RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 1
ARRÊT DU 03 SEPTEMBRE 2014
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/00733
Décision déférée à la Cour : renvoi après cassation en date du 15 janvier 2013 par la cour de cassation de l'arrêt rendu le 6 septembre 2011 par la cour d'appel de Poitiers sur renvoi de cassation prononcé le 21 avril 2010 (rectifié par arrêt du 14 septembre 2010) par la cour de cassation contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2008 par la cour d'appel de Bordeaux suivant jugement rendu le 09 Janvier 2007 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX - RG n° 05/00029
APPELANTE
Madame [D] [K]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparante en personne, assistée de Me Jérôme BORZAKIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0242
INTIMES
Me [C] [E] (SELARL [C]), ès-qualités de liquidateur amiable de l'ASSOCIATION TRAMEMPLOI
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représenté par Me Christophe BIAIS, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me Elsa MATTHESS-MAURIAC, avocat au barreau de BORDEAUX, toque : 713
COMMUNAUTE URBAINE DE [Localité 2]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représentée par Me Cédric RAUX, avocat au barreau de BORDEAUX
CONSEIL GENERAL DE [Localité 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représenté par Me Bruno DE PRÉMARE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1176
CONSEIL REGIONAL D'[Localité 1]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Mirella ZILIOTTO, avocat au barreau de BORDEAUX
UNION DES INDUSTRIES ET METIERS DE LA METALLURGIE [Localité 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée par Me Christophe BIAIS, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me Elsa MATTHESS-MAURIAC, avocat au barreau de BORDEAUX, toque : 713
FEDERATION REGIONALE DES TRAVAUX PUBLICS D'[Localité 1]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
représentée par Me Christophe BIAIS, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me Elsa MATTHESS-MAURIAC, avocat au barreau de BORDEAUX, toque : 713
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Mai 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Irène CARBONNIER, Présidente
Madame Véronique SLOVE, Conseillère
Madame Isabelle DELAQUYS, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Laetitia LE COQ, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, conformément à l'avis donné après les débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme CARBONNIER, Présidente, et par Madame Laetitia LE COQ, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Vu le jugement du 9 janvier 2007 par lequel le conseil de prudhommes de Bordeaux, section encadrement, a notamment :
- dit que l'employeur de [D] [K] était l'Association TRAMEMPLOI et retenu sa compétence pour statuer sur ce litige,
- mis hors de cause la Communauté urbaine de [Localité 2] (CUB), le Conseil général de [Localité 5], le Conseil régional d'[Localité 1], l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie [Localité 4] (UIMM) et la Fédération Régionale des Travaux Publics d'[Localité 1] (FRTPA),
- reconnu la réalité du motif économique du licenciement à raison de la dissolution de l'association qui ne bénéficiait plus d'aucun budget de fonctionnement et débouté Mme [K] de toutes ses demandes,
Vu l'appel interjeté par [D] [K] et l'arrêt rendu le 30 septembre 2008 par la cour d'appel de Bordeaux qui a
- donné acte à cette dernière de son désistement à l'égard de l'UIMM,
- confirmé le jugement sur la compétence juridictionnelle et la mise hors de cause de la CUB, du Conseil général et du Conseil régional,
- réformé la décision pour le surplus et condamné la société Christophe Mandon ès qualités de liquidateur amiable de TRAMEMPLOI, faute de justifier de difficultés économiques ayant présidé à la décision de dissolution anticipée de l'association, à verser à la salariée une indemnité de 40 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu l'arrêt prononcé le 21 avril 2010 (rectifié par arrêt du 14 septembre 2010) par la cour de cassation saisie du pourvoi du liquidateur de TRAMEMPLOI, ayant cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé pour violation de l'article L. 1233-3 du code du travail,
Vu l'arrêt rendu le 6 septembre 2011 sur renvoi de cassation par la cour d'appel de Poitiers qui, après avoir dit que la mise hors de cause de la CUB, du conseil général, du conseil régional, de l'UIMM et de la FRTPA avait été définitivement jugée, a confirmé le jugement prudhommal de débouté de Mme [K] de ses demandes dirigées contre le liquidateur de TRAMEMPLOI, en retenant que le licenciement de la salariée pour motif économique était fondé sur une cause économique réelle et sérieuse, la dissolution de l'association, laquelle ne procédait pas d'une faute ou d'une légèreté blâmable,
Vu l'arrêt rendu le 15 janvier 2013 par la cour de cassation statuant sur le pourvoi de Mme [D] [K], ayant cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers pour avoir dit, en violation de l'article 624 du code de procédure civile, qu'il n'y avait lieu de convoquer devant la cour de renvoi la CUB, le conseil général, le conseil régional, l'UIMM et la FRTPA alors que la cassation d'une décision « dans toutes ses dispositions » l'investit de la connaissance de l'entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit et ne laisse subsister aucun chef du dispositif de cette décision, concernerait-il des personnes n'ayant pas été parties à l'instance de cassation ou n'y ayant plus figuré par suite d'un désistement partiel des demandeurs au cours de cette instance,
Vu les conclusions développées à l'audience de renvoi pour le compte de Mme [D] [K] aux termes desquelles celle-ci demande de
- constater la qualité de co-employeurs avec TRAMEMPLOI de la CUB et de l'ensemble des sociétés et structures adhérentes à l'association,
- constater la légèreté blâmable avec laquelle les co-employeurs ont procédé à la dissolution de l'association,
- constater que cette décision n'a été inspirée par aucun motif de sauvegarde de compétitivité ou de difficultés économiques et financières mais dans le seul but de réaliser des économies,
- dire en conséquence le licenciement prononcé par l'association TRAMEMPLOI dénué de cause réelle et sérieuse,
- condamner in solidum la CUB et l'ensemble des co-employeurs, ainsi que l'association prise en la personne de son liquidateur à lui verser la somme de 300 000 euros de dommages et intérêts, outre les intérêts légaux avec application de la clause d'anatocisme à compter de l'arrêt,
- condamner les mêmes au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions de la SELARL Christophe Mandon, liquidateur de l'association TRAMEMPLOI, tendant à :
- constater la dissolution de l'association à effet du 18 juin 2004, date à laquelle sa mission était terminée, la parfaite régularité de la procédure de licenciement et le caractère réel et sérieux de son motif économique,
- débouter Mme [K] de toutes ses demandes,
- la condamner à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de ses frais de procédure,
Vu les conclusions prises pour la CUB qui demande de :
- juger que l'association TRAMEMPLOI était seul employeur de Mme [K], que la Communauté n'a donc pas la qualité de co-employeur et « n'a commis aucune faute détachable de ses fonctions de membre de l'association »,
- débouter en conséquence l'appelante de toutes ses demandes et confirmer le jugement du conseil de prudhommes,
- se déclarer, à titre subsidiaire, incompétente pour apprécier sa responsabilité,
- juger, à titre infiniment subsidiaire, que le licenciement pour cause économique repose sur une cause réelle et sérieuse et qu'elle n'a eu aucune légèreté blâmable dans la rupture du contrat de travail de la salariée,
- en conséquence, débouter cette dernière de toutes ses demandes,
- limiter, à titre très infiniment subsidiaire, l'indemnisation de Mme [K] à une somme au plus égale à six mois de salaire,
- en tout état de cause condamner Mme [K] à lui payer la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions du Conseil général de [Localité 5] aux fins de :
- juger que l'association TRAMEMPLOI était seul employeur de Mme [K], que le Conseil Général n'a donc pas la qualité de co-employeur et « n'a commis aucune faute détachable de ses fonctions de membre de l'association »,
- débouter en conséquence l'appelante de toutes ses demandes et confirmer le jugement du conseil de prudhommes,
- juger, à titre subsidiaire, que le licenciement pour cause économique repose sur une cause réelle et sérieuse et qu'il n'a eu aucune légèreté blâmable dans la rupture du contrat de travail de la salariée,
- en conséquence, débouter cette dernière de toutes ses demandes et confirmer le jugement prudhommal,
- en toute hypothèse, condamner Mme [K] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions du Conseil régional d'[Localité 1] tendant à voir juger qu'il n'a pas la qualité de co-employeur de Mme [D] [K], confirmer le jugement du conseil de prudhommes, débouter l'appelante de toutes ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions de l'UIMM par lesquelles celle-ci demande de constater qu'elle n'a pas la qualité de co-employeur, « se déclarer incompétent en l'absence de contrat de travail » entre elle et la salariée et renvoyer celle-ci « à mieux se pourvoir notamment devant le tribunal de grande instance », subsidiairement confirmer le jugement du conseil de prudhommes et, en conséquence, la mettre hors de cause, en tout état de cause condamner l'appelante à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions de la FRTPA par lesquelles celle-ci demande de constater qu'elle n'a pas la qualité de co-employeur, « se déclarer incompétent en l'absence de contrat de travail » entre elle et la salariée et renvoyer celle-ci « à mieux se pourvoir notamment devant le tribunal de grande instance », subsidiairement confirmer le jugement du conseil de prudhommes et, en conséquence, la mettre hors de cause, en tout état de cause condamner l'appelante à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Considérant qu'à l'occasion de la réalisation des travaux du tramway bordelais, la CUB, maître d'ouvrage, a décidé de mettre en place un dispositif d'accompagnement économique et social (AES) permettant de maximiser l'impact du chantier sur l'emploi local et d'en suivre les retombées ; que c'est [S] [J], l'expert indépendant « en développement territorial » qu'elle avait désigné par lettre de commande du 25 mai 1999, qui a préconisé de charger un coordinateur spécialisé de mener à bien cette mission dans le cadre d'une association régie par la loi du 1er juillet 1901, solution ayant reçu l'agrément de la CUB comme pouvant notamment faciliter le versement des subventions européennes ;
Que [S] [J] a écrit le 6 décembre 1999 à [O] [U], président de la Mission Tramway de la CUB, un courrier lui demandant de donner rapidement son accord sur le choix du candidat au poste de « coordonnateur TRAMEMPLOI » parmi ceux qu'il avait sélectionnés avec une préférence pour le profil de Mme [K] qui, résidant à [Localité 6], devait être informée à temps pour pouvoir assister à une réunion prévue le 2 février 2000 à [Localité 2] ;
Que [O] [U] a adressé en sa qualité de chef de projet le 2 mai 2000 aux partenaires de la CUB une convocation à la réunion constitutive de l'association ;
Que les statuts de l'association TRAMEMPLOI, ainsi constituée le 13 juin 2000 à l'initiative de la CUB, et composée des représentants des personnes morales adhérentes, prévoyaient qu'elle soit composée de deux collèges, l'un comprenant les membres fondateurs ' CUB, conseil régional, conseil général, rectorat, ANPE, AFPA, Fédération Régionale des TP, Fédération de la Metallurgie ' lesquels formaient ensemble le conseil d'administration, l'autre les adhérents postérieurs dont l'adhésion était subordonnée à l'accord du conseil d'administration ; qu'ils précisaient initialement que la mission de l'association s'achèverait à la fin de la deuxième tranche des travaux ; qu'ils disposaient également que les moyens financiers de l'association seraient composés, en particulier, des subventions, dons ou cotisations et dotations supplémentaires des membres, ainsi que de toutes autres contributions perçues dans le cadre de conventions avec des partenaires, et qu'il appartenait au conseil d'administration de fixer le montant de la cotisation de chaque membre ; qu'il était enfin prévu que l'association recrute un coordonateur de l'AES ;
Considérant que Mme [D] [K], fonctionnaire en poste dans l'académie de [Localité 3] jusqu'à sa radiation des cadres de l'éducation nationale par arrêté du 21 octobre 1999, a été contactée par [S] [J] pour être embauchée, suivant contrat à durée déterminée du 1er mars 2000 signé dans le cadre d'une commande publique de la CUB, maître d'ouvrage du chantier, comme chargée de mission - coordinatrice pour l'Association Compétitivité et Emploi (ACE) responsable de l'analyse préliminaire et de la mise en place d'une méthodologie de travail pour le suivi du chantier du tramway de [Localité 2], puis, suivant contrat à durée indéterminée du 21 juin 2000 passé avec l'association TRAMEMPLOI en qualité de « coordinatrice » pour mettre en place un dispositif d'Accompagnement Economique et Social (AES) étudiant l'impact des travaux du tramway sur la commune de [Localité 2] ; que la coordinatrice exerçait au siège de l'association, [Adresse 6], ses missions qui étaient principalement de participer aux phases de management de travaux aux côtés du maître d'oeuvre et des entreprises et de faire le lien entre ces dernières et les collectivités locales pour toutes les questions concernant l'emploi ; qu'en contrepartie de son travail, les appointements annuels réels bruts de la salariée qui s'engageait à respecter les instructions pourvant lui être données par TRAMEMPLOI, ainsi que les règles relatives à l'organisation et au fonctionnement internes de l'association, s'élevaient à 360 000 francs pour 35 heures hebdomadaires ;
Considérant que l'expert [J] a écrit dès le 22 septembre 2000 à [O] [U] au sujet des volets 3 et 4 de la mission que lui avait confiée la CUB qu'une fois juridiquement constituée, l'association TRAMEMPLOI, si elle avait assurément fourni des prestations constituant un bon support technique au département Communication de la Mission Tramway de la communauté, manquait « dérisoirement de fonds et de personnel » et ne pouvait « revendiquer des responsabilités sans pouvoir disposer des moyens de son mandat. La survie de la mission de Mme [K] est en jeu » ; qu'il a cependant conseillé à son mandant de maintenir l'association TRAMEMPLOI pour, malgré les difficultés dues aux contestations et affrontements autour des procédures de repérage des offres et d'organisation des sélections des candidatures et des formations, retrouver la cohérence entre l'action des services publics et celle des acteurs privés ;
Que, le 12 novembre 2003, l'association TRAMEMPLOI s'est de même interrogée lors d'une réunion du conseil d'administration sur le sort des salariés à reclasser sans indemnité ou à indemniser sans reclassement en cas de dissolution de l'association ; que, suivant un courrier du 21 novembre suivant, le cabinet d'expert comptable [L] a informé le président de l'association, [I] [Z], de ce que, dans l'hypothèse où Mme [K] invoquerait des documents à caractère contractuel « pour la durée de vie de l'association, c'est-à-dire jusqu'à la fin de la deuxième tranche du tramway, contrairement au contrat signé de votre main qui, lui, est bien à durée indéterminée, le montant de l'indemnité plus charges sociales hors dommages et intérêts et frais de procédure dépasse 360 000 euros » ;
Que, suivant procès-verbal du 26 février 2004, le conseil d'administration de TRAMEMPLOI a adopté à l'unanimité, sur proposition de son président, une modification des statuts consistant à avancer le terme de son activité à la fin de la première tranche et au plus tard le 31 décembre 2004 ;
Que, le 18 juin 2004, une assemblée générale extraordinaire de TRAMEMPLOI a ratifié cette délibération à la demande du président [Z], y représentant la CUB, en faisant valoir que « Les collectivités ont estimé que la mission de TE se termine, que sa mission de mise en relation du personnel avec les entreprises du chantier avait été bien accomplie. Le personnel étant formé, il sera disponible pour la seconde phase » ; qu'elle a décidé de sa dissolution pour le 31 décembre suivant, à l'issue de la première tranche de travaux, et de la nomination concomitante d'un liquidateur ; que, si les deux autres salariées ont pu être reclassées, Mme [K] a été licenciée pour motif économique suivant lettre recommandée du 28 octobre 2004 au motif de la suppression de son poste à la suite de la dissolution de l'association une fois sa mission accomplie et de l'impossibilité de la reclasser ;
Considérant, sur la qualité d'employeur, que celui-ci est la personne pour le compte de qui le travailleur accomplit pendant un certain temps, en sa faveur et sous sa direction, des prestations en contrepartie desquelles il perçoit une rémunération ;
Considérant que si, en l'espèce, comme l'ont relevé les premiers juges, le contrat de travail et le certificat de fin de contrat de Mme [K] ont été signés par TRAMEMPLOI en sa qualité d'employeur, un certain nombre d'éléments de la procédure manifestent qu'il existait une unité de direction de l'association sous la conduite de la CUB, que les décisions prises par celle-ci à son seul profit privaient l'association de tout pouvoir effectif, que les choix stratégiques et de gestion de l'association étaient décidés par la collectivité territoriale, laquelle assurait également la gestion des ressources humaines de l'association et avait elle-même imposé la cessation d'activité en votant la modification des statuts de l'association ;
Que Mme [K] a tout d'abord produit un écrit de [S] [J] à [O] [U] du 20 mars 2000 s'inquiétant du choix des personnalités pour les postes statutaires de l'association ; que, de fait, le bureau de TRAMEMPLOI aurait-il affiché une composition diversifiée avec M. [I] [Z], imprimeur, en qualité de président, M. [A] [F], administrateur territorial, en qualité de vice-président, MM. [I] [R], ingénieur, et [P] [G], PDG, respectivement secrétaire général et secrétaire général adjoint, MM. [X] [T], cadre SNCF, et [V] [N], chef d'entreprise, comme trésorier et trésorier adjoint, il n'est pas sans importance de relever que les postes de président, secrétaire général et trésorier de l'association ont été attribués à des membres éminents de la CUB qu'ils ont représentée au sein des instances délibératives de TRAMEMPLOI, notamment les 26 février et 18 juin 2004, tout en participant en tant que représentants à la CUB aux délibérations de cette collectivité relatives au sort de TRAMEMPLOI ;
Que l'appelante a également versé, outre la délibération de la CUB en date du 29 juin 2000 actant son adhésion à l'association TRAMEMPLOI, la convention de financement passée par cette dernière avec la Communauté Urbaine à concurrence de 300 000 F pour l'année 2000 ' 240 000 F dans le mois de la signature et le solde à réception de la « charte de l'AES » et du tableau de bord ' à mettre en regard d'une contribution de l'ensemble des membres fondateurs fixée à 710 000 F selon le budget prévisionnel, second marqueur de la forte implication de la CUB dans l'association ;
Que l'implication déterminante de la CUB et sa collaboration décisive avec l'association ressortent encore de nombres de documents produits par l'appelante aux débats, tels que :
- la télécopie manuscrite adressée dès le 17 avril 2000 par l'expert indépendant de la CUB à la salariée qu'il venait de recruter pour la future association,
- la télécopie du 18 janvier 2002 par laquelle la responsable communication de la mission Tramway de la CUB, [B] [Y], invite la responsable de TRAMEMPLOI à convier des journalistes à son « opération emploi » auprès des entreprises,
- le courrier du 4 avril 2002 aux termes duquel [I] [Z] ayant appris qu'un entrepreneur avait fait part au cours d'une réunion à la CUB de ses difficultés pour embaucher du personnel qualifié afin de répondre à ses besoins sur l'ensemble de ses chantiers, l'informe de la possibilité qu'il a de saisir Mme [K] pour mettre en place une nouvelle opération de recrutement,
- la télécopie de transmision du courrier préparé par cette dernière à [O] [U], chef de la mission Tramway à la CUB, qui répond à sa demande d'avis et de remarques, avant signature par le président de l'association,
- la transmission du rapport d'audit définitif de TRAMEMPLOI du 22 octobre 2002 demandé par la CUB avec invitation de M. [Z] à la coordinatrice de l'association de mettre ses préconisations en oeuvre,
- la télécopie du cabinet du maire de [Localité 7], membre de la CUB, datée du 27 novembre 2003 à 10 heures 29 aux termes de laquelle celui-ci confirme à Mme [K] que l'assemblée générale de TRAMEMPLOI prévue le vendredi 28 novembre 2003 à 14 heures 30 est reportée à une date qui lui sera communiquée ultérieurement,
- le courrier de [X] [Q], directeur général de la mission Tramway à la CUB, à M. [Z] en date du 19 décembre 2003 sollicitant la production d'un budget prévisionnel 2004 en relevant que, l'association n'étant pas dissoute au 31 décembre 2003, « il s'en suit son prolongement pour une année selon des modalitéés dont nous devrons convenir très prochainement »,
- deux courriers du chef du projet Tramway de la CUB en date du 24 février et 31 mars 2004, l'un réclamant à TRAMEMPLOI, avec une certaine urgence, des pièces déjà sollicitées, bilan de l'activité de l'association, CV et bulletins de salaires des employés, comptes rendus du conseil d'administration, l'autre demandant à la coordinatrice le contenu d'une « procédure extra-comptable » qu'elle avait élaborée à l'occasion de son dossier FSE et la confirmation qu'il pouvait tenir ce dossier pour clos ;
- les procès-verbaux des 12 novembre 2003 et 26 février 2004 d'où il résulte que c'est sur la proposition du président [Z], représentant de la CUB, que le conseil d'administration de TRAMEMPLOI a adopté à l'unanimité, la modification des statuts ayant consisté à avancer le terme de son activité à la fin de la première tranche et au plus tard le 31 décembre 2004 et permis à l'association d'organiser le licenciement économique de Mme [K] ;
Que, bien plus, il résulte d'autres pièces régulièrement communiquées par Mme [K], tel son bulletin de paie du 21 au 30 juin 2000 et sa déclaration de rémunérations du 21 juin au 30 décembre 2000, que l'employeur mentionné est l'« association TRAMEMPLOI, Mission Tramway, Communauté Urbaine de [Localité 2] » ; que, de même, l'attestation ASSEDIC délivrée le 31 octobre 2014 par le mandataire liquidateur de l'association et le certificat de travail daté du 30 janvier 2005 indiquent que l'employeur de Mme [K], l'association TRAMEMPLOI, est domicilié à la Mission Tramway à [Localité 2] Bastide ; qu'il est certes indiscutable que, par courrier du 3 avril 2006, la CUB a reproché à son cabinet d'expert comptable d'avoir établi les bulletins de paie et autres documents produits, ainsi qu'un certificat de travail et une attestation destinée à l'ASSEDIC transmis au liquidateur de l'association, en mentionnant la mission Tramway et/ou la communauté urbaine de [Localité 2] comme employeur de Mme [K] ; qu'il ne suffit cependant pas à la CUB de manifester sa surprise, le procès venu, pour annihiler cet indice d'une unité de direction sous sa conduite ;
Qu'en l'état de l'ensemble de ces éléments illustrant les critiques des rapports d'audit figurant à la procédure, il apparaît qu'il existait entre TRAMEMPLOI et, non pas chacune des collectivités territoriales intimées, mais la CUB, maître d'ouvrage, une confusion d'activités, d'intérêts et de direction ayant conduit cette dernière à s'immiscer directement dans la gestion de l'association et dans la direction de son personnel ; qu'il convient dès lors d'infirmer le jugement prudhommal et de conclure à la qualité de co-employeurs de la CUB et de l'association TRAMEMPLOI à l'égard de Mme [K] ;
Qu'alors qu'il doit être donné acte à l'appelante de son désistement d'action à l'égard de l'UIMM, il y a lieu de mettre les autres intimés hors de cause ;
Considérant, sur l'incompétence de la juridiction judiciaire soulevée par la CUB, que le juge judiciaire est seul compétent pour statuer sur le litige né de la rupture du contrat de travail de Mme [K] dès lors que celle-ci n'a jamais été liée à ses employeurs par un rapport de droit public et que ne sont en cause que des relations de droit privé ;
Considérant que la lettre de licenciement du 28 octobre 2004, dont les termes fixent les limites du litige, est rédigée dans les termes suivants :
« Je vous indique que l'association Tramemploi, par décision de son assemblée générale extraordinaire du 18 juin 2004 a prononcé la dissolution pour avoir constaté l'accomplissement de sa mission et que j'ai été désigné en qualité de liquidateur amiable.
« Compte tenu de cette décision, de la suppression de votre poste et de ce qu'il n'existe aucune possibilité de reclassement du personnel, je suis contraint de vous licencier pour motif économique à réception de la présente » ;
qu'il a été proposé par ce courrier à la salariée un dispositif PARE et une priorité de ré-embauchage ;
Considérant, sur le caractère sérieux du motif économique du licenciement, que, sauf lorsqu'elle procède d'une faute ou d'une légèreté blâmable, la cessation totale de l'activité de l'employeur constitue une cause économique de licenciement ;
Considérant que, si le contrat de travail de Mme [K] ne précise pas la date de fin du chantier du Tramway, il ressort en particulier des procès-verbaux du conseil d'administration du 12 novembre 2003 et de l'assemblée générale du 18 juin 2004 que la mission de la salariée devait initialement s'effectuer sur toute la durée du chantier de construction du tramway ; que le tableau de bord édité le 26 avril 2004 à l'en-tête de la CUB mission Tramway fait état d'une date de commencement des travaux début 2000 et d'une date de fin de travaux en avril 2005, la première phase étant terminée avec la mise en service des lignes A, B et C à la date du 28 février 2004 et la seconde ayant démarré au mois de mai suivant ;
Que le bilan d'activité du 1er semestre 2004 de la CUB révèle que celle-ci a mis en place, pour le commencement de la deuxième phase de travaux, une action nécessaire de sensibilisation sur l'emploi, axée sur le personnel qualifié, auprès et en amont de l'intervention des entreprises concernées et des sous-traitants ;
Que, lors de sa séance du 4 octobre 2004 présidée par M. [Z], la Commission tramway de la CUB a donné, sur le rapport de sa Mission tramway, un avis favorable à la signature de marchés concernant la « construction du tramway 2ème phase » ainsi qu'à l'attribution d'un financement complémentaire de 116 800 euros afin de permettre à Me [C] de solder la liquidation de l'association TRAMEMPLOI ; que M. [Z], ès qualités de vice-président de la Mission tramway a préparé, en vue de la séance du 19 octobre 2004 de la Commission tramway de la CUB un projet de délibération tendant à décider de l'attribution de cette somme ;
Qu'il apparaît de ces éléments que la mission de l'association TRAMEMPLOI n'était pas totalement accomplie à la date de sa dissolution, ayant été, au moins en partie, reprise par la mission Tramway de la CUB ;
Considérant, en revanche, que, plusieurs audits ayant été commandés par le Directeur général des services de la CUB à son auditeur interne, le rapport du 22 octobre 2002 de fin de mission d'audit sur les causes de la situation financière de l'association TRAMEMPLOI relève déjà que l'association présentait une situation financière tendue au 31 décembre 2001, montre qu'en dépit du fait qu'aucun dérapage des dépenses par rapport au budget total n'a été constaté, le conseil d'administration a voté un budget 2002 imprudent, surévaluant certaines recettes telles que la participation de la Fédération de la Métallurgie qui n'avait pas pris d'engagement ou celle du Fonds Social Européen (FSE) dont elle ne maîtrisait pas suffisamment les règles d'attribution, retient qu'elle n'a ni fixé le montant des cotisations des membres, ni créé le second collège statutaire qui aurait permis d'obtenir des recettes complémentaires ; qu'en conclusion de ses recommandations au conseil d'administration, l'auditeur observe qu'à défaut de décisions suffisantes pour améliorer le niveau des recettes rattachables à l'exercice du budget 2002 et d'un budget 2003 sincère et prudent donnant une certitude raisonnable de redressement, il serait de la responsabilité des administrateurs de s'interroger d'ici quelques mois sur la réduction de la masse salariale, les autres dépenses ne pouvant être que partiellement comprimées sans remettre en question l'action même de l'association ; que, le 4 novembre 2002, Mme [K] a fait valoir ès qualités les nombreuses relances qu'elle avait en vain faites pour obtenir la participation de la Fédération de la Métallurgie, le rejet à deux reprises par le conseil d'administration de la demande qu'elle avait faite d'ouvrir le 2nd collège aux entreprises et que la subvention du FSE, accordée pour la mise en place de l'association exclusivement, avait été étalée sur deux ans ; que ce rapport transmis le 10 décembre 2002 par la direction générale de la CUB au président de l'association TRAMEMPLOI a été adressé par celui-ci à la coordinatrice à fin de mettre les recommandations en oeuvre ;
Que le rapport des frais généraux de TRAMEMPLOI pour 2003 note à la date du 27 mai 2004 que les mesures d'urgence recommandées par le précédent audit ont été réalisées pour l'essentiel mais que, d'une part, l'association n'a pas trouvé les subventions qu'elle escomptait, qu'il s'agisse de celle de la Fédération de la Métallurgie ou de celle du FSE, d'autre part, son autonomie de gestion n'a pas été renforcée notamment par la modification du contrat de travail de la coordinatrice et une diminution du recours à l'expert-comptable ;
Qu'il s'établit ainsi de ces rapports que le conseil d'administration de l'association ne s'est pas soucié du « volet recettes » de l'association dont ilavait connu la situation avant même le 22 novembre 2002 ;
Considérant qu'en l'état de ces éléments, dont il ressort que si TRAMEMPLOI a été créée à l'initiative de la CUB comme étant le meilleur moyen pour celle-ci de recueillir les fonds européens attendus pour financer l'accompagnement économique et social du chantier du tramway, c'est en réponse aux inquiétudes suscitées dès 2002 par le manque de recettes, comme aux interrogations sur le maintien de cette mission ou sa possible intégration dans les services communautaires, qu'a été prise fin 2003, alors qu'aucun dérapage de ses dépenses n'était constaté, la décision de cette collectivité de mettre un terme à l'association à la fin de la première phase ;
Qu'en dépit du montant de sa participation au financement de TRAMEMPLOI et de sa forte participation à ses instances dirigeantes, et alors qu'il appartenait au conseil d'administration de l'association de fixer le montant de la cotisation de chaque membre, cette instance, dont le président, le vice-président, le secrétaire général et le trésorier siégeaient à la communauté urbaine, n'a à aucun moment cherché à fixer et recouvrer les cotisations des autres membres ; qu'il est démontré par l'absence de réponse aux rapports d'audit préconisant la recherche de nouveaux financements et l'élargissement par avenant des missions prévues par le contrat de travail de la coordinatrice que la CUB a fait le choix de mettre un terme, non à la mission d'accompagnement économique et social, mais à sa mise en oeuvre par TRAMEMPLOI à la fin de la première phase et, partant, engagé l'association à opter pour sa dissolution anticipée ;
Que, ce faisant, l'employeur, qui a en outre exécuté le contrat de travail de la salariée de mauvaise foi puisqu'une donnée essentielle sur la durée prévisible du contrat a été modifiée unilatéralement, a agi avec une légèreté et une imprudence d'autant plus blâmables qu'il avait été mis en garde à plusieurs reprises sur la viabilité de l'association faute de rechercher et d'obtenir les financements ' cotisations ou subventions ' lui permettant de mener son action à bien ;
Considérant que l'ensemble de ces considérations permet de qualifier le licenciement économique de Mme [K] comme dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Qu'il est incontestable que, de ce seul fait, Mme [K] a subi un préjudice qui doit être évalué, au regard de son âge et de ses difficultés à retrouver un nouvel emploi à la date de son licenciement, à 50 000 euros, somme au paiement de laquelle la CUB et le liquidateur de TRAMEMPLOI tenus pour co-employeurs doivent être condamnés in solidum, outre les intérêts légaux à compter de la demande ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 1154 du code civil et d'ordonner la capitalisation des intérêts dus sur le montant de la condamnation au profit de la salariée qui en a judiciairement formée la demande ;
Considérant que l'équité commande de condamner la CUB et la société TRAMEMPLOI au paiement à Mme [K] de la somme de 5 000 euros pour l'ensemble de ses frais de procédure ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement déféré sauf sur la mise hors de cause du Conseil général de [Localité 5], du Conseil régional d'[Localité 1], de l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie [Localité 4] et de la Fédération Régionale des Travaux Publics d'[Localité 1],
Dit que le licenciement de Mme [D] [K] est dénué de toute cause réelle et sérieuse,
Condamne in solidum la CUB et l'association TRAMEMPLOI au paiement à Mme [K] de la somme de 50 000 euros de dommages et intérêts, outre les intérêts légaux dus à compter de la demande et capitalisés,
Condamne la CUB et l'association TRAMEMPLOI en tous les dépens de première instance et d'appel et à verser à Mme [K] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs conclusions autres ou contraires.
LE GREFFIERLE PRESIDENT