Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRET DU 13 NOVEMBRE 2012
(n° 601, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/05083
Sur renvoi après cassation d'un arrêt rendu le 9 juiilet 2010 par la cour d'appel de PARIS - pôle 1 ch 2 (RG 10/00487) sur appel d'une ordonnance de référé rendue le 22 décembre 2009 par le tribunal de commerce de PARIS (RG 1009076080
DEMANDEURS A LA SAISINE
SCS MEDIA SATURN FRANCE nouvellement dénommée CAP BOULANGER Agissant poursuites et dilienes en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 14]
[Localité 3]
SAS SATURN [Localité 2] nouvellement dénommée SAS [Localité 2] agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentant légaux
[Adresse 12]
[Adresse 12]
[Localité 2]
SAS SATURN [Localité 7] nouvellement dénommée SAS [Localité 7] agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 10]
[Localité 7]
SAS SATURN DOMUS [Localité 4] nouvellement dénommée SAS DOMUS [Localité 4] agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux.
[Adresse 8]
[Localité 4]
SAS SATURN [Localité 6] nouvellement dénommée SAS [Localité 6] agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 9]
[Localité 6]
Représentées par : la SCP MONIN - D'AURIAC (Me Patrice MONIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : J071)
assistées de : Me Fabrice BAUMAN de la ASS HERTSLET WOLFER & HEINTZ (avocat au barreau de PARIS, toque : R188)
DEFENDEUR A LA SAISINE
SAS DARTY & FILS Prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 5]
Rep : la SCP FISSELIER & ASS(Me Alain FISSELIER) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0044)
assistée de : Me Jean-Daniel BRETZNER de la AARPI BREDIN PRAT (avocat au barreau de PARIS, toque : T12)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 Octobre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Joëlle BOURQUARD, Présidente de chambre
Madame Martine TAILLANDIER-THOMAS, Conseillère
Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Joëlle BOURQUARD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.
Saisi d'une demande de rétractation des ordonnances rendues à la requête de la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS SAS par les sociétés SATURN SAS [Localité 6], SATURN DOMUS SAS [Localité 4], SATURN SAS [Localité 7], SATURN SAS [Localité 2] et SCS MEDIA SATURN France, le président du tribunal de commerce de Paris a, par ordonnance du 22 décembre 2009, rejeté l'exception d'incompétence soulevée par les demanderesses et les a déboutées de toutes leurs demandes les condamnant en une indemnité de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt rendu le 9 juillet 2010, la présente cour d'appel autrement composée, statuant sur le recours formé à l'encontre de cette décision par les sociétés SATURN l'a confirmée en toutes ses dispositions.
Sur le pourvoi relevé par les sociétés MEDIA SATURN France SCS, SATURN SAS [Localité 6], SATURN DOMUS SAS [Localité 4], SATURN SAS [Localité 7], SATURN SAS [Localité 2], la cour de cassation, chambre commerciale a, par arrêt du 14 février 2012, cassé et annulé mais seulement en ce qu'il a dit mal fondées les sociétés SATURN en leur exception d'incompétence territoriale l'arrêt ainsi rendu et renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée.
La cassation est intervenue au visa des articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile au motif que « le président du tribunal de commerce, saisi sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, de requêtes tendant à ce que soit ordonnées des mesures devant être exécutées dans le ressort de plusieurs tribunaux, n'est compétent pour ordonner les mesures sollicitées qu'à la double condition que l'une d'entre elle doive être exécutée dans le ressort de ce tribunal et que celui-ci soit compétent pour connaître de l'éventuelle instance au fond ;
Que pour dire mal fondée l'exception d'incompétence territoriale soulevée par les sociétés SATURN, l'arrêt retient que les règles de compétence territoriale du juge des mesures in futurum de l'article 145 du code de procédure civile sont identiques que le juge soit saisi en référé ou sur requête et que le juge des requêtes du tribunal de commerce de Paris étant le juge des requêtes de la juridiction appelée à connaître de l'éventuel procès au fond pouvait ordonner des mesures devant s'exécuter dans des ressorts territoriaux d'autres juridictions, même si aucune d'entre elles ne devait l'être dans son propre ressort territorial, qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé les textes susvisés » ;
Par conclusions déposées le 24 septembre 2012, les sociétés MEDIA SATURN France (nouvellement dénommée CAP BOULANGER), SATURN [Localité 6] (nouvellement dénommée SAS [Localité 6]), SATURN DOMUS [Localité 4] (nouvellement dénommée SAS DOMUS [Localité 4]), SATURN [Localité 7] (nouvellement dénommée SAS, [Localité 7]), SATURN [Localité 2] (nouvellement dénommée SAS [Localité 2]) demandent de les déclarer recevables en leur exception de procédure, de constater que le président du tribunal de commerce de Paris a été saisi par la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS par voie de requête du 1er septembre 2009, que le président du tribunal de commerce de Paris, uniquement saisi en qualité de juge des référés était compétent pour ordonner les mesures d'instruction sollicitées par la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS devant être réalisées dans le magasin de la société SATURN [Localité 7] à [Localité 7] situé dans le ressort du tribunal de commerce de Créteil et celui de la société SATURN [Localité 6] situé dans le ressort du tribunal de commerce de Bobigny,
En conséquence, les accueillir en leur exception d'incompétence et dire les requêtes présentées au président du tribunal de commerce de Paris le 1er septembre 2009 irrecevables, déclarer que le président du tribunal de commerce de Paris, saisi en qualité de juge des requêtes, n'a pas été valablement saisi et rétracter les deux ordonnances rendues sur requête le 1er septembre 2009 étant constaté qu'elles n'ont pas été rendues par le président du tribunal de commerce de Créteil et/ou Bobigny, seuls compétents en qualité de juge des requêtes, pour statuer sur les mesures d'instruction sollicitées par la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS,
En conséquence,
Annuler les deux constats établis le 17 septembre 2009 en exécution de ces ordonnances et condamner la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS à leur payer une indemnité de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les entiers dépens.
Par conclusions déposées le 19 septembre 2012, la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS demande de dire mal fondée la saisine sur renvoi après cassation opérée par SATURN, que le président du tribunal de commerce de Paris était compétent pour ordonner les mesures d'instruction sur requête sollicitées par elle en application de l'article 145 du code de procédure civile, en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise ; à titre subsidiaire, elle sollicite de confirmer l'ordonnance entreprise et les mesures d'instruction in futurum litigieuses par application de l'article 79 alinéa 1 du code de procédure civile et de dire mal fondée la demande en annulation des rapports de mission rédigés en l'espèce par le mandataire désigné afin d'exécuter les mesures d'instruction litigieuses, de débouter SATURN de toutes ses demandes, fins et conclusions et de la condamner à lui verser le somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les entiers dépens.
SUR CE, LA COUR,
Considérant que les appelantes se prévalent pour l'essentiel de ce que la cour de cassation impose deux conditions cumulatives de la compétence du juge saisi sur requête tenant à l'exécution de l'une des mesures sollicitées sur le ressort du tribunal dont le président est saisi et à la compétence de ce tribunal pour connaître de l'éventuelle instance au fond, que l'intimée ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles 156, 157 et 158 du code de procédure civile relatifs à l'exécution des mesures d'instruction qui n'ont vocation à s'appliquer que si le juge a valablement ordonné la mesure d'instruction ; qu'elle soutient qu'aucun constat ne devait être pratiqué dès lors que le juge des requêtes était incompétent pour les ordonner ;
Qu'elles estiment que l'article 79 alinéa 1 du code de procédure civile ne peut recevoir application en ce que la cour de cassation a accueilli son pourvoi sans retenir le moyen soulevé par DARTY sur ce texte et en ce que les conditions de cet article ne sont pas réunies dès lors qu'elle n'a pas contesté la compétence de la juridiction des référés de Paris pour statuer sur la rétractation de la décision mais celle du juge des requêtes pour statuer sur les mesures d'instruction et qu'elles ont relevé appel de l'ordonnance de référé rétractation les ayant déboutées de leur demande de rétractation, qu'il n'est donc pas demandé d'infirmer l'ordonnance de référé du chef de la compétence de la juridiction qui l'a rendue ;
Qu'elle ajoute que l'effet dévolutif de l'appel est limité aux questions examinées par le premier juge qui a rendu la décision attaquée ;
Que la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS soutient que rien ne légitime la solution adoptée par la cour de cassation et que même à supposer que la cour accueille l'exception d'incompétence de SATURN, l'article 79 alinéa 1 du code de procédure civile interdirait de rétracter les ordonnances obtenues par elle le 1er septembre 2009 ;
Qu'elle soutient en effet qu'il est de jurisprudence constante qu'une requête sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile peut être présentée devant le juge des requêtes dont la juridiction territorialement compétente pour statuer sur le litige éventuel au fond, que l'arrêt du 14 février 2012 est un arrêt isolé, au demeurant non publié, que la référence aux articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ne permet pas d'expliquer la solution retenue par la cour de cassation ; qu'elle se réfère notamment aux articles 156, 157 et 158 du code de procédure civile pour justifier de la possibilité offerte au juge de sortir de son ressort, de solliciter l'aide d'une autre juridiction pour faire exécuter une mesure d'instruction ou favoriser l'exécution simultanée de mesures d'instruction et ainsi ordonner une mesure d'instruction sur requête hors de son ressort ;
Qu'elle ajoute que SATURN n'a jamais contesté la compétence territoriale du tribunal de commerce de Paris pour statuer sur le fond du litige et que dès lors que les mesures prescrites ont consisté pour le mandataire désigné à procéder à des relevés de prix dans deux magasins hors ressort du tribunal de commerce de Paris, la rédaction du rapport de mission a été effectué dans le ressort du tribunal de commerce de Paris, qu'il s'ensuit qu'une partie de la mission a été accomplie dans le ressort de la juridiction qui l'a ordonnée ;
Que l'intimée fait valoir à titre subsidiaire que la cour d'appel de Paris était juridiction d'appel des tribunaux de commerce de Créteil et Bobigny, l'article 79 alinéa 1er du code de procédure civile doit recevoir application ;
Et considérant qu'il est constant que les requêtes présentées au président du tribunal de commerce de Paris, intitulées « requête aux fins de mesure d'instruction in futurum (article 145 du code de procédure civile) » visent les articles 145, 493 et 874 du code de procédure civile ; que l'article 145 du code de procédure civile prévoit que ces mesures d'instruction peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ; que ce texte offre la possibilité au demandeur de solliciter ces mesures contradictoirement devant le juridiction des référés ou si les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement, de les obtenir par ordonnance rendue sur requête comme le prévoit l'article 493 du code de procédure civile ;
Que l'article 145 du code de procédure civile n'opère aucune distinction entre ces deux modes alternatifs de saisine ; que quelque soit le mode de saisine choisi par le demandeur, les mesures d'instruction requises doivent reposer sur l'existence d'un motif légitime qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur et plausible dont la solution peut dépendre de celles-ci ;
Considérant qu'en l'espèce, les appelantes ne contestent pas que le fond du litige était de nature à relever de la compétence du tribunal de commerce de Paris, comme étant celui dans le ressort duquel les publicités étaient parues ;
Que les dispositions de l'article 42 du code de procédure civile ne sont pas exclusives de l'application de celles de l'article 46 du même code ;
Qu'il s'ensuit que la société DARTY pouvait saisir à son choix, le juge des requêtes de cette juridiction comme étant celle susceptible de connaître de l'instance au fond ou le juge des requêtes des juridictions dans le ressort de chacune desquelles les mesures devaient être exécutées ;
Que le juge des requêtes du tribunal de commerce de Paris était donc compétent pour ordonner des mesures devant s'exécuter dans des ressorts territoriaux d'autres juridictions et ce même si aucune d'entre elles ne devait l'être dans son propre ressort territorial ;
Que l'ordonnance doit être confirmée en ce qu'elle a déclarée infondée l'exception d'incompétence territoriale des sociétés SATURN et les a déboutées de toutes leurs demandes ;
Considérant que l'équité commande d'allouer à la société DARTY une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant tel que précisé dans le dispositif de l'arrêt, que les appelantes doivent supporter les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Vu l'ordonnance de référé rendue le 22 novembre 2009 par le président du tribunal de commerce de Paris, l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 9 juillet 2010, l'arrêt rendu par la cour de cassation, chambre commerciale et économique, le 14 février 2012,
Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,
Condamne les sociétés MEDIA SATURN France (nouvellement dénommée CAP BOULANGER), SATURN [Localité 6] (nouvellement dénommée SAS [Localité 6]), SATURN DOMUS [Localité 4] (nouvellement dénommée SAS DOMUS [Localité 4]), SATURN [Localité 7] (nouvellement dénommée SAS, [Localité 7]), SATURN [Localité 2] (nouvellement dénommée SAS [Localité 2]) à payer à la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS une indemnité de 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre prétention des parties,
Condamne les sociétés MEDIA SATURN France (nouvellement dénommée CAP BOULANGER), SATURN [Localité 6] (nouvellement dénommée SAS [Localité 6]), SATURN DOMUS [Localité 4] (nouvellement dénommée SAS DOMUS [Localité 4]), SATURN [Localité 7] (nouvellement dénommée SAS, [Localité 7]), SATURN [Localité 2] (nouvellement dénommée SAS [Localité 2]) aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT