Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2013
(n° ,11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/08265
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Février 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/01360
APPELANTE
La S.C.I. SECRETAN 44, prise en la personne de ses représentants légaux,
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090, avocat postulant
assistée de Me Philippe ALFANDARI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0471, avocat plaidant
INTIMÉE
Madame [S] [O]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Jean-Philippe AUTIER de la SCP AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053, avocat postulant
assistée de Me Juliette CROS de la SELARL GERARD FASSINA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0587, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Décembre 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odile BLUM, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.
Madame Odile BLUM a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Chantal BARTHOLIN, Présidente
Madame Odile BLUM, Conseillère
Madame Isabelle REGHI, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Alexia LUBRANO.
ARRÊT :
- contradictoire.
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Chantal BARTHOLIN, Présidente et par Mme Alexia LUBRANO, Greffière.
* * * * * * *
Vu le jugement rendu le 12 février 2009 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
- débouté la s.c.i. Secretan 44 de sa demande de résiliation judiciaire du bail portant sur les locaux loués à Mme [O] sis à [Adresse 2] et de ses demandes subséquentes en expulsion et paiement d'indemnité d'occupation,
- dit que la s.c.i. Secretan 44 est responsable des désordres survenus à l'intérieur des locaux loués à Mme [O],
- fixé à la somme globale de 75 000 €, toutes causes de préjudices confondues, les dommages et intérêts alloués à Mme [O] résultant des désordres subis à l'intérieur des locaux,
- dit que le montant justifié des loyers et accessoires de loyers dont Mme [O] reste redevable à l'égard de la s.c.i. Secretan 44 s'élève à la somme de 20.992,35 €,
- condamné la s.c.i. Secretan 44 à payer à Mme [O], après compensation entre ces deux sommes, la somme de 54. 007,65 €,
- condamné la s.c.i. Secretan 44 à effectuer les travaux de remise en état des locaux loués à Mme [O] consécutivement aux désordres apparus après les travaux achevés en mai 2006,
- condamné la s.c.i. Secretan 44 à payer à Mme [O] la somme de 9.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la s.c.i. Secretan 44 aux dépens comprenant les frais de l'expertise judiciaire confiée à M. [G] ;
Vu l'appel de cette décision relevé le 6 avril 2009 par la s.c.i. Secretan 44 ;
Vu l'arrêt, rectifié par arrêt du 16 février 2011, rendu le 1er décembre 2010 par cette cour qui a :
- confirmé le jugement sur le principe de la responsabilité de la s.c.i. Secretan 44 dans le préjudice consécutif aux désordres litigieux,
- infirmé le jugement sur l'évaluation du préjudice et statuant à nouveau sur ce chef, dit que le préjudice subi par Mme [O] suite aux désordres en cause s'établit à la somme de 60.000 € concernant le préjudice commercial et à la somme de 3.000 € concernant le préjudice moral,
- avant dire droit sur le décompte locatif et le compte entre les parties et sur la demande de Mme [O] relative aux travaux restant à effectuer :
*ordonné, concernant le compte locatif, la réouverture des débats aux fins de production par les parties de l'avis d'échéance et de la quittance afférente au terme ayant précédé la révision du 1/4/1999 et d'observations de leur part, d'une part, sur la concordance aux stipulations contractuelles de l'appel à ce terme du loyer principal et d'autre part, sur l'existence ou non d'un accord de la locataire à la révision triennale opérée en 2002 et 2005 par la bailleresse,
- ordonne, concernant les travaux restant à effectuer, une expertise confiée à M. [G] avec mission de vérifier si les travaux réalisés par la bailleresse en partie arrière des locaux correspondent aux devis établis par les entreprises Arpb, Barse, Amelec Bastille qu'il avait, dans sa précédente expertise, agréées, de déterminer les éventuelles autres origines de la persistance des désordres et les travaux nécessaires à la remise en état,
- sursis à statuer dans l'attente sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- réservé les dépens ;
Vu le dépôt par l'expert de son rapport le 1er décembre 2011 ;
Vu l'ordonnance du 16 mai 2012 par laquelle le conseiller de la mise en état s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de nullité du rapport d'expertise formée par Mme [O] ;
Vu les dernières conclusions en date du 31 octobre 2012 de la s.c.i. Secretan 44 qui demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à effectuer des travaux de remise en état des locaux loués et à payer une indemnité de 9.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens et de :
- fixer le montant de sa créance locative sur sa locataire à la somme, arrêtée au 19/10/2012, de 45.593,50 €,
- condamner Mme [O] à lui rembourser la somme de 1.500 € allouée par le jugement du 20 juillet 2010 infirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 7 avril 2011,
- condamner en conséquence Mme [O] à lui payer la somme de 47.093,50 €,
- ordonner la compensation entre la somme de 63.000 € correspondant à l'indemnisation allouée à Mme [O] par l'arrêt du 1er décembre 2010 et celle de 59.007 € réglée à Mme [O] par la s.c.i. Secretan 44 dans le cadre de la décision du 12 février 2009,
- constater l'acquisition de la clause résolutoire visée par le commandement de payer délivré le 21 juillet 2011,
- prononcer la résiliation du bail,
- ordonner l'expulsion de Mme [O] ou de tous occupants de son chef,
- condamner Mme [O] à procéder à la radiation de l'inscription d'hypothèque judiciaire prise le 20 décembre 2009 sur l'immeuble sous astreinte ainsi qu'au paiement d'une somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts,
- déclarer tant irrecevable que mal fondée, Mme [O] en l'ensemble de ses demandes,
- condamner Mme [O] à lui payer 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel dont distraction ;
Vu les dernières conclusions en date du 16 novembre 2012 de Mme [O] qui demande à la cour de :
1/- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le montant justifié des loyers et accessoires de loyers dont Mme [O] reste redevable à l'égard de la s.c.i. Secretan 44 s'élève à la somme de 20.992,35 €,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la s.c.i. Secretan 44 de sa demande d'acquisition de la clause résolutoire, débouté la s.c.i. Secretan 44 de sa demande en paiement de loyers et accessoires, condamné la s.c.i. Secretan 44 à effectuer les travaux de remise en état des locaux loués à Mme [O] consécutivement aux désordres apparus après les travaux achevés en mai 2006 et condamné la s.c.i. Secretan 44 à payer à Mme [O] la somme de 9.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris les frais d'expertise,
2/ assortir d'une astreinte la condamnation de la s.c.i. Secretan 44 à effectuer les travaux,
3/- dire que le rapport d'expertise de M. [G] du 14 novembre 2011 est nul et de nul effet,
- subsidiairement, dire que les constatations et conclusions de M. [G] doivent être écartées, le juge n'étant pas lié,
4/- constater son préjudice tel que constaté par le juge des référés dans son ordonnance du 17 janvier 2006 du fait de la s.c.i. Secretan 44 qui n'a pas réalisé les travaux dans les délais et réalisé, très tardivement et dans l'urgence, des travaux non conformes aux prescriptions expertales,
- dire qu'elle n'est pas redevable de la somme de 20.992,35 € correspondant au loyer pour la période du 30 septembre 2004 au 31 mai 2006, somme payée par compensation en exécution du jugement du 12 février 2009,
- condamner la s.c.i. Secretan 44 à lui payer la somme de 20.992,35 € assortie de l'intérêt au taux légal,
- débouter la s.c.i. Secretan 44 de sa demande de paiement de cette créance complémentaire de loyer et de toutes demandes plus amples ou complémentaires à ce titre,
- débouter la s.c.i. Secretan 44 de sa demande d'acquisition de la clause résolutoire sur le fondement du commandement de payer du 21 juillet 2011,
5/ - débouter la s.c.i. Secretan 44 de sa demande en dommages et intérêts de 10.000 € et plus généralement de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la s.c.i. Secretan 44 à lui payer la somme complémentaire de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens dont distraction ;
SUR CE,
Considérant que pour la compréhension du présent litige, il sera indiqué que :
- par acte du 18 janvier 1991, Mme [O] a acquis avec son époux, depuis décédé, un fonds de commerce de parfumerie - soins esthétiques exploité au [Adresse 2] en vertu d'un contrat de bail commercial du 30 mars 1990 à effet au 1er avril 1990,
- par jugement du 22 octobre 2003, le juge des loyers commerciaux a fixé à 8.514 € en principal par an à compter du 1er avril 1999, le loyer du bail renouvelé depuis cette date, toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées et dit que les arriérés de loyers porteront intérêts au taux légal à compter de la date de prise d'effet de chaque loyer,
- par ordonnance du 12 décembre 2002, le juge des référés a désigné M. [G] en qualité d'expert qui, dans son rapport déposé en mai 2005, a constaté l'existence d'infiltrations multiples dans les locaux commerciaux dues à la vétusté de l'immeuble et a préconisé la réparation des fissures, la réfection des plâtres et des peintures dégradées, le déplacement de la canalisation d'arrivée d'eau et l'isolation du mur séparatif infiltré,
- le 19 janvier 2007, la s.c.i. Secretan 44 a assigné Mme [O] en paiement d'un arriéré locatif puis a demandé la résiliation du bail, Mme [O] demandant reconventionnellement la remise en état complète de son local ainsi que des dommages et intérêts pour préjudice commercial et moral ce qui a donné lieu au jugement déféré puis à l'arrêt mixte rendu par cette cour le 1er décembre 2010 ;
Considérant que parallèlement à la présente instance :
- une instance a été introduite par Mme [O] devant le juge de l'exécution ce qui a donné lieu à un jugement du 28 mai 2010 puis à un arrêt infirmatif du 7 avril 2011,
- par acte extrajudiciaire du 5 octobre 2010, Mme [O] a demandé le renouvellement du bail à compter du 1er janvier 2011 ce que la s.c.i. Secretan 44 a accepté moyennant un loyer de 13.601,41 € hors taxes et hors charges,
- le 21 juillet 2011, la s.c.i. Secretan 44 a délivré à Mme [O] un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme de 19.013,05 € en principal, correspondant au montant de loyers et charges prétendument dû pour la période du 1er avril 2010 au 1er juillet 2011,
- le 12 août 2011, Mme [O] a saisi le tribunal de grande instance de Paris d'une opposition à commandement,
- le 28 septembre 2011, la s.c.i. Secretan 44 a saisi le juge des référés pour voir déclarer acquise la clause résolutoire visée au commandement du 21 juillet 2011 ce qui a donné lieu à une ordonnance de rejet confirmée en appel le 8 novembre 2012 ;
Considérant enfin, qu'il ressort des explications des parties et pièces produites que :
- l'instance en opposition au commandement de payer du 21 juillet 2011 est toujours pendante devant le tribunal de grande instance de Paris,
- le prix du bail renouvelé à la suite de la demande de renouvellement du locataire acceptée par le bailleur n'apparaît pas avoir fait l'objet d'un accord entre les parties dès lors que le bordereau de pièces annexé à l'assignation en opposition à commandement, produite par Mme [O] en pièce 92, vise un "mémoire en demande de fixation de loyer" faisant suite à la "demande de renouvellement du 5 octobre 2010 ;
Considérant, cela étant posé, que par son arrêt mixte du 1er décembre 2010, cette cour a confirmé le jugement sur le principe de la responsabilité de la s.c.i. Secretan 44 dans le préjudice consécutif aux désordres antérieurs à 2006, l'a partiellement infirmé sur les dommages et intérêts alloués à Mme [O] en réparation de son préjudice commercial et de son préjudice moral et a, d'une part, rouvert les débats sur le compte locatif et les comptes entre les parties, d'autre part, désigné à nouveau M. [G] sur les travaux restant à effectuer.
Sur les travaux restant à effectuer :
Considérant qu'en conclusion de son rapport déposé le 1er décembre 2011, M. [G] a indiqué que les travaux réalisés par la bailleresse en partie arrière des locaux correspondent bien aux devis établis par les entreprises Arpb, Barse et Amelec Bastille lors de sa précédente expertise et que ces travaux ont permis de remédier aux désordres qui avaient été alors constatés ;
Considérant que Mme [O] conclut à la nullité de ce rapport d'expertise au visa notamment des articles 16 et 276 du code de procédure civile, faisant valoir que l'expert a déposé son rapport moins de cinq mois après l'unique réunion sur place du 20 juin 2011, sans compte-rendu de cette réunion ni note de synthèse valant pré-rapport ni calendrier des opérations alors même qu'il s'est appuyé sur des pièces de la s.c.i. Secretan 44 qui ne lui ont pas été communiquées de sorte qu'elle n'a pas été mise en mesure par l'expert de lui faire valoir ses observations ;
Considérant que la s.c.i. Secretan 44 réplique que la mission de l'expert était simple et relevait davantage d'un constat que d'une expertise, que l'expert a pu constater l'absence d'humidité et la conformité des travaux réalisés avec ceux qu'il avait précédemment préconisés, que Mme [O] aurait eu le temps d'adresser un dire à l'expert sur des pièces qui lui avaient été précédemment communiquées et qu'elle connaissait, qu'elle ne rapporte la preuve ni de circonstances pouvant justifier la violation du principe du contradictoire ni d'un quelconque grief et ne précise pas en quoi les conclusions de M. [G] auraient été inexactes ou partiales ;
Mais considérant qu'il suffit à la cour de constater que si l'unique réunion sur place a été organisée contradictoirement par l'expert, le principe de la contradiction n'a pas été respecté par la suite ; qu'en effet, l'expert a poursuivi ses opérations en s'appuyant sur les seules pièces que lui avait adressées la s.c.i. Secretan 44 et dont celle-ci ne justifie pas de la communication intégrale à Mme [O] dans le cadre de ces opérations d'expertise ; que l'expert n'a pas informé Mme [O] de la réception de ces pièces ni suscité ses observations sur celles-ci ; qu'il a, en cet état et sans en aviser les parties, clos son rapport le 14 novembre 2011 de sorte que Mme [O] n'a pas pu faire aucune observation ni déposer un dire qui aurait été annexé au rapport ;
Considérant qu'il importe peu que la mission de l'expert soit simple ; que Mme [O] est fondée à se plaindre de n'avoir pas été mise en mesure de faire valoir ses observations à l'expert ce qui lui fait grief ; que le principe de la contradiction n'ayant pas été respecté, le rapport d'expertise est nul ;
Considérant qu'il demeure que l'entreprise [L] mandatée par la bailleresse atteste de ce qu'il n'existait plus aucune trace d'infiltration active sur l'ensemble du local commercial au 29 septembre 2010 ; qu'il est par ailleurs établi que les travaux réalisés dans la cave ont été achevés le 1er octobre 2010 ; que Mme [O], qui a la charge de cette preuve et ne demande pas de nouvelle expertise, ne justifie pas que les infiltrations auraient repris par la suite dans les lieux loués ;
Considérant que Mme [O] qui se plaint de l'imperfection des travaux réalisés en 2006 dans son local par la bailleresse, n'indique pas précisément en quoi consisteraient les nouveaux travaux à réaliser ; qu'elle fait état de ce qu'il n'aurait pas été tenu compte "des contraintes de réfection à l'identique et la nécessité d'employer des techniques et matériaux en adéquation" et de ce que "sur le plan technique, les postes ventilation et peintures ont été particulièrement bâclés et réalisés à l'économie par rapport à ce qui avait été prévu par les autres devis réalisés par l'expert judiciaire" ;
Mais considérant que la note rédigée par Mme [O] après la réception des travaux en 2006 et à laquelle elle renvoie dans ses écritures, montre la mesure de ses exigences qui sont excessives ; qu'elle y indique en effet qu'il n'a pas été "pris en compte la difficulté de la réalisation du fait de l'ancienneté de l'Institut, de la nécessité d'utiliser des techniques et matériaux en adéquation avec cette ancienneté et l'assistance de spécialistes était une condition pour réussir à recréer sans que cela ne se ressente, une authenticité, d'autant que le tissu, la moquette (plus de 15 ans), les double-rideaux et le mobilier d'agencement plus de 50 ans ..." ; que ces annotations rejoignent les termes du procès-verbal de réunion de chantier du 20 avril 2006 mentionnant que "En tout état de cause, comme précédemment pour le papier peint, Mme [O] rejette la proposition du maître d'oeuvre de procéder à tout autre choix que l'existant, au motif d'une reconstitution à l'identique. Elle signale qu'il conviendrait de remplacer l'ensemble des revêtements de sol de ce type mis en oeuvre dans son salon : pour lui être agréable et en accord avec le maître d'ouvrage, l'entreprise Spare propose d'étendre le remplacement de ce revêtement de sol au rez-de-chaussée. Mme [O] revient au strict remplacement à l'identique de ce revêtement de sol, sur l'ensemble du salon de beauté, comme "cela a été fait à la Cathédrale Notre-Dame de Paris où le remplacement à l'identique des statues de la façade a été assuré ou au Palais du Louvre, où les décors ont été restitués à l'identique" sic ... Rejetant toute forme de discussion, elle ajoute à l'attention du maître d'ouvrage qu' "il est le cinquième ou sixième architecte qu'elle voit dans son salon, sans doute parce qu'il est le seul à s'être allongé" ..." ;
Considérant que l'huissier de justice que Mme [O] a mandaté pour tenter de démontrer le bien fondé de sa position présente, s'est borné à relever dans son procès-verbal de constat du 16 décembre 2011, des coulures sombres matérialisant des traces d'humidité sous l'escalier au niveau de l'accueil, l'impossibilité d'ouvrir les volets dans la cabine située au fond à droite du fait de la présence de barreaux à la fenêtre donnant sur cour, la propreté des murs, "recouverts d'une peinture claire et en bon état", dans la réserve au fond de la cabine à gauche, la différence du revêtement de sol des deux cabines de soins, le linoléum étant brillant et posé de façon longitudinale dans la cabine de gauche, mat et posé en largeur dans la cabine de droite, ainsi que le fait que dans la cabine située au fond à gauche, la Vmc se met en fonctionnement avec l'interrupteur électrique et continue à fonctionner pendant environ 3 minutes après l'extinction de la lumière ;
Considérant que de telles constatations, effectuées à sa demande, révèlent en fait que Mme [O] poursuit une mauvaise querelle, les coulures sous l'escalier étant susceptibles de s'expliquer par le lavage de celui-ci et la différence de revêtement de sol entre les deux cabines étant de son fait ainsi qu'il ressort du procès-verbal de réunion de chantier du 20 avril 2006 ; que les lieux loués sont à présent normalement exploitables ; que la preuve de désordres persistants imputables à la bailleresse n'étant pas rapportée, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la s.c.i. Secretan 44 à effectuer d'autres travaux et la demande de condamnation sous astreinte formée par Mme [O] à ce titre rejetée ;
Sur l'arriéré locatif et les comptes entre les parties :
Considérant qu'outre la fixation de sa créance locative sur sa locataire à la somme, arrêtée au 19 octobre 2012, de 45.593,50 € et la condamnation de Mme [O] au paiement de ladite somme, la s.c.i. Secretan 44 demande à la cour la condamnation de Mme [O] à lui rembourser la somme de 1.500 € allouée par le jugement du 20 juillet 2010 infirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 7 avril 2011 et le prononcé de "la compensation" entre la somme de 63.000 € allouée à Mme [O] à titre de dommages et intérêts pour la réparation des désordres et celle de 59.007 € qu'elle a réglée en exécution du jugement déféré assorti de l'exécution provisoire ;
Mais considérant que de telles demandes ne font qu'ajouter vainement à la confusion entretenue par des parties qui multiplient entre elles les comptes abscons et les procédures judiciaires ; que la s.c.i. Secretan 44 dispose déjà d'un titre lui permettant de se voir rembourser les 1.500 € qu'elle aurait versés en exécution du jugement du 20 juillet 2010, qui n'est pas le jugement déféré et a été infirmé en appel dans le cadre d'une autre instance ; qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur sa demande à ce titre ; qu'il n'y a pas lieu non plus, de prononcer "une compensation", entre ce que la s.c.i. Secretan 44 a d'ores et déjà versé en exécution du jugement partiellement infirmé et le montant des dommages et intérêts alloués par l'arrêt précédemment rendu dans le cadre de cette instance ;
Considérant que pour sa part, Mme [O] demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a dit que le montant justifié des loyers et accessoires de loyers dont elle reste redevable à l'égard de la s.c.i. Secretan 44 s'élève à la somme de 20.992,35 € en faisant valoir que le juge des référés l'a autorisée à suspendre les loyers du 30 septembre 2004 et le 31 mai 2006 en ordonnant la fin des travaux à cette date et qu'elle doit être dispensée du paiement des loyers pour cette période ; qu'elle soulève par ailleurs au visa de l'article 2224 ancien du code civil, la prescription quinquennale de la demande au titre des loyers réclamés pour la période du 1er octobre 2004 au 4 février 2005 ; qu'elle ajoute qu'elle est créancière de la s.c.i. Secretan 44 pour une somme de 12.841,80 €, montant de divers frais de procédure ou d'exécution et indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile et intérêts alloués tant par le jugement déféré que par d'autres décisions ; qu'elle soutient que la s.c.i. Secretan 44 doit en conséquence être déboutée de l'ensemble de sa demande au titre de l'arriéré locatif ;
Mais considérant que seul l'arriéré locatif est ici à considérer ; qu'il appartiendra à chacune des parties de faire exécuter les titres exécutoires dont elles bénéficient déjà et d'établir des comptes plus généraux entre elles, sachant au surplus qu'en vertu de l'article 1290 du code civil la compensation s'opère de plein droit, les dettes s'éteignant réciproquement à l'instant où elles se trouvent exister à la fois, jusqu'à concurrence de leurs quotités respectives ;
Considérant que Mme [O] est débitrice des loyers et charges pour les locaux qu'elle loue à la s.c.i. Secretan 44, y compris sur la période du 30 septembre 2004 au 31 mai 2006 car elle a pu constamment exploiter son fonds de commerce dans les lieux et a été indemnisée des préjudices subis du fait des désordres survenus qui ont troublé son exploitation ; que Mme [O] sera déboutée de sa demande tendant à se voir déchargée des loyers et charges pour la période du 30 septembre 2004 au 31 mai 2006 ;
Que la prescription qu'elle invoque n'est pas acquise puisque la s.c.i. Secretan 44 a saisi le 2 mars 2001 le juge des loyers commerciaux de la fixation du prix du bail renouvelé à compter du 1er avril 1999, que ce loyer n'a été fixé que par jugement du 22 octobre 2003 et qu'interrompant ainsi le cours de la prescription quinquennale d'une action en paiement dudit loyer, la s.c.i. Secretan 44, après avoir délivré dès 2005 un commandement de payer, a saisi le tribunal, par assignation du 19 janvier 2007, d'une action en paiement de l'arriéré locatif, toujours pendante devant la cour ;
Considérant que le loyer du bail renouvelé le 1er avril 1999 a fait l'objet d'une fixation judiciaire à la somme de 8.514 € en principal avec intérêts au taux légal sur les arriérés de loyers à compter de la date de chaque échéance ;
Considérant que le contrat de bail ne prévoit pas l'indexation automatique du loyer et renvoie banalement aux règles de révision posées par le statut des baux commerciaux ;
Qu'il stipule par ailleurs que :
"En sus du loyer ci-dessus fixé, le preneur remboursera au bailleur par quart aux époques du terme, le montant des charges fixé à 10 % du prix du loyer et 60 m3 d'eau, les prestations, taxes et impôts auxquels sont tenus les locataires notamment sans que cette énonciation soit limitative : taxes et impôts locaux, droit de bail et la moitié de la taxe additionnelle au droit de bail, également tous nouveaux impôts ou taxes qui pourront être mis à la charge des propriétaires pensant le cours du bail et dont le remboursement devra être effectué par les locataires'effet de chaque loyer" ;
Qu'il prévoit également le réajustement du dépôt de garantie en cas de variation du loyer, proportionnellement à celui-ci de façon à être toujours égal à 6 mois de loyer ;
Considérant que ces dispositions contractuelles font la loi des parties ;
Que la s.c.i. Secretan 44, qui ne peut se prévaloir d'une indexation contractuellement prévue du loyer, admet désormais qu'il n'y a eu aucune révision du loyer en 2002 comme elle l'avait antérieurement soutenu à tort ; qu'elle ne justifie pas plus d'une révision du loyer à compter du 1er avril 2005 ainsi qu'elle le prétend ni d'aucune révision postérieure ; que ni le paiement par Mme [O] d'une partie des loyers ni le calcul du loyer qui résulterait de la demande de renouvellement de bail au 1er avril 2011, ne saurait valoir accord exprès de la locataire à la révision de loyer demandée par la s.c.i. Secretan 44 à compter du 1er avril 2005 ; qu'au surplus, la s.c.i. Secretan 44 n'a pas mis en oeuvre la procédure de révision visée aux articles L 145-37 et suivant du code de commerce ;
Considérant que Mme [O] est donc débitrice au titre des loyers et charges à compter du 1er avril 1999 jusqu'au 31 décembre 2010, c'est-à-dire pour le bail à présent expiré :
- d'un loyer annuel de 8.514 € soit 2.128,50 € par trimestre,
- de 10 % de cette somme pour charges forfaitaires,
- du coût de "60 m3 d'eau" et des "prestations, taxes et impôt dont sont tenus les locataires" soit au vu des décomptes produits par la bailleresse en pièces 76 et 80, de la somme de 1.832,46 € pour la consommation d'eau de 1999 à 2010, de 2.50 % du montant du loyer du 1er avril 1999 au 1er janvier 2001 au titre du "droit de bail" supprimé à cette date, de 1,25 % du loyer du 1er avril 1999 au 1er janvier 2006 au titre de la moitié de la taxe additionnelle puis de la Crl qui a cessé d'être comptabilisée à cette date,
- du complément du dépôt de garantie de façon à ce que celui-ci s'établisse à 4.257 € (709,50 € x 6 mois),
le tout sous déduction des sommes qu'elle a versées au titre des loyers et charges de cette période tels que visées aux décomptes produits par la bailleresse en pièces 76 et 80, mais augmenté des intérêts au taux légal sur les seuls compléments de loyers arriérés à compter de chaque échéance depuis le 1er avril 1999 ;
Considérant que Mme [O] sera condamnée au paiement du montant ainsi dégagé pour l'arriéré locatif du 1er avril 1999 au 31 décembre 2010, les frais de relance, de recherche pour fuite ou de procédure n'étant pas justifiés ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une compensation intervenant de plein droit entre les dettes réciproques ;
Considérant enfin que la s.c.i. Secretan 44 qui ne justifie ni d'un accord sur le prix du bail renouvelé le 1er janvier 2011 ou de l'état de la procédure de la fixation judiciaire de ce prix, est à ce stade irrecevable dans le surplus de sa demande en paiement ;
Sur les autres demandes :
Considérant qu'en l'état des désordres ayant affectés les locaux avant 2006 et de la réclamation injustifiée par la bailleresse de loyers majorés, c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté la s.c.i. Secretan 44 de sa demande de résiliation du bail ; que le jugement sera confirmé sur ce chef ;
Considérant que pour le surplus, la s.c.i. Secretan 44 demande à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail à la suite du commandement de payer, resté selon elle sans effet, qu'elle a fait délivrer à Mme [O] le 21 juillet 2011, c'est-à-dire après l'arrêt précédemment rendu par cette chambre qui a rouvert les débats sur l'arriéré locatif alors arrêté par la bailleresse au 25 juin 2010 ;
Que Mme [O] est bien fondée à soulever l'irrecevabilité d'une telle demande, à ce point nouvelle devant la cour que le tribunal en est encore saisi ;
Considérant qu'en vertu du jugement déféré assorti de l'exécution provisoire, Mme [O] a inscrit le 20 décembre 2009 une hypothèque judiciaire sur l'immeuble du [Adresse 2] pour sûreté de la somme de 54.007,65 € en principal et 15.768,28 € en accessoires, outre trois années d'intérêts au taux légal ; que la s.c.i. Secretan 44 demande la radiation de cette inscription hypothécaire au motif qu'elle a réglé le 16 juin 2009 la somme de 54.007,65 € ;
Considérant que Mme [O] ne conteste pas le versement à cette date de cette somme ; que par ailleurs le jugement du 12 février 2009 a été partiellement infirmé par cette cour qui a ramené le montant des dommages et intérêts dû par la s.c.i. Secretan 44 de 75.000 € à 63.000 € et Mme [O] est débitrice de loyer et charges dont le montant vient de plein droit en compensation avec les dommages et intérêts à due concurrence ; qu'il sera en conséquence fait droit à la demande formée par la s.c.i. Secretan 44 de radiation d'inscription hypothécaire ;
Considérant que si la demande de dommages et intérêts formée par la s.c.i. Secretan 44 n'est pas nouvelle au sens de l'article 654 du code de procédure civile dès lors qu'elle se rapporte à l'hypothèque inscrite par Mme [O] en vertu du jugement déféré, elle n'est pas fondée ; que la s.c.i. Secretan 44 ne fait pas la démonstration de la faute ou de l'abus de droit commis par Mme [O] qui bénéficiait alors de l'exécution provisoire d'un jugement qui ne se bornait pas à la condamnation de la s.c.i. Secretan 44 au paiement de la somme de 54.007,65 € ; que la s.c.i. Secretan 44 sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre ;
Considérant que la s.c.i. Secretan 44 qui a succombé sur l'action en dommages et intérêts de Mme [O] supportera la charge des dépens de première instance comprenant les frais de la première expertise judiciaire confiée à M. [G] ; que succombant l'une et l'autre à ce stade, les dépens d'appel, qui comprendront le coût de la seconde expertise de M. [G], seront partagés par moitié entre les parties ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, les dispositions du jugement à ce titre seront confirmées et les demandes formées par les parties au titre de leurs frais irrépétibles d'appel seront rejetées ;
PAR CES MOTIFS
Vu l'arrêt rendu le 1er décembre 2010 et statuant dans les limites de la saisine résiduelle,
Prononce la nullité du rapport d'expertise de M. [G] déposé le 1er décembre 2011 ;
Confirme le jugement déféré en ses dispositions ayant débouté la s.c.i. Secretan 44 de sa demande de la résiliation judiciaire du bail et de ses demandes subséquentes en expulsion et paiement d'indemnité d'occupation, condamné la s.c.i. Secretan 44 à payer à Mme [O] la somme de 9.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la s.c.i. Secretan 44 aux dépens comprenant les frais de l'expertise judiciaire confiée à M. [G] ;
Infirme le jugement pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute Mme [O] de sa demande tendant à la condamnation sous astreinte de la s.c.i. Secretan 44 à effectuer des travaux de remise en état consécutivement à des nouveaux désordres ;
Déboute Mme [O] de sa demande tendant à se voir déchargée des loyers et charges pour la période du 30 septembre 2004 au 31 mai 2006 ;
Dit que Mme [O] est débitrice, au titre des loyers et charges à compter du 1er avril 1999 jusqu'au 31 décembre 2010, d'un loyer annuel de 8.514 € soit 2.128,50 € par trimestre, de 10 % de cette somme pour charges forfaitaires, de la somme de 1.832,46 € pour la consommation d'eau de 1999 à 2010, de 2,50 % du montant du loyer du 1er avril 1999 au 1er janvier 2001 au titre du "droit de bail", de 1,25 % du loyer du 1er avril 1999 au 1er janvier 2006 au titre de la moitié de la taxe additionnelle puis de la Crl, et enfin du complément du dépôt de garantie de façon à ce que celui-ci s'établisse à 4.257 € (709,50 € x 6 mois) ;
Condamne Mme [O] à payer à la s.c.i. Secretan 44 la somme ainsi dégagée dont seront déduites les sommes qu'elle a versées au titre des loyers et charges de cette période telles que visées aux décomptes produits par la bailleresse en pièces 76 et 80 et à laquelle seront ajoutés les intérêts au taux légal sur les compléments de loyers arriérés à compter de chaque échéance depuis le 1er avril 1999 jusqu'au 31 décembre 2010 ;
Déclare la s.c.i. Secretan 44 irrecevable en sa demande en paiement de l'arriéré locatif prétendu depuis le 1er janvier 2011 ; et en sa demande tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail à la suite du commandement de payer du 21 juillet 2011 ;
Ordonne la radiation de l'inscription hypothécaire prise le 20 décembre 2009 par Mme [O] sur l'immeuble du [Adresse 2] ;
Déboute la s.c.i. Secretan 44 de sa demande de dommages et intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de la s.c.i. Secretan 44 en restitution de la somme de 1.500 € versée en exécution du jugement du 28 juillet 2010 infirmé par arrêt du 7 avril 2011 ;
Rejette toutes autres demandes ;
Condamne chacune des parties par moitié aux dépens d'appel qui comprendront les frais de la seconde expertise de M. [G] et dit que ces dépens d'appel pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE