RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 8
ARRÊT DU 14 Novembre 2013
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00087 - MEO
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Septembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY section encadrement RG n° 10/01630
APPELANTE
SAS K PAR K venant aux droits de la SNC DISTRIK
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Philippe YON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0521
INTIME
Monsieur [W] [H]
[Adresse 1]
[Localité 1]
comparant en personne, assisté de Me Lamiel BARRET KRIEGEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C2099
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Octobre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Catherine METADIEU, Présidente
Mme Marie-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère
Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère
Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE :
M. [W] [H] a été embauché en 2003 par la Sas K par K , en qualité de responsable régional des ventes, moyennant une rémunération brute mensuelle s'élevant en dernier lieu à 5 648,89 €.
Convoqué le 11 février 2010 à un entretien préalable fixé le 2 mars suivant, M. [H] a été licencié le 5 avril 2010 par une lettre remise en main propre pour insuffisance managériale et pour manque de loyauté et d'intégrité.
Contestant son licenciement, M. [H] a saisi le conseil des Prud'Hommes de Bobigny d'une demande tendant en dernier lieu à obtenir le paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi, outre la remise des documents sociaux conformes, le paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile et l'exécution provisoire. A titre reconventionnel, la Sas K par K a réclamé le paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par décision en date du 7 septembre 2011, le conseil des Prud'Hommes a jugé le licenciement de M. [H] sans cause réelle et sérieuse et condamné la Sas K par K à lui payer les sommes suivantes :
- 67 786,68 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre les intérêts au taux légal à compter du jugement
- 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile
Il a débouté pour le surplus les parties et condamné la Sas K par K aux dépens.
L'employeur a fait appel de cette décision dont il sollicite l'infirmation. Il demande à la cour de juger le licenciement de M. [H] bien fondé, de le débouter de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [H] conclut à la confirmation partielle du jugement déféré. Il demande à la cour qu'elle juge son licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu'elle condamne la Sas K par K à lui payer les sommes suivantes :
- 67 786,68 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre les intérêts au taux légal à compter du jugement
- 67 786,68 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
- 4 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile
Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 8 octobre 2013, reprises et complétées à l'audience.
MOTIVATION :
La lettre de licenciement en date du 31 mars 2010 reçue par le salarié le 6 avril suivant, qui reproche à son salarié de ne pas remplir ses missions et d'adopter 'un comportement contraire aux règles et à l'éthique internes' en détaille les motifs et conclut : 'votre licenciement est prononcé au motif de vos insuffisances managériales, de vos utilisations délibérément opaques des outils de reporting, qui ont pour incidence de rendre impossible le contrôle de votre activité par votre hiérarchie et, enfin, au motif de votre manque d'intégrité et de loyauté...'.
Contrairement à ce que soutient l'employeur, le licenciement prononcé à l'encontre de son salarié pour le comportement fautif de celui-ci, notamment au regard des 'règles et de l'éthique internes' à la société constitue un licenciement disciplinaire régie par les règles applicables en la matière. En particulier le licenciement constitue une sanction qui doit être motivée.
Cependant avant même la réception de la lettre de licenciement, il ressort des débats qu'a été remise au salarié, en main propre par l'employeur, une lettre datée du 5 avril 2010 libellée en ces termes : ' Nous vous avons prévenu samedi matin le 2 avril 2010 par téléphone de votre licenciement. Nous vous avons fait part également que votre lettre de licenciement était partie. Je vous demande donc de ne pas travailler et par conséquent de ne pas assister à la réunion de ce 5 avril.'
La cour relève que l'employeur ne conteste pas la sincérité de ce document, au demeurant confirmé par un mail du 6 avril suivant, et en tire la conséquence que M. [H] a fait l'objet d'un licenciement verbal le 2 avril, réitéré par écrit non motivé le 5 avril.
A défaut de comporter des motifs expressément énoncés, le licenciement de M. [H] est sans cause réelle et sérieuse .
Cette situation qui cause un préjudice à M. [H] du fait de la perte de son emploi lui donne droit à percevoir une indemnité que la cour, compte-tenu des éléments produits aux débats, notamment sur l'ancienneté du salarié, est en mesure d'évaluer à la somme de 67 786,68 €, en application de l'article L1235-3 du code du travail.
En outre, il apparaît que l'éviction brutale dont a fait l'objet M. [H] , d'abord par téléphone, puis sur le lieu même du travail, sans aucun égard pour sa personne, lui a occasionné un préjudice moral distinct du préjudice d'ores et déjà réparé par l'indemnité qui précède.
Compte-tenu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer à 10 000 € le préjudice moral subi par M. [H] .
Enfin, compte-tenu de ce qui précède, il convient d'ordonner d'office, en application de l'article L 1235-4 du code du travail, et dans la limite posée par cette disposition, le remboursement par la Sas K par K de toutes les indemnités de chômage payées à M. [H].
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le préjudice moral
L'infirme sur ce chef. Statuant à nouveau et y ajoutant :
Condamne la Sas K par K à payer à M. [W] [H] la somme de 10 000 € en réparation du préjudice moral distinct, outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision
Ordonne d'office, en application de l'article L 1235-4 du code du travail, et dans la limite posée par cette disposition, le remboursement par la Sas K par K de toutes les indemnités de chômage payées à M. [H]
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la Sas K par K à payer à M. [H] la somme de 4 000 €
La déboute de sa demande de ce chef
Condamne la Sas K par K aux dépens.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,