Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 12 NOVEMBRE 2014
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/04138
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Novembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/00507
APPELANTS
S.A.R.L. LUX'ORIENT prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Monsieur [W] [O] (SARL) ès-qualités de Mandataire ad'hoc de la SARL LUX'ORIENT
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentés par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
INTIMÉS
S.C.I. [Adresse 4] prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, avocat postulant
Assistée de Me Patrice ARCHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0910, avocat plaidant
[P] [L] [F], décédé
Conclusions de désistement partiel, de Me [R] [S], signifiées le 01 Octobre 2013
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juillet 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Chantal BARTHOLIN, présidente
Madame Odile BLUM, conseillère
Monsieur Christian BYK, conseiller
Greffier: lors des débats : Madame Orokia OUEDRAOGO
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, et par Madame Orokia OUEDRAOGO, greffière.
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EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé en date du 18 juin 2001, M [P] [L] [F] et Mme [J] [L] [F] ont donné à bail à la société Lux'Orient des locaux commerciaux situés [Adresse 4] constituée d'une boutique avec sous sol et magasin en fond de cour pour y exercer une activité de vente de tapis, textile, prêt à porter, antiquité, articles d'artisanat de tous pays et vente en gros, demi gros et détail de ces articles ;
Ces locaux ont été apportés à la SCI 26Toudic.
La société Lux'Orient invoquant le mauvais état des locaux a assigné M [P] [L] [F] et la SCI [Adresse 4] en exécution de travaux et paiement in solidum d'une provision à titre de dommages -intérêts, sollicitant subsidiairement la désignation d'un expert.
Par jugement du 9 mai 2006, le tribunal a rejeté la demande de mise hors de cause de M [L] [F] et désigné un expert en la personne de M [V] remplacé par M [C] afin d'examiner les désordres, évaluer les responsabilités encourues et indiquer les travaux nécessaires à la réfection des lieux, vérifier si la société Lux'Orient a exécuté son obligation de remise en état complète des locaux.
M [C] a déposé son rapport le 15 janvier 2008.
La société Lux'Orient a été expulsée le 21 janvier 2008 en exécution d'un arrêt de cette cour du 26 septembre 2007 ayant constaté la résiliation du bail à la date du 5 janvier 2007 par infirmation de l'ordonnance de référé.
Après expertise, le tribunal de grande instance de Paris a, par jugement du 25 novembre 2008 :
- condamné la SCI [Adresse 4] et M [L] [F] à payer à la société Lux'Orient la somme de 5000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait des carences des bailleurs,
-condamné la société Lux'Orient à payer à la SCI [Adresse 4] la somme de 45 274, 01€ en deniers ou quittances correspondant aux loyers et charges pour la période allant de janvier 2006 au jour de l'expulsion.
-fait masse des dépens en ce compris la mesure d'instruction, et dit qu'ils seront supportés pour 1/3 par la SCI [Adresse 4] et M [L] [F] et pour les 2/3, par la société Lux'Orient ;
La société Lux'Orient a interjeté appel de cette décision ; elle s'est ensuite désistée de son appel envers M [F] décédé et partant la succession ;
Agissant par son mandataire ad'hoc M [O], désigné par ordonnance du président du tribunal de commerce du 12 janvier 2011, la société Lux'Orient demande à la cour par conclusions signifiées le 18 septembre 2013 d'infirmer le jugement déféré et de :
Dire que le bailleur a failli à son obligation d'assurer une jouissance paisible des lieux, que le bailleur ne peut se prévaloir de la clause résolutoire,
Ordonner en conséquence une réduction de loyer équivalent à 35 % du montant du loyer pendant la durée du bail,
Condamner la SCI [Adresse 4] à lui payer la somme de 47 488 € et ordonner la réintégration de la société Lux'Orient dans les lieux,
A défaut, condamner la SCI [Adresse 4] à payer à la société Lux'Orient la somme de 142 000 € au titre de son préjudice du fait de l'expulsion injustifiée et de la perte de son fonds de commerce,
En tout état de cause,
Ordonner à la SCI [Adresse 4] de restituer les biens mobiliers en ce compris les tapis qui ont été mis en garde meubles,
Désigner tel expert avec mission de donner son avis sur la valeur marchande des marchandises détenues par la société Lux'orient,
A défaut condamner la SCI [Adresse 4] à lui payer la somme de 720 103, 93 € au titre du préjudice résultant de la perte de son stock et une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI [Adresse 4] par conclusions signifiées le 29 octobre 2013 demande à la cour de dire irrecevable la société Lux'Orient en ses conclusions, faute de précision quant à l'étendue du mandat consenti à son gérant M [O] par l'ordonnance du 12 janvier 2011, de dire la société Lux'Orient mal fondée en son appel, de confirmer le jugement déféré, et condamner la société Lux'Orient à lui verser la somme de 5000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.
SUR CE
La société Lux'Orient a versé aux débats, pendant le cours du délibéré et conformément à la demande qui lui en a été faite à l'audience, la requête présentée au président du tribunal de commerce de Paris dont il résulte que la société a demandé la désignation d'un mandataire ad'hoc pour la représenter devant la procédure pendante devant la cour en indemnisation de son préjudice née de la résiliation du bail et de son expulsion.
La SCI [Adresse 4] a présenté, à la suite de cette communication, ses observations en indiquant que la société Lux'Orient se domiciliait [Adresse 3] dans ses conclusions devant la cour alors que dans la requête, elle se domicilie [Adresse 1] et dans de précédentes écritures [Adresse 5] , ce qui pose le problème du domicile exact de la société au regard des dispositions ders articles 960 et 961 du code de procédure civile.
Or la société [Adresse 4] n'a pas saisi le conseiller de la mise état pour statuer sur la difficulté alléguée concernant l'adresse exacte de la société Lux'Orient, alors que ce magistrat est seul compétent jusqu'à son dessaisissement pour statuer sur les exceptions de procédure et les incidents mettant fin à l'instance ; elle ne peut invoquer que la difficulté liée à l'adresse de la société a été révélée à l'occasion de la communication de la requête alors que dans le jugement du 25 novembre 2008, la société Lux'Orient se domiciliait déjà au [Adresse 1] tandis que dans ses conclusions d'appel, elle s'est domiciliée [Adresse 3].
La SCI [Adresse 4] est donc irrecevable à soulever devant la cour un incident concernant le domicile de la société Lux'Orient.
La société Lux'Orient fait valoir que l'affaissement du plancher de la boutique et la pose d'étais en sous sol ont empêché l'utilisation du sous sol et rendu impossible la pose dune nouvelle vitrine, que l'expert a constaté que la verrière était vétuste, les fers en mauvais état, des traces de fuite visibles, que la verrière était donc fuyarde ; qu'il a cependant a relevé à tort que l'entretien de la verrière revenait à la société locataire alors qu'il s'agit d'une partie commune d'après le règlement de copropriété, qu'elle a donc été privée d'une partie des lieux loués.
La société Lux'Orient fait également observer que l'escalier intérieur qui permettait la communication avec l'appartement de l'étage n'a pas été supprimé en même temps que la communication, contrairement à l'engagement pris par le bailleur, que les conduites d'eau ayant été sectionnées à la suite de travaux effectués par la bailleur avant la prise de possession par la société Lux'Orient, elle n'a pu bénéficier du chauffage avant une intervention de la société ALT de novembre 2006 qui a procédé à des travaux qui ne sont que le résultat des carences de la bailleresse de sorte que ces travaux ne constituent pas des travaux d'entretien et doivent être mis à la charge de la bailleresse.
Enfin, elle fait valoir que plusieurs tapis ont été endommagés par l'écoulement des eaux de chauffage lors de travaux réalisés dans les lieux par le fils de M [L] [F], qu'il en est résulté une impossibilité de les commercialiser, que ces travaux ont en outre annulé le bénéfice des travaux effectués par elle précédemment ;
Enfin, elle indique qu'elle a été privée du libre accès à la cour par des vélos qui l'encombraient alors qu'elle devait pouvoir avoir facilement accès aux locaux en fond de cour.
L'expert a constaté de son côté que si l'affaissement du plancher est réel (flèche de l'ordre de 5mm sur 1 mètre ) avec fissure du seuil d'accès, le plancher ayant été étayé au sous sol, l'affaissement du plancher n'empêche pas l'exploitation de la boutique ; l'expert a constaté en effet la présence au sous sol d'étais de chantier et d'un bastaing qui réduisent néanmoins la disponibilité des locaux en sous sol ; la copropriété a voté l'exécution de travaux de réfection du plancher le 1er février 2006 ;
L'expert également constaté que la verrière est fuyarde mais le premier juge a justement relevé que l'entretien des fermetures et vitrages recouvrant partie des lieux loués était à la charge de la locataire au terme du bail et que la société Lux' Orient ne justifiait pas de travaux d'entretien à cet égard, ne démontrant pas avoir du arrêter les travaux qu'elle aurait entrepris, à la demande du syndic .
Le tribunal doit être approuvé en ce qu'il a jugé que la société Lux Orient n'établit pas que l'escalier intérieur, rendu inutile à la suite de la suppression de communication entre le rez de chaussée et l'étage et qui existait lors de l'entrée dans les lieux, ait fait l'objet d'un accord du bailleur concernant sa suppression, la société locataire ne démontrant pas que la présence de cet escalier l'a privée d'une jouissance paisible.
Il sera également confirmé en ce qu'il a relevé qu'une première facture d'intervention sur le chauffage d'un montant de 2152, 80 € avait eu lieu en janvier 2006, ce qui rend admissible la réclamation de la société Lux'Orient concernant le défaut de chauffage allégué mais que les travaux de réparation du chauffage allant bien au-delà de la simple remise en état, effectués sans accord de l'expert par la société ALT en novembre 2006, ne peuvent lui être remboursés ;
Le tribunal doit être également approuvé en ce qu'il a retenu que le bouchement de la trémie avec des plaques de plâtre non peintes avait été réalisé sans grand soin par le bailleur mais que la locataire échouait à démontrer l'existence du préjudice en résultant, le constat d'huissier mentionnant seulement la chute de poussières de gravats en février 2004 et la lettre de Tapis Tabriz se rapportant à des dommages causés à des tapis par des dégâts des eaux n'ayant pas de rapport avec la réalisation du bouchage de la trémie.
Quant au fait que l'accès à la cour a été rendu peu aisé en raison des vélos qui y étaient stationnés, la société Lux'Orient n'invoque pas avoir alerté la bailleresse de cette difficulté avant 2006 de sorte qu'elle ne peut se plaindre de l'inaction de celle-ci à cet égard.
En conséquence l'indisponibilité partielle du sous sol, le défaut de chauffage et le désordre mineur provenant du bouchement de la trémie justifient l'octroi de dommages intérêts à hauteur de la somme accordée, aucune relation entre les désordres ainsi constatés et les difficultés économiques de la société n'étant par ailleurs établie. Elle sera déboutée de ses autres demandes en diminution de loyers ou encore en réintégration dans les lieux laquelle est sans aucun fondement .
La société Lux'Orient n'oppose aucune critique pertinente au décompte des sommes dues au titre des loyers au 7 janvier 2007 tel que mentionné dans l'arrêt de cette cour du 26 septembre 2007 statuant sur l'appel de l'ordonnance du 6 mars 2007 ; elle fait en effet état dans ses conclusions de règlements survenus postérieurement à l'arrêté de compte en février et mars 2007 et qui ne tendent d'ailleurs pas à établir qu'elle n'était débitrice d'aucune somme au 5 janvier 2007 mais seulement qu'elle aurait été débitrice d'une somme moindre. Défaillante en cause d'appel, elle n'a cependant pas sollicité de délai de paiement suspendant la clause résolutoire et échoue à démontrer que la résiliation a été constatée à tort.
Ayant été expulsée des locaux en exécution de l'arrêt précité, la société Lux'Orient qui a fait l'objet depuis d'une liquidation judiciaire est mal fondée à revendiquer l'indemnisation de la perte de son fonds résultant de son expulsion ou encore celle de son stock qui aurait été selon elle appréhendé par le bailleur sans qu'aucune partie ne fasse état de cet élément et notamment d'une saisie opérée par la bailleresse. La société Lux'Orient sera déboutée de ces demandes.
S'agissant enfin des sommes réclamées par la SCI [Adresse 4] au titre non des seuls loyers et charges comme indiqué par le jugement mais au titre également des indemnités d'occupation dues entre la date de résiliation du bail au 5 janvier 2007 et l' expulsion des lieux de la société Lux'Orient, le conseil de la société [Adresse 4] a indiqué par écrit du 30 juin 2014 à la cour en remettant les pièces de son dossier que la pièce n° 11 constituée par le décompte des sommes dues au 15 avril 2008 ne pouvait être remise bien que figurant sur le bordereau des pièces communiquées car cette pièce était introuvable, indiquant qu'elle devait néanmoins figurer'au dossier de la cour puisqu'il s'agit d'une pièce invoquée également par l'appelante' .
Or la cour ne dispose que des pièces qui lui sont remises par l'une et l'autre parties, que la SCI [Adresse 4] qui échoue en ne produisant pas le décompte annoncé à démontrer la réalité et le montant de sa créance au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation dues entre la date de résiliation du bail et celle de l'expulsion de la société Lux'Orient sera déboutée de sa demande en paiement de la somme de 45 274, 01€, que du reste la société Lux'Orient ayant fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Nanterre le 9 avril 2009, la SCI [Adresse 4] ne pouvait, avant la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actif intervenue le 27 juillet 2010, que solliciter la fixation de sa créance au passif de la société ;
La société Lux'Orient supportera les dépens d'appel.
Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile .
PAR CES MOTIFS
Rejette l'exception de procédure contenue dans les observations de la SCI 26 Toudic présentées postérieurement à la communication autorisée en cours de délibéré par la société Lux'Orient de la requête aux fins de désignation d'un mandataire ad'hoc ;
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société Lux'Orient à payer à la SCI [Adresse 4] la somme de 45 274, 01€ en deniers ou quittance,
Réformant sur ce point et statuant à nouveau,
Déboute la SCI [Adresse 4] de cette demande,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Dit que la société Lux'Orient supportera les dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE