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04/04/2012 | FRANCE | N°10/15960

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 04 avril 2012, 10/15960


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRET DU 04 AVRIL 2012



(n° ,7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/15960



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Mars 2010 -Tribunal de Commerce de BERGERAC - RG n° 2009F00089





APPELANTS



SARL MEDILINDUSTRY agissant poursuites et diligences de son gérant

Ayant son siège social
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[Localité 4]



Représentée par la SCP DUBOSCQ&PELLERIN, avocats au barreau de PARIS, toque L0018

Assistée par Me Sébastien SEGARD, plaidant pour la SCP UGGC & Associés, substitu...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRET DU 04 AVRIL 2012

(n° ,7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/15960

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Mars 2010 -Tribunal de Commerce de BERGERAC - RG n° 2009F00089

APPELANTS

SARL MEDILINDUSTRY agissant poursuites et diligences de son gérant

Ayant son siège social

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par la SCP DUBOSCQ&PELLERIN, avocats au barreau de PARIS, toque L0018

Assistée par Me Sébastien SEGARD, plaidant pour la SCP UGGC & Associés, substituant Me Thierry MONTERAN, toque P 261

INTERVENANTS VOLONTAIRES

Me [O] [S] pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la SARL MEDILINDUSTRY

[Adresse 3]

[Localité 4]

Me [P] [U] pris en sa qualité de mandataire judiciaire de la SARL MEDILINDUSTRY

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentés par la SCP DUBOSCQ&PELLERIN, avocats au barreau de PARIS, toque L0018

Assistés par Me Sébastien SEGARD, plaidant pour la SCP UGGC & Associés, substituant Me Thierry MONTERAN, toque P 261

INTIMEE

S.A.S. VILGO prise en la personne de son président

Ayant son siège social

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par la SCP GALLAND - VIGNES, avocats au barreau de PARIS, toque L0010

Assistée par Me Jean-Claude MARTIN, plaidant pour la SCP MARTIN et Associés, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 Février 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur JACOMET conseiller faisant fonction de président et Madame Dominique SAINT SCHROEDER conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Fabrice JACOMET conseiller faisant fonction de président

Monsieur Bernard SCHNEIDER désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de Paris en vertu de l'article R312-3 du code de l'organisation judiciaire pour compléter la chambre .

Mme Dominique SAINT-SCHROEDER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Véronique GAUCI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Fabrice JACOMET, président et par Madame Camille RENOUX, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

****

La société Vilgo, spécialisée dans la production et la vente de matériel médical, appartenait au même groupe d'actionnaires, la société de développement hôtelier et hospitalier, que la société Matifas qui avait pour activité la fabrication de lits pour les hôpitaux et cliniques et avec laquelle une convention intragroupe a été signée le 7 mars 2000 ainsi qu'un contrat de sous-traitance le 30 avril 2004. Matifas a été placée en redressement judiciaire le 2 mars 2007 par le tribunal de commerce d'Amiens puis a fait l'objet d'un plan de cession ordonné par jugement du 29 juin 2007 avec entrée en jouissance le 1er juillet suivant au profit de la société JIPG qui s'est substituée la société Medilindustry . En exécution de ce jugement, Matifas a été cédée le 15 octobre 2007 à cette dernière qui a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 5 juillet 2007 en vue de la reprise de Matifas. Le contrat de sous-traitance de 2004 n'a pas été cédé mais des relations commerciales ont été échangées par les deux sociétés jusqu'au 16 novembre 2007, date à laquelle le nouveau dirigeant de Vilgo depuis la mi-octobre 2007 a indiqué à Medilindustry, par lettre recommandée avec avis de réception, qu'il entendait mettre fin à la relation commerciale pour cause de non-conformité des lits livrés avec la norme NF en vigueur, de la qualité de la fabrication, du non-respect des délais et de l'augmentation unilatérale des tarifs des

pièces détachées. Aucun accord n'ayant été trouvé, notamment au sujet de l'annulation des commandes fermes non livrées et de la rupture des relations commerciales sans préavis, Medilindustry a fait assigner Vilgo devant le président du tribunal de commerce d'Amiens statuant en référé aux fins de nomination d'un expert qui a été désigné par ordonnance du 25 avril 2008 et a déposé son rapport le 3 octobre suivant. Par acte du 5 juin 2009, Medilindustry a fait assigner Vilgo au fond en payement de différentes sommes correspondant aux matériels commandés et en stock, aux commandes fermes annulées par Vilgo, au coût des pièces détachées destinées à la production Vilgo et aux préjudices résultant de la rupture brutale de la relation commerciale établie devant le tribunal de commerce de Bergerac qui, par jugement du 26 mars 2010, a condamné la société HMS-Vilgo à prendre livraison du matériel commandé en stock et à lui payer la somme de 51.370,59 € TTC, lui a donné acte de ce qu'elle tenait à la disposition de celle-ci l'ensemble du matériel, objet de cette demande, a dit que HMS-Vilgo devra prendre livraison dans les locaux de Medilindustry de l'ensemble du matériel objet de cette demande, a débouté cette société de ses autres demandes et a condamné HMS-VILGO à lui payer la somme de 2500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'expertise.

Medilindustry a interjeté appel de cette décision le 29 juillet 2010. Elle a été admise au bénéfice d'une mesure de sauvegarde par jugement du 11 mars 2011 du tribunal de commerce d'Amiens qui a désigné Maître [O] [S] en qualité d'administrateur judiciaire et Maître [P] [U] en qualité de mandataire judiciaire, lesquels sont intervenus volontairement à l'instance.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 26 janvier 2012, Medilindustry et les mandataires judiciaires demandent à la cour, au visa des articles L.442-6 5°, L.441-6 et D.442-3 du code de commerce, 1134, 1147, 1153 et suivants et 1382 du code civil, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société HMS-Vilgo à payer la somme de 51.370,59 € TTC, a donné acte de ce que Medilindustry tenait à la disposition de HMS-Vilgo l'ensemble du matériel, objet de cette demande, a dit que celle-ci devra prendre livraison dans les locaux de Medilindustry de l'ensemble du matériel objet de cette demande et a condamné HMS-Vilgo à payer à cette société la somme de 2500 € au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens et demandent que la somme de 51.370,59 € TTC soit majorée des intérêts au taux légal à compter de chaque facture ou, à défaut, à compter du 14 janvier 2009, date de l'assignation en référé provision, ainsi que des pénalités de retard en application de l'article L.441-6 du code de commerce et sollicite la capitalisation des intérêts. Les appelants concluent à l'infirmation du jugement pour le surplus et à la condamnation de Vilgo au payement, au bénéfice de Medilindustry, des sommes suivantes :

-1.200.000 € à titre de dommages-intérêts en indemnisation de la rupture brutale de la relation commerciale établie équivalente à un minimum de deux ans de préavis,

-97.650,52 € à titre de dommages-intérêts pour la perte de marge brute subie sur le solde des commandes annulées,

-83.446,12 € TTC au titre du coût des pièces détachées destinées à la production Vilgo,

-600.000 € en réparation des autres préjudices,

outre les intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2009 sur l'ensemble de ces sommes et capitalisation des intérêts, la somme de 2500 € étant réclamée en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vilgo conclut dans ses dernières écritures du 6 janvier 2012 à la confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a écarté l'application de l'article L. 442-6 5° du code de commerce et à son infirmation pour le surplus ainsi qu'au rejet de l'ensemble des demandes de Medilindustry et réclame une indemnité de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Considérant que Medilindustry et ses mandataires judiciaires font valoir tout d'abord que l'expert, M. [Y], a conclu à la conformité des matériels aux commandes passées, ce qui était l'objet de sa mission, de sorte que c'est en vain que Vilgo justifie la rupture des relations commerciales par la prétendue non-conformité desdits matériels ;

Qu'ils soutiennent qu'il importe peu que le contrat de sous-traitance de 2004 n'ait pas été cédé dès lors que Vilgo a poursuivi les relations commerciales qu'elle entretenait avec Matifas de sorte que la durée des relations commerciales à prendre en compte est celle qui part du début de la relation de Vilgo avec Matifas à laquelle Medilindustry a succédé; qu'ils rappellent que la cession de Matifas comprenait notamment la clientèle de cette société dont Vilgo faisait partie et que cette dernière a adressé ses nouvelles commandes à Medilindustry qui, de son côté, a poursuivi l'exécution des commandes de Vilgo y compris les anciennes commandes en cours passées à Matifas;

Qu'ils contestent la pertinence des arguments avancés par Vilgo pour nier la poursuite de la relation commerciale nouée avec Matifas tels que le changement de dirigeant, la conclusion de nouvelles conventions alors que l'élément déterminant n'est pas la reprise d'un contrat mais la poursuite de la relation commerciale matérialisée par la poursuite des commandes, et la qualification de la période de poursuite des relations durant trois mois en « pourparlers »;

Qu'ils affirment que les relations commerciales entre les sociétés Matifas et Vilgo ayant existé depuis plusieurs dizaines d'années, Vilgo aurait dû accorder à Medilindustry un préavis de 2 ans, ce pourquoi celle-ci réclame les sommes susvisées;

Considérant que Vilgo, après avoir rappelé la nature particulière des relations commerciales entretenues avec Matifas dont le dirigeant, M. [W] [H], était le même, objecte qu'elle n'a conclu aucun contrat après la sortie du groupe de Matifas, les relations antérieures ayant été régies par la note de [W] [H] du 7 mars 2000 et la convention de 2004 qui y faisait référence; qu'elle affirme que lors de sa reprise par la société HMS le 12 octobre 2007, son président a souhaité rencontrer les dirigeants de Medilindustry afin de déterminer les conditions d'une éventuelle collaboration, les prix, les délais de livraison et les quantités dès lors que les conventions de 2000 et de 2004 ne s'appliquaient pas mais que la réunion du 9 novembre 2007 n'a donné aucun résultat; qu'elle a alors exprimé ses griefs par lettre du 16 novembre 2007 et a attendu qu'une proposition lui soit faite par Medilindustry pour y remédier ; qu'aucune proposition concrète n'ayant été émise par cette société, elle a mis fin aux relations commerciales qui n'avaient duré, selon elle, que trois mois;

Qu'elle ajoute être étrangère aux difficultés économiques exposées par Medilindustry et précise que sa part dans le chiffre d'affaires de Matifas en 2006 ne représentait que 7% de celui-ci; qu'elle fait observer que Medilindustry, non seulement n'a procédé à aucun licenciement mais au contraire a porté ses effectifs de 95 à 120 en octobre 2008; qu'elle explique la situation économique actuelle de la société appelante par la stratégie de ses repreneurs qui ont licencié la totalité du personnel et délocalisé l'activité au cours de l'année 2010;

Que s'agissant de l'expertise de M. [Y], elle prétend que ce dernier n'a pas rempli sa mission en ce qui concerne la vérification de la détermination des prix et n'a pas sérieusement vérifié le respect des normes auquel était astreinte Medilindustry;

Considérant, cela étant exposé, que les parties sont donc contraires sur le point de départ de leur relation commerciale, les appelants affirmant que Medilindustry a poursuivi celle qu'entretenaient les sociétés Vilgo et Matifas à laquelle celle-ci a succédé, l'estimant à 'plusieurs années', tandis que Vilgo la fait débuter au jour de la cession du fonds de commerce de Matifas au profit de Medilindustry au mois de juin 2007;

Considérant qu'il est constant que les règles de facturation et/ou de partage des marges réalisées dans le cadre des échanges de marchandises par les sociétés Matifas, Vilgo et Villard du groupe 'médical', ont été définies par la convention intra groupe du 7 mars 2000 signée par [W] [H], alors président de Villard, de Matifas et de Vilgo; que l'on peut donc situer à cette date le début des relations commerciales entre Vilgo et

Matifas, à défaut d'élément probant habile à établir le début de ces relations à une date antérieure; que le tribunal de commerce d'Amiens a arrêté le plan de cession de Matifas suivant jugement du 29 juin 2007 avec une entrée en jouissance au 1er juillet suivant au profit de JIPG (Holding) ou toute personne appelée à lui succéder, en l'espèce Medilindustry; que l'acte de cession vise de façon expresse la clientèle parmi les éléments cédés; que si le contrat de sous-traitance n'est pas visé dans la cession, il demeure que Vilgo ne dément pas, et les bons de commande et lettres de voiture produits par les appelants en témoignent, avoir continué de passer commande de lits et autres matériels mobiliers auprès de Medilindustry après la cession de l'entreprise Matifas; qu'il résulte de ces constatations que Vilgo a poursuivi avec Medilindustry la relation commerciale intialement nouée avec Matifas; que l'existence d'une relation commerciale établie est ainsi démontrée ;

Considérant qu'après avoir refusé pour partie une première livraison par lettre du 13 novembre 2007 pour non conformité puis une seconde par lettre du 29 novembre suivant, Vilgo a fait savoir à Medilindustry par lettre du 30 novembre 2007 que la prochaine réception , 'si tant est que la qualité de fabrication soit acceptable', serait la dernière; qu'elle ajoutait : 'Le solde des commandes en cours est annulé; les retards de livraison sont trop importants (...)'; que pour justifier cette rupture, Vilgo excipe du défaut de conformité des lits;

Mais considérant qu'il résulte de l'expertise ordonnée en référé le 25 avril 2008 par le président du tribunal de commerce d'Amiens aux fins de : 'examiner l'ensemble des lits actuellement stockés et objet des livraisons refusées par la société Vilgo; décrire ces matériels, donner leur quantité et dire si, au vu de leurs caractéristiques techniques (dimensions, matériaux utilisés, montage, accessoires, etc.) ils sont conformes aux commandes passées; dire si ces matériels sont affectés de désordres, dans ce cas, les décrire, dire s'ils sont notables ou au contraire minimes, et dire si ces désordres rendent ces matériels impropres à leur usage; dire si la qualité de fabrication est conforme, eu égard notamment à leur prix de vente, et plus généralement, dire si ces matériels sont fabriqués dans les règles de l'art; donner son avis sur la qualité de fabrication de ces matériels et à cette fin, comparer ces matériels à des matériels identiques, ou analogues de standard équivalent, en possession des parties;(...)', que les lits sont conformes aux exigences contractuelles de Vilgo, que leur examen n'a pas permis de mettre en évidence des désordres, des ruptures d'assemblage ou des dysfonctionnements; que l'expert a relevé que l'aspect de certaines soudures pouvaient être améliorées; que cet aspect inesthétique ne peut cependant, à lui seul, être de nature à justifier un refus de livraison dès lors qu'il ressort des constatations de l'expert que cet aspect inesthétique n'affecte en rien la fonctionnalité du lit pour qu'il se développe dans différentes positions pour le confort du malade et que la qualité de la structure des lits est convenable pour l'usage qui en est attendu; qu'il est d'ailleurs précisé par l'expert qu'il n'a pas été fait mention de rupture ou de dysfonctionnement des lits avant la réunion d'expertise; que Vilgo a pu soumettre tout particulièrement à l'examen de l'expert les lits qu'elle estimait présenter des désordres et que ce dernier n'a pas, après cet examen, relevé de défauts ni de dysfonctionnements, seul l'aspect inesthétique de quelques soudures ayant été mentionné; que Vilgo qui critique les conclusions de l'expert telles que rapportées ci-dessus ne produit néanmoins pas de pièces susceptibles d'établir que les lits n'étaient pas conformes à l'usage auxquels ils étaient destinés au regard des normes alors en vigueur;

Considérant qu'au vu des conclusions de l'expert et des documents qui ont été produits et remis à ce dernier, il apparaît que la mauvaise qualité du matériel mise en avant par Vilgo pour justifier la rupture immédiate de la relation commerciale ne peut être retenue comme un juste motif de cette brusque rupture; que pas plus les retards de livraison allégués ne peuvent-ils l'être dès lors que la preuve de ces retards répétés de livraison n'est pas rapportée, étant observé par ailleurs que, contrairement à ce que prétend Vilgo, la mission de l'expert ne portait pas sur la 'vérification de la détermination des prix';

Qu'il suit de ces développements que Vilgo a rompu brutalement la relation commerciale

établie entre les parties sans préavis écrit tenant compte de la durée de cette relation commerciale et a, de ce fait, engagé sa responsabilité;

Considérant qu'eu égard à la durée de la relation commerciale, soit sept années, il y a lieu de fixer le préavis à six mois, lequel doit être porté à un an dès lors que les lits commandés par Vilgo sont fabriqués sous la marque Vilgo et que, dans un tel cas, l'article L.442-6 I 5° du code de commerce prévoit que la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur;

Considérant que Médilindustry ne peut obtenir réparation que du préjudice entraîné par le caractère brutal de la rupture et non du préjudice découlant de la rupture elle-même; que ce préjudice doit être réparé au regard de la marge brute qui aurait dû être réalisée au cours du préavis;

Considérant qu'il n'est pas contesté que le chiffre d'affaires global de l'appelante pour l'année 2006 s'est élevé à 17.122.654 €; que la part de la production pour Vilgo représentait environ 7%, les parties s'accordant sur le montant du chiffre d'affaires réalisé par Matifas et Medilindustry avec Vilgo en 2006 et 2007, soit environ 1.200.000 € par an; que Médilindustry chiffre à 50% la perte de marge brute réalisée; que si la perte de marge brute de cette société est certaine dès lors que les commandes provenant de Vilgo ont cessé, elle ne met cependant pas aux débats les éléments comptables probants (tels que les salaires et achats de matières premières à déduire) permettant de retenir un taux supérieur à 30%; que la cour, au vu des éléments d'appréciation qui sont versés aux débats, fixe cette perte à la somme de 360.000 €;

Considérant que Medilindustry, qui ne peut prétendre comme il vient d'être dit, à une autre réparation que celle du préjudice résultant de la brutalité de la rupture, ne peut réclamer, en sus de l'indemnité de rupture, le montant des commandes annulées et en stock; que s'agissant des pièces détachées qui auraient été, aux dires de l'appelante, exclusivement destinées aux produits Vilgo, la preuve de cette affectation exclusive n'est pas rapportée, seule l'attestation du gérant de la sarl Medilindustry du 15 décembre 2008 étant produite et la liste signée par celui-ci ne révélant pas que les pièces qui y sont énumérées ne pourraient être utilisées dans le cadre de commandes provenant d'autres clients que Vilgo; que la demande de dommages-intérêts tendant à réparer les préjudices d'image et commercial allégués par Medilindustry n'est étayée par aucune pièce justificative; que la mise en place de trois plans de sauvegarde est de surcroît sans lien direct avec la brusque rupture de la relation commerciale entretenue avec Vilgo comme cela ressort du rapport du 12 septembre 2011 de l'administrateur judiciaire, [O] [S],qui relève que Medilindustry a créé 25 emplois et porté son effectif à 121 salariés au 19 février 2009; que cette demande de dommages-intérêts sera donc rejetée;

Et considérant qu'il y a lieu d'allouer à Medilindustry une indemnité supplémentaire en application de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter la demande formée du même chef par Vilgo;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné la société Vilgo à payer à la société Medilindustry la somme de 2500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'expertise,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société Vilgo à payer à la société Medilindustry la somme de 360.000 € à titre de dommages-intérêts et celle de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Vilgo aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Camille RENOUX Fabrice JACOMET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 10/15960
Date de la décision : 04/04/2012

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°10/15960 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-04-04;10.15960 ?
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