COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 27 FEVRIER 2013 (no 68, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 08966
Décision déférée à la Cour : Sentence arbitrale rendue le 24 juillet 2006- Barreau de Paris
Arrêt 18 novembre 2008 1ère Chambre-Section A Cour d'appel de PARIS Arrêt du 9 février 2011- Cour de Cassation de PARIS Civ 1- no 137 F-D
DEMANDEUR à la SAISINE
Monsieur Michel Guillaume François X...... 75015 PARIS autorisé par Monsieur le président à présenter des observations orales en application de l'article 441 du Code de procédure civile, représenté par Me Lionel MELUN (avocat au barreau de PARIS, toque : J139) présents à l'audience
DÉFENDEURS à la SAISINE
Madame Martine Y...... 75116 PARIS
Monsieur Vincent Z...... 75016 PARIS
représentés et assistés de Me François TEYTAUD (avocat au barreau de PARIS, toque : J125) et de Me Guy CHARLEY (avocat au barreau de PARIS, toque : E1953)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 9 janvier 2013, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de : Monsieur Jacques BICHARD, Président Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller venu d'une autre chambre pour compléter la cour en application de l'ordonnance de roulement du 20 décembre 2012 portant organisation des services de la cour d'appel de Paris à compter du 7 janvier 2013, de l'article R 312-3 du Code de l'organisation judiciaire et en remplacement d'un membre de cette chambre dûment empêché qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN
MINISTERE PUBLIC Madame ARRIGHI de CASANOVA, avocat général, a visé le dossier le 17 décembre 2012
ARRET :- contradictoire-rendu publiquement par Monsieur Jacques BICHARD, Président-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile-signé par Monsieur Jacques BICHARD, Président, et par Madame Noëlle KLEIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Considérant que par acte sous seing privé du 30 avril 2002 conclu entre Madame Martine Y..., avocat, (Maître Y...) et Monsieur Vincent Z..., avocat, (Maître Z...) d'une part, et leur confrère Monsieur Michel X... (Maître X...), d'autre part, les signataires ont convenu de mettre à la disposition de ce dernier des bureaux pour l'exercice de sa profession d'avocat ;
Que cette convention, qualifiée de " contrat de mise à disposition ", avec effet au 1er septembre 2002, portait, moyennant redevance, sur deux bureaux et placards dépendant d'un local sis à Paris (XVIème),..., et était conclue pour une durée indéterminée, chacune des parties pouvant y mettre fin à tout moment sous réserve d'un préavis de trois mois ;
Que la " S. C. I. 18 Mag ", propriétaire des locaux, souhaitant les vendre, Maître Y... et Maître Z..., par ailleurs gérant de ladite la S. C. I., ont entendu dénoncer ladite convention ; que devant le refus de Maître X... de quitter les lieux, ils ont saisi la Commission des Difficultés d'Exercice en Groupe de l'Ordre ; qu'après avoir enregistré un accord de Maître X... de libérer les locaux au plus tard le 30 avril 2006, cette Commission constatant le non-respect de cet engagement, a saisi le Bâtonnier le 16 juin 2006 au nom de Maître Z... et Maître Y... d'une demande d'arbitrage en application de la clause compromissoire figurant à l'article 11 du contrat de mise à disposition ainsi libellée : " Tout différend relatif à l'interprétation de la présente seront soumis à l'arbitrage de Madame ou Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats au Barreau de Paris. " ;
Que, Maître X... estimant que le litige, de par sa qualification juridique, ne relevait pas d'une procédure d'arbitrage, Monsieur Didier DALIN, avocat au barreau de Paris, ancien membre du Conseil de l'Ordre, agissant en qualité d'arbitre unique désigné par le Bâtonnier du Barreau de Paris, a, par sentence arbitrale du 24 juillet 2006, retenu sa compétence en ces termes : " dit qu'en application de la clause compromissoire insérée dans le contrat de mise à disposition conclu par les parties le 30 avril 2002, le litige qui les oppose relève de l'arbitrage du Bâtonnier de Paris " et a fixé un calendrier pour l'échange des demandes entre elles ;
CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,
Vu la déclaration d'appel à l'encontre de cette sentence le 4 août 2006 par Maître X...,
Vu l'arrêt rendu 18 novembre 2008 par cette Chambre qui a :- confirmé en toutes ses dispositions la sentence déférée,- renvoyé les parties devant l'arbitre,- condamné Monsieur X... aux dépens ;
Vu l'arrêt rendu le 9 février 2011 par la Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, qui a cassé cet arrêt dans toutes ses dispositions et renvoyé l'affaire devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée au motif " que, pour confirmer la sentence, l'arrêt retient, d'abord, que lors de la saisine de l'arbitre, le juge de droit commun, soit n'avait pas été régulièrement saisi, soit n'avait pas retenu sa compétence, puisque tout litige né de l'interprétation de la convention et de la qualification des rapports contractuels relève de la compétence de l'arbitre, enfin que Mme Y... et M. Z... n'ont pas renoncé à la procédure arbitrale " et qu'en " statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. X... faisant valoir que la clause compromissoire désignait comme arbitre le bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Paris, personne physique, sans possibilité de délégation, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences " de l'article 455 du Code de procédure civile physique de la victime, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu la saisine de la Cour de renvoi en date du 3 mai 2011 par Maître X...,
Vu l'avis du Procureur Général estimant ne pas avoir d'observations particulières à formuler ;
Vu les dernières conclusions déposées le 11 décembre 2012 par Maître X... par lesquelles il demande à la Cour :- d'infirmer la sentence entreprise en toutes ses dispositions, Et statuant à nouveau,- condamner Monsieur Z... et Madame Y... à lui payer, chacun, la somme de 20 000 € pour demande abusive d'un arbitrage avec une intention dilatoire,- se déclarer incompétente, vu l'infirmation de la sentence entreprise, pour trancher la contestation entre Monsieur Michel X... et la S. C. I. 18 Mag connexe à la présente instance,- compte tenu de cette infirmation, se saisir de ce litige relevant normalement de la compétence du tribunal d'instance (motifs des conclusions, p. 27),- condamner Monsieur Z... et Madame Y... à lui payer, chacun, la somme de 8 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- débouter Monsieur Z... et Madame Y... de toutes leurs demandes, fins et conclusions, pour demande abusive d'un arbitrage avec une intention dilatoire,- condamner Monsieur Z... et Madame Y... aux entiers dépens ;
Vu les dernières conclusions déposées le 18 décembre 2012 par Maître Z... et Maître Y... par lesquelles ils demandent à la Cour de :- débouter Monsieur Michel X... de toutes ses demandes, fins et conclusions,- condamner Monsieur Michel X... au paiement d'une somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
SUR CE,
Considérant que Maître X... qui soutient qu'en tout état de cause, le Bâtonnier ne pouvait déléguer ses pouvoirs d'arbitre à une autre personne, affirme, d'une part, que la clause compromissoire n'est pas applicable dans la mesure où la question de l'illicéité de sa brutale expulsion est étrangère à tout différend d'interprétation et que la convention relève de la compétence du tribunal d'instance s'agissant en réalité d'un contrat de louage d'immeuble, d'autre part, que Maître Z... et Maître Y... ont eux-mêmes renoncé à cette clause en faisant délivrer deux assignations en référé dont le défaut de placement " ne fait que leur donner une coloration abusive et malicieuse plus vive " ;
Considérant que Maître Z... et Maître Y... font valoir que l'engagement, qui comportait une contre partie, pris par Maître X... de quitter les lieux correspond non pas à une décision d'arbitrage mais à une transaction au sens des articles 2044 et suivant du Code civil, que par ailleurs, le Bâtonnier tirait de la clause compromissoire, de l'article 2061 du Code civil et du code de déontologie de 2002 la possibilité de déléguer ses pouvoirs de concilier les parties ;
Considérant, s'agissant de la faculté de délégation du Bâtonnier, que celle-ci est expressément prévue par les dispositions du Code de déontologie, de la loi du 31 décembre 1971 et du décret du 27 novembre 1991 ;
Considérant, par ailleurs, qu'il n'est plus contesté que lors de la saisine de l'arbitre, le juge de droit commun, soit n'avait pas été régulièrement saisi, soit n'avait pas retenu sa compétence, qu'en outre, en l'absence de placement des deux assignations en référé, il ne peut être tiré la démonstration d'une renonciation des intimés à la clause compromissoire, qu'enfin, Maître X... faisant état de difficultés relatives à la qualification du contrat de mise à disposition dans lequel est précisément insérée la clause compromissoire, il y a lieu de constater qu'il s'agit bien d'un litige né de l'interprétation de celui-ci entrant par voie de conséquence dans la compétence de l'arbitre ;
Qu'il y a donc lieu de confirmer la sentence déférée ;
Considérant que l'équité ne commande pas, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
CONFIRME la sentence en toutes ses dispositions,
REJETTE toute autre demande des parties,
CONDAMNE Monsieur Michel X... au paiement des entiers dépens de première instance, d'appel et de l'arrêt cassé avec admission, pour ceux d'appel, de l'avocat concerné au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.