RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRÊT DU 02 Mai 2012
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/06187
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Juin 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses RG n° 07/10229
APPELANTE
Mademoiselle [P] [S] [N]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Me Rafaele BLACHERE, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE
SARL CELLA INFORMATIQUE venant aux droits de la SARL VIRTUTIS
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Sébastien STEIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J064
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 Mars 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
Madame Dominique LEFEBVRE-LIGNEUL, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour est saisie de l'appel interjeté par Melle [N] du jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris section activités diverses chambre 4 du 3 juin 2010 qui a condamné la société Cella Informatique à lui payer la somme de 12 000€ pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1000 € pour frais irrépétibles et a ordonné le remboursement aux organismes sociaux des indemnités de chômage dans la limite de 3 mois.
FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
Melle [N] a été engagée le 3 juillet 2000 en qualité d'assistante de gestion par la société Information Technology Software, dite Its, au dernier salaire de 2000€ par mois.
Lors de l'assemblée générale du 16 décembre 2002, il a été voté l'augmentation du capital social de la société Its avec introduction du nouvel associé majoritaire, le Groupe Cella Informatique.
Melle [N] a été licenciée le 29 janvier 2003 pour suppression de son poste suite au rapprochement de la société Its avec le Groupe Cella Informatique, avec dispense d'exécution de son préavis de 2 mois.
Melle [N] a saisi le conseil des prud'hommes le 25 septembre 2007 en revendiquant la qualité de salariée protégée comme étant déléguée du personnel selon élection du 25 avril 2002.
L'entreprise est soumise à la convention collective syntec et compte plus de 11 salariés.
Melle [N] demande d'infirmer le jugement, de dire le licenciement nul à défaut d'autorisation du licenciement au regard de sa qualité de déléguée du personnel, de condamner la société Cella Informatique à payer les sommes de :
26 000 € pour les salaires du mois de 'février 2003" ( en fait avril 2003) à mai 2004)
12 000 € pour la période de juin 2004 à novembre 2004
22 000 € pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse
2000 € à titre de dommages-intérêts pour le non-respect de la procédure de licenciement
2000 € pour frais irrépétibles.
La société Cella Informatique venant aux droits de la société Virtutis demande par voie d'infirmation de débouter Melle [N] de toutes ses demandes et en tout cas de réduire à un mois le remboursement des indemnités de chômage.
SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience ;
Sur la revendication de la qualité de déléguée du personnel
Melle [N] justifie de réclamations restées vaines faites en 2007 et 2008 auprès de l'inspection du travail, de la direction départementale du travail et de la Cgt en vue d'obtenir une copie du procès-verbal d'élection du personnel;
Elle produit :
- les copies non signées du procès-verbal de la première réunion ordinaire datée du 13 mai 2002 des délégués du personnel relatant la participation de M. [W], dirigeant d'Its, et de MM. [N] et [M], délégués du personnel, portant les logo et timbres de la société Its avec des références téléphoniques de l'époque similaires à celles portées sur le contrat de travail, du commentaire des délégués du personnel du 17 juin 2002 remis à la direction faisant état de l'élection des délégués du personnel depuis le 25 avril fait par Melle [N], déléguée titulaire et M. [M], délégué suppléant, ainsi que du procès-verbal de la réunion du 25 juin 2002 avec la participation de MM. [W], [N] et [M] relatant le voeu de la rédaction d'un procès-verbal de la réunion précédente en accord avec la direction,
-les attestations des salariés de la société Its, MM. [U], directeur technique, [R], informaticienne, et [A], infographiste, attestant de sa qualité de déléguée du personnel titulaire depuis le début d'année 2002 ;
Ces éléments concordants portant des références téléphoniques, timbres et dirigeant de l'époque 2002 de la société Its, avant sa reprise par le Groupe Cella, sont suffisants pour établir la qualité de déléguée du personnel de Melle [N], ensuite des vaines tentatives de se faire produire par des tiers le procès-verbal d'élection qui n'est pas le seul moyen de preuve admissible de ce fait juridique ;
La saisine tardive du conseil des prud'hommes est sans conséquence et l'allégation de la société Cella selon laquelle la société Its n'était pas tenue d'organiser des élections de délégués du personnel en avril 2002 à défaut d'effectif supérieur à 11 depuis plus de 12 mois n'est pas établie à défaut de production du registre du personnel de la société Its malgré demande de Melle [N] ;
L'attestation de Mme [T], assistante de direction dans la société Cella et administratrice de la société Its, d'après le procès-verbal d'assemblée du 16 décembre 2002, selon laquelle elle n'a pas été informée de la qualité de déléguée du personnel de Melle [N] qui n'a pas voulu s'intégrer dans le Groupe Cella et a demandé à être licenciée, n'est pas de nature à apporter la preuve contraire en raison de son implication dans l'administration de la société et alors que le licenciement économique prononcé va à l'encontre de ses affirmations ;
Sur le licenciement
Le licenciement de Melle [N] dont la qualité de déléguée du personnel est reconnue, sans autorisation préalable de l'inspection du travail, est nul ;
Melle [N] sera accueillie en sa demande de paiement de salaire pendant la période de protection allant, à l'issue du préavis, d'avril 2003 à octobre 2004 inclus, pour la somme globale de 38 000 € ;
Il lui sera alloué pour le licenciement illicite la somme de 12 000 € appropriée au préjudice subi ;
Le licenciement étant nul, il n'est pas besoin d'examiner la cause réelle et sérieuse du licenciement, étant observé toutefois à toutes fins que le licenciement n'est pas fondé à défaut d'indication de cause économique et de recherche de reclassement ;
Il n'y a pas lieu à cumul avec une indemnité de non-respect de procédure pour défaut de convocation à entretien préalable, s'agissant d'une société employant plus de 11 salariés pour un emploi de plus de 2 ans ;
La société qui a contrevenu gravement à ses obligations sera condamnée en tant que de besoin à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage restant à leur charge dans la limite de 6 mois, à moins que ces organismes ne se fassent rembourser les indemnités servies par la salariée, au regard de la condamnation de la société Cella à payer les salaires de Mme [N] pendant la période allant jusqu'à début novembre 2004 ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement et statuant à nouveau :
Dit le licenciement nul au regard de la qualité reconnue à Melle [N] de déléguée du personnel ;
Condamne la société Cella Informatique à payer à Melle [N] les sommes de :
38 000 € de rappel de salaire pour la période d'avril 2003 à octobre 2004 inclus
12 000 € de dommages-intérêts pour licenciement nul
2000 € pour frais irrépétibles.
Ordonne en tant que de besoin le remboursement des indemnités de chômage restant à la charge des organismes intéressés dans la limite de 6 mois.
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société Cella Informatique aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT