Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2014
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/15015
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/08185
APPELANT
Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] représenté par la société SULLY GESTION SARL, ayant son siège social
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Caroline MARCEL de la SELARL CAROLINE MARCEL ET ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0418
assisté de Me Farouze ISSAD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2017
INTIMÉE
Société GALIAN, auparavant dénommée CAISSE DE GARANTIE DE L'IMMOBILIER - CGAIM, ayant son siège social
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Me Jean-François LOUIS de la SCP SOUCHON CATTE LOUIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0452
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Juin 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Dominique DOS REIS, Président, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Président
Madame Denise JAFFUEL, Conseiller
Madame Claudine ROYER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier présent lors du prononcé.
***
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] a été administré par la société Gescopro, garanti par la société CGAIM (ex FNAIM), à compter de l'assemblée générale du 12 juin 2002. A la fin de l'année 2006, la société Gescopro a cédé son portefeuille d'administrateur de biens à la société IBS dans des conditions ignorées. Le 22 mars 2007, une assemblée générale des copropriétaires a désigné la société Lamy agence le Pré en qualité de syndic pour succéder à la société Gescopro.
Selon lettre recommandée avec avis de réception du 13 février 2007, le syndicat des copropriétaires a déclaré à la société CGAIM une créance provisionnelle de 121.658 € puis, par une seconde lettre du 6 novembre 2009, une créance arrêtée à un montant de 60.445,20 €, que la société CGAIM a refusé de régler.
La société Gescopro a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire du tribunal de commerce de Versailles du 23 août 2007 ; la société IBS a été mise également en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris du 8 novembre 2007.
C'est dans ces conditions que, suivant acte extra-judiciaire du 1er juin 2010, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] a assigné la société CGAIM à l'effet de la voir condamner au paiement de la somme de 60.455,20 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 février 2007.
Par jugement du 27 juin 2012, le tribunal de grande instance de Paris a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes et l'a condamné à payer à la société CGAIM une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] a relevé appel de ce jugement dont il poursuit l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 18 février 2013, de :
au visa des articles 55 du décret du 17 mars 1967, 39, alinéa 2, 44, alinéa 3 et 46 du décret du 20 juillet 1972,
- dire que seule la société Gescopro, garantie par la société CGAIM, a été syndic de l'immeuble jusqu'au 22 mars 2007, date à laquelle elle a été remplacée par la société Lamy,
- dire que la garantie de la société CGAIM a cessé le 10 février 2007,
- au visa de l'article 9 du code de procédure civile, dire que les conventions qui auraient été passées entre la société Gescopro et la société IBS ne sont pas justifiées et que si elles lui sont inopposables, elles le sont également à la société CGAIM,
- condamner la société CGAIM à lui payer la somme de 44.190 € majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du conseil syndical du 13 février 2007 et de la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
- subsidiairement, désigner un expert à l'effet d'établir le décompte des sommes dues pour non-représentation de fonds au 13 février 2007, date de la cessation de garantie, ainsi que le montant des sommes détournées à son préjudice,
- condamner la société CGAIM au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
La société Galian, nouvelle dénomination de la société CGAIM, prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 19 mai 2014, de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- constater que sa garantie ne peut être mise en 'uvre qu'à raison de défaut de restitution de fonds mandants qui seraient imputables à la société Gescopro et dont l'origine serait antérieure au 10 février 2007, date de cessation de sa garantie,
- constater que le syndicat des copropriétaires ne justifie d'aucun défaut de restitution de fonds mandants imputables à la société Gescopro, dont l'origine serait antérieure à cette date,
- débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes,
- le condamner au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
L'ordonnance de clôture ayant été prononcée le 21 mai 2014, le syndicat des copropriétaires conclut, par écritures du 10 juin 2014, au rejet des conclusions de la société Galian signifiées le 19 mai 2014 à 19 h 16, comme violant le principe du contradictoire, du fait de leur proximité avec l'ordonnance de clôture.
La société Galian s'oppose à ce rejet en faisant valoir que le syndicat des copropriétaires avait tout loisir de solliciter le report de l'ordonnance de clôture en temps utile, soit à une date antérieure à l'audience de plaidoiries du 10 juin suivant, pour répondre à ces écritures, ce qu'il n'a pas fait.
CECI ETANT EXPOSE, LA COUR
Sur l'incident de procédure
Le syndicat des copropriétaires n'ayant pas sollicité de report de l'ordonnance de clôture avant son prononcé, le 21 mai 2014, les écritures signifiées par la société Galian le 19 mai 2014 avant clôture ne seront pas rejetées ;
Sur le fond
Au soutien de son appel, le syndicat des copropriétaires fait valoir que le tribunal s'est contredit en relevant, d'une part, que les relations entre la société Gescopro et la société IBS étaient inopposables à la copropriété, d'autre part, que la gestion du syndicat avait été valablement transférée à la société IBS à compter au mois de juillet 2006 ; il estime que le principe de la garantie de la société CGAIM lui est acquis nonobstant la publication de la cessation de la garantie de celle-ci dans le journal « le Parisien » du 7 février 2007 dès lors qu'il a déclaré sa créance née antérieurement à cette cessation dans le délai de trois mois de cette publication ; il nie que la société IBS ait jamais eu la qualité de syndic de l'immeuble et souligne que la société Gescopro a été remplacée par l'assemblée générale dès le 22 mars 2007 ;
La société Galian fait observer que, lorsqu'elle a dénoncé sa garantie, la société IBS administrait la copropriété depuis 7 mois, que le syndicat des copropriétaires ne peut prétendre l'avoir ignoré, que la société IBS était en possession de tous les documents de la copropriété, en sorte que sa garantie ne peut être demandée par le syndicat à raison d'actes accomplis par la société IBS qui avait un autre garant financier, et non par la société Gescopro garantie par CGAIM ; elle ajoute que le syndicat ne peut solliciter sa garantie pour des actes accomplis ou des créances nées postérieurement à la cessation de sa garantie, ce qui est le cas, à son sens, des créances dont fait état le syndicat ;
En droit, le mandat conféré par un syndicat des copropriétaires à un syndic est strictement personnel, de sorte que si le syndic cède son fonds à une société, cette dernière ne peut lui succéder dans les fonctions de syndic qu'ensuite d'une décision expresse de l'assemblée générale ; la société cessionnaire n'est à aucun moment substituée au cédant en l'absence de cette formalité qui ne peut être suppléée par une acceptation tacite du syndicat, d'où il suit que la société syndic conserve son mandat, avec la garantie financière y attachée, jusqu'à la désignation du nouveau syndic ;
Au cas d'espèce, il apparaît des pièces produites que la société Gescopro a cédé son portefeuille de clients à la société IBS au mois de juillet 2006 dans des conditions qui ne sont pas opposables au syndicat des copropriétaires qui avait désigné la société Gescopro pour un mandat renouvelable lors de l'assemblée générale du 12 juin 2002 et qui a été placé devant le fait accompli par une cession de portefeuille qui n'a pu avoir pour effet de substituer la société IBS à la société Gescopro dans les fonctions de syndic alors que l'assemblée générale n'a à aucun moment mandaté ou habilité cette dernière comme syndic ;
Le changement de gérance de la société Gescopro, dont les copropriétaires ont été avertis lors de l'assemblée générale du 25 juin 2006, n'a pas mis fin au mandat consenti à la société Gescopro, personne morale, et si la société IBS a géré de fait le syndicat des copropriétaires jusqu'à l'assemblée générale du 22 mars 2007 qui a remplacé la société Gescopro par la société Lamy Le Pré, cette gestion n'a pas fait perdre sa qualité de syndic à la société Gescopro qui n'a pas démissionné dans les formes requises par le décret du 17 mars 1967 : dès lors, les circonstances énumérées par la société Galian, notamment, l'assistance du conseil syndical à la société IBS, la mise en possession de cette dernière des documents du syndicat, sa tenue de la comptabilité, la déclaration de créance du syndicat au passif de la société IBS, ne révèlent aucune acceptation expresse par le syndicat d'une substitution de son syndic mais seulement la gestion exercée de fait par la société IBS dans l'attente de la désignation du nouveau syndic par l'assemblée générale des copropriétaires, ce qui a été fait au mois de mars 2007, étant observé que le grand livre de la copropriété a été tenu par la société Gescopro du 1er janvier au 5 avril 2007 et que la balance et le relevé de dépenses pour toute l'année 2006 ont été établis par la société Gescopro, qui a également émis les appels de charges jusqu'au 31 décembre 2006 ;
Enfin, c'est par simple mesure de précaution sans incidence sur la solution du litige que le syndicat a déclaré sa créance tant au passif de la société IBS qu'à celui de la société Gescopro en indiquant, pour la première « solde de trésorerie dû par la société IBS », formulation n'emportant aucune reconnaissance de la qualité de syndic de la société IBS ;
Au vu de ces éléments, la garantie financière accordée par la société CGAIM à la société Gescopro ne peut être déniée au syndicat au titre des fonds mandants non représentés par la société Gescopro à la fin de son mandat, pour des créances antérieures à la cessation de la garantie financière de la société CGAIM ;
A cet égard, la garantie de la société CGAIM a pris fin trois jours après la publication de l'avis dans un quotidien parisien et il importe peu que les formalités de notification au conseil syndical n'aient pas été effectuées, car ces formalités ne sont pas prescrites à peine d'inopposabilité de la cessation de garantie du syndicat mais ont seulement pour but de déterminer le point de départ du délai de trois mois imparti aux créanciers pour présenter leurs réclamations ; le syndicat des copropriétaires a produit sa créance par lettre recommandée avec avis de réception du 13 février 2007, donc dans le délai de trois mois qui lui était ouvert à cette fin et il convient seulement de rechercher si les créances déclarées correspondent à des fonds mandants non restitués avant la cessation de la garantie ;
- compte à terme de 12.000 € : il ressort des pièces produits que le syndicat disposait dans les livres de la banque HSBC d'un compte à terme de 12.000 € qui a été débité le 1er décembre 2006 au bénéfice d'un destinataire inconnu, d'où il suit que ce compte à terme entre dans la définition de fonds mandants non restitués par le syndic Gescopro qui a transféré les fonds correspondants à la société IBS sans l'aval du syndicat,
- solde de trésorerie la société Gescopro : il n'est pas établi que la différence de 972,86 € constatée entre le solde de trésorerie de 13.508,83 € indiqué au grand livre de la société Gescopro et la somme de 12.535,97 € figurant sur le compte créditeur du syndicat dans les livres de la banque HSBC correspondrait à des fonds mandants non restitués avant la cessation de la garantie, car l'extrait du grand livre dont s'agit est arrêté au 7 avril 2007, donc à une date postérieure à la cessation de la garantie,
- solde de trésorerie dû par la société IBS : la somme de 17.587,27 € remise par la société Gescopro à la société IBS qui gérait les comptes de la copropriété pour le compte de la première sans mandat n'a pas été restituée en fin de mandat par la société Gescopro ; les rapports entre la société Gescopro et la société IBS étant étrangers au syndicat ainsi qu'il a été dit, la société Galian ne peut pertinemment objecter qu'elle ne saurait garantir la faute commise par la société Gescopro à l'occasion de la remise de ces fonds à un tiers non autorisé ; de ce fait, la société Galian ex CGAIM doit garantir la représentation de ces fonds,
- salaire de la gardienne pour le mois de janvier 2007 : il s'agit d'une somme de 1.220,91 € qui a été réglée par les copropriétaires au syndic mais non reversée à la gardienne de l'immeuble du syndicat, et qui correspond donc à des fonds mandants non représentés que la société CGAIM doit garantir,
- honoraires de la société IBS : ces honoraires d'un montant de 7.042,95 € qui ont été réglés à IBS ne peuvent être garantis par la société CGAIM, alors que, d'une part, il ne s'agit pas de fonds non restitués à la copropriété par le syndic, d'autre part, qu'ils ont été réglés postérieurement à la cessation de la garantie de la société Gescopro, le 21 août 2007,
- cotisations URSSAF des mois de janvier et février 2007 et ASSEDIC du mois de janvier 2007 : 4.902 € et 464 € : le syndicat expose que ces cotisations n'ont pas été payées, contrairement à ce qui est indiqué sur les relevés de compte du grand livre de la copropriété tenu par la société Gescopro : or ces écritures du grand livre font présumer que ces cotisations ont été réglées par des appels de fonds correspondants, en sorte qu'il s'agit bien de fonds réglés au syndic et non représentés par ce dernier, que la société CGAIM doit garantir dans le cadre de ses obligations,
Au vu de ces éléments, le jugement sera infirmé et la société Galian ex CGAIM condamnée à régler au syndicat des copropriétaires la somme de 36.174,18 € (12.000 + 17.587,27 + 1.220,91 + 4.902 + 464) assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2007 et de la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil, le syndicat étant débouté du surplus de ses demandes ;
L'équité justifie de condamner la société Galian ex CGAIM à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Dit n'y avoir lieu de rejeter les écritures signifiées par la société Galian le 19 mai 2014,
Infirme le jugement dont appel,
Statuant à nouveau,
Condamne la société Galian ex CGAIM à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 36.174,18 € assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2007 et de la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Condamne la société Galian ex CGAIM à payer audit syndicat la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
La condamne aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,