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04/01/2012 | FRANCE | N°08/15550

France | France, Cour d'appel de Paris, 04 janvier 2012, 08/15550


COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5- Chambre 1

ARRET DU 04 JANVIER 2012

(no 005, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 05115

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Janvier 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS 3ème Chambre 3ème Section-RG no 08/ 15550



APPELANTE :

S. A. R. L. INGESS INGENIERIE ET GESTION
prise en la personne de son représentant légal,
ayant son siège social 16 rue des Sources 77400 LAGNY SUR MARNE,

représentée par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES, avoué à la Cour,


assistée de Maître Cécile DESKINE plaidant pour la SCP DM & D Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque P 052.

INTIMÉS ...

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5- Chambre 1

ARRET DU 04 JANVIER 2012

(no 005, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 05115

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Janvier 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS 3ème Chambre 3ème Section-RG no 08/ 15550

APPELANTE :

S. A. R. L. INGESS INGENIERIE ET GESTION
prise en la personne de son représentant légal,
ayant son siège social 16 rue des Sources 77400 LAGNY SUR MARNE,

représentée par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES, avoué à la Cour,
assistée de Maître Cécile DESKINE plaidant pour la SCP DM & D Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque P 052.

INTIMÉS :

- Monsieur Philippe X...

demeurant ...,

- S. N. C. HOTELIERE ARCOTEL MULHOUSE A 36
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège 1 avenue du Général de Gaulle 68390 SAUSHEIM,

représentés par la SCP TAZE-BERNARD BELFAYOL BROQUET, avoué à la Cour,
assistés de Maître Marc MULLER du Cabinet MULLER et STAEDEIN avocat au barreau de MULHOUSE.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Didier PIMOULLE, Président,
Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère,
Madame Anne-Marie GABER, Conseillère,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence DESTRADE.

ARRET :
Contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président, et par Madame Noëlle KLEIN, greffier présent lors du prononcé.

LA COUR,

Vu l'appel relevé par la s. a. r. l. ingess Ingénierie et Gestion du jugement du tribunal de grande instance de Paris (3ème chambre, 3ème section, no de RG : 08/ 15550), rendu le 13 janvier 2010 ;

Vu les dernières conclusions de l'appelante (18 octobre 2011) ;

Vu les dernières conclusions (11 octobre 2011) de M. Philippe X... et de la s. n. c. Hôtellerie Arcotel Mulhouse A 36, intimée ;

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 25 octobre 2011 ;

* *

SUR QUOI,

Considérant que la société ingess Ingénierie et Gestion (ci-après : ingess), se présentant comme titulaire des marques suivantes, qui lui ont été cédées le 21 septembre 2007 par le mandataire judiciaire à la liquidation de la société Sogecer Investissements :

- marque communautaire semi-figurative no 629055 « Arcotel accueil routier caristes-Chaîne d'Hôtels et Restaurants des Centres Routiers », déposée à l'OHMI le 12 septembre 1997 pour désigner notamment des services en classes 35 et 42 à savoir publicité et affaires, hôtellerie, restauration, bar, réservation de chambres d'hôtel,

- marque communautaire semi-figurative no 629063 « Arcotel Trucks Center » déposée à l'OHMI le 12 septembre 1997 pour désigner notamment des services en classes 35 et 42 à savoir publicité, restauration (alimentation), hébergement temporaire,

- marque française semi-figurative no 94514147 « Arcotel Trucks Center » déposée le 1er avril 1994 en classes 35 et 43 pour désigner notamment les services de publicité, restauration (alimentation), hébergement temporaire, régulièrement renouvelée le 2 mars 2004,

Titulaire en outre de la marque française semi-figurative « Arcotel Restaurant » no 08 3 568 099 déposée à l'INPI le 7 avril 2008 en classes 35, 39 et 43 pour désigner notamment les services de transport, organisation de voyages, services de restauration (alimentation) et hébergement temporaire service de bar et service hôtelier,...,

Ayant appris que la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A 36 utilisait, sans autorisation, le signe « Arcotel » dans sa dénomination sociale, dans son nom commercial et à titre d'enseigne pour désigner des services proposés dans l'hôtel-restaurant qu'elle exploite à Sausheim et à titre de nom de domaine d'un site internet accessible à l'adresse arcotel. fr sur lequel elle propose des services identiques à ceux visés dans l'enregistrement de ses propres marques, après négociations infructueuses et vaine mise en demeure, a assigné cette société et M. X..., son gérant, sur le fondement de la contrefaçon de marque et réclamé des dommages-intérêts, l'interdiction pour cette société d'utiliser un nom commercial comportant le terme''Arcotel''et le transfert à son profit du nom de domaine''arcotel. fr'';

Que le tribunal, ayant relevé, pour l'essentiel, que la société ingess ne pouvait se prévaloir de ses deux marques communautaires faute de prouver que le transfert de ses marques à son profit avait été enregistré, et que la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A 36 a utilisé le signe''Arcotel''comme nom commercial depuis le 22 septembre 1986 et de façon continue jusqu'en 1993 et l'a adopté comme enseigne à partir du 10 décembre 2001, a débouté la demanderesse de toutes ses prétentions et rejeté la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive présentée par les défendeurs ;

Sur les demandes de la société INGESS dirigées contre M. X... :

Considérant que le tribunal a pertinemment rappelé le principe selon lequel la responsabilité personnelle d'un dirigeant social à l'égard des tiers ne peut être retenue qu'à raison de fautes séparables de ses fonctions et qui lui soient personnellement imputables ;

Considérant qu'il résulte des propres écritures de l'appelante (page 15) que c'est à la société Hôteliere Arcotel Mulhouse A 36, et non à son gérant à titre personnel, qu'elle avait proposé de continuer à pouvoir exploiter les signes Arcotel en qualité de franchisé du réseau Arcotel ; que c'est donc dans l'exercice de ses fonctions de gérant que M. X... a refusé de donner suite à cette proposition ; que ce refus, à le supposer fautif, n'est dès lors pas susceptible d'engager la responsabilité de M. X... à titre personnel ;

Considérant, par ailleurs, que la modification de la dénomination sociale de la société seras en celle de société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 décidée le 16 octobre 2007 est une décision de la société, qui engage éventuellement sa responsabilité à l'égard des tiers et non celle de son gérant à titre personnel, lequel, à supposer qu'il en ait pris personnellement l'initiative, n'a pu le faire que dans le cadre de ses fonctions de dirigeant social ;
Considérant enfin que c'est encore au nom et pour le compte de la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 que M. X... a déposé le nom de domaine « arcotel. fr » comme le montrent les documents qui rendent compte de cet enregistrement ; que ces documents, s'ils font en effet apparaître le nom de M. X... comme la personne à contacter relativement à cet enregistrement, donnent l'adresse du siège de la société, non celle du domicile personnel de M. X... ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté la société ingess de toutes ses demandes dirigées contre. X... personnellement ;

Considérant que M. X... ne démontre pas qu'il aurait subi, du fait de sa mise en cause à titre personnel dans la procédure, un préjudice distinct de la nécessité dans laquelle il s'est trouvé d'avoir à exposer des frais particuliers pour sa défense, ce qui donnera lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile dans les conditions fixées au dispositif ; que sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive sera en conséquence rejetée ;

Sur la contrefaçon de marques par la dénomination sociale, le nom commercial et l'enseigne :

Considérant qu'il est constant que la société ingess ne peut invoquer aucun droit de marque antérieur au 1er avril 1994, date du dépôt de la marque française semi-figurative no 94514147 « Arcotel Trucks Center » déposée le 1er avril 1994 ;

Considérant qu'il est établi par les pièces versées au débat que la s. n. c. sogecer et cie a été immatriculée le 16 février 1983 au registre du commerce de Mulhouse sous le no 325 306 959 avec le nom commercial centre douanier et routier de mulhouse-sausheim ;

Que cette même société a déclaré le 22 septembre 1986 une modification dans la situation de la personne morale portant sur son nom commercial pour y adjoindre le terme arcotel ;

Qu'un extrait Kbis du registre du commerce et des sociétés de Mulhouse du 6 janvier 2004 relatif à la même société immatriculée sous le no 325 306 959, avec la dénomination sociale seras montre que celle-ci a pour nom commercial centre routier et douanier de mulhouse sausheim arcotel ;

Considérant qu'il est encore démontré que la société sogecer et cie devenue seras puis société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 a fait un usage public et continu du terme arcotel dans son nom commercial depuis 1986 jusqu'en 1993 ainsi que cela ressort des lettres commerciales ou administratives de toute nature échangées avec divers correspondants (pièces no 5 à 16 versées au débat par les intimés) ;

Considérant, dès lors, que la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 est fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 713-6, alinéa 1, du code de la propriété intellectuelle en vertu desquelles : « L'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme : a) Dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est … antérieure à l'enregistrement... » ; que ces dispositions ne distinguent pas selon le support du nom ou de l'enseigne, de sorte que l'utilisation du signe litigieux à titre de nom commercial ou d'enseigne rendu visible sur le site internet de a société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 doit être regardée comme entrant dans les prévisions de ce texte ;
Considérant qu'il suit de là que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société ingess fondée sur la contrefaçon de ses marques par l'usage fait par la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 du terme arcotel dans sa dénomination sociale, son nom commercial et son enseigne ;

Sur les mesures d'interdictions réclamées par la société ingess :

Considérant que l'article L. 713-6, alinéa 2, du code de la propriété intellectuelle dispose : « Toutefois, si cette utilisation porte atteinte à ses droits, le titulaire de l'enregistrement peut demander qu'elle soit limitée ou interdite » ;

Considérant que la société ingess se fonde sur ces dispositions pour demander à la cour d'interdire à la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 de faire usage en France, à quelque titre que ce soit, et sous quelque forme que ce soit, du signe arcotel et des marques arcotel et arcotel restaurant, pour désigner notamment les services de restauration, alimentation, et d'hébergement temporaire ;

Qu'elle fait valoir que la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 offre dans l'hôtel restaurant qu'elle exploite des services comparables à ceux qu'elle-même offre dans ses propres établissements et qu'elle signale son hôtel au moyen d'une enseigne de grande taille portant le terme arcotel en caractères similaires à ceux de ses propres enseignes, faisant ainsi croire qu'elle est membre du réseau arcotel, entretenant ainsi la confusion dans la clientèle et créant un obstacle au développement de son propre réseau de franchise à proximité de Mulhouse ;

Mais considérant qu'il résulte des pièces de la procédure et des explications des parties que la société sogecer investissements exploitait à l'origine une vingtaine d'établissements arcotel à travers la France et que, lors de la liquidation judiciaire de cette société, la société ingess a bénéficié de la cession de trois d'entre eux, à Metz, Rouen et Rennes, tandis que plusieurs autres étaient cédés à d'autres repreneurs et que la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36, anciennement sogecer et cie, a continué d'exploiter l'établissement de Mulhouse ;

Considérant, dans ce contexte, que l'atteinte alléguée par la société ingess ne justifie pas d'interdire à la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 de faire usage dans sa dénomination sociale, son nom commercial et son enseigne du terme arcotel qu'elle emploie publiquement depuis vingt-cinq ans et par lequel elle est connue de ses fournisseurs, de ses clients, des services administratifs et de tous ses partenaires ;

Que la demande d'interdiction présentée par la société Ingess sera en conséquence rejetée ;

Sur la demande de transfert des noms de domaine arcotel. fr et arcotel-mulhouse. com :

Considérant qu'il est établi par les pièces versées au débat que la société seras, devenue la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36, a déposé le 12 octobre 2006 le nom de domaine « arcotel. fr » ; que cette société exploite ce nom de domaine comme le montre l'onglet « contact » de son site internet (pièce 34 de la société ingess) qui renvoie, pour toute demande d'information, à « informations @ arcotel. fr », pour toute question commerciale, à « commercial @ arcotel. fr », pour les demandes de réservation, à « réservation @ arcotel. fr » et pour toute demande d'information sur l'accueil des groupes à « groupes @ arcotel. fr » ;

Considérant que l'article R. 20-44-45 du code des postes et des télécommunications électroniques dispose : « Un nom identique ou susceptible d'être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle par les règles nationales ou communautaires ou par le présent code ne peut être choisi pour nom de domaine, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi » ;

Considérant, s'il résulte des motifs qui précède que, eu égard à l'ancienneté de l'usage du nom commercial et de l'enseigne de la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36, cette dernière conserve la faculté de faire usage du signe arcotel dans la mesure où il est inséparable de la fonction de désignation de l'établissement hôtelier qu'elle exploite à Mulhouse-Sausheim, il n'en reste pas moins que le choix de ce signe dans le nom de domaine « arcotel. fr », dès lors qu'il n'est plus associé à cet établissement, induit un risque de confusion avec le même signe sur lequel la société ingess possède, à titre de marque, un droit de propriété intellectuelle ;

Considérant qu'il en résulte que la société ingess est fondée à demander le transfert à son profit du nom de domaine « arcotel. fr » initialement déposé par la société seras ; que sa demande à cette fin sera accueillie ; que sa demande de transfert à son profit du nom de domaine « arcotel-mulhouse. fr » sera en revanche rejetée ;

* *

PAR CES MOTIFS :

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande de transfert du nom de domaine « arcotel. fr » au profit de la société ingess,

Le RÉFORMANT et STATUANT à nouveau de ce seul chef,

ORDONNE à la société Hôtelière Arcotel Mulhouse A36 le transfert du nom de domaine « arcotel. fr » au profit de la société ingess en autorisant en tant que de besoin la notification de l'arrêt à l'AFNIC en vue de faire procéder à ce transfert,

REJETTE toute demande contraire à la motivation,

CONDAMNE la société ingess Ingénierie et Gestion aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile et à payer à M. X... 4. 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT n'y avoir lieu à plus ample application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 08/15550
Date de la décision : 04/01/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-04;08.15550 ?
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