Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 10 OCTOBRE 2012
(no 217, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 10684
Décision déférée à la Cour : jugement du 14 mars 2011- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 10/ 01654
APPELANTE
Société MONARD D'HULST BRUXELLES SCRL 270, avenue de Tervueren 1150 BRUXELLES (BELGIQUE)
représentée par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018), assistée de Me Solène CHEDAL-ANGLAY (avocat au barreau de Paris, Cabinet KOWELA-PIQUET, toque : D 854)
INTIMEE
SELARL X... et ASSOCIES... 75008 PARIS
représentée par Me Frédéric BURET (avocat au barreau de PARIS, toque : D1998) assistée de Me Sandra DOS SANTOS (avocat au barreau de PARIS, toque : B0988)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 5 septembre 2012, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques BICHARD, Président Madame Maguerite-Marie MARION, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Melle Sabine DAYAN
ARRET :
- contradictoire
-rendu publiquement par Monsieur Jacques BICHARD, Président
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
-signé par Monsieur Jacques BICHARD, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
***
Estimant que les démarches effectuées à sa demande pour le compte de son client caractérisait une convention de ducroire, la société MONARD D'HULST BRUXELLES SOCIÉTÉ D'AVOCATS S. C. R. L. a fait assigner la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. en paiement des honoraires correspondants devant le Tribunal de grande instance de Paris par exploit d'huissier de Justice du 25 janvier 2010 ;
Par jugement contradictoire du 14 mars 2011, le Tribunal de grande instance de Paris a :- débouté la société MONARD D'HULST BRUXELLES de ses prétentions,- l'a condamnée à verser à X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire,- laissé les dépens à la charge de la demanderesse ;
Par déclaration du 6 juin 2011, la société MONARD D'HULST BRUXELLES SOCIÉTÉ D'AVOCATS S. C. R. L. a interjeté appel de ce jugement ; Dans ses seules conclusions en cause d'appel déposées le 5 septembre 2011, elle demande à la Cour, au visa des " articles 11. 5 du Règlement intérieur national français et 21. 5. 7 du Code de déontologie des avocats européens ", de :- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau et y ajoutant,- condamner la société X... et ASSOCIES à payer à la société MONARD D'HULST BRUXELLES la somme de 45 762, 17 € avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2007,- condamner la société X... et ASSOCIES à verser à la société MONARD D'HULST BRUXELLES SOCIÉTÉ D'AVOCATS la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la première instance,- condamner la société X... et ASSOCIES à verser à la société MONARD D'HULST BRUXELLES SOCIÉTÉ D'AVOCATS la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,- condamner la société X... et ASSOCIES aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Dans ses seules conclusions en cause d'appel déposées le 3 novembre 2011, la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. demande à la Cour, au visa des mêmes articles que précédemment, de, notamment :- la recevoir en dans ses demandes, fins et conclusions et la déclarer bien fondée, Y faisant droit, A titre principal,- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,- débouter la société MONARD D'HULST BRUXELLES de l'ensemble de ses demandes non fondées, A titre subsidiaire,- limiter la condamnation de la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. aux seuls honoraires correspondant aux services effectivement rendus par la société MONARD D'HULST BRUXELLES jusqu'au 6 novembre 2005 inclus et exclure en tout état de cause de l'assiette de condamnation les frais et émolument taxables, En tout état de cause,- condamner la société MONARD D'HULST BRUXELLES à verser à la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. la somme supplémentaire de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de l'appel et la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 juin 2012 ;
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,
Considérant qu'il résulte des écritures des parties que, le 16 octobre 2005, Maître Christophe X..., de la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. (Cabinet X... et ASSOCIES), dans le cadre d'un projet de son client, Monsieur Martial Y... (Monsieur Y...) d'acquérir des d'hôtels situés à Anvers, a pris contact téléphoniquement avec la société MONARD D'HULST BRUXELLES SOCIÉTÉ D'AVOCATS S. C. R. L. (Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES) du Barreau de Bruxelles ; qu'il s'en est suivi diverses démarches, notamment un audit, et productions de pièces pour la mise en place de la structure d'acquisition à l'issue desquelles les deux cabinets sont entrés en conflit, le Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES estimant que ces échanges caractérisaient une convention de ducroire ce que le Cabinet X... et ASSOCIES contestait formellement, refusant de régler les honoraires réclamés par son homologue belge ; que, par lettre du 26 novembre 2006, le Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES a saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Bruxelles qui a saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris lequel a considéré que Maître X... n'apparaît pas comme ducroire ; qu'en l'absence de règlement amiable, le Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES, autorisé par son Bâtonnier, a fait assigner le Cabinet X... et ASSOCIES devant le Tribunal de grande instance de Paris qui a rendu le jugement déféré à la Cour ;
SUR QUOI,
Considérant que le Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES qui se fonde sur les articles 11. 5 du Règlement intérieur national français (RIN) adopté par le Conseil national des barreaux (CNB) et " l'article 21-5-7 " du Code de déontologie des avocats européens, estime que ces textes n'envisagent pas divers degrés d'implication de l'avocat confiant un dossier ou une affaire, n'excluent pas tout rapport entre l'avocat correspondant et le client et qu'en l'espèce, le Cabinet X... et ASSOCIES lui a bien confié une mission comme cela résulte des télécopies des 16 et 24 octobre 2005 desquelles il résulte qu'il a déterminé le cadre de la mission confiée et définit les rôles de chacun ; qu'il a ainsi interféré dans la mission et avait un intérêt personnel à soutenir le rapport d'affaire ; que par ailleurs, par sa télécopie du 31 janvier 2006 relative au défaut de règlement des honoraires par Monsieur Y..., il admet qu'il participe à l'opération dont il a confié une partie du dossier au Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES ; que de surcroît s'il n'avait été qu'un intermédiaire, le Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES aurait eu des contacts plus tôt et exclusivement avec monsieur Y... ; qu'enfin, dans l'hypothèse de la nécessité de caractériser un degré d'implication, il estime que le Cabinet X... et ASSOCIES a été le véritable maître d'oeuvre en faisant le lien entre les différents intervenant, en fixant dates et lieux de rendez-vous et en procédant à des remises de documentation ;
Considérant que pour sa part, le Cabinet X... et ASSOCIES s'appuyant sur les mêmes textes que l'appelant pour définir l'engagement de ducroire, affirme n'avoir jamais mandaté le Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES et de ce fait ne pas avoir contracté en son propre nom, s'être borné, d'une part, à mettre son correspondant en relation avec son client Monsieur Y... et à recommander à ce dernier ledit Cabinet qui a lui a soumis son budget prévisionnel d'honoraires, d'autre part, à transmettre l'accord intervenu afin que débute la mission au regard de la proposition de services de l'appelant ; ***
Considérant, s'agissant de la profession d'avocat, que la définition de la clause de ducroire résulte de l'article 11. 5 du RIN qui énonce : " un avocat qui, ne se bornant pas à mettre en relation son client avec un autre avocat, confie un dossier à un confrère ou le consulte, est personnellement tenu des honoraires, frais et débours dus à ce confrère correspondant, au titre des prestations accomplies à sa demande par celui-ci Les avocats peuvent néanmoins, dès l'origine et par écrit, convenir du contraire. En outre, le 1er avocat peut, à tout instant, limiter par écrit son engagement au montant des sommes dues au jour où il exclut sa responsabilité pour l'avenir (...) " ainsi que de l'article 5. 7 (et non 21. 5. 7) du Code de déontologie des avocats européens qui indique pour sa part : " Dans les relations professionnelles entre avocats de barreaux de différents Etats membres, l'avocat qui, ne se bornant pas à recommander un confrère ou à l'introduire auprès d'un client, confie une affaire à un correspondant ou le consulte, est personnellement tenu, même en cas de défaillance du client, au paiement des honoraires, frais et débours dus au conseil étranger. Cependant, les avocats concernés peuvent, au début de leurs relations, convenir de dispositions particulières à ce sujet. En outre, l'avocat peut, à tout instant, limiter son engagement personnel au montant des honoraires, frais et débours engagés avant la notification à son confrère étranger de sa décision de décliner sa responsabilité pour l'avenir. " ;
Considérant qu'en l'espèce le Cabinet X... et ASSOCIES indique dans sa télécopie du 16 octobre (pièce no 1 de l'appelant) en transmettant un mémorandum signé par Monsieur Y... portant sur trois hôtels, que la mission confiée au Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES consiste à assister son client dans la préparation de son projet immobilier et d'évaluer les honoraires tout en proposant l'assistance, " le cas échéant ", de son Cabinet dans la mise en place de la structure d'acquisition (localisation, mise en place de financement), dans la restructuration de la " cible " aux fins de cession de l'un des hôtels et de l'optimisation fiscale et sociale de l'opération du côté français ;
Que dans sa télécopie du 24 octobre 2005 (pièce no 24, idem), le Cabinet X... et ASSOCIES, insistant sur l'urgence de la situation, transmet un calendrier précis du déroulement des audits techniques, comptables et financier, précise qu'il est demandé d'adresser aux vendeurs " la listes des documents et informations auxquels nous souhaitons accéder " avant d'indiquer : " nous serions susceptibles d'intervenir à partir de mardi ", transmet également, en annexe, une liste type d'acquisition d'un hôtel en France en demandant à l'appelant de l'adapter le cas échéant ou de substituer sa liste type " qu'il conviendra d'adresser par télécopie au directeur des hôtels " (suivent le nom, les numéros de téléphone et de fax avec la procédure à suivre), joint la déclaration fiscale de la société hôtelière transmise par son client pour " préparer notre intervention " et termine en ces termes : " J'ai besoin de pouvoir communiquer à notre client un budget prévisionnel d'intervention de votre Cabinet que je vous remercie de m'adresser rapidement : ce budget doit lui être soumis ce Jeudi lors de son passage à Paris. " ;
Qu'enfin, le Cabinet X... et ASSOCIES n'établit ni n'allègue avoir, à un moment quelconque, convenu avec le Cabinet MONARD D'HULST BRUXELLES de dispositions particulières ou contraires ni limité son engagement au regard des dispositions tant de l'article 11. 5 du RIN que de l'article 5. 7 du Code de déontologie des avocats européens ;
Qu'il résulte de ce qui précède que le Cabinet X... et ASSOCIES ne s'est pas contenté de mettre Monsieur Y... en relation avec son homologue belge mais a confié à celui-ci, au sens des articles précités, l'affaire à traiter en Belgique ;
Que dès lors, la demande subsidiaire du Cabinet X... et ASSOCIES tendant à limiter sa condamnation " aux seuls honoraires correspondant aux services effectivement rendus jusqu'au 6 novembre 2005 inclus " est dénuée de pertinence ;
Considérant en conséquence, qu'il y a lieu d'infirmer le jugement déféré ;
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Considérant que l'équité commande de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile dans les termes du dispositif à intervenir, tant au titre de la première instance que de la procédure d'appel ;
PAR CES MOTIFS,
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
CONDAMNE la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. à payer à la société MONARD D'HULST BRUXELLES SOCIÉTÉ D'AVOCATS S. C. R. L. la somme de 45 762, 17 € avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 25 janvier 2010,
CONDAMNE la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. à payer à la société MONARD D'HULST BRUXELLES SOCIÉTÉ D'AVOCATS S. C. R. L. la somme de 8 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
REJETTE toutes autres demandes des parties,
CONDAMNE la société X... et ASSOCIES S. E. L. A. R. L. au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel avec admission, pour de l'Avocat concerné au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.