Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRET DU 05 MARS 2013
(n° 200 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/14650
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Juillet 2012 -Tribunal d'Instance de Paris 12 - RG n° 12-000103
APPELANTS
Monsieur [G] [M] [J] [X]
[Adresse 2]
[Localité 4], France
Rep/assistant : la SELARL FBC AVOCATS (Me Catherine FAVAT) (avocats au barreau de PARIS, toque : C1806)
Madame [N] [F] [K] [T] Épouse [X]
[Adresse 2]
[Localité 4], France
Rep/assistant : la SELARL FBC AVOCATS (Me Catherine FAVAT) (avocats au barreau de PARIS, toque : C1806)
INTIMEE
Madame [D] [H] [O] épouse [Y]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Rep/assistant : la SCP A.K.P.R. (Me Jérôme DOULET) (avocats au barreau de PARIS, toque : C2316)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Février 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Joëlle BOURQUARD, Président, et Madame Sylvie MAUNAND, Conseiller, chargées d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Joëlle BOURQUARD, Présidente de chambre
Madame Martine TAILLANDIER-THOMAS, Conseillère
Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Joëlle BOURQUARD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.
M. [G] [X] et Mme [N] [T] épouse [X] sont appelants de l'ordonnance rendue le 12 juillet 2012 par le juge des référés du tribunal d'instance de Paris 12ème qui, vu le bail signé le 4 octobre 1993, le congé délivré le 25 mars 2011 pour le 31 octobre 2011, a dit n'y avoir lieu à référé et renvoyé les parties à se pourvoir devant le juge du fond.
Par conclusions déposées le 11 septembre 2012, ils demandent de la réformer, de débouter Mme [D] [Y] de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions et de les juger recevables et bien fondés en leurs demandes tendant à juger valables le congé pour reprise signifié à Mme [Y] le 25 mars 2011, constater que celle-ci n'a pas restitué les lieux à la date d'effet du congé, ordonner en conséquence son expulsion et celle de tous occupants de son chef des lieux qu'elle occupe [Adresse 1], bâtiment 11, escalier D, 2ème étage, porte gauche et de la condamner à leur payer une indemnité mensuelle d'occupation de 1 500 € à compter du 1er novembre 2011 jusqu'à complète libération des lieux, de la condamner aux entiers dépens ainsi qu'à leur payer la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [D] [O] veuve [Y], par conclusions déposées le 17 octobre 2012, demande de confirmer l'ordonnance étant constaté que les appelants ne justifient pas d'un cas d'urgence et à titre subsidiaire, vu l'article 1131 du code civil et 15-1 de la loi du 6 juillet 1989, de dire que le congé aux fins de reprise signifié le 25 mars 2011 revêt un caractère frauduleux et le déclarer nul et de nul effet, plus subsidiairement, de fixer l'indemnité d'occupation au montant du loyer tel qu'il résultait du bail et lui accorder les plus larges délais pour quitter les lieux ; en tout état de cause, de condamner les appelants aux entiers dépens et à lui payer une indemnité de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR,
Considérant que les appelants font valoir que les conditions de validation du congé sont réunies, qu'ils font grief à l'ordonnance d'avoir retenu l'existence d'une contestation sérieuse en se bornant à affirmer qu'il serait tenu de se livrer à une analyse des conditions de forme et de fond du congé, de la réalité du motif invoqué, de l'existence ou non d'une fraude susceptible de le rendre nul alors que la locataire ne contestait pas la régularité formelle du congé, qu'ils estiment que l'âge et l'état de santé de celle-ci ne sauraient constituer une contestation sérieuse ;
Qu'ils estiment leur demande fondée par application de l'article 848 du code de procédure civile, qu'en effet, ils justifient de l'urgence, s'étant portés acquéreurs en 2006 de l'appartement litigieux, ayant délivré le congé dans le respect des formes et délais à leur locataires, et Mme [X], âgée de 72 ans étant de plus atteinte d'une maladie évolutive qui entrave sa mobilité alors que l'immeuble qu'ils occupent est dépourvu d'ascenseur ; qu'ils estiment que la fraude invoquée dans la délivrance du congé par l'intimée ne repose que sur de simples assertions et qu'ils sont parfaitement libres de vouloir habiter leur appartement sans que cela constitue une fraude ; qu'ils se prévalent de ce que le congé a été délivré conformément à l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, que l'intimée a bénéficié de larges délais et disposent des moyens financiers démontrant qu'elle peut se reloger ;
Considérant que l'intimée soutient que l'existence même du congé ne saurait caractériser l'urgence, qu'elle est très âgée et dans un mauvais état de santé, que l'analyse des conditions de fond du congé relève de l'appréciation de la juridiction du fond ; qu'elle ajoute que si la loi de 1989 n'a prévu aucun contrôle préalable du congé, les principes généraux du droit relatifs à l'absence de cause, la fausse cause ou la cause illicite ont vocation à s'appliquer, que manifestement le congé qui lui a été délivré est frauduleux, que les appelants ont acquis l'appartement dans des conditions très avantageuses, que leur volonté de déménager de l'appartement dont ils sont propriétaires pour habiter celui qu'elle occupe n'est pas établie, qu'ils cherchent à l'intimider ;
Qu'elle estime à titre subsidiaire que les appelants ne justifient pas du montant de l'indemnité d'occupation qu'ils réclament et se fonde sur les articles L 313-1 et L 613-2 du code de l'habitation et de la construction pour obtenir des délais pour quitter les lieux ;
Et considérant qu'aux termes de l'article 848 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge du tribunal d'instance peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ;
Considérant qu'en l'espèce, il est établi que les époux [X] ont fait délivrer le 25 mars 2011 à Mme [D] [Y] leur locataire, un congé aux fins de reprise à effet au 31 octobre 2011 au visa de l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 ; que la régularité formelle de ce congé n'est pas contestée ;
Qu'il est démontré que Mme [X], né le [Date naissance 3] 1942, souffre d'une maladie évolutive des membres inférieurs (polyhandicap rhumatismal sévère évolutif) qui entraîne une incapacité de monter des escaliers et de porter des charges (pièce 6), qu'il est également établi et non contesté que les époux [X] résident actuellement au 4ème étage d'un immeuble dépourvu d'ascenseur et que l'appartement qu'ils souhaitent reprendre pour habiter est équipé d'un ascenseur ; qu'ils justifient en conséquence de l'urgence telle qu'exigée par l'article 848 du code de procédure civile ;
Considérant que pour s'opposer à la demande, l'intimée, qui n'allègue ni ne justifie avoir contesté la validité du congé devant la juridiction du fond, se prévaut de la fraude dans sa délivrance ; que la fraude ne se présume pas, qu'elle ne saurait notamment résulter, en l'absence de tout élément de preuve objectif, des simples allégations de l'intimée selon lesquelles ses bailleurs auraient acquis en 2006 cet appartement à un prix intéressant et se seraient engagés à la laisser indéfiniment dans les lieux ;
Considérant que l'intimée fait valoir également qu'elle est très âgée, comme née en 1920 et se trouve dans un état de santé précaire ; que ces circonstances certes établies, ne constituent pas une contestation sérieuse dès lors qu'il est démontré qu'elle disposait, au titre de l'année 2010 (avis d'imposition de 2011) d'une retraite annuelle de 43 650 €, que le prix du loyer de l'appartement qu'elle occupe est de 1 469, 57 € par mois et qu'elle dispose en conséquence de la possibilité de se reloger dans le même quartier, qu'elle n'allègue ni ne prouve au demeurant avoir effectué une quelconque démarche en ce sens ;
Que dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande des époux [X] et d'infirmer l'ordonnance déférée ;
Que l'expulsion de Mme [Y], devenue occupante sans droit ni titre des lieux depuis le 1er novembre 2011, sera ordonnée ; que compte tenu des délais dont elle a déjà de fait bénéficié sans les mettre utilement à profit, il n'y a pas lieu d'accéder à sa demande de délais pour quitter les lieux ;
Que l'indemnité d'occupation due jusqu'à son départ effectif des lieux sera fixée au prix du bail outre charges si celui-ci s'était poursuivi ;
Considérant que l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile ; que Mme [D] [Y] doit supporter les entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS
Infirme l'ordonnance entreprise,
Statuant à nouveau,
Constate que le congé pour reprise délibéré le 25 mars 2011 pour le 31 octobre 2011 par M. [G] [X] et Mme [N] [T] épouse [X] à Mme [D] [O] veuve [Y] a été régulièrement et valablement délivré,
Constate que Mme [D] [O] veuve [Y] est occupante sans droit ni titre des lieux,
Ordonne son expulsion et celle de tous occupants de son chef des lieux qu'elle occupe [Adresse 1],
Condamne Mme [D] [O] veuve [Y] à payer à M. [G] [X] et Mme [N] [T] épouse [X] à compter du 1er novembre 2011 une indemnité mensuelle d'un montant égal à celui du loyer contractuel outre charge jusqu'à libération effective des lieux,
Rejette la demande de délais pour quitter les lieux,
Déboute les parties de toute autre prétention et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [D] [O] veuve [Y] aux entiers dépens qui seront recouvrés comme il est prescrit à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT