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18/10/2012 | FRANCE | N°10/10790

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 18 octobre 2012, 10/10790


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 18 Octobre 2012

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10790



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Novembre 2010 par le conseil de prud'hommes de EVRY Section Commerce RG n° 09/01086





APPELANTE

SAS BOMAG FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T1

0 substitué par Me Sabine NIVOIT, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE

Madame [Z] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Inès PLANTUREUX, avocat au barreau de PARIS...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 18 Octobre 2012

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10790

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Novembre 2010 par le conseil de prud'hommes de EVRY Section Commerce RG n° 09/01086

APPELANTE

SAS BOMAG FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Sabine NIVOIT, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [Z] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Inès PLANTUREUX, avocat au barreau de PARIS, toque : B0171

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Rémy LE DONGE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Monsieur Rémy LE DONGE, Conseiller

Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président et par Mlle Laëtitia CAPARROS, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [Z] [Z] a été engagée par la SAS BOMAG France le 1er octobre 2005 en qualité d'assistante commerciale et percevait au moment de son licenciement un salaire mensuel brut de 2530,40 €.

La convention collective applicable est celle de la métallurgie région parisienne.

Elle a fait l'objet le 9 mars 2009 d'une convocation à un entretien préalable à son licenciement, qui s'est tenu le 17 mars 2009 avant d'être licenciée par lettre du 30 mars 2009 pour motif économique constitué selon l'appelante, par une chute radicale de ses activités justifiant la mise en 'uvre d'un plan destiné à sauvegarder sa compétitivité, imposant la suppression de divers postes dont celui de Madame [Z] sans pouvoir recourir à une solution alternative.

Le 16 octobre 2009, Madame [Z] saisissait le Conseil de prud'hommes d'Évry aux fins de faire juger que le licenciement intervenu le 30 mars 2009 était dénué de cause réelle et sérieuse et faire condamner la SAS BOMAG France à lui payer 12 615€ € à titre de rappel de salaire jusqu'à sa réintégration, 59514 € de dommages et intérêt pour préjudice subi, 59514 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 59514 € pour violation des critères de l'ordre de licenciements, 9919 € pour non respect de la priorité de ré-embauchage ainsi que 2000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 9 novembre 2010 le Conseil de prud'hommes d'Évry a dit que le licenciement de Madame [Z] ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et a condamné la SAS BOMAG France prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à l'intéressée 15182 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que 900 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

La cour est saisie d'un appel formé contre cette décision par la SAS BOMAG France le 6 décembre 2010.

Par lettre en date du 23 décembre 2010, la SAS BOMAG France et Madame [Z] ont été convoquées à l'audience du 7 septembre 2012 aux fins de voir statuer sur l'appel interjeté à l'encontre du jugement du 9 novembre 2010 du Conseil de prud'hommes d'Évry par la SAS BOMAG France

Vu les conclusions du 7 septembre 2012 au soutien des observations orales par lesquelles la SAS BOMAG France, conclut à titre principal à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a considéré que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, à sa confirmation pour le surplus, au débouté de la demanderesse de l'intégralité de ses demandes et à titre subsidiaire à la réduction du montant des indemnités allouées à Madame [Z].

Vu les conclusions du 7 septembre 2012 au soutien de ses observations orales par lesquelles Madame [Z] conclut à titre principal à l'infirmation du jugement attaqué en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du licenciement et demande à la cour de condamner la SAS BOMAG France à lui verser la somme de 96704,01 € au titre des salaires dus, à titre subsidiaire de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que les licenciements étaient sans cause et de l'infirmer en condamnant la SAS BOMAG France à lui verser 96704,01 € en réparation de l'intégralité du préjudice subi.

Madame [Z] sollicite à titre infiniment subsidiaire l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande relative au défaut de reclassement, en lui allouant 96704,01 € à ce titre, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande relative à la violation des critères d'ordre de licenciement en lui allouant à ce titre la somme de 96704,01 € et en tout état de cause à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande relative à la priorité de réembauchage, en lui allouant la somme de 4959 € à ce titre, outre les intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil des prud'hommes.

A titre reconventionnel, elle sollicite la condamnation de la société BOMAG à lui verser 1000€ pour procédure abusive.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience';

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité du licenciement

Invoquant des motifs économiques, la SAS BOMAG France (BOMAG France) qui compte plus de cinquante salariés, a procédé à une première série de neuf licenciements notifiés aux intéressées par LRAR du 30 mars 2009 en consultant préalablement le Comité d'entreprise le 27 février 2009.

Pour les mêmes motifs, BOMAG France procédera à une seconde série de neuf licenciements notifiés aux intéressés par LRAR du 11 juin 2009 en effectuant également la consultation du Comité d'entreprise.

Au terme des dispositions de l'article L 1233-8 du code du travail, l'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de moins de dix salariés dans une même période de trente jours réunit et consulte le Comité d'entreprise dans les entreprises de plus de cinquante salariés.

Si le licenciement concerne plus de dix salariés sur la même période, l'employeur doit en application des dispositions des articles L1233-28 et L1233-30 du Code du travail, réunir et consulter le Comité d'entreprise qui tient deux réunions séparées dans un délai inférieur à quatorze jours.

L'employeur est également tenu à peine de nullité de présenter au Comité d'entreprise un plan de sauvegarde de l'emploi destiné à éviter les licenciements.

En relevant que le délai entre les deux vagues de licenciement de neuf salariés par BOMAG France était supérieur à trente jours et que BOMAG avait procédé préalablement à chaque vague de licenciement à la consultation du Comité d'entreprise, le Conseil des prud'hommes d'Évry a fait une exacte appréciation des faits.

En déduisant de cette circonstance que l'employeur n'était légalement tenu ni de convoquer deux réunions successives du Comité d'entreprise ni de présenter un plan de sauvegarde de l'emploi et que par conséquent la nullité du licenciement, la réintégration et le rappel de salaire ne pouvaient être prononcés, le Conseil des prud'hommes d'Évry a fait une application pertinente de la règle de droit, peu important que BOMAG France ait ainsi pu éviter les obligations beaucoup plus contraignantes que celles prévues à l'article 1233-8 du Code du travail

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point et Madame [P] déboutée des demandes formulées à ce titre.

Sur l'absence de motif économique :

Faisant suite au courrier du 9 mars 2009, la convoquant à un entretien préalable le 17 mars 2009 en vue d'un éventuel licenciement, Madame [Z] s'est vue notifier son licenciement pour motif économique par LRAR du 17 mars 2009 dans ces termes :

'A la suite de votre entretien du 17 mars 2009 avec Madame [N], lors duquel vous étiez assistée par Monsieur [S], nous vous confirmons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique.

Les motifs économiques qui vous ont été exposés lors de votre entretien préalable sont les suivants :

- BOMAG France est confrontée a des difficultés économiques conjoncturelles de forte ampleur : notre marché connaît un retournement brutal et spectaculaire. BOMAG France accuse une chute radicale de ses activités (la baisse estimée du chiffre d'affaires est de l'ordre de 50 à 60%). Le carnet de commande 2009, est en chute libre, il s'établit à fin janvier à 927K€ contre 17183K€ à la même période l'année précédente. BOMAG France est particulièrement fragilisée dans ce contexte de par son positionnement mono produit, très orienté sur le compactage et sa forte part de marché. Les experts laissent présager une crise durable. Nos ventes élevées de ces dernières années se traduisent par une surcapacité chez nos clients finaux, ce qui aura un effet retardateur. Cette tendance est accentuée par un phénomène de destockage entrepris par les loueurs et d'autres pays européens.

Face aux difficultés conjoncturelles et structurelles auxquelles BOMAG France est confrontée, la société est amenée à recentrer sa stratégie et à mettre en 'uvre d'urgence des mesures afin de sauvegarder sa compétitivité. Ceci se traduit en particulier par un plan de restructuration qui comporte la suppression de votre poste d'assistance à l'ADV mais aussi la suppression de

- deux postes d'assistante à l'ADV

- d'un poste d'Agent Logistique sur les postes actuels

- du poste de Responsable Trésorerie et Crédit Management

-du poste de mécanicien délégué commercial des matériels d'occasion

-du poste de Responsable Technique

-du poste de Chef d'Equipe Technicien Support en charge du suivi des contrats déchets

Malgré une recherche active et individualisée de reclassement, tout particulièrement au sein du groupe FAYAT, l'absence de poste disponible ne nous permet pas de recourir à une solution alternative.'

Aux termes de l'article L1235-1 du code du travail, il appartient à la juridiction saisie de la contestation du caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné au besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles, le doute bénéficiant en toute hypothèse au salarié.

Les moyens soutenus par l'appelant ne font que réitérer, sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels, se livrant à une exacte appréciation des faits de la cause, et à une juste application des règles de droit s'y rapportant, ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation;

Il sera seulement souligné que bien qu'interpellée y compris à l'audience par Madame [Z] à l'instar des premiers juges sur la justification d'abonder une réserve pour atteindre un montant de 9 000 000 € et de la distribution de dividendes pour la première fois au moment même où elle constatait une première baisse de son chiffre d'affaires, DOMAG France se borne à réitérer l'argument relatif à l'utilité de cette réserve pour l'acquisition de matériels neufs, sans répondre en ce qui concerne la distribution de dividendes.

De surcroît, outre les éléments de fait et de contexte propres à l'entreprise BOMAG France et au groupe FAYAT ayant conduit les premiers juges à émettre des doutes sur les réelles difficultés de l'entreprise, force est de constater que le caractère très anticipé des mesures prises fondé sur des projections de chiffres d'affaires sur la base des carnets de commandes plus réduits que les années précédentes particulièrement exceptionnelles ou d'un chiffre d'affaires du second trimestre non encore achevé au moment du licenciement, ne permet pas de justifier de leur urgence.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il n'a pas reconnu le caractère économique du licenciement de Madame [Z]

L'absence de caractère réel et sérieux du licenciement de Madame [Z] qui compte plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise de plus de dix salariés, ouvre droit à l'intéressée à une indemnité qui ne peut être inférieure à six mois de salaire.

Salariée dans l'entreprise BOMAG France depuis le 1er octobre 2005, Madame [Z] percevait au moment de son licenciement un salaire brut de 2530,40 €.

Il ressort des pièces communiquées et des débats que l'intéressée a entamé des démarches pour retrouver un emploi, qu'en dépit de son inscription à Pôle emploi, elle n'a pu en retrouver, rencontrant une véritable difficulté à se réinsérer professionnellement après son licenciement en particulier du fait de son âge (née en 1966).

Compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise, de la taille de l'entreprise, des recherches d'emploi effectuées par l'intéressée, de sa difficulté à retrouver un emploi, de sa situation de famille (prise en charge d'un enfant handicapé) et nonobstant les allocations versées par Pôle emploi, il sera alloué à Madame [Z] la somme de 18978 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice.

Sur les demandes à caractère subsidiaire

Dès lors qu'il est jugé que le licenciement est dépourvu de caractère économique, ces demandes sont devenues sans objet.

Sur la demande relative à la priorité de ré-embauchage

Madame [Z] ne fait valoir en cause d'appel aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause la décision rendue par les premiers juges au terme d'une analyse approfondie des faits et d'une exacte application du droit par des motifs pertinents que la cour adopte ;

Si elle a en effet, souhaité bénéficier de la priorité de ré-embauchage prévue à l'article L1233-45 du Code du Travail, force est de constater que les cinq salariés embauchés pendant la période de référence, l'ont été pendant l'été 2009 pour des contrats de courte durée allant de deux jours à deux mois et ce, en qualité d'intérimaires, pour des emplois n'ayant aucun caractère de durabilité.

Il ne peut donc être imputé à BOMAG France une quelconque carence dans l'application des dispositions de l'article L 1233-45 du Code du Travail, la circonstance que les pages du livre d'entrées et de sorties soit dépourvue de certification de l'expert comptable étant indifférente.

Madame [Z] sera donc débouté de la demande formulée à ce titre.

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive

L'abus du droit d'ester en justice ne peut résulter du seul exercice d'une voie de recours légalement ouverte. Pour être retenu, il doit revêtir le caractère d'une faute dénaturant l'exercice de ce droit.

En l'espèce, les éléments rapportés tels que la tardiveté à produire ses conclusions d'appel, ne permettent de considérer qu'en agissant ainsi, BOMAG France ait abusé du droit de soumettre sa cause au réexamen de la juridiction du second degré.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point et Madame [Z] sera donc débouté de la demande formulée à ce titre.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

En l'état de la procédure, il est équitable de faire droit à la demande formulée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile par Madame [Z] à hauteur de la somme de 2000 €.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

DÉCLARE recevable l'appel formé par la SAS BOMAG France

CONFIRME, le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement de Madame [Z] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ;

LE REFORME en ce qu'il a condamné la SAS BOMAG France à lui verser 15182 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

et statuant à nouveau

CONDAMNE la SAS BOMAG France prise en la personne de ses représentants légaux à verser à Madame [Z] la somme de 18978 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse assorti de l'intérêt légal à compter et dans la proportion de la décision qui en a fixé le montant.

DEBOUTE Madame [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

CONDAMNE la SAS BOMAG France à verser à Madame [Z] 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la SAS BOMAG France aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 10/10790
Date de la décision : 18/10/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-18;10.10790 ?
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