RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2012
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/09280
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Février 2009 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY RG n° 08/03609
APPELANTE
AGS CGEA IDF EST
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Vanina FELICI, avocat au barreau de PARIS, toque : C1985 substitué par Me Garance COURPIED, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES
Me [X] [P] - Mandataire ad'hoc de SARL ZINEB FOREVER
[Adresse 3]
[Localité 5]
ni comparant, ni représenté
Madame [N] [M] épouse [G]
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Katia SZLEPER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0942 substitué par Me Camille BLONDEL, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Avril 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Michèle MARTINEZ, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Elisabeth PANTHOU-RENARD, Présidente
Madame Michèle MARTINEZ, Conseillère
Monsieur Guy POILÂNE, Conseiller
Greffier : Melle Claire CHESNEAU, lors des débats
ARRET :
- réputé contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Monsieur Guy POILÂNE, Conseiller pour la Présidente empêchée et par Mademoiselle Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
[N] [M] épouse [G] a été engagée par la société MELIDA SARL, le 19 février 1999, en qualité de mécanicienne en confection, suivant un contrat de travail à durée indéterminée.
Son contrat de travail a été transféré à la société cessionnaire ZINEB FOR EVER SARL à compter du 2 avril 2002.
Elle s'est trouvée en congé-maternité du 31 octobre 2002 au 31 mars 2003.
A l'issue de cet arrêt de travail lié à la grossesse, elle a sollicité et obtenu un congé parental qui a pris place du 1er avril 2003 au 30 juin 2007.
Par jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 16 octobre 2006, la société ZINEB FOR EVER SARL a été placée en liquidation judiciaire.
Par courrier recommandé avec avis de réception du 8 février 2008, le mandataire liquidateur a pris acte de la rupture de son contrat de travail 'le 30 juin 2007, date de [votre] fin de congé parental'.
Contestant le bien-fondé de la rupture, la salariée va saisir la juridiction prud'homale, le 16 septembre 2008, de diverses demandes.
Par jugement réputé contradictoire en date du 16 février 2009, le conseil de prud'hommes de Bobigny a :
- fixé la rupture du contrat de travail de [N] [M] épouse [G] au 1er juillet 2007,
- fixé la créance de [N] [M] épouse [G] sur la liquidation judiciaire de la SARL ZINEB FOR EVER aux sommes suivantes:
* 2 308,54 € préavis,
* 230,85 € congés-payés sur préavis,
* 442,84 € indemnité légale de licenciement (montant rectifié : il faut lire 1 442,84 €),
- dit le présent jugement opposable à l'AGS,
- ordonné la remise de l'attestation ASSEDIC et du certificat de travail,
- débouté la salariée du surplus de ses demandes.
Appel de cette décision a été interjeté par l'AGS CGEA IDF EST, suivant un courrier recommandé expédié le 28 octobre 2009.
Par des conclusions visées le 10 avril 2012 puis soutenues oralement à l'audience, l'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ÎLE DE FRANCE EST demande à la cour , au visa des articles L.622-9, L.622-30 et L.622-34 du code de commerce ainsi que l'article 1844-8, alinéa 3 du code civil, à titre liminaire, de dire et juger les demandes de Mme [G] irrecevables ; en conséquence, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel ; à titre principal, de constater que le contrat de travail n'a jamais été rompu, de dire et juger que la rupture dudit contrat ne peut désormais procéder que de sa résiliation judiciaire et que la date de cette résiliation ne pourra être prononcée qu'à la date de la décision à intervenir et de dire et juger que la garantie de la concluante n'a pas vocation à prendre en charge les indemnité liées à une rupture intervenant après les quinze jours suivant l'ouverture de la liquidation judiciaire ; en conséquence, de dire et juger inopposable à la concluante toute somme allouée au titre des indemnités de rupure, eu égard aux limites précitées de sa garantie, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel ; en tout état de cause, il est demandé de constater, vu les dispositions de l'article L.622-28 du code de commerce, que les intérêts ont nécessairement été arrêtés au jour de l'ouverture de la procédure collective, de donner acte à l'AGS de ce qu'elle n'est pas concernée par la remise de documents, de constater que le paiement d'une astreinte ne relève pas de sa garantie tout comme l'allocation d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rappelle les conditions et modalités d'application de sa garantie légale.
Par des conclusions visées le 10 avril 2012 puis soutenues oralement lors de l'audience, [N] [M] épouse [G] demande à la cour, au visa des articles L.1232-2, L.1234-1 et L.1235-14 du code du travail, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé sa créance dans les termes suivants :
* 2 308,54 € préavis,
* 230,85 € congés-payés afférents,
* 1 442,84 € indemnité conventionnelle de licenciement, d'infirmer le même jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts au vu du préjudice subi ; par conséquent, de fixer au passif de la liquidation judiciaire la somme de 20 776,86 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit qu'il était opposable à l'AGS, outre l'octroi de la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Bien que régulièrement convoqué à l'audience (avis de réception signé le 16 février 2012), Me [X] [P], en qualité de mandataire ad hoc de la société ZINEB FOR EVER SARL , ne comparaît pas, n'est pas représenté mais a adressé à la cour un courrier reçu au greffe le 27 février 2012 par lequel il indique qu'il 'ne pourra pas se faire représenter , és qualités, en raison de l'impécuniosité des opérations de liquidation judiciaire' ; l'arrêt est réputé contradictoire.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité des demandes
C'est en vain, au vu de la chronologie des faits et de la procédure, que l'AGS excipe, au stade du présent appel, de l'irrecevabilité des demandes présentées par [N] [M] épouse [G]. En effet, il doit être relevé que le mandataire-liquidateur de la société ZINEB FOR EVER SARL a 'pris acte de la rupture du contrat de travail de l'intimée à la date du 30 juin 2007" par un courrier du 8 février 2008, alors que la clôture pour insuffisance d'actif de la procédure collective était intervenue le 9 janvier 2008. Force est de constater que la salariée ne pouvait saisir plus tôt la juridiction prud'homale du contentieux de la rupture de son contrat de travail en ce que celle-ci a été opérée par le mandataire-liquidateur postérieurement à la date de clôture de la procédure collective avec effet rétroactif. Cette situation spécifique , qui ne saurait être imputable à [N] [M] épouse [G], a été régularisée suivant une ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Bobigny en date du 30 septembre 2008 désignant le mandataire-liquidateur (Me [X] [P]) en qualité de mandataire ad hoc pour représenter la société ZINEB FOR EVER SARL, en continuité, dans la présente procédure, la personnalité morale de cette société subsistant ainsi pour les besoins de la liquidation judiciaire. L'exception d'irrecevabilité soulevée par l'AGS est, en conséquence, rejetée.
Sur la rupture du contrat de travail
En licenciant [N] [M] épouse [G] au motif que son congé parental ayant pris fin, il convenait de 'prendre acte de la rupture' de son contrat de travail, le mandataire-liquidateur de la société ZINEB FOR EVER a méconnu les conditions légales applicables en présence d'un contrat de travail simplement suspendu pendant la durée de ce congé parental en vertu des dispositions de l'article L.122-28-1 ancien du code du travail applicable à l'époque. Il est constant que la liquidation judiciaire n'entraîne pas, par elle-même, la rupture du contrat de travail qui, ici, aurait dû se poursuivre à l'identique une fois achevé le congé parental. Au vu de la seule motivation retenue, la rupture du contrat de travail est dès lors abusive et, au surplus, irrégulière ( absence d'entretien préalable ) et doit s'analyser en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur l'indemnisation du licenciement illégitime
Il est réclamé à ce titre par la salariée une somme de 20 776,86 €.
L'AGS, appelante, ne formule pas d'offre subsidiaire sur ce point.
La cour relève que [N] [M] épouse [G] présentait une ancienneté de huit années et demi et était âgée de 38 ans au moment de la rupture. Elle explique qu'à ce jour elle n'a pas retrouvé d'emploi sans fournir d'éléments sur ses recherches mais en montrant que l'Assedic n'a pu prendre en compte sa situation au vu de la fin de son congé parental en raison du caractère illicite de la rupture. Elle est mère de trois jeunes enfants (7 ans, 5 ans et 3 ans) qu'elle élève grâce aux revenus de son époux. Au vu de ce qui précède, il y a lieu de lui accorder une somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.1235-5 du code du travail (il est indiqué, dans la demande initiale, un effectif 'd'environ dix salariés' ne permettant pas l'application de l'article L.1235-3 du code du travail).
Sur les indemnités compensatrice de préavis, de congés-payés sur préavis et conventionnelle de licenciement
En raison du licenciement déclaré illégitime et en l'absence de contestation subsidiaire par l'appelante des montants accordés, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce points en précisant que la somme fixée au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement est de 1 442,84 € .
Les dispositions du jugement déféré concernant la remise des documents de fin de contrat rectifiés, sans astreinte, est également confirmée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Rejetant l'exception d'irrecevabilité,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions en précisant que la somme accordée par celui-ci au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement est de 1 442,84 €,
Y ajoutant,
Fixe la créance complémentaire de [N] [M] épouse [G] au passif de la liquidation judiciaire de la société ZINEB FOR EVER SARL à la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à application de ses dispositions en cause d'appel,
Déclare le présent arrêt opposable, en tant que de besoin, au CGEA AGS IDF EST,
Dit que les dépens s'inscriront au passif de la liquidation judiciaire de la société ZINEB FOR EVER SARL.
LA GREFFIÈRE POUR LA PRÉSIDENTE EMPÊCHÉE