Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2013
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/07134
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/09811
APPELANTS
Monsieur [L] [T]
[Adresse 7]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Me Nathalie LESENECHAL (avocat au barreau de PARIS, toque : D2090)
Ayant pour avocat plaidant: Me Pierre FAVEL, avocat au barreau de PERPIGNAN
Madame [S] [B] ex épouse [T]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant: Me Nathalie LESENECHAL (avocat au barreau de PARIS, toque : D2090)
Ayant pour avocat plaidant : Me Pierre FAVEL, avocat au barreau de PERPIGNAN
INTIMÉE
SA BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER 'BPI', agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée et assistée par : la SELARL CABINET BOUKRIS (Me Isabel LOPES), avocat au barreau de PARIS, toque : B0274
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 Janvier 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente
Madame Caroline FÈVRE, Conseillère
Madame Muriel GONAND, Conseillère
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.
Greffier, lors des débats : M. Sébastien PARESY
ARRÊT :
- contradictoire
-rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente et par M. Sébastien PARESY, greffier présent lors du prononcé.
****************
Vu le jugement réputé contradictoire rendu le 14/3/2012 par le tribunal de grande instance de Paris qui a condamné Monsieur [L] [T] et Madame [S] [B] épouse [T] à payer à la BANQUE PATRIMOINE et IMMOBILIER ( BPI) la somme de 156.996 €, un centime, qui portera intérêts au taux interbancaire offert en euros à trois mois majoré de 1,25 point, conformément aux dispositions du contrat, à compter du 4/5/2011, a débouté la BPI de sa demande de dommages-intérêts et de sa demande de capitalisation des intérêts, a ordonné l'exécution provisoire, a dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
Vu l'appel interjeté par Monsieur et Madame [T] à l'encontre de cette décision;
Vu l'ordonnance en date du 4/10/2012 par laquelle le magistrat de la mise en état s'est dit compétent pour statuer sur la demande de sursis à statuer formé par Monsieur et Madame [T] et l'a rejetée ;
Vu les conclusions signifiées le 17/12/2012 par lesquelles Monsieur et Madame [T] demandent à la cour, à titre principal, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, d'ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la décision pénale définitive devant intervenir dans le dossier 'APOLLONIA' et dans lequel la BPI est mise en examen, subsidiairement, de rejeter l'ensemble des demandes de la BPI, celle-ci étant dépourvue du droit d'agir contre eux, de rejeter en tout état de cause les demandes de la BPI, cette dernière ne démontrant pas le quantum de sa créance, de rejeter ses demandes au titre de la clause pénale et des dommages-intérêts, de condamner la BPI au paiement de la somme de 156.996,01€ à titre de dommages-intérêts, et d'ordonner, autant que de besoin, la compensation avec les sommes qu'ils pourraient lui devoir ou si la cour estimait qu'ils ne rapportent pas la preuve de leur préjudice, de désigner un expert qui évaluera l'ensemble des préjudices, proposera un apurement des comptes entre les parties, et donnera à la cour tous éléments utiles à la solution du litige, en tout état de cause, de condamner la BPI au paiement de 10.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions signifiées le 18/12/2012 par la BANQUE PATRIMOINE et IMMOBILIER (BPI) qui demande à la cour de rejeter toutes les fins de non recevoir soulevées par les appelants, de dire irrecevable la demande de sursis à statuer qu'ils présentent, de rejeter la demande de nomination d'un expert et la demande de déchéance du droit aux intérêts qu'ils formulent, de débouter les appelants de toutes leurs demandes, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné les appelants au paiement de la somme de 156.996,01 € et aux dépens, de l'infirmer pour le surplus, statuant à nouveau de condamner les époux [T] à lui verser, en plus de la somme de 156.996,01 €, celle de 10.989,72€ , de dire que cette somme portera intérêt au taux contractuel de 3.50 % à compter de la déchéance du terme et jusqu'au parfait paiement des sommes dues, d'ordonner la capitalisation des intérêts et de condamner les appelants à lui verser la somme de 40.000€ à titre de dommages-intérêts, en tout état de cause, ' d'ordonner l'exécution provisoire' (sic) et de condamner les appelants à lui payer la somme de 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile' ;
SUR CE
Considérant que par acte du 20 mars 2007, Monsieur [T] et Madame [B] ont signé un contrat de réservation concernant la vente en l'état futur d'achèvement d'un appartement situé [Adresse 13] pour le prix de 155.767 euros ;
Considérant que par acte notarié du 23 novembre 2007, la BPI a consenti à Monsieur [T] et Madame [B] un prêt de 155.767 euros, destiné à financer l'acquisition en l'état futur d'achèvement d'un appartement à usage locatif, situé [Adresse 13] ;
Considérant que des échéances étant impayées, la BPI a prononcé la déchéance du terme le 4 mai 2011 ;
Considérant que par acte d'huissier de justice du 23 juin 2011, la BPI a assigné Monsieur [T] et Madame [B], lesquels n'ont pas comparu, en paiement du solde de prêt devant le tribunal de grande instance de Paris qui a rendu la décision déférée ;
Considérant que les époux [T], qui ont divorcé en [Date décès 9], exposent qu'ils ont été démarchés, sinon harcelés, dans le courant de l'année 2007, par la société APOLLONIA, qui s'est présentée comme une société gérée 'avec talent et exigence', réalisant un chiffre d'affaires de 35 millions d'euros, pour un résultat net de plus de 16 millions, et ce en employant moins de 20 salariés, exerçant 'une activité de gestion de patrimoine immobilier', plus particulièrement dans la mise en relation entre des indépendants ou dirigeants (professions libérales, commerçants, artisans, mandataires sociaux et cadres) et des promoteurs, dans le cadre, soit du dispositif dit anciennement '[N]' et actuellement 'DE ROBIEN' destiné à favoriser le logement locatif, soit du dispositif dit du ' loueur en meublé' ; qu'il leur a été indiqué qu'il pouvait s'assurer une 'retraite dorée', s'ils investissaient dans l'immobilier sous le statut LMP (Loueur en Meublé Professionnel), garantis sans risque, et sans apport personnel ; que grâce au montage qui leur était proposé, ils allaient compenser les charges afférentes aux différents biens immobiliers, en ce compris les échéances des crédits, grâce, en premier lieu, aux importants avantages fiscaux (notamment, le remboursement de TVA) dont ils allaient bénéficier et, en second lieu, aux loyers que devaient verser les différents locataires ayant contracté avec les sociétés de gestion exploitant les différentes résidences ; qu'il leur a été dit que la société APOLLONIA était partenaire de différents groupes bancaires, et notamment GE MONEY BANK, CREDIT MUTUEL, BANQUE PATRIMOINE et IMMOBILIER, CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE RHÔNE ALPES AUVERGNE, et que les financements nécessaires seraient obtenus sans difficulté, et sans délai ; que, de même, elle travaillait avec des notaires, Me [W], Me [J] et Me [V], qui se chargeraient de toutes les formalités nécessaires, sans que, surtout, ils n'aient à s'inquiéter de prendre contact avec leur propre conseil ;
Que c'est ainsi que, profanes en la matière et mis en confiance, ils ont signé 5 contrats de réservation pour des ventes en l'état futur d'achèvement portant sur trois biens, sur la commune de [Localité 14], pour un prix total de 556.750 €, et deux sur la commune de [Localité 15], Résidence Val de Durance, pour un prix total de 311.534 €, ce qui impliquait un investissement total de 868.284,00 € ; qu'ils ont souscrit 5 prêts, le 27/3/2007 auprès de la Banque PATRIMOINE et IMMOBILIER, pour un montant de 155.567€, le 2/4/2007 auprès de GE MONEY BANK pour 193.625€ , le 20/4/2007 auprès du CRÉDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE, pour 155.767€, le 23/4/2007 auprès du CRÉDIT IMMOBILIER de FRANCE RHÔNE ALPES AUVERGNE, pour 184.611€, le 3/5/2007, auprès du CRÉDIT MUTUEL VALDOIE pour 178.514€ ; qu'ils ont conclu des baux commerciaux avec la société HISTORIA PRESTIGE pour les appartements de [Localité 14] et avec la SAS ABC, pour l'exploitation des appartements de [Localité 15] ; qu'ils ont donné des procurations pour réitérer les ventes par actes authentiques et pour l'inscription au registre du commerce et des sociétés ; que c'est ainsi que les actes de vente et de prêt ont été formalisés ;
Considérant qu'ils indiquent que les investissements ne correspondaient en rien aux promesses et qu'ils n'étaient en aucune façon autofinancés ; qu'ils précisent que les travaux ont pris du retard, ce qui fait qu'ils ont dû régler les échéances des emprunts immobiliers sans contrepartie, qu'ils se sont aperçus que les biens avaient été largement surévalués et donc surpayés, qu'ils étaient difficilement revendables, que les remboursements de TVA étaient inférieurs à ce qui leur avait été promis, de même que les loyers commerciaux, qui, en outre, étaient encaissés avec beaucoup de retard ;
Considérant qu'ils déclarent que près de deux cents personnes, qui comme eux, ont été victimes de la société APOLLONIA se sont regroupées au sein d'une association (ASDEVILM) et ont déposé plainte auprès du Procureur de la République de [Localité 10] ; qu'une information a été ouverte dans le cadre de laquelle les dirigeants de la société APOLLONIA et des notaires ont été mis en examen ;
Que l'association a demandé, et obtenu, la désignation par le Président du tribunal de commerce de MARSEILLE d'un mandataire ad hoc aux fins de renégocier les prêts consentis aux différents investisseurs ; que ces négociations n'ont pas abouti ;
Considérant qu'ils ajoutent que par actes délivrés les 05, 06, 09, 11 et 12 juin 2009, ils ont assigné devant le tribunal de grande instance de MARSEILLE, les banques, les notaires et la société APOLLONIA, en responsabilité ;
Considérant que Monsieur et Madame [T] critiquent l'ordonnance du conseiller de la mise en état qui a refusé de faire droit à leur demande de sursis à statuer ; qu'ils indiquent que la cour devra statuer sur les fautes de BPI qui peuvent entraîner une déchéance des intérêts, frais et de la clause pénale, celles par lesquelles ils entendent voir engagée la responsabilité de la banque par voie d'exception ; qu'ils dénoncent le fait qu'en raison du secret de l'instruction, ils sont dans l'impossibilité d'utiliser les moyens de preuve utiles à leur défense ; qu'ils font valoir que si leur créance de dommages-intérêts peut revêtir un caractère hypothétique, c'est parce que le tribunal de grande instance de MARSEILLE a sursis à statuer sur leurs demandes; que les droits de la défense sont consacrés par la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme au même titre que le délai raisonnable et que le fait que la cour puisse trancher sans qu'ils puissent utiliser les éléments de preuve recueillis par le juge d'instruction est attentatoire aux droits de la défense et aux garanties du procès équitable ; qu'ils demandent donc à la cour de prononcer le sursis à statuer ;
Considérant que Monsieur et Madame [T] soutiennent ensuite que la BPI est irrecevable à agir, à défaut d'intérêt ; qu'ils expliquent que toutes les créances dites 'APOLLONIA', qui s'élèvent à la somme de 78.829 millions d'euros, ont été cédées 'selon la méthode dite de titrisation' en vertu d'une convention passée avec BPI MASTER MORTGAGE;
Considérant au fond, qu'ils prétendent que le TEG, qui est indiqué en page 6 de l'offre, n'intègre pas les commissions versées aux apporteurs d'affaires ou à la société APOLLONIA, et qu'il est donc irrégulier, ensuite que les dispositions des articles L312-10 et L312 8 4° et L 312-14-2 du code de la consommation n'ont pas été respectées, en ce qui concerne le délai de 10 jours, l'évaluation du coût des sûretés réelles ou personnelles, l'information annuelle sur le taux d'intérêt variable, de sorte que BPI devrait être déchue du droit aux intérêts contractuels ; qu'ils demandent à la cour de modifier le montant de l'indemnité contractuelle qui est une clause pénale et de dire que la demande de dommages-intérêts n'est pas justifiée ;
Considérant que, subsidiairement, ils soutiennent que la responsabilité de la BPI est engagée ; qu'elle a commis des fautes dans l'octroi du crédit ; qu'elle s'est abstenue de vérifier la réalité des informations fournies par la société APOLLONIA, ce qui aurait permis de découvrir les fraudes et constitue un manquement de sa part à son obligation contractuelle de mise en garde ; qu'ils invoquent la qualité de mandataire des banques de la société APOLLONIA qui a utilisé des man'uvres frauduleuses, et à tout le moins dolosives, afin d'engager les demandeurs à souscrire des engagements financiers totalement disproportionnés à la valeur réelle des biens dont ils se portaient acquéreurs, et en tout point inadaptés à leur situation financière et personnelle et en distribuant des crédits bancaires, a joué un rôle d'intermédiaire entre les demandeurs et les banques concernées de sorte que les banques, qui 'ont, par son truchement, adressé des offres de prêts, reçu des acceptations des emprunteurs et débloqué les crédits, ne sauraient dès lors ignorer la situation résultant du mandat plus ou moins formel qu'elles ont accordé à la société APOLLONIA, qu'elles ont à cet égard rémunéré au titre des bons services qu'elle leur a rendus' et que la société APOLLONIA doit être considérée comme leur mandataire en application des dispositions de l'article 1984 du code civil et a pratiqué du démarchage pour le compte d'établissements financiers en qualité d'intermédiaire de banque au sens de l'article L.519-1 du Code Monétaire et Financier ;
qu'ils s'appuient sur la consultation établie par le Professeur [Z] pour dire que les banques devront être déclarées responsables des fautes commises par la société APOLLONIA sur le fondement des dispositions des articles 1146 et suivants du code civil et du fait du défaut de surveillance de leur mandataire, la société APOLLONIA puisqu'elles ont incontestablement favorisé la distribution de crédits dans des conditions irrégulières et préjudiciables à toute une série d'emprunteurs ;
- sur la demande de sursis à statuer
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 73, 771 et 916 du code de procédure civile que le magistrat de la mise en état est seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation de la juridiction, pour statuer sur une demande de sursis à statuer, qui constitue une exception de procédure, et que la partie qui a été déboutée de la demande de sursis à statuer qu'elle avait formée devant le magistrat de la mise en état et qui n'a pas déféré cette ordonnance devant la cour dans les 15 jours de sa date est irrecevable à former devant la cour, statuant au fond, une nouvelle fois, une telle demande ;
Considérant que, ainsi que la demande la BPI, la demande de sursis à statuer sera déclarée irrecevable ;
- sur la qualité à agir de la BPI
Considérant qu'il résulte de la pièce n° 9 de la BPI que cette banque a cédé, par voie de bordereau, au fonds commun de créances BPI MASTERMORTAGE- COMPARTIMENT BPI MASTER MORTAGE 2003, 196 créances résultant de prêts immobiliers, au nombre desquels ne figure pas la créance résultant du prêt consenti à Monsieur et Madame [T]; qu'en outre, en [Date décès 9], les parties sont convenues de procéder à la résolution de leur cession qui a pris effet au 31/3/2009 ; que cette résolution a eu pour effet d'annuler la cession des créances au fonds de sorte que celui-ci n'a eu aucun droit sur les créances ;
Considérant qu'il s'ensuit que la BPI a constamment été créancière au titre du prêt consenti à Monsieur et Madame [T], ce qui rend sa qualité et son intérêt à agir incontestables, étant au surplus à rappeler, comme le fait l'intimée, que selon l'article L214-46 du code monétaire et financier, le cédant conserve, en matière de titrisation, la qualité pour agir en recouvrement des créances cédées ;
Considérant que la BPI est donc recevable à agir ;
- sur la déchéance des intérêts au taux contractuel
Considérant que le contrat de prêt (pièce 5 de la BPI) contient aux pages 3,4,5,6 toutes les stipulations relatives, d'abord au taux d'intérêt (fixe et révisable ), puis au TEG ; qu'il donne des précisions sur la durée, le mode de calcul de ceux-ci et prévoit au titre des frais que sera dûe une somme de 900€ ; qu'il est spécifié en page 6 que le taux effectif global du crédit ressort à 5,630% ' en prenant pour base pour la totalité de la première période en ce compris la durée de la franchise éventuelle, le taux d'intérêt fixe, et pour la seconde période l'Euribor 3 mois connu lors de l'étude (du) dossier augmenté de 1,250 point (s), du coût des frais de montage, des frais d'actes et de garanties, du coût de l'assurance, et en supposant le taux d'intérêt constant en deuxième période', que le coût total du crédit se chiffre à 137.927,28€, se décomposant en intérêts 121.285,28€, assurance groupe 13.242€, frais de montage 900€ , frais d'acte et garantie 2.500€ , et que ni le coût total du crédit, ni le TEG ne tiennent compte des intérêts intercalaires;
Considérant qu'en l'état de ces indications, il ne peut être déduit, comme le soutiennent Monsieur et Madame [T], que 'l'offre de prêt n'intègre pas les commissions versées à des apporteurs d'affaires ou à la société APOLLONIA', cette affirmation péremptoire n'étant pas autrement justifiée, ni dans son principe ni dans son quantum, étant à préciser à ce dernier propos que le contrat fait état de frais de montage d'un montant de 900€ ;
Considérant dès lors que le non respect de l'article L 313-1 du code de la consommation qui prévoit que le TEG doit intégrer les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels, n'est pas établi ;
Considérant que selon l'article L 312-10 du code de la consommation, l'envoi de l'offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu'elle indique pendant une durée minimale de trente jours à compter de sa réception par l'emprunteur, l'offre est soumise à l'acceptation de l'emprunteur et des cautions, personnes physiques, déclarées, l'emprunteur et les cautions ne peuvent accepter l'offre que dix jours après qu'ils l'ont reçue, l'acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi ;
Que l'examen de l'offre de prêt démontre d'une part que cette réglementation est rappelée, d'autre part que l'offre a été adressée à Monsieur et Madame [T], le 27/3/2007, qu'ils l'ont acceptée le 10/4/2007, ainsi qu'en atteste la mention manuscrite qu'ils ont apposée au dessus de leur signature et le cachet de la poste sur l'enveloppe adressée à la BPI, de sorte qu'ils ont bien pu bénéficier du délai légal de réflexion ;
Que la circonstance qu'une procuration notariée ait été établie le 29/3/2007 est indifférente à cet égard ;
Considérant que le contrat de prêt prévoit en page 5 que les frais d'actes et de garanties 'peuvent être évalués à1,60% du montant du crédit' et que leur montant sera précisé par le notaire auquel ils seront réglés ; que cette clause répond aux exigences de l'article L312-8 4° du Code de la consommation ;
Considérant qu'à supposer que la BPI, qui le conteste, n'ait pas adressé aux emprunteurs les courriers annuels indiquant le capital restant dû, cette inobservation des dispositions de l'article L312-14-2 du code de la consommation, n'est pas sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts contractuels ;
Considérant que Monsieur et Madame [T] seront déboutés de leurs prétentions;
- sur la responsabilité de la BPI
Considérant que Monsieur et Madame [T] se fondent sur la consultation qu'ils versent aux débats pour prétendre qu'ils sont bien fondés à mettre en oeuvre la responsabilité de la banque ; que l'universitaire qui a établi cette étude affirme en effet ' que la responsabilité des banques dans les opérations en cause est engagée sur le droit du mandat, qu'elle trouve une double expression, d'abord contractuelle pour fait d'autrui, (les agissements irréguliers et frauduleux d'APOLLONIA étant là visés), et contractuelle du fait personnel tenant au fait d'avoir facilité la distribution de crédits excessifs en n'exerçant aucun contrôle sur les activités d'APOLLONIA' ; que cette conclusion est fondée sur un double postulat, d'une part, que le crédit consenti est excessif, d'autre part, que les banques sont liées par un contrat de mandat avec la société APOLLONIA ;
Considérant que la cour doit rappeler qu'elle ne saurait envisager 'la responsabilité globale des banques' mais qu'elle doit apprécier si la BPI dans le cadre spécial et limité du prêt qu'elle a consenti à Monsieur et Madame [T] portant sur le financement de l'acquisition d'un appartement, a engagé sa responsabilité ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'en ce qui concerne l'opération de crédit litigieuse, les époux [T] ont conclu un contrat préliminaire de vente en l'état futur d'achèvement d'un appartement de type T 2, avec la société SCCV VAL DE DURANCE aux termes duquel ils ont donné mandat à l'agent de 'déposer une demande de prêt correspondant aux caractéristiques visées ci-avant auprès de la banque'; que la nature du prêt est définie dans cet acte 'prêt immobilier / montant du prêt 155 767 €'; que la BPI, qui a accepté de financer cette acquisition, a adressé l'offre de prêt au domicile personnel des époux [T]; que ceux-ci ont retourné l'offre acceptée à la banque ; que l'acte notarié de prêt en date du 23/11/2007 a été passé entre la BPI et les époux [T] ;
Considérant qu'il est manifeste qu'aucun intermédiaire et, notamment pas la société APOLLONIA, n'apparaît dans les actes de prêt qui ont été passés ;
Considérant que la consultation versée aux débats par la BPI ( pièce 7-1) fait apparaître (page 17) qu'une convention a été conclue entre la société APOLLONIA et la BPI, le 5/5/2004, intitulée 'convention de mandat' ;
Que s'il y est prévu que le mandataire APOLLONIA, s'engage à promouvoir auprès de sa clientèle les crédits immobiliers de la banque, il est expressément indiqué que les demandes de crédit devront être signées par les emprunteurs et que ' la banque reste seule juge de ses décisions en matière d'octroi de crédits';
Que cette seule stipulation est exclusive de la notion de mandat qui suppose qu'une personne charge une autre d'accomplir pour son compte un acte juridique ;
Qu'en l'espèce il est manifeste que la société APOLLONIA n'était pas chargée de représenter la banque pour l'accomplissement d'un ou plusieurs actes juridiques mais simplement d'effectuer des actes de nature matérielle (démarches, collecte de documents, transmission à la banque ...) qui excluent la représentation ; qu'elle agissait dans le cadre des dispositions de l'article L519-1 du code monétaire et financier qui prévoit l'intermédiation en opérations de banque, précision étant apporté qu'en dépit de son intitulé, le contrat limitait son intervention à la présentation de la clientèle pour la conclusion éventuelle d'opérations de banque ;
Considérant que Monsieur et Madame [T] sont également mal fondés à invoquer la théorie du mandat apparent qui suppose, ce qui n'est pas le cas, que des actes juridiques aient été passés et qu'il résulte des circonstances que le tiers a pu légitimement croire que le mandataire agissait en vertu d'un mandat et dans les limites de ce mandat ;
Considérant qu'il est constant que Monsieur et Madame [T] n'ont eu de contact qu'avec la société APOLLONIA, qui ne les a pas démarchés au sens de l'article L341-1 du code monétaire et financier qui implique la conclusion d'un contrat entre le démarcheur ou son commettant et un client, mais leur a fait signer autant de demandes de prêts que de lots de copropriété à financer ;
Considérant qu'en l'espèce Monsieur et Madame [T] ont souscrit 5 prêts auprès de 5 banques différentes pour financer leurs cinq investissements ;
Considérant que selon l'expression utilisée dans la consultation produite par Monsieur et Madame [T] les demandes de prêt étaient 'cloisonnées', c'est à dire que chaque banque ignorait les engagements souscrits concomitamment auprès des autres établissements de crédit et ignorait même que le crédit immobilier s'inscrivait dans un contexte de défiscalisation reposant sur le statut de loueur en meublé ;
Que ce point n'est pas critiqué par Monsieur et Madame [T], qui ne prétendent pas avoir fait état auprès de la BPI des autres crédits qui étaient simultanément en cours d'étude auprès d'autres établissements bancaires ;
Considérant que n'est pas remis en cause le fait que la banque disposait au moment de l'octroi du prêt, de la fiche de réservation signée, du contrat préliminaire de vente en l'état futur d'achèvement signé, de la demande de prêt immobilier dûment signée, incluant la fiche de renseignements bancaires des époux, des pièces justificatives relatives aux ressources, au patrimoine ainsi qu'aux charges de Monsieur [T] et Madame [B], des éléments d'état civil et de leur situation de la famille ;
Considérant qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que les éléments sur la situation financière des époux [T] aient été falsifiés et présentaient des anomalies évidentes pour un professionnel de la distribution du crédit de sorte que la BPI n'avait à opérer aucune investigation pour en vérifier l'exactitude ; que compte tenu du principe de non immixtion, la banque n'avait pas non plus à s'interroger sur l'opportunité du projet qu'elle finançait et de l'état d'endettement des époux [T] ;
Considérant que pris isolément, le crédit d'un montant de 155.767€, destiné à l'achat d'un T2, n'était pas disproportionné par rapport aux facultés financières des époux [T];
Considérant que le prêt n'étant pas excessif au regard de la capacité financière des époux [T] et du risque de l'endettement né de son octroi, la BPI n'était tenu à aucun devoir de mise en garde à leur égard ; qu'en outre, compte tenu des dissimulations effectuées, qui empêchaient la banque de détecter les irrégularités, les époux [T] sont mal fondés à invoquer la défaillance de la BPI en ce qui concerne son obligation de conseil ou de mise en garde ;
Considérant qu'il a été indiqué ci-dessus que la banque, qui a consenti un prêt immobilier à des particuliers, a respecté les dispositions du code de la consommation ;
Considérant en définitive qu'aucune faute ne peut être reprochée à la BPI ; que Monsieur et Madame [T] seront déboutés de leurs demandes indemnitaires et de leur demande de désignation d'un expert ;
- sur les demandes de la BPI
Considérant qu'il n'est pas contesté que la BPI a, en vertu du contrat de prêt litigieux, remis les fonds aux emprunteurs qui ont ainsi financé l'acquisition immobilière ; qu'il est tout aussi constant que Monsieur et Madame [T] ont été défaillants dans le remboursement des échéances ;
Considérant que Monsieur et Madame [T] prétendent, lapidairement, que la BPI ne rapporte pas la preuve du quantum de sa créance ; que, cependant, ils ne critiquent pas précisément le montant des sommes réclamées au titre des échéances impayées et du capital restant dû ; qu'il résulte des pièces versées aux débats par la BPI, qui ne sont pas utilement contestées, qu'ils sont redevables, ainsi que les premiers juges l'ont dit, de la somme totale de 156.996,01€, au titre des mensualités échues impayées au 4/5/2011 et du capital restant dû après l'échéance du 25/4/2011 ;
Considérant que l'article VIII des conditions générales du contrat de prêt prévoit que lorsqu'une somme devenue exigible ' n 'est pas payée dans le délai d'un mois de l'envoi de la lettre recommandée avec avis de réception, ou dans les huit jours d'une sommation d'huissier....le montant des sommes dues à la banque comprendra les échéances impayées, majorées des indemnités de retard, les reports éventuels, le capital restant dû, les intérêts calculés au taux du contrat sur les sommes ci-dessus jusqu'au règlement intégral de la créance, ... une indemnité de 7 % sur la totalité des sommes ci-dessus' ; que le contrat fait la loi des parties, et qu'il met, dans certaines hypothèses, à la charge des emprunteurs, le paiement d'une indemnité contractuelle de 7% sur le capital restant dû et les échéances impayées majorées des indemnités de retard ; qu'il n'est pas contesté que la mise en demeure qui a été délivrée à Monsieur et Madame [T] est demeurée vaine ; que Monsieur et Madame [T] sont redevables au titre de l'indemnité contractuelle de la somme de 10 989,72 euros ;
Considérant que Monsieur et Madame [T] demandent à la cour de réduire le montant de cette indemnité qu'ils qualifient de clause pénale ; que cependant la peine convenue n'apparaît pas manifestement excessive, eu égard au préjudice subi ;
Considérant que Monsieur et Madame [T] seront donc condamnés à payer, en outre, la somme de 10.989,72 € à la BPI ; que le jugement déféré sera sur ce point, infirmé ;
Considérant que les premiers juges ont justement refusé de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts prévue par l'article 1154 du code civil, au visa des dispositions de l'article L 311-23 du code de la consommation ; que la décision sera, sur ce point, confirmée ;
Considérant que la BPI expose qu'elle ne dispose d'aucun dépôt pour se financer, n'ouvrant pas de compte courant ; que son chiffre d'affaires résulte des intérêts tirés des prêts accordés ; qu'elle subit donc un préjudice certain, évalué à 40.000€, du fait du non-remboursement total du prêt ; qu'elle ajoute que les emprunteurs ont contracté de mauvaise foi en ne l'informant pas de ce qu'ils souscrivaient d'autres prêts auprès d'autres établissements bancaires, augmentant par la même leur état d'endettement et l'empêchant de mesurer le risque d'irrécouvrabilité qui pesait sur sa créance ; qu'elle précise que les emprunteurs n'ont jamais accepté ses propositions de paiement ;
Mais considérant que le préjudice subi par la BPI a déjà été indemnisé, sur la base des stipulations contractuelles ; que la cour n'estime pas devoir l'indemniser autrement, et ce d'autant qu'elle ne peut faire abstraction, dans l'appréciation de la faute commise par Monsieur et Madame [T], du contexte dans lequel les faits se sont déroulés et des agissements dont ils ont été victimes de la part de la société APOLLONIA;
Considérant que la BPI sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
Considérant que, compte tenu du sort réservé au recours, Monsieur [T] et Madame [B], qui succombent et seront condamnés aux dépens, ne peuvent prétendre à l'octroi de sommes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; que l'équité commande au contraire de les condamner au paiement de la somme de 1.000€ à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
Déclare irrecevable la demande de sursis à statuer formée par Monsieur [T] et Madame [B],
Rejette la fin de non recevoir qu'ils ont présentée, tirée de l'absence de qualité et d'intérêt à agir de la BPI,
Infirme le jugement déféré uniquement en ce qu'il a refusé de faire droit à la demande de la BPI au titre de l'indemnité contractuelle le confirme pour le surplus,
Statuant du chef infirmé et y ajoutant,
Condamne Monsieur [L] [T] et Madame [S] [B], solidairement, à payer à la BPI la somme de 10.989,72 € au titre de l'indemnité contractuelle, avec intérêt contractuel de 3.50% à compter de la déchéance du terme jusqu'à parfait paiement, et celle de 1.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes des parties,
Condamne solidairement Monsieur [T] et Madame [B] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
Le Greffier Le Président