RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRÊT DU 29 Mai 2012
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/11612
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juin 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Activités diverses RG n° 10/14990
APPELANT
Monsieur [V] [K]
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparant en personne, assisté de Me Katia DEBAY, avocat au barreau de VERSAILLES
INTIME
SAS SAMSIC SECURITE
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Cédric LIGER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1065
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Avril 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
Madame Dominique LEFEBVRE-LIGNEUL, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour est saisie de l'appel interjeté par M. [K] du jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris section Activités Diverses chambre 4 du 29 juin 2011 qui a condamné la société Samsic Sécurité à lui payer les sommes suivantes:
6 427.28 € à titre de préavis et 642.72 € pour congés payés afférents
avec intérêt légal à dater de la réception de la convocation par la partie défenderesse devant le bureau de conciliation
25 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
et 1000 € pour frais irrépétibles.
FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
M. [K] a été engagé le 6 novembre 1993 en qualité d'agent de sécurité ; Il a été par la suite, responsable du centre opérationnel de sécurité jusqu'à sa fermeture en novembre 2006.
Il a refusé le 8 avril 2007 le poste de responsable d'exploitation planning comportant des astreintes de nuit et week-end, proposé les 2 juin et 27 juillet 2006 et 1er mars 2007 notamment pour des raisons d'horaires, d'astreinte et de fonctions ;
Il a été affecté à diverses missions et en avril 2007 au service facturation;
Il est chargé de recrutement selon avenant signé le 17 février 2010 avec effet au 1er novembre 2009 ;
Il est en arrêt-maladie du 7 avril au 18 juin 2010 ;
Il a exercé des mandats de représentation depuis 1999;
Il a été désigné délégué syndical par la Cfdt par lettre du 3 avril 2006 et par la Cgt par lettre du 3 avril 2009 jusqu'à son remplacement par lettre du 6 novembre 2009, envoyées à son employeur.
Entre temps, il avait démissionné de son premier mandat de délégué syndical selon lettre du 17 mars 2009 adressé à la Cfdt ;
Il a été convoqué le 20 septembre 2010 avec dispense de présence dans l'entreprise et maintien de rémunération à un entretien préalable au 30 septembre 2010 et licencié le 29 octobre 2010 pour faute grave.
L'entreprise est soumise à la convention collective des entreprises de sécurité ;
M. [K] par voie d'infirmation demande dire le licenciement nul et de condamner la société Samsic Sécurité à payer les sommes de 77 000 € pour licenciement nul et 10 000 € pour violation du statut protecteur, subsidiairement 77 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en tout état de cause d'ajouter les sommes de 13 925.71 € pour indemnité de licenciement, 10 000€ pour discrimination syndicale, 5 000 € de dommages-intérêts pour les conditions du licenciement et 4000 € pour frais irrépétibles.
La société Samsic Sécurité demande de débouter M. [K] de ses demandes et de le condamner à payer la somme de 2000 € pour frais irrépétibles.
SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience ;
Sur le régime protecteur
Selon l'article L 2411-3 du code du travail, le délégué syndical bénéficie d'une protection dans les 12 mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s'il a exercé ces dernières pendant au moins un an ;
M. [K] dont les fonctions de délégué syndical ont été interrompues entre sa démission avec remise de mandat envoyée au syndicat Cfdt le 17 mars 2009 et le mandat donné par la Cgt entre les 3 avril et 6 novembre 2009 ne bénéficie pas de cette protection à défaut d'exercice de fonctions de délégué syndical pendant un an pour son dernier mandat ; Il ne soutient pas utilement qu'à défaut de notification de relèvement de son mandat par la Cfdt à l'employeur, ses mandats ont été ininterrompus à l'égard de l'employeur : En effet, sa démission du syndicat Cfdt l'a empêché immédiatement d'exercer des fonctions de délégué syndical au nom de ce syndicat de telle sorte que seul le dernier mandat syndical donné par la Cgt doit être pris en considération et qu'il a duré moins d'un an ;
Le licenciement n'avait donc pas besoin d'être autorisé et les demandes et nullité de licenciement et indemnité de statut protecteur seront donc rejetées;
Sur le licenciement
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige fait état :
du message laissé le 17 septembre 2010 sur le répondeur du téléphone portable de M. [N], président de la société, disant 'j'ai honte pour vous, vous êtes un karchérisateur, un dégraisseur, un tueur, les opérations ethniques ont commencé sur [Localité 6]. Vous donnez pouvoir à vos sbires pour licencier tout le monde,'
d'avoir le 18 septembre 2010, sur les remarques de M. [T], directeur régional Ile de France, sur son comportement inacceptable signalé par M. [N], insulté M. [T] en lui disant, 'je vais m'occuper de ton cas, je vais te faire payer, je connais des contacts, con, j'aurai ta peau, je te prépare quelque chose dès la semaine prochaine',
d'avoir fait circuler ensuite une lettre chargée de calomnie remettant en cause les décisions prises dans l'agence de [Localité 6].
Il est rappelé les mises en garde pour les faits précédents des :
10 mars 2010, de dénonciation par l'inspection du travail de son comportement violent à l'égard de M. [D] qui a déposé une main courante sur lequel il n'a pas été possible à Mme [I], (responsable des ressources humaines) d'obtenir des explications en raison de son comportement énervé et insultant envers M. [D],
de courrier sarcastique envoyé le 30 avril 2010 en réponse à une demande de retour d'avenant,
d'incidents coléreux le 7 juin 2010 parce que M. [H] a fermé la porte de son bureau et disant, 'ici, à la direction il n'y a que des tapettes et des enculés',
depuis le 13 septembre 2010 de répandre un message que la direction fait un nettoyage au karcher des maghrébins,
d'avoir demandé des explications le 16 septembre 2010 à Mme [I] sur la promotion d'un collègue, représentant du personnel.
Les attestations de M. [N], président directeur général de la société et de Mme [I], directeur des ressources humaines et signataire de la lettre de licenciement, ne peuvent être prises en moyens de preuve comme faits à soi-même;
Les faits commis avant le délai de deux mois avant la convocation à entretien préalable peuvent être pris en compte s'ils ont été réitérés dans ce laps de temps ;
MM. [C] et [P] ont attesté que l'incident du (10) juin 2010 est en relation avec les doléances de M. [K] que les portes de bureau se fermaient lorsqu'il se trouvait au photocopieur et qu'il a été exclu de certaines réunions d'exploitation;
Par lettre du 10 mars 2010 l'inspection du travail a demandé à la société Samsic de prendre les mesures nécessaires ensuite de la déclaration de main courante faite par M. [D] pour des incidents du 29 janvier 2010 imputés à M. [K] ; MM. [J] et [C] ont attesté que M. [D] en voulait à M. [K] pour un défaut d'appui pour une mutation et qu'il l'a menacé en lui faisant dire qu'il l'avait enregistré sur son téléphone ; Les pièces produites ne permettent pas de connaître la teneur et l'imputabilité de l'incident entre MM. [K] et [D];
La lettre du 30 avril 2010 ne dépasse pas la liberté d'expression du salarié sur son sort dans son entreprise et regrettant de ne pas avoir obtenu le poste de responsable de recrutement en agence;
Le tract de la Cgt relève de la liberté d'expression syndicale ;
Les seuls faits suivants ci-après sont établis à faute :
Mme [N] a attesté le 2 mai 2011 avoir écouté le soir du 17 septembre 2010 le message téléphonique de M. [K] et avoir été profondément choquée par les propos injurieux et agressifs entendus et qui ont affecté son mari dont c'était la première fois qu'il entendait un tel message ;
M. [T] a attesté le 22 octobre 2010 avoir été menacé par M. [K] dans les termes relatés dans la lettre de licenciement le 18 septembre 2010 et avoir été traité de pédale et enculé le 7 juin 2010 ;
Ces faits de menaces et d'insultes réitérés, sis en-dehors de la liberté d'expression du salarié et syndicale, justifient le licenciement sur une cause réelle et sérieuse sans être de nature à entraîner une cessation immédiate du contrat de travail au regard de l'ancienneté du salarié ;
La société sera condamnée à payer deux mois de préavis et l'indemnité de licenciement non critiqués dans leur montant ;
Il n'y a pas lieu à dommages-intérêts pour la dispense d'activité rémunérée imposée par la société dès la convocation à entretien préalable ;
Sur la discrimination syndicale
M. [K] invoque l'absence d'entretiens annuels et de formation, le retard apporté à son reclassement à la fermeture du Cos en novembre 2006 sans répondre à ses candidatures à des postes disponibles, en le laissant sans affectation ou en l'affectant en avril 2007 à un poste de facturation sans rapport avec ses responsabilités antérieures, puis ensuite au poste de chargé de recrutement moindre que celui promis de responsable de recrutement et sans recevoir toutes les informations divulguées dans l'entreprise, le refus de lui régler ses heures de délégation ou supplémentaires, en relation avec la grève à la tour Eiffel du 10 avril 2009 et la discrimination syndicale de la société qui a licencié deux autres délégués syndicaux ;
Les 7 février et 3 avril 2007, M. [K] émettait des doléances sur les missions temporaires données, son affectation en simple planificateur, le défaut de proposition depuis juin dernier à des postes disponibles imputé à son activité syndicale ; M. [R] relaie le 26 mars 2007 son défaut d'affectation et de paiement de salaires depuis 2 mois.
Le 19 juin 2008 M. [K] émet des doléances pour une absence injustifiée les 13 et 16 juin 2008 alors qu'il est en heures de délégation et invoque des représailles;
Le 17 février 2010 il demande le paiement de 5heures10 supplémentaires effectuées entre novembre 2009 et février 2010 (qui a fait l'objet d'une fin de non-recevoir par lettre du 24 février 2010 à défaut d'enregistrement de ses heures d'arrivée) et réclame son avenant à contrat de travail attendu depuis octobre 2009 qui lui a été transmis le 24 février 2010 et retourné signé le 30 avril 2010 ;
M. [K] n'a pas été destinataire du nouvel annuaire samsic en juillet 2010 nécessaire à ses fonctions et est privé d'accès à certains fichiers selon courriel du 17 août 2010 ;
Il est ainsi établi une discrimination syndicale du fait du défaut d'évaluation annuelle et de formation, du retard apporté à son reclassement avec avenant tardif de plus d'un an après la prise de fonction en novembre 2009 à un poste moindre en responsabilité, de l'exclusion de certaines informations et réunions, de refus de règlement d'heures supplémentaires et de délégation ;
Il sera alloué de ce chef la somme de 3000 € de dommages-intérêts ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement et statuant à nouveau :
Dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société Samsic Sécurité à payer à M. [K] les sommes de 6 427.28 € à titre de préavis et 642.72 € pour congés payés afférents, 13 925.71€ pour indemnité de licenciement, 3000 € pour discrimination syndicale et 2 500 € pour frais irrépétibles.
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société Samsic Sécurité aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT