Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 15 JANVIER 2014
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/13793
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Juin 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/09933
APPELANT
Syndicat des copropriétaires de l'immeuble LE GRAND PAVOIS [Adresse 7], 14-28 RUE DE VASCO DE GAMA, [Adresse 1] ET [Adresse 10] représenté par son syndic la Société VINCI IMMOBILIER GESTION elle même prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social
[Adresse 8]
[Localité 1]
représenté la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480
assisté de Me Emmanuelle LEFEVRE, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 381
INTIMES
Monsieur [E] [N]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Monsieur [H] [N]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentés par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936
assistés de Me Jacques MAZALTOV, avocat au barreau de PARIS, toque : E1021
PARTIES INTERVENANTES
Madame [O] [J]
[Adresse 9]
[Localité 2]
Monsieur [G] [Q]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Madame [D] [C] [W] épouse [Q]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentés par Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, toque : P0480
assistés de Me Emmanuelle LEFEVRE, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 381
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 Novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Président
Madame Denise JAFFUEL, Conseiller, chargée du rapport
Madame Claudine ROYER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier présent lors du prononcé.
Messieurs [E] et [H] [N] ont acquis le 5 mars 1980, dans l'immeuble en copropriété « Le Grand Pavois » sis [Adresse 7], [Adresse 6], [Adresse 2] et [Adresse 11], le lot n° 1804 de l'état descriptif de division.
En 1991, ils ont procédé à des aménagements à l'intérieur de ce lot en y réalisant des mezzanines d'une superficie de 268 m2. Ils indiquent ne pas avoir demandé l'autorisation de l'assemblée générale, mais que ces mezzanines étaient prévues dès l'origine et qu'ils ont informé le syndic des travaux relatifs à leur réalisation.
Le syndicat des copropriétaires a obtenu, par ordonnance de référé du 31 janvier 2007 confirmée par arrêt de la cour d'appel du 21 septembre 2007, la désignation de Mme [P] en qualité d'expert avec mission notamment de dire si des modifications ont été apportées au lot n° 1804 par rapport à son état initial tel que décrit dans le règlement de copropriété, les décrire en précisant la date d'achèvement des travaux, les circonstances de leur exécution et leur impact sur les parties communes, de dire si les travaux ont été conduits conformément aux règles de l'art et d'urbanisme, de fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre la détermination des responsabilités éventuellement encourues et de donner, le cas échéant, son avis sur les préjudices subis et les chiffrer.
L'expert a déposé son rapport le 3 avril 2008.
Par exploit des 3 et 10 juin 2010, le syndicat des copropriétaires a fait assigner les consorts [N] pour les voir condamner solidairement sous astreinte à faire procéder à la démolition du 4ème étage créé dans leur lot, outre l'indemnisation des préjudices subis à fixer par voie d'expertise.
Par jugement contradictoire, assorti de l'exécution provisoire, rendu le 16 juin 2011, dont le syndicat a appelé par déclaration du 21 juillet 2011, le Tribunal de grande instance de Paris 8ème chambre 2ème section :
- Déclare prescrite la demande du syndicat tendant à voir ordonner la démolition, sous astreinte, du quatrième étage du lot n° 1804, propriété de Messieurs [E] et [H] [N],
- Dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise,
- Condamne le syndicat à verser à M. [E] [N] et à M. [H] [N] une somme de 7.500 euros, chacun, pour procédure abusive,
- Condamne le syndicat à verser à Messieurs [E] et [H] [N] une indemnité de 12.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,
- Dit que Messieurs [E] et [H] [N] seront dispensés de toute participation à la dépense de la copropriété pour les frais de la présente procédure, conformément aux dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.
Les intimés ont constitué avocat.
Mme [J] et les époux [Q], copropriétaires, sont intervenus volontairement à la procédure en cause d'appel pour s'associer aux demandes du syndicat sans formuler de demandes propres.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux conclusions d'appel dont les dernières ont été signifiées dans l'intérêt :
Du syndicat, de Mme [J] et des époux [Q], le 17 septembre 2013,
De Messieurs [E] et [H] [N], le 11 septembre 2013.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 septembre 2013.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,
Sur la procédure
Il n'y a pas lieu d'écarter des débats la pièce n° 57 versée par les consorts [N], consistant en « une lettre [Z] [N] du 11 avril 1990 et LR + AR », cette pièce ayant été régulièrement communiquée, selon bordereau annexé aux conclusions, tant en première instance qu'en cause d'appel ;
Dans ces conditions, il sera dit n'y avoir lieu d'écarter des débats la pièce n° 57 produite par les consorts [N] ;
L'appelant et les copropriétaires intervenants ne peuvent pas utilement soutenir devant la Cour que les conclusions signifiées par les consorts [N] le 16 mai 2013 devraient être déclarées irrecevables sur le fondement des articles 909 et suivants du CPC alors qu'une telle demande relevait, non de la compétence de la Cour, mais de celle exclusive du conseiller de la mise en état qu'il leur appartenait de saisir dans le cadre d'un incident, ce qu'ils n'ont pas fait ; cette demande sera donc rejetée ;
Les consorts [N] ne peuvent pas valablement soutenir que l'intervention volontaire à la procédure d'appel de Mme [J] et des époux [Q] serait irrecevable pour défaut d'intérêt à agir au regard de l'article 554 du CPC alors que ces intervenants sont des copropriétaires qui s'associent à la demande du syndicat dont ils sont membres, ce qui justifie leur intérêt, sans formuler de demandes propres distinctes de celles présentées par le syndicat, de telle sorte que leur intervention est recevable ;
En conséquence, les interventions volontaires en cause d'appel de Mme [J] et des époux [Q] seront déclarées recevables ;
Sur le fond
Le syndicat et les copropriétaires intervenants demandent, par infirmation, de dire non prescrite l'action engagée par le syndicat, de condamner solidairement [E] et [H] [N] à restituer les éléments de parties communes indûment privatisés et les condamner, pour ce faire, sous astreinte à démolir le 4ème étage créé dans leur lot n° 1804, les condamner solidairement à réparer l'ensemble des préjudices subis par le syndicat en raison de la création du 4ème étage, résultant notamment en l'aggravation des charges de copropriété, de l'appropriation du COS de l'immeuble et des incidences de l'extension sur le classement IGH de l'immeuble et pour ce faire, avant dire droit, ordonner une mesure d'expertise ;
Les consorts [N] demandent de confirmer le jugement, de dire prescrites les demandes du syndicat et, en toute hypothèse, de juger que le syndic n'a pas pouvoir pour demander la démolition des aménagements du lot 1804 et de débouter le syndicat de l'ensemble de ses prétentions ;
Les moyens invoqués, au soutien de l'appel, par le syndicat et les copropriétaires intervenants ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ;
Il convient toutefois d'ajouter que le syndicat justifie avoir habilité le syndic à poursuivre la présente action lors de l'assemblée générale du 22 juin 2010 ;
Les consorts [N] ne peuvent pas utilement soutenir que le syndicat n'aurait pas le pouvoir, par application de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, à quelque majorité que ce soit, de rechercher la démolition du 4ème étage du lot n° 1804, ce qui constituerait une atteinte illicite aux modalités de leur jouissance de leur lot, alors que le syndicat peut valablement demander au juge d'ordonner la démolition de travaux qui affecteraient les parties communes et auraient été réalisés sans autorisation de l'assemblée générale ; ce moyen sera donc rejeté ;
Le syndicat et les copropriétaires intervenants ne peuvent pas valablement soutenir que l'action introduite serait une action réelle au motif qu'elle tendrait à contester l'appropriation abusive, sans autorisation de l'assemblée générale, par les consorts [N] de parties communes, la construction d'un étage supplémentaire prenant nécessairement appui sur les structures porteuses de l'immeuble et étant susceptible d'avoir une incidence sur les droits accessoires tels les droits à construire alors que par application de l'article 42 alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965, la demande de suppression de travaux affectant les parties communes à l'intérieur du lot, non autorisés par l'assemblée générale, est une action personnelle, l'appui reproché sur les murs parties communes s'analysant en une affectation desdites parties communes et non en une appropriation qui pourrait permettre au copropriétaire de devenir à terme propriétaire de la partie commune concernée par prescription acquisitive ; ainsi l'action entreprise, qui tend principalement à obtenir la démolition des mezzanines, est une action personnelle qui se prescrit par dix ans, la création des mezzanines incriminées ne privant pas le syndicat de ses droits à construire, inexistants puisqu'épuisés dès la construction de l'immeuble ainsi qu'il résulte du rapport de l'expert [P] ;
Le syndicat ne peut se prévaloir, pour revendiquer une prescription trentenaire, de droits potentiels susceptibles de naître de l'évolution du COS dans le temps, s'agissant d'une simple éventuelle potentialité de droits et non de droits existants ;
Il appert de l'examen des pièces produites que la création des mezzanines incriminées était connue du syndicat des copropriétaires depuis 1994, ainsi que l'atteste le rapport de l'expert d'assurance Odette & Courtois du 14 février 1994 intervenu à la suite d'un dégât des eaux et transmis au syndicat, de telle sorte que l'action en démolition desdites mezzanines était prescrite en 2004 à l'expiration du délai de dix ans, s'agissant d'une action personnelle ;
En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont déclaré prescrite la demande du syndicat tendant à voir ordonner la démolition, sous astreinte, du 4ème étage du lot n° 1804, propriété de Messieurs [E] et [H] [N] ; le jugement sera donc confirmé de ce chef ;
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise dès lors que l'action principale tendant à la démolition des mezzanines litigieuses a été déclarée prescrite ;
Sur les demandes de dommages et intérêts
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires à payer aux consorts [N] des dommages et intérêts pour procédure abusive, le caractère abusif allégué n'étant pas établi ni justifié le préjudice dont se prévalent [E] et [H] [N] ;
Les demandes de Messieurs [E] et [H] [N] tendant à voir condamner le syndicat à leur payer, à chacun, la somme de 25.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et atteinte à leur honneur, qui ne sont pas justifiées, seront rejetées ;
Seront également rejetées, car non justifiées, les demandes de Messieurs [E] et [H] [N] tendant à voir condamner Mme [J] et les époux [Q] à leur payer, à chacun, des dommages et intérêts pour procédure abusive et atteinte à leur honneur ;
Sur les autres demandes
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que les consorts [N] seront dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de la procédure de première instance ;
Il y aura lieu de dire que les consorts [N] seront dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de la procédure d'appel ;
Il n'y a pas lieu d'ordonner la communication par le syndic du présent arrêt à chaque copropriétaire dans les 15 jours de sa signification ; la demande des consorts [N] de ce chef sera donc rejetée ;
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué aux consorts [N] la somme de 12.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles de première instance ;
L'équité commande de condamner le syndicat à payer aux consorts [N] la somme de 3.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles d'appel ;
Il n'y a pas lieu de condamner Mme [J] et les époux [Q] à payer aux consorts [N] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du CPC ; leur demande de ce chef sera donc rejetée ;
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Dit n'y avoir lieu d'écarter des débats la pièce n° 57 produite pas les consorts [N] ;
Déclare recevables les interventions volontaires en cause d'appel de Mme [J] et des époux [Q] ;
Confirme le jugement sauf pour ce qui concerne les dommages et intérêts alloués à [E] et [H] [N] ;
Statuant à nouveau de ce seul chef et y ajoutant :
Dit n'y avoir lieu d'allouer des dommages et intérêts à Messieurs [E] et [H] [N] ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « Le Grand Pavois » sis [Adresse 7], [Adresse 5], [Adresse 1], [Adresse 10] à payer à Messieurs [E] et [H] [N] la somme de 3.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles d'appel ;
Dit que Messieurs [E] et [H] [N] seront dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de la présente procédure d'appel, conformément aux dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Rejette les demandes autres, plus amples ou contraires ;
Condamne le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les frais de l'expertise de Mme [P] et qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,