Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2013
(n° 203, 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/21002.
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2011 - Tribunal de Commerce de MELUN - RG n° 2010/2245.
APPELANT :
Monsieur [F] [X]
demeurant [Adresse 2],
représenté par Maître Jean-Loup PEYTAVI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106,
assisté de Maître Georges SITBON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0198.
INTIMÉE :
SA SOCIETE GENERALE
prise en la personne de ses représentants légaux,
ayant son siège social [Adresse 1],
représentée par Maître Christine CADIX MALPEL de la SCP MALPEL & Associés, avocat au barreau de MELUN,
assistée de Maître Laëtitia MICHON DU MARAIS substituant Maître Christine CADIX MALPEL de la SCP MALPEL & Associés, avocat au barreau de MELUN.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 juin 2013, en audience publique, devant Madame Véronique RENARD, Conseillère chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Christine AIMAR, présidente,
Madame Sylvie NEROT, conseillère,
Madame Véronique RENARD, conseillère.
Greffier lors des débats : Monsieur Truc Lam NGUYEN.
ARRET :
Contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, et par Monsieur Truc Lam NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.
La société OXALYS dirigée par son gérant Monsieur [F] [X] avait pour activité la vente de films, musiques, jeux vidéos, sous l'enseigne MEDIASTORE dans le centre commercial de [1] situé à [Localité 1] et a obtenu par acte sous seing privé du 14 juin 2007 de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE un prêt d'équipement d'un montant de 197.000 euros au taux d'intérêt Euribor 1 mois majoré de 1,49 % remboursable en 59 mensualités constantes de 3.285 euros, la dernière mensualité s'élevant à la somme de 3.185 euros.
Pour garantie de ce prêt, Monsieur [F] [X] s'est porté caution solidaire par acte sous seing privé en date du 14 juin 2007 en faveur de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à hauteur de la somme de 128.050 euros ;
Par acte sous seing privé du même jour, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a accordé à la société OXALYS un prêt d'équipement d'un montant de 417.000 euros au taux d'intérêt Euribor 1 mois majoré de 1,49% remboursable en 120 mensualités constantes de 3.475 euros ;
Pour garantie de ce prêt, [F] [X] s'est porté caution solidaire par acte sous seing privé en date du 14 juin 2007 en faveur de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à hauteur de la somme de 271.050 euros ;
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la banque a mis en demeure la société OXALYS de procéder au paiement de sa dette.
En l'absence de remboursement et de régularisation de la situation, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a prononcé la déchéance des termes des prêts par lettres recommandées avec demande d'avis de réception datées du 19 mai 2010.
Par jugement du tribunal de commerce de Melun du 31 mai 2010, la société OXALYS a été placée en liquidation judiciaire et la SCP ANGEL HAZANE désignée en qualité de liquidateur judiciaire ;
La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur judiciaire à hauteur de la somme de 627.034,21 euros ;
Par acte sous seing privé daté du 10 mai 2008, Monsieur [F] [X] a consenti au profit de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE un engagement de caution couvrant l'ensemble des engagements courants de la société OXALYS à concurrence de la somme de 350.000 euros.
La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a, par acte du 16 juillet 2010, fait assigner [F] [X] devant le tribunal de commerce de Melun pour obtenir notamment le paiement des sommes suivantes :
- 120.005,14 euros, outre les intérêts au taux contractuel sur la somme principale de 116.156,93 euros à compter du 15 juin 2010, date du décompte et jusqu'au jour du complet paiement,
- 348.250,87 euros, outre les intérêts au taux contractuel sur la somme principale de 337.184,45 euros à compter du 15 juin 2010, date du décompte et jusqu'au jour du complet paiement,
- 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
Par jugement assorti de l'exécution provisoire du 7 novembre 2011, le Tribunal de Commerce de Melun a :
- dit n'y avoir lieu à jonction,
- condamné Monsieur [F] [X] à payer à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE les sommes de :
- 120.005,14 euros, avec les intérêts au taux contractuel de la somme principale de 116.156,93 euros, à compter du 15 juin 2010, date du décompte et jusqu'au jour du complet paiement,
- 348.250,87 euros, avec les intérêts au taux contractuel sur la somme principale de 337.184,45 euros, à compter du 15 juin 2010, date du décompte et jusqu'au jour du complet paiement,
- dit que Monsieur [F] [X] pourra s'acquitter de sa dette en 23 mensualités de 500 euros et une 24ème pour le solde, le premier versement devant intervenir dans le mois de la signification du jugement,
- dit que l'absence d'un seul règlement à l'échéance prévue emportera la déchéance du terme et l'exigibilité immédiate du solde de la créance,
- condamné Monsieur [F] [X] à payer à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens liquidés à la somme de 80,85 euros ;
Vu l'appel interjeté le 13 décembre 2011 par Monsieur [F] [X] ;
Vu l'ordonnance du magistrat de la mise état du 5 juillet 2012 qui a prononcé la caducité de la déclaration d'appel pour défaut de notification régulière de ses conclusions d'appel dans les délais des articles 908 et 911 du code de procédure civile et qui a condamné Monsieur [F] [X] à payer à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de la procédure d'incident ;
Vu l'arrêt de cette cour en date du 16 novembre 2012 qui a ordonné la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 12/15425 et 12/17182, dit qu'elles se poursuivront sous le numéro 12/15425, infirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 5 juillet 2012 par le conseiller de la mise en état de la présente chambre de la cour d'appel,
déclaré recevables les conclusions notifiées le 12 mars 2012 par [F] [X], rejeté la demande formée par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et laissé à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés afférents à la procédure sur incident ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2012 par lesquelles Monsieur [F] [X] demande à la Cour de :
- ordonner la jonction de la procédure avec celles engagées par les sociétés BRED et BNP PARIBAS,
- subsidiairement, avant dire droit, d'ordonner à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE de justifier de la mise en jeu des garanties OSEO qui figurent au prêt,
- débouter la SOCIÉTÉ GENERALE de l'intégralité de ses demandes, la banque ayant commis une faute en octroyant un prêt disproportionné en regard des capacités de remboursement de la société OXALYS et en exigeant la caution d'un dirigeant notoirement insolvable,
- plus subsidiairement, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déchargé des intérêts échus,
- lui accorder 24 mois de délais pour apurer sa dette soit 23 mensualités de 500 euros et la dernière du solde dû,
- condamner la SOCIÉTÉ GENERALE à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et celle de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions signifiées le 18 avril 2013 par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE qui demande à la cour de :
- déclarer à titre liminaire irrecevable la demande de dommages intérêts formée par Monsieur [F] [X],
- dire qu'il n'y a pas lieu à jonction des procédures engagées à l'encontre de Monsieur [F] [X] et qu'elle n'a pas à mettre en 'uvre la garantie OSEO tant que toutes les poursuites ne sont pas épuisées,
- dire que Monsieur [F] [X] est une caution avertie qui ne peut se prévaloir d'un manquement au devoir de conseil de sa part,
- dire que les contrats de cautionnement consentis à Monsieur [F] [X] ne constituaient pas lors de leurs conclusions des engagements disproportionnés par rapport à ses revenus et à son patrimoine,
- dire que la demande de dommages intérêts fondée sur la notion de procédure abusive est une demande nouvelle,
- dire que la caution a bénéficié d'une information annuelle de sa part,
- débouter Monsieur [F] [X] de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'application du taux d'intérêts conventionnels,
- condamner [F] [X] à lui payer les sommes de :
- 120.005,14 euros, outre les intérêts au taux contractuel Euribor 1 mois majoré de 1,49 % l'an sur la somme principale de 116.156,93 euros à compter du 15 juin 2010, date du décompte et jusqu'au jour du complet paiement,
- 348.250,87 euros, outre les intérêts au taux contractuel Euribor 1 mois majoré de 1,49 % l'an sur la somme principale de 337.184,45 euros à compter du 15 juin 2010, date du décompte et jusqu' au jour du complet paiement,
- ordonner la capitalisation des intérêts dès qu'ils seront dus au moins pour une année entière en application de l'article 1154 du code civil,
- condamner [F] [X] à lui payer la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens qui comprendront le coût des mesures conservatoires, et dont distraction au profit de son conseil ;
SUR CE,
Sur la demande de jonction avec des procédures engagées par la BNP PARIBAS et la BRED :
Considérant que c'est par une juste analyse que la Cour adopte que les premiers juges ont considéré qu'il ne ressortissait pas des contrats de prêts consentis par d'autres organismes bancaires une volonté de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE d'agir de concert avec ces derniers et de constituer 'un pool bancaire' en vue du financement du projet de Monsieur [F] [X] ;
Que dès lors il n'existe pas de lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de juger ces affaires, au demeurant distribuées à une autre chambre de la Cour d'Appel de Paris, ensemble ;
Qu'il n'y a pas lieu en conséquence de faire droit à la demande de jonction ;
Sur la recevabilité de la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive :
Considérant que la banque n'est pas contredite lorsqu'elle indique que la demande en dommages-intérêts pour procédure abusive formulée par Monsieur [X] constitue une demande nouvelle en appel ;
Qu'en effet, cette demande ne tend pas à opposer compensation, à faire écarter les prétentions adverses ou à faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ;
Qu'elle doit donc être déclarée irrecevable en application de l'article 564 du Code de Procédure Civile ;
Sur la mise en 'uvre préalable des garanties OSEO :
Considérant que l'engagement d'OSEO est un engagement de caution simple, qui, en application de l'article 10 des conditions générales de la garantie, ne peut être mis en 'uvre que lorsque toutes les poursuites utiles ont été épuisées, pour le règlement de la perte finale et des intérêts, au prorata d sa part de risque ;
Que le jugement dont appel doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a dit que Monsieur [X] ne pouvait imposer à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE la mise en 'uvre 'avant dire et juger droit' de la garantie OSEO ;
Sur la demande en paiement
Considérant que pour s'opposer aux demandes de la banque Monsieur [X] invoque en premier lieu, au visa de l'article 1147 du Code Civil un manquement de celle-ci à son devoir de conseil ;
Qu'il indique dans ses écritures qu'il était salarié et que 'l'on ne s'improvise pas dirigeant d'une grande surface de 20 salariées sans une solide expérience' pour en déduire sans autre motif, que la banque ne pouvait s'exonérer de son devoir de conseil ;
Qu'il ne caractérise ainsi pas le manquement de la banque qu'il allègue alors au surplus qu'il avait la qualité de gérant de la société OXALYS ;
Considérant que Monsieur [X] prétend par ailleurs que la banque ne pourrait se prévaloir de ses engagements en application des dispositions de l'article L 341-4 du code de la consommation selon lequel 'Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation' ;
Qu'il soutient qu'il existerait une disproportion manifeste entre les capacités de remboursement de la société OXALYS, ce qui est inopérant dans le cadre du présent litige qui l'oppose à la banque en sa qualité de caution, et entre ses engagements et ses propres facultés financières en faisant valoir que son revenu était à la date de ses engagements son seul revenu salarié , que son patrimoine actuel s'élève à 300.000 euros, soit la moitié de la valeur résiduelle de son domicile estimé à 1.100.000 euros, dont il convient de déduire le solde du prêt destiné à son acquisition pour 500.000 euros environ, enfin qu'il y a lieu d'ajouter dans ces charges ses engagements de cautions consentis à l'égard d'autres banques, la BRED et la BNP ;
Considérant, ceci exposé, que selon les termes de l'article précité il y a lieu d'apprécier le caractère disproportionné de l'engagement 'lors de sa conclusion', étant observé que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE ne fait pas état d'une situation financière favorable au moment où la caution a été appelée ;
Qu'il résulte de la demande de renseignements sollicitée par la banque lors de l'engagement de caution, portant la signature de Monsieur [F] [X], que ce dernier a déclaré percevoir une rémunération mensuelle de 4.500 euros sans mentionner ni la consistance ni l'étendue de son patrimoine ni encore l'existence de ses charges ;
Qu'il était néanmoins propriétaire de deux biens immobiliers, l'un situé à [Localité 2] acquis en 2002 et estimé en 2007 à 1.150.000 euros et grevé d'un prêt arrivant à échéance en 2015, et l'autre à [Localité 3] acquis en 1984 et estimé à 60.000 euros ;
Qu'eu égard à ces éléments, la banque qui n'était tenue à aucun devoir de vérification a pu valablement considérer que les engagements souscrits par le débiteur ne revêtait aucun caractère excessif ;
Que l'appelant ne peut dès lors se prévaloir de la disproportion qu'il allègue et le jugement sera également confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef ;
Sur le manquement de la banque à son obligation d'information de la caution :
Considérant que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE ne justifie pas de la réception par Monsieur [F] [X], qui la conteste, des lettres simples annuelles d'information de la caution ;
Que le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a déchargé Monsieur [X] du paiement des intérêts conventionnels échus ;
Sur les délais de paiement :
Considérant que pour solliciter 24 mois de délais de paiement, l'appelant se prévaut à la fois d'une situation financière difficile et de sa volonté d'engager la responsabilité de la société bailleresse de la société OXALYS qu'il considère comme responsable du préjudice qu'il subit ;
Que la banque s'oppose à cette demande au motif qu'il s'agit là d'une action par principe aléatoire et au demeurant non encore engagée et que Monsieur [X] ne justifie nullement de sa situation financière actuelle ;
Considérant néanmoins qu'eu égard à la situation du débiteur ci-dessus décrite et aux besoins du créancier le jugement sera confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de délais de paiements à raison de 23 mensualités de 500 euros et d'une 24ème pour le solde et déchéance du terme en cas de défaillance ;
Sur les autres demandes :
Considérant qu'aucune considération d'équité ne justifie l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au présent litige ;
Que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS :
Dit n'y a voir lieu à joindre la présente procédure avec celles engagées par les sociétés BRED et BNP PARIBAS.
Déclare irrecevable comme nouvelle la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive de Monsieur [F] [X]
Confirme le jugement du Tribunal de Commerce de MELUN du 7 novembre 2011 en toutes ses dispositions.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel.
Le greffier,Le Président,