Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 4
ARRÊT DU 20 MAI 2014
(n° 169 , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04799
Décision déférée à la Cour : Ordonnance rendue le 18 Février 2014 -par le Conseiller de la mise en état de la Cour d'Appel de PARIS - RG n° 12/18848
APPELANTE
LA SOCIÉTÉ CASTORAMA FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
Assistée de Me Richard RENAUDIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L003
INTIMÉE
LA SOCIÉTÉ NAUDET SAPINS DE NOËL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
[Localité 1]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS,
toque : K0065
Assistée de Me Sylvie FERNANDES BONNIVARD, substituant la SELARL BALLORIN SARCE BAUDRY, avocat au barreaud de PARIS, toque : K 65
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mai 2014 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise COCCHIELLO, Président, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Françoise COCCHIELLO, Président, rédacteur
Madame Valérie MICHEL-AMSELLEM, Conseiller,
Madame Claudette NICOLETIS, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Denise FINSAC
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Françoise COCCHIELLO, Président et par Madame Denise FINSAC, Greffier auquel la minute du présent arrêt lui a été remise par le magistrat signataire.
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Estimant être victime d'une rupture brutale des relations commerciales qu'elle entretenait avec la société Castorama, la société Naudet Sapins de Noël (société Naudet) a engagé, par acte du 19 décembre 2008, devant le tribunal de commerce de Nevers une procédure pour obtenir réparation de son préjudice.
Par jugement du 8 juillet 2009, le tribunal de commerce de Nevers, appliquant une clause attributive de juridiction, a renvoyé la cause devant le tribunal de commerce de Lille.
Par jugement du 3 mars 2011, le tribunal de commerce de Lille a :
- dit que la société Castorama France n'a commis aucune rupture brutale à l'égard de la société Naudet,
- débouté cette société de ses demandes,
- condamné la société Naudet à payer à la société Castorama France la somme de 5000 Euros au titre de l' indemnité pour frais irrépétibles,
- condamné la société Naudet aux entiers dépens.
Le 8 avril 2011, la société Naudet a interjeté appel du jugement devant la cour d'appel de Douai. Par arrêt du 8 avril 2011, cette cour a déclaré l'appel irrecevable.
La société Naudet a interjeté appel du jugement par déclaration du 19 octobre 2012 devant la cour d'appel de Paris.
Par ordonnance du 18 février 2014, le conseiller de la mise en état a déclaré l'appel de la société Naudet recevable, débouté la société Naudet de sa demande pour procédure abusive, condamné la société Castorama aux dépens de l'incident.
La société Castorama France a déféré cette ordonnance à la cour par requête du 4 mars 2014.
Par conclusions du 18 avril 2014, elle expose que la société Naudet ne pouvait, en application des dispositions transitoires applicables, interjeter appel devant la cour d'appel de Paris qui n'a pas de pouvoir pour connaître la demande de cette société en appel ; elle conclut en l'irrecevabilité de l'appel de la société Naudet, en sa condamnation à lui payer la somme de 3000 Euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et en tous dépens.
Par conclusions du 10 avril 2014, la société Naudet demande à la cour de débouter la société Castorama de sa fin de non-recevoir, déclarer son appel recevable, confirmer l'ordonnance déférée, condamner la société Castorama à lui verser la somme de 10 000 Euros à titre de dommages-intérêts pour comportement déloyal et abusif, celle de 10 000 Euros pour indemnité pour frais irrépétibles engagés et à supporter les entiers dépens qui seront recouvrés avec le bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile. Elle soutient essentiellement que la société Castorama ne peut se contredire sans déloyauté à son égard, que les décisions inconciliables des deux cours d'appel aboutiraient à un déni de justice, que l'application de la règle d'interprétation donnée par la cour de cassation la priverait d'un procès équitable en lui interdisant l'accès au juge dans un délai raisonnable.
SUR CE :
Considérant que la société Naudet fait la distinction entre les instances devant le premier juge et devant la cour pour relever que l'instance d'appel est soumise aux textes nouveaux de procédure, qu'elle soutient que l'article 8 du décret du 11 novembre 2009 n'exclut pas la compétence spéciale de la cour d'appel de Paris qui n'est pas la juridiction " primitivement saisie" et qu'une telle interprétation est conforme au principe de l'application immédiate de la loi de procédure nouvelle au jour du jugement ;
Mais considérant que la juridiction consulaire lilloise, désignée juridiction de renvoi par jugement du tribunal de commerce de Nevers, n'a pas été saisie en application des termes du décret du 11 novembre 2009 ; qu'il s'ensuit que les dispositions de l'article D 442-3 du Code de commerce ne sont pas applicables en l'espèce ; que d'ailleurs, l'article D 442-3 alinéa 2 du Code de commerce désigne comme juridiction d'appel la cour de Paris lorsque le jugement frappé d'appel émane d'une juridiction compétente en application de l'alinéa 1 de ce même texte ; qu'en outre, les dispositions transitoires de l'article 8 du décret qui précisent : ".... La juridiction primitivement saisie demeure compétente pour statuer sur les procédures introduites antérieurement à l'entrée ne vigueur du présent décret." ne distinguent pas les instances devant le premier juge et devant la cour d'appel, en usant du terme de " procédure" qu'il soumet à un régime procédural unique, celui de la loi en vigueur au moment de l'introduction de la demande en justice ;
Considérant que l'attitude déloyale de la société Castorama France qui se serait contredite au détriment de la société Naudet - que cette dernière n'établit d'ailleurs pas par les circonstances de fait et de droit qu'elle invoque - ne peut donner à la cour d'appel de Paris le pouvoir de statuer ; que de même, la violation du droit d'obtenir une décision dans des délais raisonnables ne peut non plus justifier le pouvoir de la cour de statuer ;
Considérant en outre que la société Naudet n'est pas privée du droit d'agir en justice par l'absence de pouvoir de la cour de Paris de connaître le litige qui l'oppose à la société Castorama, dès lors que, comme le remarque cette dernière, les voies de recours existent lors que deux juridictions rendent des décisions inconciliables ;
Considérant enfin que ces motifs excluent tout abus de la part de la société Castorama pour avoir soulevé cet incident et l'avoir ensuite déféré à la cour ;
PAR CES MOTIFS
Dit le déféré fondé,
Déclare irrecevable l'appel de la société Naudet du jugement du tribunal de commerce de Lille en date du 3 mars 2011,
Déboute la société Naudet de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
Dit n' y avoir lieu à indemnité pour frais irrépétibles au profit de la société Castorama,
Condamne la société Naudet Sapins de Noël aux entiers dépens qui seront recouvrés avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT