La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2014 | FRANCE | N°11/07630

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 07 mai 2014, 11/07630


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 7 Mai 2014

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/07630-MPDL



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section industrie RG n° F09/00909









APPELANTE

Madame [W] [G]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante en personne, assi

stée de Me Rachid MEKOUAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D2194







INTIMEE

SARL TCA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Gilles KHAIAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1628...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 7 Mai 2014

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/07630-MPDL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section industrie RG n° F09/00909

APPELANTE

Madame [W] [G]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Rachid MEKOUAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D2194

INTIMEE

SARL TCA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Gilles KHAIAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1628

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Février 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Pierre DE LIÈGE, Présidente

Madame Anne MÉNARD, Conseillère

Monsieur Thierry MONTFORT, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Monsieur Bruno REITZER, lors des débats

ARRET :

- contradictoire,

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Pierre DE LIÈGE, présidente et par Monsieur Bruno REITZER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Les faits :

Mme [W] [G] a été engagée, sans contrat écrit, à temps partiel, à compter du 5 février 2002 pour une durée indéterminée en qualité de céramiste-prothésiste, dentaire par la Sarl TCA.

Après une visite de l'inspection du travail, le 8 février 2008 il était demandé à la salariée de signer un nouveau contrat de travail à temps partiel prenant effet au 1er Janvier 2008, pour une durée de 130 heures mensuelles et la même rémunération.

La salariée sollicitait alors un délai de réflexion, soutenant que ce contrat écrit introduisait des changements dans son contrat de travail et sollicitant une reprise d'ancienneté au 5 février 2002. L'employeur se serait alors opposé au délai de réflexion sollicité.

Le 13 septembre 2008 Mme [W] [G] prenait acte de la rupture de son contrat de travail faisant état d'actes de harcèlement.

Mme [W] [G] saisissait alors le conseil de prud'hommes de Paris.

Celui-ci par jugement du 17 juin 2011, statuant en formation de départage, constatait la rupture du contrat de travail, disait que cette rupture produisait les effets d'une démission et déboutait Mme [W] [G] de l'ensemble de ses demandes.

Mme [W] [G] a régulièrement formé le présent appel contre cette décision.

Elle demande à la cour d'infirmer le jugement dans toutes ses dispositions et de débouter la Sarl TCA de l'ensemble de ses demandes, pour  :

-dire que la prise d'acte de rupture était bien-fondé et que cette rupture constitue un licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

-dire que le contrat de travail de Mme [W] [G] était un contrat à temps complet ;

-condamner la Sarl TCA à lui payer les sommes suivantes :

* 25 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

* 3906 € d'indemnité de préavis congés payés de 10 % en sus ;

* 3906 € d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

* 5000 € de dommages-intérêts pour préjudice moral ;

* 2000 € de dommages-intérêts pour atteinte à la vie privée ;

* 18 342,40 euros de rappel de salaire, avec en sus 10 % de congés payés ;

* 3500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La Sarl TCA a formé appel incident. Elle demande à la cour de :

- confirmer le jugement, mais de l'infirmer en ce qu'il a débouté la Sarl TCA de ses demandes reconventionnelles ;

- condamner Mme [W] [G] à lui payer :

* 3906 € d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 5000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive et de mauvaise foi ;

* 3500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'entreprise compte plus de 11 salariés.

La dernière rémunération brute de Mme [W] [G] était de 2031 € pour une duré mensuelle de travail de 130h y compris une prime d'ancienneté versée chaque mois.

La convention collective des « dentaires-prothésistes et laboratoires de prothèse dentaire » est applicable à la relation de travail.

Les motifs de la Cour :

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur le contexte du litige

Il est constant que depuis l'embauche de la salariée en 2002 les relations avec son employeur se sont déroulées sans difficulté rapportée et à la satisfaction de celui-ci, Mme [W] [G] étant, outre le gérant de fait de la Sarl TCA, M. [F], la seule céramiste prothésiste dentaire du laboratoire.

Les parties sont d'accord pour reconnaître que le gérant de fait M. [F] et la salariée, entretenaient des liens d'amitié, qui se sont dégradées au cours du premier semestre 2008 :

- selon la salariée parce que ce dernier lui a demandé brusquement au début du mois de février et après une intervention de l'inspection du travail de régulariser un contrat écrit, antidaté au 1er janvier 2008, sans reprise de son ancienneté, et sur une base de 130 heures par mois

- selon l'employeur parce qu'en réalité Mme [W] [G] s'était engagée, en tant que co-associée depuis la fin de l'année 2007 avec son ami, dans la création d'une SARL intitulée « je golf», dont les statuts avaient été déposés le 7 décembre 2007, et souhaitait la rupture du contrat de travail sans supporter les conséquences d'une démission.

Sur la rupture du contrat de travail de Mme [W] [G] et l'invocation d'un harcèlement moral

La salariée a par lettre du 13 septembre 2008 pris acte de la rupture de son contrat de travail dans ces termes :

« je me dois de vous rappeler que j'ai quitté mon travail depuis le 30 avril 2008 au soir avec quelques tentatives de reprise, mais compte tenu des actes de harcèlement entrepris à mon égard, et malgré ma conscience professionnelle et mon affection pour mon métier, je n'ai pu reprendre mon activité dans de bonnes conditions.

En effet j'ai fait l'objet pour commencer de pressions, sous peine de menaces, pour signer un contrat de travail me concernant et que j'ai à peine eu le temps de lire. J'ai été victime de reproches, de pressions, d'humiliations et accusations de la part de M. [F]. Ce dernier m'a aussi menacé lors d'un appel téléphonique. J'ai constaté à mon retour au laboratoire que mes affaires personnelles avaient été déplacées dans un coin, me signifiant bien que j'étais indésirable. Et pour finir M. [F] a clairement dit qu'il préférait que je revienne pour travailler au retour des vacances et m'a enlevé la clé du labo (sachant que je n'ai jamais quitté cette clé de même durant les congés) il n'a même pas voulu me donner le code d'accès de la porte de l'immeuble du laboratoire. J'ai donc en conséquence dû faire l'objet d'un suivi médico-psychologique qui n 'a pour l'heure pas été suffisant pour me permettre de reprendre mon activité. Aussi je suis contrainte de constater que des conditions normales pour poursuivre mon contrat de travail ne sont pas réunies. Je prends donc acte de la rupture de mon contrat de travail dont vous assumerez l'entière responsabilité' »

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire d'une démission. L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à l'employeur ne fixe pas les limites du litige. Dès lors le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Le juge du fond peut, pour trancher la question de l'imputabilité de la rupture, se fonder sur des présomptions. La rupture prend effet à la date à laquelle elle a été notifiée.

La salariée explique sa réticence à signer le contrat de travail sus mentionné le 8 février 2008 parce que :

- il s'agissait d'un contrat à temps partiel alors que selon elle, jusqu'alors elle effectuait un travail à temps complet malgré l'indication de 130 heures sur les bulletins de salaire,

- le salaire prévu était de 1953 euros pour 130 heures alors qu'en fait sa rémunération était variable et dépassait les 130h,

- la prise d'effet était fixée au 1er janvier 2008 malgré une ancienneté au 5 février 2002.

Selon elle, le gérant n'aurait pas accepté eu égard aux liens d'amitié qui les liaient, qu'elle ne lui fasse pas confiance en exigeant un délai de réflexion pour la signature du contrat.

Le contrat de travail, cependant signé des deux parties, versé en procédure, est effectivement un contrat de travail à temps partiel prenant effet le 1er janvier 2008. Les horaires de travail, de 130 heures par mois, fixés de 10 à 13h et de 14 à 17h du lundi au vendredi ont été rajoutés de manière manuscrite sans que cet ajout ne soit paraphé et l'article 10 intitulé ancienneté ne fait nullement référence à l'ancienneté réelle et non discutée de Mme [W] [G] au sein de l'entreprise (2002).

Si l'horaire de travail de 130 heures par mois, correspond aux indications portées depuis l'origine de la relation de travail sur chacun des bulletins de salaire de Mme [W] [G], la cour relève toutefois que le contrat de travail, ne prévoit aucune rémunération particulière en sus alors que la salariée recevait mensuellement et régulièrement une prime d'ancienneté dont le montant était de 78 € par mois en février 2008.

Ces deux éléments, non prise en compte d'une ancienneté de six ans, et absence de contractualisation de la prime d'ancienneté régulièrement servie, étaient en eux-mêmes suffisants pour justifier une prise d'acte de rupture de la part de Mme [W] [G].

La salariée soutient ensuite qu'à partir de ce moment, elle aurait subi de la part de M. [F] des actes réitérés de vexations et humiliations quotidiennes constitutifs de harcèlement moral, pour lesquels elle a sollicité l'intervention de l'inspection du travail et demandé à la Sarl TCA de prendre les dispositions pour mettre un terme à ce climat de harcèlement.

Il ressort en effet d'un mail adressé le 16 février 2008 par Mme [W] [G] à la direction départementale du travail de l'emploi et de la formation professionnelle que celle-ci, indiquant qu'à la suite d'un contrôle, son employeur avait été contraint de se mettre en accord avec la loi et de lui faire signer un contrat de travail, elle avait, sous la pression, signé ce contrat le 8 février 2008, elle dit : « que puis-je faire ' Je veux partir. Démissionner ' Pas les moyens. Est-ce que le contrat est valide '' ».

Il ressort qu'à cette date, huit jours après la signature du contrat, la salariée se plaignant des conditions de signature de son contrat de travail, disait son envie de partir mais exprimait son impossibilité de démissionner, « faute de moyens ». De manière évidente une telle démission n'aurait pu être considérée comme claire et non équivoque.

Les relations entre les parties se sont ensuite manifestement dégradées, la salariée enchaînant les arrêts maladie à partir du 4 d'avril 2008, date à laquelle elle a été placée pour quelques jours en arrêt de travail, arrêt suivi d'un second le 30 avril jusqu'au 11 mai, puis un nouvel arrêt du 28 mai jusqu'au 30 juin, et une nouvelle prolongation jusqu'au 5 juillet son état de santé se dégradant manifestement comme en attestent les certificats médicaux qu'elle produit, rédigés de plusieurs médecins différents.

L'employeur formulait des doutes quant à la réalité des problèmes de santé de la salariée, affirmant que ses absences à répétition perturbaient, ce qui est indéniable, le fonctionnement du laboratoire, et affirmant dans un mail du 26 mai 2008 du gérant de la Sarl TCA à Mme [W] [G] : « au mois de mars vous avez évoqué votre désir de quitter l'entreprise pour vous consacrer davantage à vos enfants. Il vous a été répondu ce que préconise la loi, c'est-à-dire que vous pouvez donner votre démission à tout moment et effectuer le préavis de rigueur. Cette réponse ne vous a pas convenu car vous exigiez alors un licenciement sans aucun motif afin de, je cite, « percevoir les ASSEDIC et profiter d'une formation de reconversion »

L'employeur fait ensuite mention de la dégradation de la situation avec la multiplication des arrêts de travail ajoutant « jamais vous ne m'avez fait part de vos soucis de santé et je m'étonne ici du caractère dépressif de votre maladie. M. [F] ayant reçu le 14 avril 2008 un texto de votre part évoquant une parotide ou une parotidite et pas de troubles d'ordre psychologique...'.

Dans un courriel en réponse du 2 juin la salariée affirmait que ses arrêts maladie avaient toujours été justifiés et bien consécutifs à son état de santé rappelant « je n'ai jamais fait l'objet d'aucun arrêt maladie avant cela, depuis que j'ai été embauchée en 2002, ce qui démontre si besoin est que mon état actuel résulte de la pression morale qui s'exerce sur moi pour me faire partir' Ensuite vous n'êtes pas sans ignorer (sic) que depuis mon embauche j'ai toujours travaillé à plein temps sans jamais compter les heures supplémentaires et que j'ai accompli mes taches avec conscience professionnelle et esprit d'équipe en tenant toujours le meilleur de moi-même' sans en compter les montants et sans avoir été rémunérée en rapport ' À ce sujet la pression morale exercée par M. [F] consécutive à ma demande d'un délai de réflexion avant de signer un contrat à temps partiel alors que je suis à temps plein' face à la pression morale et devant les affirmations de M. [F] suivant lesquelles le laboratoire serait dans une situation difficile juridiquement (il a fallu plusieurs années pour s'en rendre compte !) j'ai accepté de signer ledit contrat.

Depuis lors M. [F] a changé de comportement à mon égard n'ayant pas toléré ma contrariété devant ces pressions et le contenu de ce contrat. Ainsi, j'ai fait l'objet de réflexions désobligeantes à mes retours au laboratoire, je cite « j'espère que tu vas bien faire ton travail » j'espère que tu ne vas pas saboter le boulot »,  « je peux m'attendre à tout maintenant venant de toi » « de quoi tu es malade cette fois-ci ' » et « je suis le patron et tu es une employée » si tu n'es pas bien tu n'as qu'à démissionner».

Le 25 juillet son employeur adressait à Mme [W] [G] un courrier recommandé disant qu'elle n'avait repris son travail que le 15 juillet et sans justifier de son absence entre le 8et le 15 se plaignant également « de plus vous ne remplissez toujours pas les bordereaux de contrôle de la durée de travail », ce qui lui était déjà mentionné dans le mail du 26 mai 2008.

De l'ensemble de ces circonstances, la cour comprend qu'à tout le moins, depuis le début avril 2008, les relations se sont effectivement détériorées entre eux Mme [W] [G], M. [F] et le gérant de la Sarl TCA, la première enchaînant les arrêts maladie, les seconds se plaignant de la désorganisation de l'entreprise et doutant du bien-fondé de ces arrêts maladie.

Mme [W] [G] prétend avoir été pendant cette période la victime d'un harcèlement moral.

L'article L 1222-1 du code du travail dispose que 'le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. Par ailleurs l'article L1152-1 du même code précise qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel'.

Le juge doit appréhender les faits dans leur ensemble et rechercher s'ils permettent de présumer l'existence du harcèlement allégué.

Dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, la détérioration évidente des relations au plan personnel mais aussi professionnel entre M. [F] et Mme [W] [G] pendant cette période de quelques mois, étant rappelé en outre que la salariée a été absente la plupart du temps, ne permet toutefois pas de considérer comme établie la présomption d'un harcèlement moral, étant en outre relevé que la salariée ne rapporte aucun élément concret à l'appui de ses dires, de nature à établir des « agissements répétés ».

Cependant, la cour relevant que les deux parties sont d'accord pour situer le début de la détérioration des relations, au début de l'année 2008, c'est-à-dire au moment où l'employeur a voulu régulariser par un contrat écrit la prestation de Mme [W] [G], dans des conditions qui, comme il est indiqué plus haut, n'étaient pas conformes à la réalité à tout le moins quant à l'ancienneté et aux éléments de rémunération, dit que cette circonstance, à l'origine d'une dégradation rapide et accentuée des relations entre les parties justifiait une prise d'acte de rupture de la part de la salariée et aux torts de l'employeur, le

fait que la salariée aurait voulu la rupture de ce contrat de travail pour pouvoir se consacrer à ses enfants ou à d'autres activités pour le compte de la SARL Je Golf, n'étant pas établi.

Cette prise d'acte de rupture produit donc les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse

Compte tenu des circonstances de l'espèce, de l'ancienneté dans son emploi de la salariée, et du préjudice qu'elle établit avoir subi à la suite de celui-ci la cour fixe à 20 000€ la somme due en application de l'article L. 1235-3 du code du travail.

La prise d'acte de rupture étant justifiée, il sera fait droit à la demande d'indemnité compensatrice de préavis pour le montant sollicité et justifié, assorti de congés payés de 10 %. Il sera également fait droit pour le montant de 3906 € à l'indemnité conventionnelle de licenciement.

Sur le préjudice moral

Mme [W] [G] ne rapporte pas la preuve d'un préjudice moral distinct des éléments de préjudice indemnisés au titre du licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Sur les rappels de salaire

La salariée conteste l'horaire mensuel de 130 heures, retenu par le contrat de travail du 8 février 2008 affirmant qu'en réalité elle travaillait à temps plein.

Le contrat de travail ayant été un contrat verbal de l'embauche jusqu'au mois de février 2008 la cour aurait la possibilité de le qualifier de contrat à temps plein.

Il s'agit toutefois d'une présomption simple qui peut être combattue.

Or en l'espèce le temps plein n'est pas établi, étant rappelé que chacun de ses bulletins de salaire depuis l'embauche c'est-à-dire pendant six ans, portait un horaire de 130 heures à quelques exceptions près, -deux en 2008 et deux en 2007-, où le bulletin de salaire fait mentions de 12h supplémentaires à 25 %.

D'autre part, la salariée n'a formé pendant toute cette période aucune réclamation rapportée à la procédure concernant ses horaires de travail et les attestations qu'elle produit émanant de trois proches, ses parents, sa soeur, ou son ami avec qui elle est engagée au sein de la Sarl TCA Je golf, d'une valeur probante limitée compte tenu des liens personnel existant entre les témoins et la salariée, sont insuffisantes à établir la réalité de ce travail à temps plein, même s'il est bien vraisemblable que la salariée, seule céramiste dans le laboratoire, a dû accomplir, dans un certain nombre de cas, des heures supplémentaires au-delà des 130 heures par mois, voire au-delà des 142 heures portées à quatre reprises sur les bulletins de salaire.

La salariée n'établit donc pas qu'elle travaillait à temps complet, la cour relevant que d'ailleurs Mme [W] [G] ne demande pas la requalification de son contrat de travail verbal en temps complet. La salariée qui se borne à affirmer exécuter en réalité 151,67 heures par mois, ne produit par ailleurs aucun décompte précis d'éventuelles heures supplémentaires qu'elle aurait exécutées.

Elle sera donc déboutée de sa demande de rappel de salaire

Sur la demande de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée

La salariée reproche à l'employeur d'avoir fait usage de documents personnels lui appartenant sans son consentement. Les conditions dans lesquelles ces documents sont parvenus entre les mains de l'employeur étant discutées, Mme [W] [G] sera déboutée de cette demande.

Sur les dépens et la demande de dommages et intérêts au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

La Sarl TCA qui succombe supportera la charge des dépens.

La Cour considère que, compte tenu des circonstances de l'espèce, il apparaît inéquitable de faire supporter par Mme [W] [G] la totalité des frais de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer. Il lui sera donc alloué, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 2500 euros, à ce titre pour l'ensemble de la procédure.

Décision de la Cour :

En conséquence, la Cour,

Infirme la décision du Conseil de prud'hommes

statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par Mme [W] [G] était bien-fondée et que cette rupture emporte les conséquences d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

Condamne la Sarl TCA à verser à Mme [W] [G] les sommes suivantes :

20 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, somme avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision :

* 3906 € d'indemnité de préavis, congés payés de 10 % en sus ;

* 3906 € indemnité conventionnelle de licenciement ;

sommes avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.

Déboute les parties de leurs demandes complémentaires ou contraires.

Condamne la Sarl TCA à régler à Mme [W] [G] la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure.

La condamne aux entiers dépens de l'instance.

LE GREFFIER,LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 11/07630
Date de la décision : 07/05/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°11/07630 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-05-07;11.07630 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award