, lui-même ayant connu une stagnation de sa carrière.

Cependant, la comparaison est inopérante dans la mesure où les deux salariés n'ont pas les mêmes fonctions et responsabilités ce dont M. [Z] convient puisqu'il précise que Mme [I] a fait carrière dans la filière des cadres administratifs tandis qu'il appartient à la filière des techniciens experts à partir de laquelle on peut accéder à la filière B expert qui n'est pas une filière d'encadrement et qui a été créée en 2004, Mme [I] ayant accédé au B22 dès 2001 mais côté cadre, nommée responsable du service PAO.

D'ailleurs, il ne revendique pas un positionnement identique à celui de Mme [I] mais une élévation en B-expert à compter de la création de cette filière pour compenser la prétendue stagnation.

Dans ces conditions, il n'est fourni par le salarié aucun élément propre à laisser présumer une inégalité de traitement de carrière ou salariale.

Par suite, alors, de surcroît, qu'il ressort de la chronologie du parcours professionnel du salarié que celui-ci a été promu, que d'après une comparaison prenant en compte les critères de qualification, fonctions, ancienneté équivalentes, il appartient au quartile des salariés les mieux rémunérés et enfin, qu'il ne démontre pas une exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur, M. [Z] a été à juste titre débouté de ses demandes.

- Sur les frais irrépétibles

L'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

DÉBOUTE les parties de toutes autres demandes,

CONDAMNE M. [B] [Z] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 09/10026
Date de la décision : 15/12/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°09/10026 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-12-15;09.10026 ?
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