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23/05/2013 | FRANCE | N°11/08513

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 23 mai 2013, 11/08513


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 23 Mai 2013

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/08513 - MAC



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Juin 2011 par Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section industrie RG n° 10/14573



APPELANTE

SAS ALTIS INTERIM

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Michèle UZAN FALLOT, avocat au barreau de

PARIS, toque : C1095



INTIMES

Monsieur [W] [F]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Alina PARAGYIOS, avocat au barreau de PARIS, t...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 23 Mai 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/08513 - MAC

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Juin 2011 par Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section industrie RG n° 10/14573

APPELANTE

SAS ALTIS INTERIM

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Michèle UZAN FALLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1095

INTIMES

Monsieur [W] [F]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Alina PARAGYIOS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0374

SARL ENTREPRISE LEGER-PAGNY

[Adresse 2]

[Localité 1]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine METADIEU, Présidente

Mme Marie-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [F] a été engagé le 12 juillet 2010 par la société de travail temporaire Altis Intérim et mis à la disposition de la SA Entreprise Léger- Pagny, entreprise de plomberie.

La mission initiale d'une durée d'une semaine a été renouvelée jusqu'au 30 juillet 2010, dernier jour de travail de M. [F].

Trois acomptes de 500 euros lui ont été remis au cours du contrat de travail. Le solde de 252,01 euros lui a été viré le 12 août 2012. Les documents de fin de contrat lui ont été remis le 3 septembre 2010.

Alléguant qu'il n'avait pas signé les trois contrats de mission, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes le 7 novembre 2010 afin de voir prononcer la requalification des contrats de mission temporaire en contrat de travail à durée indéterminée et en paiement des indemnités afférentes à un licenciement abusif, au non-respect de la procédure de licenciement ainsi qu'au préavis.

Il a aussi réclamé un rappel de salaire sur la base d'un taux horaire de 18 euros alors qu'il a été réglé sur la base de 16 euros et une indemnité de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'encontre de la société utilisatrice, la SA Entreprise Léger- Pagny, M. [F] a sollicité l'indemnité de requalification des contrats ainsi qu'une indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par un jugement du 14 juin 2011, le conseil de prud'hommes de Paris, section industrie, a mis hors de cause la SA Entreprise Léger- Pagny, société utilisatrice et a condamné la SAS Altis Intérim à verser à M. [F] les sommes suivantes :

- 2426,72 euros à titre d'indemnité de requalification des contrats de mission temporaire en un contrat à durée indéterminée,

- 2426,72 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 242,67 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 2426,72 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

- 2426,72 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

les condamnations à caractère salarial étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de la convocation devant le bureau de jugement, les autres condamnations étant assortie d'intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement.

Le conseil de prud'hommes a aussi accordé au salarié une indemnité de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et l'a débouté du surplus de ses demandes.

Les premiers juges ont rejeté les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile formulées par la SAS Altis Intérim

La SAS Altis Intérim, appelante de ce jugement, en sollicite l'infirmation.

Elle propose que soient ordonnées, en tant que de besoin, les auditions de deux salariés, Mme [T] et M. [Z].

En tout état de cause, elle s'oppose aux prétentions formulées par M. [F] et réclame à titre reconventionnel une somme de 2000 euros au titre de dommages-intérêts pour procédure particulièrement abusive et injustifiée ainsi qu'une indemnité de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À titre subsidiaire, elle propose que les indemnités susceptibles revenir à M. [F] soient calculées sur la base de son salaire mensuel brut de 2032,80 euros.

Elle rappelle que l'indemnité de requalification du contrat ne peut en aucun cas être mise à sa charge.

La SA Entreprise Léger- Pagny ne s'est pas présentée et n'a formulé aucune observation.

M. [F] conclut à la confirmation du jugement déféré sur les principes posés mais à sa réformation quant au quantum des sommes allouées.

En tout état de cause, il réclame la condamnation de la SAS Altis Intérim à lui verser les sommes suivantes:

- 5460 euros au titre de l'indemnité de requalification des contrats de mission intérimaire,

- 5460 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

- 2730 euros pour non-respect de la procédure de licenciement,

- 2730 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 276 euros au titre des congés payés afférents,

- 210 euros à titre de rappel de salaire,

- 21 euros de rappel de primes de fin de contrat,

- 4,20 euros d'indemnité compensatrice de congés payés

-1000 euros pour remise tardive et non conforme de l'attestation Pôle emploi,

- 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ces diverses condamnations étant assorties des intérêts au taux légal.

Il conclut également à la condamnation de la SA Entreprise Léger- Pagny à lui verser 5460 euros au titre de l'indemnité de requalification des contrats de mission ainsi qu'une indemnité de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sollicite la délivrance par la SAS Altis Intérim des documents sociaux obligatoires et ce, sous astreinte de 50 euros.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS :

Sur le rappel de salaire :

M. [F] soutient s'être engagé auprès de la SAS Altis Intérim pour un taux horaire de 18 euros et non de 16 euros.

Il estime qu'à raison de la mauvaise foi de la SAS Altis Intérim, le doute sérieux sur le montant du taux horaire retenu contractuellement doit lui profiter, qu'au surplus, l'employeur ne démontre pas la concordance entre la rémunération et le travail fourni.

Outre que M. [F] ne produit aucun élément pour établir la réalité de la prétendue promesse de la SAS Altis Intérim de le rémunérer sur la base d'un taux horaire de 18 euros bruts, la SAS Altis Intérim fait observer avec pertinence que la rémunération de M. [F] correspondait au salaire de référence fourni par l'entreprise utilisatrice et ce, conformément aux dispositions de l'article L. 1251 - 43 6° du code du travail.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de rappel de salaires formulée par M. [F].

Sur la demande en requalification des contrats :

Après avoir rappelé que le code du travail impose un certain formalisme pour les contrats précaires, et qu'en cas de violation de celui-ci, le contrat est réputé avoir été conclu pour une durée indéterminée, et se fondant sur les articles L. 1251 et suivants du code du travail et plus spécialement sur l'article L. 1251-17 qui dispose que « le contrat de mission est transmis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant sa mise à disposition », M. [F] sollicite la requalification des contrats de travail intérimaire en contrat de travail à durée indéterminée au motif qu' aucun contrat de travail écrit ne lui a été transmis.

Il en veut pour preuve les trois fiches de relevé d'heures, qu'il communique et sur lesquelles la rubrique « contrat n°.... » a été renseignée par la mention « pas reçu » pour démontrer que la SAS Altis Intérim avait ainsi eu connaissance, lors de la réception de ces relevés qu'il lui a adressés, de l'absence de la transmission des contrats de mission.

Il conteste tout élément communiqué par la SAS Altis Intérim qui ne peut, selon lui, pour les besoins de la cause, se constituer des preuves.

La SAS Altis Intérim fait d'abord remarquer que le contrat initial du 12 juillet 2010 n'a fait l'objet que d'un seul et unique avenant de prolongation le 17 juillet 2010 jusqu'au 30 juillet 2010, que les deux documents, -contrat initial et avenant de prolongation- ont été établis concomitamment aux documents de mise à disposition à l'intention de l'entreprise utilisatrice, que ces documents ont été transmis dans le délai légal.

Pour en justifier, la SAS Altis Intérim communique aux débats deux attestations de ses salariés Mme [T] et M. [Z].

Mme [T], assistante d'agence, explique que ses fonctions consistent entre autres à établir les contrats de mission et de mise à disposition, ces contrats étant validés par le commercial qui les fait signer à l'intérimaire et à l'entreprise utilisatrice.

Elle précise avoir établi celui de M. [F] le 12 juillet 2010 pour une mission auprès de la SA Entreprise Léger- Pagny et déclare sur l'honneur « avoir posté elle-même les contrats de mission et de mise à disposition le soir même. »

M. [Z] explique que ses fonctions consistent notamment à vérifier les contrats de mission et de mise à disposition, servis et édités par l'assistante d'agence de façon à ce qu'ils puissent être adressés à l'intérimaire et à l'entreprise utilisatrice. Il explique « avoir vérifié le contrat de M. [F] et n'avoir entendu aucune réclamation de sa part au sujet de son contrat».

La SAS Altis Intérim verse aux débats les deux documents de mise à disposition signés par la SA Entreprise Léger- Pagny et donc reçus et retournés par elle.

Par ailleurs, bien qu'il fasse état de plusieurs réclamations adressées à la SAS Altis Intérim, M. [F] ne verse aux débats aucune lettre de réclamation avant le 23 août 2010.

Enfin et surtout, s' agissant des relevés d'heures, tous renseignés exclusivement par le salarié, la SAS Altis Intérim communique la copie carbone de couleur rose que lui a adressée M. [F], pour les heures effectuées du lundi 28 juillet au vendredi 30 juillet 2010 portant mention du cachet de l'entreprise Léger-Pagny.

Or, cette copie rose, renseignée de la main de M. [F] ne porte pas mention de l'expression « pas reçu » à la rubrique «contrat n°»

La copie adressée à l'employeur n'est pas conforme à l'original conservé par le salarié, et versé au dossier en sorte qu'il apparaît que celui-ci n'a, non seulement pas informé l'entreprise de l'absence de la réception des documents contractuels mais a opéré un ajout sur l'original a postériori, en portant la mention « pas reçu » près de la rubrique « contrat n° » pour se constituer une preuve en vue de l'obtention de la requalification de ses contrats et des indemnités afférentes.

Ce constat est conforté par la déclaration sur l'honneur de Mme [T], précédemment relatée, s'agissant de l'envoi des documents contractuels.

Bien que travaillant dans le cadre d'un lien de subordination à l'égard de la SAS Altis Intérim, la rédactrice de cette déclaration engage sa responsabilité propre par cette attestation, qu'elle savait destinée à être produite en justice.

La fraude corrompt tout. Ainsi si la signature d'un contrat écrit, imposée par la loi dans les rapports entre l'entreprise de travail temporaire et le salarié afin de garantir qu'ont été observées les conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d'oeuvre est interdite, a le caractère d'une prescription d'ordre public dont l'omission entraîne, à la demande du salarié la requalification en contrat de droit commun à durée indéterminée, il en va autrement lorsque le salarié a délibérément refusé de signer le contrat de mission dans une intention frauduleuse.

Dans le cas présent, M. [F] n'a pas retourné le contrat de mission et l'avenant de prolongation qui lui ont été adressés dans le seul but de se prévaloir ultérieurement de l'irrégularité résultant du défaut de sa signature.

Il n'y a pas lieu à requalification en contrat à durée indéterminée.

Le jugement sera infirmé et M. [F] sera débouté de l'ensemble des demandes, ayant trait à la requalification de son contrat de mission en contrat de travail à durée indéterminée et ce, tant à l'encontre de la SAS Altis Intérim qu'à l'encontre de la SA Entreprise Léger- Pagny.

Par ailleurs, s'agissant de la remise tardive des documents, les premiers juges ont relevé que M. [F] ne justifie pas s'être rendu à la société pour les récupérer.

Ils lui ont été transmis par la voie postale le 31 Août 2010 ainsi que cela résulte du courriel de M. [Z].

Par ailleurs, après examen de sa situation, en tenant compte de la période de travail de trois semaines, le Pôle emploi, a informé M.[F], le 8 Septembre 2010, du renouvellement de l'allocation de solidarité.

Compte tenu de ces constatations, les premiers juges ont à juste titre débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts à cet égard.

Le jugement sera confirmé.

Des considérations d'équité imposent de débouter les parties de leurs demandes respectives d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par décision réputé contradictoire,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a requalifié les contrats de mission intérimaire en contrat de travail à durée indéterminée et a accordé à M. [F] diverses indemnités,

L'infirme sur ces points,

Statuant à nouveau,

Déboute M. [F] de ses demandes de requalification et de versement d'indemnités subséquentes,

Déboute les parties de leurs demandes respectives d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens à la charge de M. [F].

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 11/08513
Date de la décision : 23/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°11/08513 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-23;11.08513 ?
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