Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2014
(n°186, 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/21712
Décision déférée à la Cour : jugement du 10 octobre 2013 - Tribunal de grande instance de PARIS - 3ème chambre 4ème section - RG n° 11/16989
APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE
S.A. CINQ-HUITIEMES, agissant en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Thibault LANCRENON de l'AARPI KIPLING, avocat au barreau de PARIS, toque L 0080
INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE
S.A.S. SYBILLE ACCESSOIRES, exerçant sous le nom commercial petite mendigote, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque K 0065
Assistée de Me Maxime VIGNAUD, avocat au barreau de PARIS, toque P 248
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 3 juillet 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport, en présence de Mme Sylvie NEROT, Conseillère
Mmes Marie-Christine AIMAR et Sylvie NEROT ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente
Mme Sylvie NEROT, Conseillère
Mme Véronique RENARD, Conseillère
Greffière lors des débats : Mme Jacqueline BERLAND
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.
Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile,
Vu le jugement contradictoire du 10 octobre 2013 rendu par le tribunal de grande instance de Paris (3ème chambre 4ème section),
Vu l'appel interjeté le 13 novembre 2013 par la SA Cinq-Huitièmes,
Vu les dernières conclusions de la SA Cinq Huitième appelante en date du 19 juin 2014,
Vu les dernières conclusions de la SAS Sybille Accessoire, intimée et incidemment appelante en date du 19 juin 2014,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 26 juin 2014,
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,
Il sera simplement rappelé que :
La SA Cinq Huitièmes fondée en 1988 par cinq joueurs de rugby de niveau international indique avoir pour activité la création et la fabrication de lignes de vêtements et d'accessoires inspirés par le monde du rugby au travers de 400 points de vente en France et une centaine à l'étranger.
Elle est titulaire de :
* la marque française figurative déposée le 3 février 2005 sous le n°05 3 338 690 en classes 9, 14, 18 et notamment 25, pour désigner les vêtements et chaussures constituée d'un noeud papillon stylisé.
* la marque figurative française déposée en noir et blanc le 19 mars 2010 sous le n°10 3 722 956 en classes 1 à 45, à l'exception de la classe 3 notamment en classe 9 pour désigner les housses pour téléphones, étuis et pochettes pour téléphones ployables et 18 pour des articles de maroquinerie, sacs à main, portefeuilles, porte-cartes, bourses et porte-monnaie, constituée d'un noeud papillon stylisé.
La SAS Sybille Accessoires indique avoir une activité de création d'articles de prêts à porter et accessoires et exercer son activité sous la marque Petite Mendigote.
Le 10 juin 2011 le Service des douanes de l'aéroport de [1] a procédé au contrôle de marchandises importées d'Indes par la société Global Star International pour le compte de la société Sybille Accessoires portant sur 1897 articles de poche en cuir et 304 ceintures en cuir sur lesquels étaient apposés des noeuds papillons en métal.
Au vu des documents reçus par courriel, la société Cinq Huitièmes a confirmé au Service des Douanes que les produits litigieux lui apparaissaient contrefaisants et a porté plainte le 23 juin 2011 auprès du procureur de la République pour contrefaçon de ses marques semi figuratives dont Eden Park n° 3188436.
Le 28 juin 2011 les produits litigieux ont fait l'objet d'une saisie douanière.
Le 28 juin 2011 le Service des Douanes de [1] a procédé à un second contrôle d'un lot de marchandises du même importateur pour le compte de la société Sybille Accessoires portant sur 1090 paires de chaussures qui présentaient sur le dessus un noeud papillon métallique qui, après confirmation par la société Cinq huitièmes que ces produits lui paraissaient contrefaisants, et après qu'elle ait porté plainte le 13 juillet 2011 auprès du procureur de la République de Paris, pour contrefaçon de ses marques semi figuratives dont Eden Park n° 3188436, ces produits ont fait l'objet d'une saisie douanière le 19 juillet 2011.
Les deux plaintes pénales ont fait l'objet d'un classement sans suite, respectivement les 3 septembre 2011 et 27 janvier 2012.
Par ordonnances du 6 septembre 2011 le juge des référés s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande de la société Sybille Accessoires tendant à voir déclarer abusive ces saisies douanières.
Par arrêt du 21 mars 2012 la cour d'appel de Paris a, réformant ces ordonnances, déclaré le juge des référés compétent, ordonné la mainlevée immédiate des mesures de retenue et saisie et condamné la société Cinq Huitièmes à payer à la société Sybille Accessoires la somme de 100.000 euros à valoir sur son préjudice et la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Cet arrêt a été cassé par arrêt de la Cour de Cassation du 11 mars 2014 qui a renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Paris autrement composée.
Parallèlement, en vertu d'une ordonnance présidentielle en date du 14 octobre 2011, la société Cinq Huitièmes a fait procéder le 25 octobre 2011 à une saisie-contrefaçon dans les locaux du Service des Douanes de [1].
Selon acte d'huissier du 17 novembre 2011 la SA Cinq Huitièmes a fait assigner la SAS Sybille Accessoires devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marques et concurrence déloyale et parasitaire.
Suivant jugement dont appel, le tribunal a essentiellement :
- rejeté la demande en nullité des marques n°05 3 338 690 et 103722966 dont est titulaire la société Cinq Huitièmes,
- débouté la société Cinq Huitièmes de ses demandes en contrefaçon de marques et de concurrence déloyale et parasitaire,
- condamné la société Cinq Huitièmes à payer à la société Sybille Accessoires la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêt en deniers ou quittance,
- rejeté la demande de publication judiciaire,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné la société Cinq Huitièmes à payer à la société Sybille Accessoires la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En cause d'appel, la société Cinq Huitièmes, appelante, demande essentiellement dans ses dernières écritures du 19 juin 2014 de :
- rejeter des débats les conclusions et pièces signifiées tardivement par la société Sybille Accessoires à une heure vingt de la clôture,
- infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a débouté la société Sybille Accessoires de sa demande en nullité des marques dont elle est titulaire,
- statuant à nouveau,
- rejeter des débats les pièces n° 35 et 37 en raison de leur communication tardive et non simultanée à ses conclusions,
- juger que la société Sybille Accessoires a commis des actes de contrefaçon en important en France et en commercialisant les produits de maroquinerie litigieux, par reproduction ou à tout le moins imitation génératrice d'un risque de confusion, de ses marques, et des actes de parasitisme,
En conséquence,
- condamner la société Sybille Accessoires à lui payer les sommes suivantes :
* 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour les faits de contrefaçon, sur le fondement de l'article L 716-14 du CPI,
* 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour les faits de concurrence déloyale et parasitaire, sur le fondement de l'article 1382 du code civile,
- condamner la société Sybille Accessoires à lui rembourser la somme de 100.000 euros,
- ordonner des mesures sous astreinte des mesures de destruction, d'interdiction,
A titre subsidiaire,
- condamner la société Sybille Accessoires à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L 713-5 du CPI et celle de 50.000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil.
- condamner la société Sybille Accessoires à lui restituer la somme de 100.000 euros,
- ordonner la publication du dispositif de l'arrêt à intervenir,
- en tout état de cause,
- condamner la société Sybille Accessoires à lui rembourser la somme de 100.000 euros ou à titre subsidiaire une partie très importante de cette somme,
- condamner la société Sybille Accessoires à lui payer la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour s'opposer à ces demandes la société Sybille Accessoires exerçant sous le nom commercial Petite Mendigote, intimée, demande dans ses dernières écritures du 19 juin 2014 de :
- confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles,
- statuant à nouveau :
- déclarer nulles les marques n°103722956 et 05B 3 338 690 et dire irrecevables les demandes fondées sur la contrefaçon de ces marques,
- condamner la société Cinq Huitièmes à lui verser la somme de 227.716,50 euros en réparation de son préjudice consécutif aux saisies douanières injustifiées,
- condamner la société appelante à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
*******
Sur la demande de la société appelante tendant à voir écarter des débats les pièces n°35 et 37,
La société appelante sollicite sur le fondement des articles 15 et 906 du code de procédure civile, le rejet des pièces n° 35 et 37 communiquées par la société intimée aux motifs qu'elles ont été communiquées tardivement et non simultanément à leurs conclusions.
Cependant ces pièces ont été communiquées le 22 mai 2014 après la communication des conclusions de la société Sybille Accessoires en date du 11avril 2014, alors que la société appelante a conclu les 27 mai et 19 juin 2014, de sorte qu'elle a disposé d'un délai suffisant pour prendre connaissance des écritures et pièces adverses pour y répondre.
Le principe du contradictoire ayant été respecté, il n'y a pas lieu de rejeter ces deux pièces.
La société appelante sollicite également par écritures du 19 juin 2014, le rejet des conclusions et pièces signifiées à une heure vingt de la clôture de l'instruction de l'affaire.
Cependant, les dernières conclusions et communications de pièces de la société intimée sont en date du 19 juin 2014 et la clôture de l'affaire, en date du 26 juin 2014, de sorte que la société appelante, qui au surplus ne précise pas les pièces à écarter, alors que le bordereau ne liste que l'ensemble des pièces communiquées, a disposé d'un temps suffisant pour en prendre connaissance.
Il n'y a donc pas lieu de faire droit à ces demandes.
Sur la demande en nullité des marques opposées par la société Cinq Huitièmes,
Aux termes de l'article L 714-3 du code de la propriété intellectuelle est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque qui n'est pas conforme aux dispositions des articles L 711-1 à l 711-4.
L'article l 711-2 du même code prévoit que le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l'égard des produits et services désignés et l'article L 711-1 du même code dispose que la marque ...est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d'une personne physique ou morale.
La société Sybille Accessoires dénie tout caractère distinctif aux marques dont la société Cinq Huitièmes est titulaire :
* la marque française figurative déposée le 3 février 2005 sous le n°05 3 338 690 en classes 9, 14, 18 et notamment 25, pour désigner les vêtements et chaussures constituée d'un noeud papillon stylisé.
* la marque figurative française déposée le 19 mars 2010 sous le n°10 3 722 956 en classes 1 à 45, à l'exception de la classe 3 notamment en classe 9 pour désigner les housses pour téléphones, étuis et pochettes pour téléphones ployables et 18 pour des articles de maroquinerie, sacs à main, portefeuilles, porte-cartes, bourses et porte-monnaie, constituée d'un noeud papillon stylisé.
Elle fait valoir que le caractère distinctif du logo Eden Park qui constitue également une marque n° 3188436 qui comporte un noeud papillon de couleur rose, est indiscutablement lié à la couleur rose de ce noeud papillon, les marques invoquées dépourvues de couleur ne revêtent pas ce caractère distinctif en regard de la tendance actuelle de la mode qui fait du noeud papillon un élément décoratif de plus en plus utilisé.
Cependant comme relevé avec pertinence par le tribunal, la société Cinq Huitièmes justifie qu'elle utilise depuis des années sur de très nombreux produits les marques litigieuses, sans revendication de couleurs , et ce, depuis leur dépôt, en 2005 pour la marque n°10 3 722 956 sur des vêtements et chaussures et 2010 pour la marque n°05 3 338 690 sur des produits de maroquinerie.
Si elle a commencé par exploiter le noeud papillon de couleur rose doté d'une forte distinctivité qui évoquait les finales du championnat de France de rugby de 1987 et de 1990, elle a par la suite largement exploité son logo papillon sous d'autres couleurs, sur différentes matières : tissu, cuir, peau, métal, verre, sur ses boutiques et enseignes et des gammes de produits de plus en plus étendues, toujours, comme le font d'autres sociétés de prêt à porter et d'accessoires, en partie supérieure et visible de ses articles, de sorte que ces marques identifient distinctement l'origine des produits variés chaussures, vêtements, housses pour téléphones, étuis et pochettes pour téléphones portables, articles de maroquinerie, sacs à main, portefeuilles, portecartres, bourses et porte-monnaie.
La circonstance que ces marques puissent avoir simultanément une fonction décorative n'altère pas le caractère distinctif de celles-ci quant à l'origine des produits sur lesquelles elles sont apposées.
La société intimée n'établit pas, par ailleurs que ces marques aient été lors de leur dépôt dépourvue de distinctivité.
C'est donc à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de nullité de ces marques.
Sur l'action en contrefaçon de marques
La société appelante fait valoir que les signes en présence présentent des différences insignifiantes au regard de leur impression d'ensemble qui passeront inaperçues aux yeux du consommateur moyen dans la mesure où ce dernier n'aura que le souvenir imparfait qu'il a gardé de la marque antérieure et le signe argué de contrefaçon. Elle ajoute que l'usage intensif qui a été fait sur ses marques figuratives pour les produits objets du contentieux : produits de maroquinerie et chaussures leur a permis d'acquérir une grande renommée qui lui confèrent un caractère distinctif élevé et qu'il existe un risque de confusion avéré entre les signes ou à tout le moins un risque d'association entre le signe litigieux et ses marques car la société intimée a utilisé le signe litigieux qu'elle a apposé sur le même emplacement que ces marques, sur tout un éventail de produits, risque de confusion comme cela ressort d'une enquête menée sur un échantillon représentatif de 1.000 personnes les 28 et 29 janvier 2014.
La société intimée dénie tout risque de confusion entre les signes.
Sur la comparaison des produits
Les parties ne contestent pas que les produits en litige sont similaires concernant la marque 05 3 338 690 pour les chaussures ou similaires concernant la marque et 10 3 722 956 pour les articles de maroquinerie : pochettes, étuis, ceintures, ou similaire à ces deux marques.
Sur la comparaison des signes
Les marques antérieures portent sur :
- un noeud papillon stylisé en noir et blanc,
Le signe contesté porte sur un noeud papillon stylisé.
Le signe critiqué ne constituant pas la reproduction à l'identique des marques antérieurs qui lui sont opposées il convient de rechercher s'il n'existe pas entre les deux signes un risque de confusion (lequel comprend le risque d'association) qui doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants ;
En outre, un faible degré de similitude entre les produits ou services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les signes et inversement,
Visuellement, les signes représentent tous un noeud papillon stylisé, qui comportent des bouts plats aux extrémités, un centre en forme de carré légèrement arrondi ; ils diffèrent en ce que les marques sont en noir et blanc et le signe litigieux est en métal doré, les lignes sont légèrement plus arrondies dans les marques et ne comportent pas de retour sous le noeud pour l'une des marques ou sont discrets alors qu'ils sont nettement marqués sur le signe litigieux ; les marques présentent un pli horizontal de part et d'autre du centre du noeud dont est dépourvu le signe litigieux alors que leur forme générale est orientée vers le haut pour les marques et vers le bas pour le signe litigieux.
Phonétiquement, s'agissant de signes figuratifs sans élément verbaux ils ne sont pas prononcés en tant que tels mais leur description visuelle se prononcera de façon identique par noeud papillon,
Conceptuellement, les signes opposés renvoient au noeud papillon,
Le signe litigieux sur plusieurs produits de la société Sybille Accessoires est reproduits à plusieurs reprises comme élément décoratif sur lesquels figurent systématiquement la marque 'petiteMendigote'.
L'examen des produits sur lesquels sont apposés les marques et le signe litigieux, selon les documents produits respectivement par les parties, fait apparaître que les marques sont apposés sur des produits essentiellement masculins, alors que le signe litigieux l'est sur des produits davantage féminin et à visée décorative.
Il résulte de l'analyse globale ainsi menée qu'en dépit de l'identité ou de la similarité : des produits et services couverts par les marques opposées, le consommateur normalement attentif aux tendances de la mode, s'agissant pour les deux sociétés d'articles vendus à des prix élevés, et ce d'autant que le noeud papillon est, en soi, un élément figuratif ornemental présentant une certaine banalité, dont l'appelante ne peut s'approprier le monopole, ne pourra se méprendre sur 1'origine respective des produits ou des services en cause, tant sont distincts la la perception des signes opposés ; qu'il ne sera pas conduit à penser qu'ils proviennent d'une même entreprise ou d'entreprises liées économiquement ;
C'est donc à bon droit que le tribunal a rejeté la demande en contrefaçon de marques.
Sur la demande subsidiaire fondée sur l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle
Aux termes de l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle, la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.
Les dispositions de l'alinéa précédant sont applicables à la reproduction ou l'imitation d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle précitée.
La société Cinq Huitièmes expose que la renommée des deux marques figuratives dont s'agit repose sur ses très importants investissements publicitaires, leur large exploitation, sur des gammes variées de produits distribués dans des centaines de points de vente en France et de nombreux points de vente à l'étranger, sur les objets promotionnels et sur les devantures des magasins Cinq Huitièmes et qu'elle a ainsi réalisé en 2010 et 2011 plus de cinquante millions d'euros de chiffre d'affaires.
Elle ajoute que cette renommée apparaît également aux travers de nombreux articles de presse et de l'enquête du CSA qu'elle a fait établir les 28 et 29 janvier de laquelle il résulte que plus d'un consommateur français sur 2 associe le noeud paillon à ses produits.
Elle indique que les actes de la société intimée constituent une exploitation injustifiée de la distinctivité et de la réputation de son logotype déposé à titre de marque.
Cependant il est justifié que le noeud papillon est un signe utilisé fréquemment dans le domaine de la mode sur les chaussures, vêtements et accessoires, et la société appelante ne peut s'approprier l'exclusivité de cet ornement décoratif banal et ce d'autant qu'en l'espèce le noeud apposé sur les produits litigieux est en métal et en trois dimension et de représentation différente de celle des marques et exploité à titre ornemental.
De plus, le simple sondage portant sur 1.000 personnes en France n'est pas de nature à établir la notoriété invoquée alors que les produits en cause s'inscrivent dans des univers différents de sorte qu'il n'est pas justifié que la société intimée ait eu la volonté de se placer dans le sillage de la société appelante pour en tirer profit.
Sur l'action en concurrence déloyale et parasitaire
La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce ce qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.
L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité, la notoriété de la prestation copiée.
Ainsi le principe est la liberté du commerce ce qui implique qu'un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle peut être librement reproduit, sous réserve de l'absence de faute préjudiciable à un exercice paisible et loyal de la concurrence.
Pour que la vente d'un produit identique constitue un acte de concurrence déloyale il convient de démonter que cette reproduction est fautive.
La société Cinq-Huitièmes expose à cet effet que le logotype de noeud papillon stylisé mis en avant dans le commerce depuis plus de 25 ans constitue une valeur économique pour elle puisqu'il constitue un signe de rattachement de la clientèle à ses produits et à leur univers. Elle précise qu'elle a consenti des investissements publicitaires de plus de 18 millions d'euros depuis 2006 pour asseoir la notoriété de cet emblème.
Elle fait valoir que par le cumul de la copie de son logotype et l'apposition de ce signe en métal, comme elle, sur des produits variés, la société Sybille Accessoires s'est résolument placée dans son sillage profitant ainsi de ses investissements,
Toutefois comme le relève avec justesse la société intimée les articles de presse versés aux débats se réfèrent toujours à la couleur rose du noeud papillon et non au logo d'un noeud papillon dont la société appelante ne peut avoir le monopole et les investissent dont elle fait état se rapportent selon ses écritures au noeud papillon de couleur rose.
De sorte qu'il n'est pas rapporté la preuve que la société intimée se soit placée indûment dans son sillage et c'est donc à bon droit que le tribunal a rejeté les demandes formées de ces chefs.
Sur la demande en restitution de la somme de 100.000 euros,
Conformément aux dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, l'arrêt de cassation en date du 11 mars 2014, entraîne par voie de conséquence, celle du chef de l'arrêt ayant condamné la société Cinq-Huitièmes à payer à la société Sybille Accessoires la somme provisonnelle de 100.000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice, de sorte que la demande formée à ce titre est sans objet, l'arrêt de cassation valant titre.
Sur la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts,
La société intimée sollicite par voie d'appel incident la condamnation de la société appelante à lui payer la somme de 227.716,50 euros pour l'atteinte à l'image résultant des saisies litigieuses puisqu'elle a été contrainte d'indiquer à ses clients professionnels qu'elle ne serait pas en mesure de livrer les quantités commandées en raison de ces saisies ce qui porté atteinte à sa réputation et lui a occasionné un trouble commercial.
Cependant l'action en justice initiée par la société Cinq-Huitièmes relève de l'exercice normal d'un droit sans que celui-ci, à défaut de démonstration de volonté de nuire, et alors que celle-ci a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits, ne revêt aucun caractère abusif, alors que les saisies ont été effectuées à l'initiative du Service des Douanes, la société Cinq-Huitièmes n'ayant procédé qu'à une saisie-descriptive lors de la mesure de saisie-contrefaçon dûment autorisée.
Il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts à ce titre et il convient de réformer le jugement de ce chef.
Sur les autres demandes
L'équité commande d'allouer à la société intimée la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter la demande formée à ce titre par la société appelante.
Les dépens resteront à la charge de la société appelante qui succombe principalement et qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Rejette la demande de rejet de pièces communiquées par la société intimée, formée par la société appelante,
Réforme le jugement en ce qu'il a accueilli la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts de la société Sybille Accessoires,
En conséquence,
Rejette la demande reconventionnelle en paiement de la somme de 227.716,50 euros formée par la société intimée au titre des saisies douanières,
Rejette le surplus des demandes de la société appelante,
Rejette la demande reconventionnelle de la société intimée tendant à voir prononcer la nullité des marques n°05 3 338 690 et n°1 03 722 956 dont est titulaire la société Cinq-Huitièmes, et celle tendant à augmenter le quantum des sommes allouées par le tribunal,
En conséquence
Confirme le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
Condamne la société appelante à payer à la société intimée la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société appelante aux entiers dépens qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente