Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRET DU 11 MARS 2014
(n° 162 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/11497
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Avril 2013 -Président du TGI de PARIS - RG n° 13/51582
APPELANTS
Monsieur [Z] [S]
[Adresse 1]
[Localité 1]
SARL LE RALLYE PERET
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentés par Me Jehan-denis BARBIER de la SELARL BARBIER ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0987
assistés de Me Rémy CONSEIL plaidant pour Me Jehan-denis BARBIER de la SELARL BARBIER ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0987
INTIMEE
SARL CAVE PERET RCS PARIS B399719897 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Claire MONGARNY BAULT de l'AARPI CABINET CLAIRE RICARD ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2500
assistée de Me Hubert VERCKEN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0193
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Février 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Nicole GIRERD, Présidente de chambre
Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère
Madame Odette-Luce BOUVIER, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Nicole GIRERD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.
Suivant acte notarié du 8 décembre 2003, [W] [S], aujourd'hui décédé et Mme [S] , née [G] [X], son épouse ont donné à bail à la Sarl Cave Péret, ayant pour gérant Mme [Y] [Q] veuve [S], leur belle-fille, en renouvellement d'un précédent bail consenti le 28 février 2004 à [I] [S], leur fils, décédé le [Date décès 1] 2002, divers locaux à usage, notamment, de 'vente de boissons à emporter', situés [Adresse 1].
Ces locaux sont contigus aux locaux dans lesquels la société Le Rallye Péret, ayant pour dirigeant M. [Z] [S], beau-frère de Mme [Y] [Q] veuve [S] exploite un commerce de restauration disposant d'une terrasse sur la rue [Adresse 3](pièce 3 de chacune des parties).
Soutenant que la société Le Rallye Péret Ia prive de la faculté que lui ouvre le bail d'accéder avec ses palettes, le matin entre 9h et 11h, par la terrasse du restaurant, dans la réserve dont elle a la jouissance et dont la porte d'accès est commune, la société Cave Péret a fait assigner cette société et M. [Z] [S] en référé afin, pour l'essentiel, qu'il leur soit enjoint de lui remettre les clés actionnant le rideau métallique lui permettant cet accès ;
M. [Z] [S], devenu propriétaire de ce local à usage de réserve par l'effet d'une donation consentie le 8 février 2010 (pièce 2 des appelants), et qui a fait délivrer le 28 mars 2012 à la société Cave Péret, à effet du 1er octobre 2012, un congé sans offre de renouvellement avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction d'un euro (pièce 4 des appelants), a demandé, reconventionnellement, la condamnation de la société Cave Péret à verser directement entre ses mains une indemnité d'occupation mensuelle de 598€ à compter du mois d'octobre 2012.
Une ordonnance de référé le tribunal de grande instance de Paris du 22 avril 2013 a, notamment,
- fait droit à la demande de remise de clé sous astreinte,
- rejeté la demande de paiement d'une indemnité d'occupation entre les mains de M. [Z] [S] depuis le 1er octobre 2012,
- constaté que la société Cave Péret conteste la validité du congé
- et désigné un expert chargé de donner un avis sur l'évaluation de l'indemnité d'éviction litigieuse.
Par conclusions transmises le 27 janvier 2014, auxquelles il est renvoyé, la société Le Rallye Péret et M. [Z] [S], appelants, demandent à la cour de :
- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a ordonné sous astreinte la remise de la clé en cause et rejeté la demande d' indemnité d'occupation entre les mains de M. [Z] [S] depuis le 1er octobre 2012
- confirmer l'ordonnance entreprise pour le surplus
Statuant à nouveau, vu les articles 808 et 809 du code de procédure civile,
- débouter la société Cave Péret de toutes ses demandes
- la condamner à payer à M. [Z] [S] la somme de 9.568€ à titre d'indemnité d'occupation de la réserve pour la période d'octobre 2012 à janvier 2014
- la condamner à leur payer à chacun la somme de 5.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les dépens.
Par conclusions transmises le 20 décembre 2013 auxquelles il est renvoyé, la société Cave Péret, intimée et appelante incidente, demande à la cour de :
- débouter les appelants de leurs demandes
- leur ordonner, sous astreinte, de lui remettre la clé du panneau permettant d'accéder au rideau métallique situé derrière ce panneau
- de les condamner à lui payer une indemnité de procédure et à payer les dépens, en ce compris le coût du constat d'huissier du 12 juin 2013
- de lui donner acte de sa contestation de la validité du congé et de ses protestations et réserves quant à l'expertise.
SUR CE LA COUR
sur la demande d'accès, par la [Adresse 3]), au local à usage de réserve ayant un accès par l'immeuble situé au n° 8 de cette rue
Considérant qu'aux termes de l'article 809 alinéa 1er du code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
Considérant, en l'espèce, que pour s'opposer à la demande de remise de clé permettant à la société Cave Péret d'accéder au local à usage de réserve querellé, par la terrasse du restaurant située [Adresse 2], les appelants soutiennent, d'une part, que la clause du bail, que celle-ci invoque pour revendiquer un tel accès, n'autorise nullement cet accès, d'autre part et en tout état de cause, que cette clause nécessite une interprétation qui ne relève pas du juge des référés et, enfin, que le fait d'autoriser cet accès que le bail de la société Le Rallye Péret n'autorise pas non plus constituerait 'une voie de fait que la loi sanctionne';
Considérant que le bail litigieux (pièce 1 des intimés) comporte sous la rubrique CONDITIONS GENERALES - GARANTIE une clause 9 ainsi rédigée:
'Le PRENEUR s'engage à ne rien faire qui puisse nuire à la tranquillité ou à la jouissance paisible des voisins, tant à l'occasion des livraisons qu'à celle des déplacements du personnel. Le PRENEUR déclare se soumettre aux obligations du règlement de copropriété et/ou règlement intérieur qui s'imposeront à lui dans la mesure où elle ne sont pas contraire aux dispositions du présent bail.
Notamment, il devra faire en sorte de ne pas troubler sans cesse le locataire et la clientèle du Café, par des allées et venues répétées entre le magasin et la réserve. Cette traversée sera dorénavant autorisée avec des palettes d'au moins 360 bouteilles et de NEUF HEURES à ONZE HEURES; les manutentions légères devant se faire depuis la porte arrière de la boutique jusqu'à la réserve à travers la cour; la porte donnant accès à la réserve étant commune avec le locataire voisin.
En outre, aucune livraison n 'est tolérée par le couloir de l'immeuble' ;
Considérant que la rubrique DESIGNATION DES LOCAUX de ce bail indique
'Réserve derrière, autre réserve ayant accès sur l'entrée de l'immeuble'
Considérant qu'au vu du plan des lieux fourni par les parties (pièces 3) et de ces dispositions, il résulte avec l'évidence requise en référé que le refus de tout accès à la réserve litigieuse par la rue [Adresse 3] pourtant manifestement autorisé sous conditions au bail constitue un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser au plus vite, dès lors en outre qu'il n'est pas utilement contesté que cet accès est le seul à permettre l'acheminement jusqu'à cette réserve, nécessaire à l'activité commerciale de la société Cave Péret, des palettes d'au moins 360 bouteilles que cette activité requière ;
Considérant qu'il s'ensuit que l'injonction aux appelants de cesser de refuser l'accès ainsi manifestement autorisé ne saurait constituer la voie de fait qu'ils allèguent dès lors que cette injonction est précisément de nature à faire cesser le trouble manifestement illicite occasionné à la société Cave Péret dans la jouissance des locaux commerciaux qui lui ont été donnés à bail, sans préjudice du recours éventuel des appelants contre le bailleur de la société Le Rallye Péret qui n'aurait pas réservé cet accès dans le bail consenti à celle-ci ;
Considérant que l'ordonnance entreprise a ordonné à M. [Z] [S] de remettre à la société Cave Péret la clé du rideau métallique permettant l'accès par la rue [Adresse 3] à la réserve ; que la société Cave Péret indique qu'il s'est exécuté ;
Considérant, cependant, qu'il résulte du procès verbal de constat du 12 juin 2013 (pièce 14 intimée) que la société Cave Péret est privée de l'accès à la réserve par ladite rue en raison de la présence d'une porte avec serrure située devant ce rideau métallique et dont elle n'a pas la clé ; qu'elle en demande donc la remise sous astreinte ;
Considérant qu'il y a lieu, dans ces circonstances, d'enjoindre aux appelants, sous astreinte, dans les conditions prévues au dispositif de l'arrêt, de cesser de refuser à la société Cave Péret l'accès à la réserve manifestement autorisé au bail de celle-ci et, à cette fin, de leur enjoindre de remettre à la société Cave Péret toute clé donnant accès à la réserve litigieuse par la rue [Adresse 3] ;
sur la demande en paiement d'indemnité provisionnelle d'occupation de la réserve
Considérant qu'en application des dispositions de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ;
Considérant, en l'espèce, que la société Le Rallye Péret et M. [Z] [S] demandent l'infirmation du chef de l'ordonnance entreprise relatif à l'indemnité d'occupation prétendument due au titre de la réserve dont M. [Z] [S] est devenu propriétaire par l'effet d'une donation consentie le 8 février 2010 (pièce 2 des appelants), et pour laquelle il a fait délivrer le 28 mars 2012 à la société Cave Péret un congé partiel sans offre de renouvellement avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction d'un euro, à effet du 1er octobre 2012 (pièce 4 des appelants) ;
Qu'ils soutiennent qu'à la suite de cette donation et de ce congé, c'est à M. [Z] [S] qu'est due cette indemnité d'occupation et non à Mme [L], sa soeur, qui est propriétaire du reste des locaux initialement loués à la société Cave Péret et à qui cette société paye un loyer qui ne l'inclue pas; que M. [Z] [S] demande à ce titre une somme provisionnelle de 9.568€ pour la période d'octobre 2012 à janvier 2014 ;
Considérant que cette demande requiert l'appréciation de l'incidence de la donation litigieuse sur la part respective de loyer revenant à chacun des deux propriétaires des locaux loués à la société Cave Péret suivant acte notarié du 8 décembre 2003 que cette donation a substitué au propriétaire initial, étant observé qu'il est acquis aux débats que le montant de ce loyer est resté le même (conclusions appelants p. 10) ;
Que la société Cave Péret conteste la validité du congé partiel qui lui a été délivré à effet du 1er octobre 2012 et sur lequel se fonde la demande en paiement d'une indemnité d'occupation de la réserve ;
Considérant qu'il s'ensuit que la créance alléguée par M. [Z] [S] au titre de l'indemnité d'occupation de la réserve n'apparaît pas établie avec l'évidence requise en référé et qu'il appartient donc au juge du fond d'en apprécier le bien fondé ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer en référé sur cette demande ;
sur les autres demandes
Considérant que les demandes de 'donner acte' des parties qui sont inopérantes en ce qu'elles n'emportent pas de conséquences juridiques ne peuvent être accueillies ;
Considérant que le juge des référés a fait une juste appréciation de l'indemnité de procédure due par M. [Z] [S] à la société Cave Péret au titre de la procédure en première instance ; que les circonstances de l'affaire commandent de ne pas laisser à la charge de la société Cave Péret la totalité des frais de procès en appel qu'elle a dû engager ; que les appelants seront condamnés à lui payer à ce titre une indemnité de 2.500€ ;
Considérant que les appelants, qui succombent, supporteront les dépens, en ce non compris le coût, non justifié, du constat d'huissier du 12 juin 2013 ;
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de M. [Z] [S] tendant à la condamnation de la société Cave Péret au paiement d'une indemnité d'occupation entre ses mains depuis le 1er octobre 2012
Statuant à nouveau et, y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à statuer en référé sur la demande en paiement, entre les mains de M. [Z] [S], d'une indemnité provisionnelle d'occupation de la réserve de 9.568€ pour la période d'octobre 2012 à janvier 2014
Ordonne à M. [Z] [S] et à la société Le Rallye Péret de cesser de refuser à la société Cave Péret l'accès par la rue [Adresse 3], au local à usage de réserve ayant un accès par l'immeuble situé au n° 8 de cette rue, le matin entre 9 heures et 11 heures pour la manutention de palettes d'au moins 360 bouteilles, sous astreintes de 300€ par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt,
Leur ordonne, à cette fin et sous astreinte de 300€ par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt, de remettre à la société Cave Péret toute clé donnant accès, par la rue [Adresse 3], à ce local à usage de réserve
Rejette toute autre demande
Condamne in solidum la société Le Rallye Péret et M. [Z] [S] à payer à la société Cave Péret la somme de 2.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Les condamne in solidum aux dépens, en ce non compris le coût du constat d'huissier du 12 juin 2013.
LE GREFFIER LE PRESIDENT