Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRET DU 14 MAI 2013
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/08455
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Avril 2012 -Tribunal de Commerce de Paris - RG n° 2010053719
APPELANTE
SA SOGELEASE représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES (Me Michel GUIZARD) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0020)
Assistée de Me Eugénie CRIQUILLION (avocat au barreau de PARIS, toque : L 020)
INTIMEE
SARL ROBERT
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Leila PERRIMOND (avocat au barreau de PARIS, toque : G0496)
Assistée de Mérouane BRAHIMI (avocat au barreau de NICE)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 Mars 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente
Madame Evelyne DELBÈS, Conseillère
Monsieur Joël BOYER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Catherine CURT
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie HIRIGOYEN, présidente et par Madame Catherine CURT, greffier présent lors du prononcé.
Le 22 mai 2008, la Sarl Robert, qui exerce une activité de vente de bois de chauffage, a souscrit auprès de la société Sogelease un contrat de crédit- bail portant sur l'acquisition d'une fendeuse à bois et d'un tapis de convoyage, pour un montant global de 111.228 € TTC, payable en 60 mensualités.
M. [E], gérant de la Sarl Robert, a souscrit un contrat d'assurance « garantie de perte financière matériels » et s'est porté caution personnelle et solidaire des engagements souscrits par sa société à l'égard du crédit-bailleur.
Le 4 juin 2008, la société Sogelease a passé commande de la fendeuse à bois auprès de la société Sem Automation et le 6 juin 2008 du tapis de convoyage auprès de la société Cap Line.
La fendeuse a bois a été livrée le 13 juin, le tapis de convoyage ne l'a jamais été.
Le 13 octobre 2008, la société Sogelease a procédé, faute de livraison du tapis de convoyage dans le délai de 60 jours, à la résolution de la commande effectuée auprès de la société Cap Line.
Informée de l'annulation de cette commande, la société Robert a fait part de son étonnement, a précisé au bailleur que la fendeuse à bois sans le tapis de convoyage n'était d'aucune utilité et qu'elle demeurait dans l'attente de la livraison de ce dernier. La société Sogelease a alors proposé à la Sarl Robert de passer une nouvelle commande d'un tapis de convoyage auprès de la société Cap Line, proposition qui est demeurée sans suite.
Par acte en date du 18 mai 2009, la Sarl Robert a fait assigner la société Sogelease en nullité du contrat de crédit-bail, du contrat d'assurance et du cautionnement et en paiement de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 39 600 euros, ensuite portée à 65 676, 02 euros devant le tribunal de commerce de Cannes, lequel s'est déclaré territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du 11 avril 2012, le tribunal de commerce de Paris a constaté que le contrat de crédit-bail signé le 22 mai 2008 entre la société Sogelease et la Sarl Robert n'a jamais pris effet, a prononcé la nullité du contrat d'assurance et celle de l'acte de cautionnement solidaire souscrits par M. [E], a condamné la société Sogelease à payer à la Sarl Robert une somme de 27.179,93 euros en remboursement des échéances payées, outre une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté les parties de toutes autres demandes, a ordonné l'exécution provisoire, et a condamné la société Sogelease aux dépens.
Cette dernière a interjeté appel selon déclaration en date du 7 mai 2012.
Dans ses dernières conclusions déposées le 8 février 2013, elle demande à la cour d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a constaté que le contrat de crédit-bail signé le 22 mai 2008 entre la société Sogelease et la Sarl Robert n'a jamais pris effet, prononcé la nullité du contrat d'assurance et de l'acte de cautionnement souscrits par M. [E], condamné la société Sogelease à payer à la Sarl Robert une somme de 27 179, 93 euros au titre de la répétition de l'indu ainsi que la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, de le confirmer en ce qu'il a débouté la Sarl Robert de ses demandes de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi et sur le fondement de la procédure abusive, subsidiairement, de ramener à de plus justes proportions les sommes réclamées par la société Robert en remboursement des mensualités prélevées au titre de la commande de la fendeuse à bois, de débouter en tout état de cause la société Robert de ses autres demandes, y ajoutant, d'écarter des débats les pièces 15 à 24 communiquées par l'intimée le 8 janvier 2013, de condamner la Sarl Robert à lui payer une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées le 18 février 2013, la société Robert demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté que le contrat de crédit-bail n'a jamais pris effet et a prononcé l'annulation du contrat d'assurance et de l'acte de cautionnement solidaire, subsidiairement, de prononcer la nullité du contrat de crédit-bail en l'état de l'annulation par la société Sogelease de la commande du tapis de convoyage et du caractère indissociable du crédit-vente, de réformer le jugement en ce qu'il a limité la condamnation de la société Sogelease et de condamner cette dernière à lui payer les sommes suivantes : 50 172, 70 euros HT correspondant à 49 mensualités réglées, 1 103, 91 euros au titre des frais de dossier, 79 200 au titre de la perte financière en termes de productivité, 39 600 euros au titre des coûts maintenus de main d'oeuvre, de lui donner acte qu'elle se tient à la disposition de la société Sogelease pour lui restituer la fendeuse à bois passé un délai de 48 heurs à compter de la première demande qui lui en serait faite, de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
SUR CE
Sur la demande de rejet des pièces 15 à 24 de la société Robert
La société Sogelease sollicite le rejet des pièces 15 à 24 de la société Robert au motif qu'elles n'ont pas été communiquées simultanément aux conclusions du 27 septembre 2012, mais le 8 janvier 2013 après sommation et réitérative sommation.
Mais la société Robert fait valoir que la totalité des pièces n°1 à 29, telles que visées au bordereau joint aux conclusions du 27 septembre 2012 ont été communiquées simultanément auxdites conclusions, ajoutant sans être contredite, que seul un problème de lisibilité des pièces 15 à 24, au demeurant sans incidence sur le respect du contradictoire, ces pièces étant identiques à celles qui avaient été communiquées en première instance, a conduit à une nouvelle transmission le 8 janvier 2013, de sorte que le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 906 du code de procédure civile sera rejeté.
Au fond
La société Robert sollicite à titre principal qu'il soit jugé que le contrat de crédit-bail qui portait sur l'acquisition d'une fendeuse à bois et d'un tapis de convoyage n'a pas pris effet, faute de livraison de la totalité des matériels et ledit contrat étant indivisible et demande en conséquence la répétition des échéances mensuelles qu'elle a réglées.
L'article 2 des conditions générales du contrat de crédit-bail souscrit auprès de la société Sogelease précise qu''en cas de pluralité de fournisseurs, le locataire reconnaît et accepte expressément la divisibilité des opérations et des obligations résultant du présent contrat quant aux choix du matériel, de la livraison et du paiement des loyers y afférent, et accepte leur regroupement dans un contrat unique afin de simplifier la gestion du dossier'.
Il n'est pas contesté que les matériels en cause ont été commandés auprès de deux fournisseurs différents, sans qu'il résulte d'aucune pièce qu'ils constituaient un ensemble indissociable rendant l'un sans l'autre sans utilité.
Il sera relevé de surcroît que la fendeuse à bois a été livrée et acceptée sans réserve dès le 13 juin 2008, que la société Robert ne s'est souciée de la livraison du tapis de convoyage que le 17 octobre 2008, soit quatre mois plus tard, et qu'elle a régulièrement payé les échéances de loyer afférent à la seule fendeuse à bois jusqu'au mois d'avril 2012 alors même que le tapis de convoyage n'a jamais été livré.
Les stipulations claires et précises du contrat de crédit-bail comme le comportement de la société Robert durant près de quatre ans sur les cinq constituant la durée dudit contrat attestent la commune intention des parties de considérer que le contrat de financement était divisible en fonction du matériel concerné, peu important qu'un seul loyer ait été fixé, étant de surcroît relevé que les modalités de détermination dudit loyer, telles que prévues au contrat, permettaient aisément de le ventiler en fonction du matériel livré, comme la société locataire l'a d'ailleurs fait d'initiative durant quatre ans en ne procédant qu'au seul règlement de la quote-part de loyer afférent à la fendeuse à bois.
C'est donc à tort que les premiers juges ont considéré que l'absence de livraison du tapis de convoyage privait d'effet le contrat de crédit-bail dans son ensemble et le jugement déféré sera reformé sur ce point.
La divisibilité du contrat conduira de même à débouter la société Robert de sa demande, subsidiaire, de nullité du contrat de crédit-bail, et des demandes de nullité du contrat d'assurance et du contrat de cautionnement, ce dernier ayant au demeurant été souscrit par le seul M. [E], personne physique qui n'est pas dans la cause.
La société Robert invoque également la responsabilité contractuelle de la société Sogelease au motif que l'absence de livraison du tapis de convoyage lui est imputable, faute pour le crédit-bailleur d'avoir versé au fournisseur l'acompte de 40% prévu à la commande.
La Sogelease fait valoir qu'il est d'usage de n'acquitter auprès des fournisseurs le montant total de la commande qu'à réception du procès-verbal de livraison, ce qui la dispense d'avoir à exiger de son locataire le règlement d'un pré-loyer majoré de la TVA, comme stipulé en cette hypothèse par le contrat de financement, qu'elle a passé commande à la société Cap Line, fournisseur du tapis de convoyage, le 4 juin 2008, que selon facture 24 avril 2008 la société Cap Line s'était engagée à livrer le matériel courant juillet 2008, que ce délai n'a pas été tenu, sans que d'ailleurs son locataire ne s'en soucie, qu'elle se trouvait dès lors fondée, conformément aux conditions particulières de la commande, d'annuler purement et simplement cette dernière si aucune livraison n'était intervenue dans un délai de 60 jours à compter de la date de livraison envisagée ou, à défaut, de la date de la commande, ce qu'elle a fait par courrier du 13 octobre 2008, soit avant que sa locataire ne se soit plainte de l'absence de livraison, ajoutant avoir proposé à la société Robert, par courrier du 27 janvier 2009, qu'une nouvelle commande soit passée auprès du même fournisseur.
En cet état que justifient les pièces versées aux débats par la société appelante, aucune faute n'est établie à sa charge dans l'exécution des obligations qui lui incombaient de nature à engager sa responsabilité contractuelle à l'égard de la société Robert, laquelle n'a donné aucune suite à la proposition qui lui avait été faite par le crédit-bailleur de procéder à une nouvelle commande du tapis de convoyage non livré et ne justifie nullement de l'allégation selon laquelle cette nouvelle commande lui aurait été proposée par Sogelease à des conditions financières autres que celles qui lui avaient été consenties initialement.
Aussi, le jugement déféré sera-t-il infirmé en toutes ses dispositions et la société Robert déboutée de ses demandes.
L'équité ne commande pas d'allouer à quiconque une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Déboute la société Robert de toutes ses demandes,
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque,
Condamne la société Robert aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT