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05/01/2012 | FRANCE | N°10/13939

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 05 janvier 2012, 10/13939


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 05 JANVIER 2012



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/13939



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Septembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - Chambre 1 Section 1 B RG n° 07/03697





APPELANT:



Monsieur [E] [C] [L]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 4]


de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]



représenté par Maître Frédérique ETEVENARD, suppléente de Maître HANINE, avoué à la Cour

assisté de Maître Viviane SIMON...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 05 JANVIER 2012

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/13939

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Septembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - Chambre 1 Section 1 B RG n° 07/03697

APPELANT:

Monsieur [E] [C] [L]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 4]

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Maître Frédérique ETEVENARD, suppléente de Maître HANINE, avoué à la Cour

assisté de Maître Viviane SIMON, avocat au barreau de PARIS Toque : R 136

INTIMEE:

Madame [M] [H]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoué à la Cour

assistée de Maître Christophe DELPLA, avocat au barreau de Pontoise

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Novembre 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Conseiller, et Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Patrice MONIN-HERSANT, Président

Monsieur Edouard LOOS, Conseiller

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Monsieur Daniel COULON,

ARRET :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Patrice MONIN-HERSANT, Président, et par Monsieur Daniel COULON, Greffier présent lors du prononcé.

Le 16 juin 2005, Madame [M] [H] a cédé à Monsieur [E] [C] [L] les 915 parts sociales, d'un montant nominal de 100 € chacune, qu'elle détenait dans le capital de la SCI ESPACE, moyennant le prix global de 4.575 €, quittancé dans l'acte du même jour.

Madame [M] [H] a, le 19 mars 2007, attrait Monsieur [C] [L] devant le tribunal de grande instance de Bobigny aux fins de l'entendre :

- prononcer la nullité de l'acte, en offrant de restituer le prix reçu, sous un mois de la décision à intervenir, et de l'autoriser à effectuer les formalités de publicité légale et de mention au Registre du commerce et des sociétés, aux frais de Monsieur [C] [L],

- constater que ce dernier est sans droit ni titre pour occuper la maison de [Localité 5] et ordonner son expulsion sous astreinte,

outre l'allocation de 4.000 € de frais irrépétibles.

Elle a principalement exposé, devant les premiers juges, que la SCI ESPACE est propriétaire d'un pavillon situé à [Localité 5] (Seine Saint Denis), acquis le 19 novembre 2001 au prix de 1,2 MF (182.938,82 €), financé sur fonds propres de la SCI à hauteur de 199.665,57 F (30.438,82 €), dont elle déclare avoir apporté elle-même le montant à la société, et par emprunt bancaire à hauteur de 152.500 €, et a fait essentiellement valoir que :

- les stipulations des statuts, relatives aux formalités lors d'une cession de titres, n'ont pas été respectées,

- son consentement a été vicié par la contrainte morale assimilable à la violence,

- le prix est dérisoire,

- la vente est dépourvue de cause.

Monsieur [C] [L] a soulevé, à titre principal, l'irrecevabilité des demandes de Madame [H], au visa des articles 1844-12 et 1622 du code civil et s'est opposé, subsidiairement, aux prétentions de celle-ci en sollicitant reconventionnellement, son expulsion, sous astreinte, du pavillon de [Localité 5], outre 5.000 € de dommages et intérêts 'pour procédure abusive' et une indemnité de pareil montant au titre des frais non-taxables.

Après avoir retenu, dans la motivation sans le reprendre expressément dans le dispositif de la décision, que Madame [H] :

- d'une part, 'ne saurait invoquer le non respect de l'article 13 des statuts pour obtenir la nullité de la cession',

- d'autre part, ne démontrait pas que son consentement aurait été vicié par la crainte que lui inspirait Monsieur [C] [L],

le tribunal, par jugement contradictoire du 2 septembre 2008, a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par Monsieur [C] [L] tirées des articles 1844-12 et 1622 du code civil et, pour le surplus, avant dire droit, a ordonné une expertise-comptable en fixant les différents chefs de la mission.

L'expert a déposé son rapport le 12 juillet 2010.

Vu l'appel interjeté le 6 juillet 2010, par Monsieur [C] [L] et ses ultimes écritures signifiées le 27 avril 2011, réclamant 15.000 € de frais irrépétibles , soutenant 'qu'en désignant un expert avec pour mission de déterminer la valeur de la SCI et des 915 parts sociales à la date du 16 juin 2005, le tribunal a tranché une partie du droit ' et poursuivant l'infirmation du jugement en :

- renouvelant, à titre principal, ses moyens d'irrecevabilité tirées des articles 1844-12 et 1622 du code civil, tout en sollicitant, à nouveau, 5.000 € de dommages et intérêts 'pour procédure abusive'

- sollicitant, subsidiairement, le rejet des prétentions de Madame [H] ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 28 avril 2011, par Madame [H] réclamant 10.000 € de frais non-taxables, formant implicitement appel incident, priant la cour d'évoquer l'affaire et poursuivant la réformation du jugement en renouvelant tous ses moyens de nullité et sa demande d'annulation de la cession, en offrant de rembourser au cédant le prix versé et à la SCI, le montant du remboursement de son apport initial à hauteur de 41.319 €, tout en sollicitant, à nouveau, l'expulsion de Monsieur [C] [L] et l'autorisation d'effectuer les formalités de publicité légale suite à l'annulation qui sera prononcée, tout en soutenant que Monsieur [C] [L] est irrecevable, pour défaut de qualité à agir, à demander l'expulsion de Madame [H] ;

SUR CE, la cour :

Considérant liminairement, qu'en rejetant les fins de non-recevoir soulevées par Monsieur [C] [L], tirées des délais prévus aux articles 1844-12 et 1622 du code civil, le jugement tranche, dans son dispositif, une partie du principal de sorte que l'appel est recevable en application de l'article 544 du code de procédure civile ;

Que, par ailleurs, si les moyens de nullité invoqués par Madame [H], concernant le défaut de respect des formalités statutaires lors d'une cession de titres et le vice allégué du consentement, résultant d'une contrainte morale, ont été implicitement rejetés par le tribunal [motifs du jugement pages 7 et 8], celui-ci, au vu d'une évaluation du pavillon en 2005, a estimé nécessaire de recourir à une expertise comptable afin de déterminer la valeur de la SCI ESPACE et des 915 parts sociales dont la cession est aujourd'hui litigieuse ;

Qu'il s'en déduit que, contrairement aux allégations de l'appelant, le tribunal, en ordonnant une expertise, n'a pas véritablement tranché la partie de la demande de nullité fondée sur l'éventuel caractère dérisoire du prix stipulé et l'éventuelle absence de cause, en ce que, précisément, ce sont les résultats des investigations de l'expert judiciaire qui permettront, à la juridiction saisie, d'apprécier la pertinence des moyens ci-dessus rappelés et, le cas échéant, d'en déduire la solution à donner au litige ;

Que dès lors, pour une bonne administration de la justice, afin de donner rapidement une solution au litige, il apparaît nécessaire d'évoquer l'affaire conformément à la demande formulée par l'intimée, l'expertise étant désormais achevée et le rapport ayant été versé aux débats devant la cour ;

sur les fins de non-recevoir à nouveau soulevées par Monsieur [C] [L], le défaut de respect des formalités statutaires et le vice du consentement par violence à nouveau invoqués par Madame [H]

Considérant que Madame [H] poursuivant, à titre principal, l'annulation de l'acte sous seing privé intervenu entre les parties le 16 juin 2005, ne poursuit pas l'annulation d'un acte de société, ni davantage ne formule une demande de supplément de prix, les articles 1844-12 et 1622 du code civil, invoqués par Monsieur [C] [L], sont inapplicables à la contestation concernant la validité de l'acte de cession de parts sociales de la SCI ESPACE, étant, par ailleurs, observé que la mise en demeure de l'article 1844-12 du code civil faisant courir un délai de six mois n'a pas été invoqué à l'encontre de la contestation élevée par Madame [H] sur la validité de l'assemblée générale extraordinaire du 16 juin 2005 ;

Considérant, par ailleurs, que Madame [H], ne déniant pas l'authenticité de sa signature, ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, d'avoir été contrainte de signer la feuille de présence de l'assemblée générale extraordinaire du 16 juin 2005 de la SCI ;

Qu'en se bornant à faire valoir que le procès-verbal, versé aux débats, de cette AGE ne comporte que les signatures de Monsieur [O] et de Monsieur [C] [L], elle ne démontre pas davantage que ladite assemblée ne se serait pas véritablement tenue, puisque les stipulations finales de l'article 17 des statuts (page 13) prévoient que les copies ou extraits de procès-verbaux sont signés par l'un des gérants, Monsieur [O] étant le gérant en exercice, désigné dès l'origine dans les statuts, et Monsieur [C] [L] ayant été désigné co-gérant par la troisième résolution de ladite AGE ;

Qu'en tout état de cause, il est inopérant de prétendre que l'acte de cession de parts serait nul du fait d'un prétendu défaut de respect des formalités d'agrément prévues par les statuts de la SCI, ce qui ne pourrait, tout au plus, si l'allégation était démontrée, rendre la cession inopposable à la société, ce qui n'est pas demandé, sans pour autant nuire à la validité de l'acte entre les parties ;

Considérant que Madame [H] fait aussi valoir que :

- dès lors qu'elle a remis en cause la cession, Monsieur [C] [L] l'a harcelée moralement [conclusions page 3], voire insultée [conclusions page 9] en menaçant de l'expulser de la maison où ils co-habitaient, alors qu'elle s'estime titulaire d'un bail qui aurait été accordé par la SCI propriétaire, le comportement agressif de son ex-concubin ayant fait l'objet du dépôt d'une main courante, le 2 décembre 2006 [conclusions page 3],

- les attestations qu'elles produit n'avaient pas à dater les faits avec précision (comme le leur reproche le jugement) puisque les pressions qu'elles décrivent étaient permanentes, tandis que Madame [H] estime que les attestations produites par Monsieur [C] [L] 'sont de pure complaisance' ;

Mais considérant, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, que Madame [H] ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de la violence alléguée, les attestations versées aux débats ne précisant pas la date des faits qu'elles relatent, de sorte, qu'à les supposer établis, il n'est pas démontré que les pressions alléguées existaient au moment de l'échange des consentements lors de l'établissement de l'acte litigieux du 16 juin 2005, d'autant que toutes les attestations produites par l'intimée s'échelonnent du 29 avril au 2 mai 2007, soit près de deux années après l'intervention de l'acte critiqué ;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé sur la partie du fond qu'il a tranché ;

sur le prix

Considérant que Madame [H] poursuit également l'annulation de l'acte litigieux, en soutenant que le prix stipulé par les parties serait dérisoire ;

Qu'il n'est pas contesté que le pavillon de [Localité 5] constitue l'unique actif significatif de la SCI, de sorte que la valeur du bien immobilier, au jour de la cession des parts sociales, est déterminant dans l'estimation de la valeur des parts cédées ;

Qu'en faisant la synthèse des deux évaluations dudit pavillon à la date de juin 2005 (celle de l'agent immobilier consulté par Madame [H] et celle du sapiteur) et en tenant compte des autres éléments du bilan de la SCI (dont notamment le montant du capital restant à amortir du prêt bancaire), l'expert évalue les 915 parts cédées (représentant la moitié du capital social de la SCI) à hauteur moyenne de 152.781 € ;

Que l'acte de cession du 16 juin 2005 stipule un prix de 4.575 € sans aucunement prévoir que le cessionnaire prendra, en outre, en charge le compte courant débiteur de la cédante dans les livres de la SCI ;

Que c'est dès lors à tort, que l'expert, relevant dans son rapport (page 19) 'il semble que le montant de 91.500 €, dû par Madame [H], ait été soldé par un simple jeu d'écriture, à savoir le transfert d'un compte courant débiteur de Madame [H] à Monsieur [C] [L] ', en a déduit (page 23 du rapport) que 'Madame [H] doit rembourser à son acquéreur son compte courant débiteur, soit 91.500 €', alors qu'il n'a pas constaté que cette somme aurait effectivement été versée par Monsieur [C] [L] dans la caisse de la SCI, ni davantage recherché si ce dernier avait effectivement pris l'engagement de verser cette somme envers la société, l'inscription en compte par la SCI dans ses livres, dont Monsieur [C] [L] est l'un des gérants, étant, à elle seule, insuffisante à établir cet engagement en l'absence d'un acte émanant de Monsieur [C] [L] lui-même et en présence de la contestation élevée par Madame [H] ;

Que de même, Monsieur [C] [L] ne peut pas prendre en compte, dans le calcul du prix effectif de la cession, le paiement de 41.319 € par la SCI ESPACE en faveur de Madame [H], intervenu au moment de l'établissement de l'acte litigieux, à défaut de rapporter la preuve de son engagement de re-prendre cette dette de remboursement à son compte vis-à-vis de la SCI ;

Qu'au regard de la valeur réelle des 915 parts cédées (152.781 € environ) et du prix stipulé et quittancé dans l'acte (4.575 €), c'est à juste titre que Madame [H] soutient le caractère dérisoire de ce dernier, l'écart considérable ainsi constaté le rendant inexistant, le défaut de sérieux du prétendu prix stipulé entraînant la nullité absolue de la cession ;

Considérant qu'il appartiendra aux parties de tirer les conséquences de la décision ci-après de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes :

- d'expulsion, la SCI propriétaire du local n'étant pas dans la cause,

- d'autorisation d'effectuer les formalités de publicité, celles-ci devant résulter de l'exécution de l'arrêt à intervenir ;

Que succombant, Monsieur [C] [L] ne saurait prospérer dans sa demande d'indemnisation de ses frais irrépétibles ;

Qu'il serait, en revanche, inéquitable de laisser à la charge définitive de l'intimée, ceux qu'elle a dû exposer depuis l'origine de l'instance ;

PAR CES MOTIFS:

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté :

- les fins de non-recevoir soulevées par Monsieur [C] [L],

- (implicitement) le défaut de respect des formalités statutaires et le vice du consentement par violence invoqués par Madame [H],

- ordonné une expertise,

Évoquant pour le surplus des demandes,

Annule l'acte sous seing privé du 16 juin 2005 (enregistré le 1er juillet 2005 à la 'recette élargie des impôts de [Localité 5]', bordereau n° 2005/266, case n° 9) de cession des 915 parts sociales de la SCI ESPACE, intervenu entre Madame [M] [H] (cédante) et Monsieur [E] [C] [L] (cessionnaire) ;

Dit n'y avoir lieu de statuer sur les demandes d'expulsion et d'autorisation d'effectuer les formalités de publicité,

Prend acte de l'engagement de Madame [M] [H] (dans le dispositif de ses conclusions) de restituer à Monsieur [E] [C] [L] la somme de 4.575 € et de reverser, dans les caisses de la SCI ESPACE la somme de 41.319 €,

Condamne Monsieur [E] [C] [L] aux dépens de première instance et d'appel et à verser deux mille euros (2.000 €) de frais irrépétibles à Madame [M] [H],

Admet la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

D. COULON P. MONIN-HERSANT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 10/13939
Date de la décision : 05/01/2012

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°10/13939 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-05;10.13939 ?
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