RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE [Localité 5]
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 28 Avril 2014
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/09687
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Septembre 2013 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 11-00518/B
APPELANTE
SAS SAFT
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Gwen SENLANNE, avocat au barreau de [Localité 5], toque : J007 substitué par Me Corinne DUBREIL, avocat au barreau de VERSAILLES
INTIMEE
URSSAF [Localité 5]-REGION PARISIENNE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Mme [M] en vertu d'un pouvoir spécial
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 2]
[Localité 5],
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Janvier 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Delphine BARREIROS, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Delphine BARREIROS, faisant fonction Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La société par actions simplifiées SAFT, immatriculée à l'URSSAF de [Localité 5]- région parisienne et domiciliée à [Localité 2], a quatre établissements situés à [Localité 2], [Localité 3], [Localité 4] et [Localité 6] qui ont fait l'objet d'un contrôle d'assiette par l'Urssaf de [Localité 5] sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009.
L' organisme du recouvrement a adressé à la SA SAFT une lettre d'observations en date du 23 septembre 2010 pour chacun des quatre établissements et le 1er novembre 2010, à réception des observations de la société, lui a indiqué qu'elle entendait les maintenir.
Les URSSAF compétentes pour chacun des établissements les ont ensuite mis en demeure de payer, s'agissant de l'URSSAF de [Localité 5] et de la région parisienne, la somme de 8 054 euros de cotisations.
Ces mises en demeure ont été contestées devant chaque commission de recours amiable respective, le 23 décembre 2010 pour celles de [Localité 5] et de la région parisienne, tandis que la société SAFT procédait au paiement de la totalité des sommes demandées.
En l'absence de réponse dans le délai d'un mois, la société SAFT,par requête du 25 mars 2011, a saisi le tribunal des affaires de la sécurité sociale de BOBIGNY aux fins de voir ordonner le remboursement des sommes versées au titre des deux redressements contestés relatifs à la réintégration de primes d'intéressement sur l'exercice 2006 (1.799 euros ) et 2007 (5.261 euros).
Par décision en date du 10 mars 2011 , la commission de recours amiable de l'URSSAF de [Localité 5] et de la région parisienne a fait droit partiellement à la requête de la société SAFT sur les primes versées au titre de l'exercice 2006 et rejeté le surplus de sa requête sur les avances versées au titre de l'exercice 2007.
Par jugement en date du 3 avril 2013 , le tribunal des affaires de la sécurité sociale :
- a rejeté la fin de non recevoir soulevée par l'URSSAF tirée du défaut de qualité à agir,
- a déclaré recevable le recours formé par la société,
- s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes relatives aux redressements des établissements de [Localité 3], [Localité 4] et [Localité 6] et désigné respectivement les tribunaux de la Gironde, de la Charente et de la [Localité 7] pour en connaître,
- a invité la société SAFT à saisir les tribunaux compétents,
- a rejeté la fin de non recevoir tirée de la forclusion relative au redressement afférent à l'établissement de [Localité 2] ;
- a ordonné la réouverture des débats au 19 juin 2013 afin de permettre aux parties de présenter leurs observations sur le fond du litige.
A l'issue des débats , le tribunal , par jugement en date du 18 septembre 2013, a :
- constaté que la commission de recours amiable avait par décision en date du 10 mars 2011 fait droit à la demande d'annulation du redressement relatif aux primes versées au titre de l'exercice 2006,
- débouté la société SAFT de sa demande d'annulation du redressement concernant l'avance sur la prime d'intéressement versée au titre de l'exercice 2007.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société SAFT demande à la Cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société de sa demande d'annulation du chef de redressement opéré sur les avances de primes d'intéressement au titre de l'année 2007,
- annuler en conséquence la décision de redressement concernant l'avance sur la prime d'intéressement au titre de l'année 2007 versée aux salariés de l'établissement de [Localité 2] en 2007;
-ordonner le remboursement des cotisations et majorations de retard correspondantes indûment versées par la Société, avec intérêts au taux légal depuis la date de leur versement et ce jusqu'à la date de leur remboursement effectif.
Elle fait valoir pour l'essentiel qu'aucun texte légal ne subordonne le versement d'une avance à l'existence d'une clause dans l'accord d'intéressement , que si la circulaire du 14 septembre 2005, relative à l'épargne salariale, prévoit la possibilité de versement d'une avance sur l'intéressement exonérée de cotisations sociales sous certaines conditions, aucune de ces conditions n'exige que l'accord d'intéressement comporte une clause sur ce point, qu'elle a respecté la condition de dépôt de l'accord avant tout versement, que le versement d'une avance ne suppose pas l'existence de résultat.
L' Urssaf conclut à confirmation du jugement pour les motifs entrepris en insistant sur le fait que l'accord d'intéressement triennal de 2005 ne prévoit pas de clause de versement d'avance, que l'avance a été versée en exécution d'un avenant annuel de 2007 avant qu'il ne soit déposé auprès de la direction du travail et de l'emploi, et que lors de ce versement, les résultats de l'entreprise ne pouvaient être connus de sorte qu'il n'était pas possible de savoir si les bénéficiaires de l'avance auraient droit à une prime d'intéressement.
Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 27 janvier 2014, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.
SUR CE LA COUR
Considérant que le litige est circonscrit à un seul chef de redressement portant sur l'avance sur l'intéressement au titre de l'année 2007;
Considérant que selon l'article L. 441-4, alinéa 1er du code du travail, devenu l'article L. 3312-4 , les sommes attribuées aux bénéficiaires, en application de l'accord d'intéressement ou au titre du supplément d'intéressement mentionné à l'article L. 444-12 n'ont pas le caractère de rémunération, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ni de revenu professionnel au sens de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale;
Qu'aux termes de l'article L. 441-2, al. 10 du code du travail, devenu l'article D. 3313-1 dudit code, l'accord d'intéressement est déposé à la direction départementale du travail de l'emploi et de la formation professionnelle, devenue la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, du lieu où il a été conclu par la partie la plus diligente, dans un délai de quinze jours à compter de la date limite prévue à l'article L. 441-9;
Que l'article R.441-1 du code du travail dans sa version en vigueur, stipule que tout avenant modifiant l'accord d'intéressement en vigueur doit être déposé à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle selon les mêmes formalités et délais que l'accord lui-même.
Qu'il résulte de la combinaison de ces textes avec l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable, que pour ouvrir droit aux exonérations de cotisations prévues par le dernier de ces textes, les accords d'intéressement, dont la durée est limitée à trois années, ainsi que leurs avenants, doivent avoir été déposés à la direction départementale du travail et de l'emploi;
Qu'il s'agit d'une formalité substantielle, dont la non observation entraîne une requalification des sommes ainsi versées en salaires ;
Considérant en l'espèce, que la société a conclu le 6 juin 2005, un accord d'intéressement à la marche de l'entreprise pour les exercices 2005, 2006 et 2007 ;
Que cet accord central prévoyait , en son article 6 que le critère retenu au niveau de l'entreprise était fondé sur le résultat d'exploitation augmenté des dotations pour amortissement, que le montant de l'intéressement était affecté au titre de l'exercice en cours, que le montant de l'objectif budgétaire (31.867.000 euros pour 2006 ) serait déterminé chaque année à l'issue du processus d'établissement et de validation du budget par l'entreprise;
Qu'en son article 8 , l'accord excluait tout versement d'acomptes ;
Considérant que le 20 juin 2007 , la société a conclu un avenant à cet accord prenant 'effet au 1er janvier 2007" aux termes duquel le seuil de déclenchement de l'intéressement passait de 95% à 90% de l'objectif budgétaire , celui ci étant fixé à 32.441.000 euros pour l'exercice 2007 ; qu'était confirmée la disposition relative à l'impossibilité de versement d'acomptes ;
Considérant que les inspecteurs du recouvrement ont relevé qu'à la suite d'un conflit social, la société avait versé aux salariés , courant mars 2007, une somme de 200 euros qualifiée d' 'avances sur intéressement' de l'exercice 2007;
Qu'estimant que ces avances avaient été versées avant la signature de l'avenant du 20 juin 2007 , donc avant le dépôt de l'accord auprès de l'administration du travail et que l'accord d'intéressement triennal de 2005 ne prévoyait pas de clause de versement d'avance, ils ont réintégré ces sommes dans l'assiette des cotisations;
Et considérant tout d'abord que si la circulaire du 14 septembre 2005 relative à l'épargne salariale prévoit au chapitre des ' versements de l' intéressement' la faculté pour l'employeur de décider de versements d'avances sur intéressement aux salariés en cours d'année sous réserve de respecter le caractère aléatoire de l' intéressement , ce n'est qu'à la condition qu'une clause relative à une telle disposition soit expressément stipulée dans l'accord d'intéressement ou ses avenants éventuels, le directeur départemental du travail devant être en mesure d'exercer son contrôle sur cet accord et sur les modalités de l'intéressement et notamment vérifier que cette avance ne masque pas un acompte prohibé.
Que force est de constater que ni l'accord du 6 juin 2005 ni l'avenant du 20 juin 2007 n'ont inséré une clause de versement d'avance ;
Considérant ensuite que l'accord souscrit le 20 juin 2007 s'appliquait à effet du 1er janvier 2007; qu'il concernait les conditions de l'intéressement de l'exercice 2007, déterminant l'objectif budgétaire pour cet exercice et modifiant le seuil de déclenchement de l'intéressement prévu à l'accord central;
Que contrairement à ce que soutient la société, l'avance sur intéressement litigieuse consentie en mars 2007, l'a été au titre de cet accord du 20 juin 2007 et non sur le fondement de l'accord central du 6 juin 2005 lequel n'a envisagé que l'objectif budgétaire 2006;
Et considérant que les dispositions précitées, intégrées à l'article 11 de l'accord central précisaient qu'en cas de révision des modalités ou paramètres, un avenant devait être déposé auprès de la Direction Départementale du Travail et de l'Emploi ;
Que l'avance sur intéressement a été payée aux salariés en mars 2007 antérieurement à la date de conclusion de l'avenant qui est intervenue le 20 juin 2007 et donc antérieurement à son dépôt à la Direction Départementale du Travail et de l'Emploi;
Que ce versement ayant été réalisé en exécution d'un accord non encore soumis au contrôle du directeur départemental du travail, c'est en conséquence ,à bon droit, aux termes d'une motivation pertinente qui doit être adoptée, que le tribunal des affaires de la sécurité sociale a dit qu'il n'ouvrait droit à aucune exonération et a débouté la société de son recours ;
Que ce jugement sera donc confirmé ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement ,
Déboute la société SAFT de ses demandes ,
Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante qui succombe au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L241-3 du code de la sécurité sociale et la condamne au paiement de ce droit ainsi fixé à la somme de 312,90 € ( trois cent douze euros et quatre vingt dix centimes).
Le Greffier, Le Président,