RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 29 Mai 2013
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/07121
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 30 Avril 2012 par conseil de prud'hommesde PARIS - section activités diverses - RG n° 11/02660
APPELANT
Monsieur [Z] [O]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparant en personne, assisté de Me Daniel-Yves LACROIX, avocat au barreau de PARIS, D1749
INTIMÉE
SELAFA MJA prise en la personne de Me [W] [Y] agissant en qualité de mandataire liquidateur de la SARL GOSP et de Monsieur [E] [M] [P]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Safia BAZI, avocate au barreau de PARIS, E0287 substituée par Me Françoise LEMIRE, avocate au barreau de PARIS, E0287
PARTIE INTERVENANTE
AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, T10 substitué par Me Guillaume TEBOUL, avocat au barreau de PARIS, T10
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Avril 2013, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Christine ROSTAND, présidente
Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller
Monsieur Jacques BOUDY, conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 30 avril 2012 ayant débouté M. [Z] [O] de l'ensemble de ses demandes et l'ayant condamné aux dépens ;
Vu la déclaration d'appel de M [Z] [O] reçue au greffe de la cour le 11 juillet 2012 ;
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 10 avril 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de M. [Z] [O] qui demande à la cour :
- d'infirmer le jugement déféré
- statuant à nouveau :
. de prononcer la résiliation judicaire de son contrat de travail avec effet au 20 mai 2011
. à titre principal, de fixer en conséquence à son profit au passif de la liquidation judiciaire de la SARL GOSP et à celui de M. [E] [M] [P] les créances suivantes :
5 321,47 € de rappel de salaires (période du 1er février au 20 mai 2011) et 532,14 € de congés payés afférents
2 986,63 € d'indemnité compensatrice de congés payés
3 100,74 € d'indemnité compensatrice de préavis (deux mois de salaire) et 310,07 € d'incidence congés payés
815,67 € d'indemnité légale de licenciement
1 000 € de dommages-intérêts pour préjudice financier (article 1382 du code civil)
8 707,86 € de dommages-intérêts pour licenciement injustifié (article L.1235-3 du code du travail)
. subsidiairement, de fixer sa créance globale nette à la somme de 9 466,58 €
. de déclarer opposables à l'AGS CGEA IDF OUEST ses créances ainsi fixées
. d'ordonner la remise par la SELAFA MJA en la personne de Me [W] [Y], mandataire liquidateur, des bulletins de paie (période du 1er novembre 2010 au 20 mai 2011) et d'une attestation POLE EMPLOI conformes à l'arrêt à intervenir ;
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 10 avril 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SELAFA MJA prise en la personne de Me [W] [Y], mandataire liquidateur de la SARL GOSP et de M. [M] [E] [P], qui demande à la cour de confirmer le jugement querellé et déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS CGEA IDF OUEST ;
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 10 avril 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de l'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST qui demande à la cour de confirmer la décision critiquée, de prononcer en conséquence sa mise hors de cause et s'il y a lieu à fixation de dire que sa garantie ne peut intervenir que dans les limites légales.
MOTIFS
La SARL GOSP, ayant eu comme gérant M. [M] [E] [P], a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Paris du 30 septembre 2010 avec la désignation de la SELAFA MJA (Me [I] [R]) en qualité de mandataire liquidateur.
Aux termes d'un jugement ultérieur du 5 mai 2011, la juridiction consulaire précitée a étendu la procédure de liquidation judiciaire de la SARL GOSP à M. [M] [E] [P] et dit que les opérations se poursuivront sous patrimoine commun.
En vertu d'une ordonnance du 14 décembre 2012, la SELAFA MJA prise en la personne de Me [W] [Y] a été désigné en qualité de mandataire liquidateur de la SARL GOSP et de M. [M] [E] [P] en lieu et place de Me [I] [R].
Sur la résiliation judiciaire
M. [Z] [O], embauché par la SARL GOSP en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein ayant pris effet le 3 décembre 2008 en qualité d'agent de sécurité (niveau 2-échelon 2-coefficient 120) rémunéré 1 171,23 € bruts mensuels, a saisi le 10 février 2011 le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande de convocation directe des parties en bureau de jugement aux fins notamment de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail avec la fixation au passif du débiteur des créances indemnitaires en résultant (indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, indemnité de licenciement, dommages-intérêts en application de l'article 1382 du code civil et pour licenciement abusif).
Par lettre du 20 mai 2011, la SELAFA MJA, es-qualités, a notifié à M. [Z] [O] son licenciement pour motif économique avec dispense d'exécuter son préavis de deux mois tout en lui rappelant qu'il disposait d'un délai légal de 21 jours pour répondre à l'offre d'adhésion au dispositif de la Convention de Reclassement Personnalisé (CRP), offre à laquelle il n'a pas souscrit.
Sur sa demande de résiliation judiciaire avec effet au 20 mai 2011, M.[Z] [O] rappelle que le mandataire liquidateur (Me [R]) n'a pas procédé à son licenciement dans le délai légal de 15 jours suivant le jugement de liquidation judiciaire du 30 septembre 2010, qu'il n'en fut personnellement informé que par un courrier de M. [E] [M] [P] du 21 février 2011, que du 1er février au 20 mai 2011 il est resté à la disposition de son employeur sans être rémunéré, qu'il s'agit d'un manquement patronal d'une gravité suffisante, et que la prise d'effet de cette résiliation avec toutes conséquences indemnitaires de droit doit être fixée au 20 mai 2011, date de la notification de son licenciement pour motif économique.
La SELAFA MJA, es-qualités, s'oppose à cette demande de résiliation judiciaire assortie de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil et pour licenciement abusif, dès lors que M. [Z] [O] a été régulièrement licencié pour motif économique le 20 mai 2011 suite au jugement du 5 mai 2011 d'extension de la liquidation judiciaire de la SARL GOSP - 1er jugement du 30 septembre 2010 - à M. [E] [M] [P], tout en indiquant que l'AGS CGEA IDF OUEST n'a suspendu sa garantie que dans l'attente de l'issue de la présente instance prud'homale.
Le jugement du tribunal de commerce de Paris du 30 septembre 2010, qui a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SARL GOSP avec la désignation de la SELAFA MJA (Me [R]) comme mandataire liquidateur, a emporté de plein droit dès son prononcé en application de l'article L.641-9 I du code de commerce «dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens».
M. [E] [M] [P] a ainsi été à compter du 30 septembre 2010 intégralement dessaisi et obligatoirement représenté par le mandataire liquidateur exerçant tous ses droits et actions durant la procédure collective concernant la SARL GOSP.
Il s'en déduit le caractère inopérant de la demande de M. [Z] [O] aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de M. [E] [M] [P] pour des manquements allégués sur la période février/mai 2011, dans la mesure où ce dernier avait définitivement perdu 4 mois auparavant les prérogatives de plein exercice liées à la qualité d'employeur.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. [Z] [O] de ses demandes au titre de la résiliation judiciaire ainsi qu'en fixation de dommages-intérêts au visa de l'article 1382 du code civil et pour licenciement injustifié (article L.1235-3 du code du travail).
Sur la fixation de créances au profit de M.[Z] [O]
1/ Les indemnités liées à la notification du licenciement pour motif économique intervenue le 20 mai 2011
La cour rappellera que la lettre de licenciement pour motif économique du 20 mai 2011 mentionne la suppression de l'emploi de l'appelant suite à la procédure de liquidation judicaire précitée non discutée en tant que telle.
Il sera donné acte à la SELAFA MJA (Me [W] [Y]), es-qualités, de ce qu'elle a d'ores et déjà intégré dans son relevé destiné à l'AGS (sa pièce 7) les créances de M. [Z] [O] au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés (2 986,63 €), de l'indemnité compensatrice de préavis (3 100,74 € + 310,07 €) et de l'indemnité légale de licenciement (815,67 €).
2/ Les salaires (période du 1er février au 20 mai 2011)
Il ressort des éléments soumis à la cour, et notamment du jugement du tribunal de commerce de Paris du 5 mai 2011 d'extension de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL GOSP à M. [E] [M] [P], que ce dernier a reconnu avoir repris en février 2011 une activité de direction au sein de la SARL GOSP avec les salariés dont M. [Z] [O], en violation de la première décision précitée du 30 septembre 2010 rendue en son absence et dont il a prétendu ignorer l'existence.
Si les actes juridiques accomplis par le débiteur en liquidation judiciaire, dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, sont en principe inopposables à la procédure collective, ceux-ci peuvent toutefois être ratifiés par le liquidateur dans l'intérêt des créanciers qu'il représente.
La cour constatera que la SELAFA MJA, es-qualités, a sur le principe opéré cette ratification en mentionnant dans son relevé précité pour l'AGS des «salaires» revenant à M. [Z] [O], lesquels seront portés à la somme globale non contestée dans son mode de calcul de 5 321,47 € (+532,14 €) sur la période concernée du 1er février au 20 mai 2011 inclus.
Pour ces deux groupes de créances, il sera ordonné au profit de l'appelant leur fixation au passif tant de la SARL GOSP que de M. [E] [M] [P] en application des deux jugements rendus par le tribunal de commerce de Paris les 30 septembre 2010 et 5 mai 2011.
La décision critiquée sera en conséquence infirmée sur ce point.
Sur la garantie de l'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST :
Pour contester sa garantie, l'AGS CGEA IDF OUEST considère que le jugement du 5 mai 2011 d'extension de la procédure collective à M. [E] [M] [P] n'a pas ouvert une nouvelle procédure de liquidation judicaire, qu'en vertu du principe d'unicité de la procédure collective, c'est la même procédure qui se poursuit à laquelle il est seulement adjoint le patrimoine d'une autre personne physique ou morale, que l'unique date à retenir est celle du 30 septembre 2010 correspondant à la liquidation judiciaire de la SARL GOSP, qu'en application de l'article L.3253-8-1° du code du travail sa garantie ne s'exerce que pour les sommes dues au salarié à la date d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire et qu'en l'espèce elle n'a donc pas à garantir des sommes qui sont postérieures au 30 septembre 2010.
Si le régime de l'extension d'une procédure collective aboutissant à une confusion des patrimoines concernés repose sur le principe tiré de l'unicité de la procédure en ce qu'une procédure collective déjà ouverte est étendue à toutes les personnes visées, contrairement à ce que soutient l'AGS CGEA IDF OUEST, le jugement d'extension ne rétroagit pas à la date d'ouverture de la procédure collective initiale, la soumission à la procédure collective de la personne intéressée par l'extension ne produisant effets à son égard qu'à la date de ladite extension opérant ainsi à la manière d'un jugement d'ouverture .
Dès lors, comme précédemment rappelé, que le jugement d'extension susvisé du 5 mai 2011 a produit vis-à-vis de M. [E] [M] [P] les mêmes effets qu'un jugement d'ouverture, sans possibilité de rétroagir au 30 septembre 2010, date à laquelle la SARL GOSP a été mise en liquidation judiciaire, il y a lieu de dire que l'AGS CGEA IDF OUEST doit sa garantie à l'appelant dans les conditions et limites de plafond légalement prévues.
Sur la remise de documents conformes
La SELAFA MJA (Me [W] [Y]), es-qualités, délivrera à l'appelant les bulletins de paie et une attestation POLE EMPLOI conformes au présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M.[Z] [O] de ses demandes au titre de la résiliation judiciaire et de dommages-intérêts afférents (article 1382 du code civil, article L.1235-3 du code du travail) ;
L'INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,
FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SARL GOSP et de M. [E] [M] [P] au profit de M. [Z] [O] les créances suivantes :
3 100,74 € d'indemnité compensatrice de préavis et 310,07 € de congés payés afférents
2 986,63 € d'indemnité compensatrice de congés payés
815,67 € d'indemnité légale de licenciement
5 321,47 € de rappel de salaires (période du 1er février au 20 mai 2011) et 532,24 € d'incidence congés payés
Y ajoutant,
DIT que l'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST doit sa garantie dans les conditions et limites de plafond légalement prévues ;
ORDONNE la délivrance par la SELAFA MJA (Me [W] [Y]), es-qualités, à M. [Z] [O] des bulletins de paie et d'une attestation POLE EMPLOI conformes au présent arrêt ;
CONDAMNE la SELAFA MJA (Me [W] [Y]), es-qualités, aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE