RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 04 Décembre 2014
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11538 - 12/12020
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Novembre 2012 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 09/00499CR
APPELANTE
SARL YIDA FOOD
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Jeffrey SCHINAZI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0264 substitué par Me Elsa MASSON, avocat au barreau de PARIS, toque : C0264
INTIMÉE
URSSAF [Localité 4] - RÉGION PARISIENNE
Division des recours amiables et judiciaires
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Mme [V] en vertu d'un pouvoir spécial
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 2]
[Localité 1]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 octobre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président
Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller
Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Fatima BA, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Président et par Madame Marion MÉLISSON, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour statue sur les appels régulièrement interjetés par la société Yida Foods de deux jugements rendus le 7 novembre 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil dans un litige l'opposant à l'URSSAF de [Localité 4] région parisienne, aux droits de laquelle vient l'URSSAF d'Ile de France ;
Les faits, la procédure, les prétentions des parties :
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;
Il suffit de rappeler qu'à la suite d'un contrôle inopiné, effectué par les services de gendarmerie dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette de cotisations de sécurité sociale dues par la société Yida Foods les rémunérations n'ayant pas, selon elle, fait l'objet de déclarations; qu'il en est résulté un supplément de cotisations d'un montant total de 119.358€ au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 octobre 2006 ; que la société Yida Foods a contesté ce redressement devant la commission de recours amiable qui a rejeté sa réclamation par décision du 2 décembre 2009 ; qu'elle a alors saisi la juridiction des affaires de sécurité sociale ; qu'entre temps, il lui avait été délivré, le 20 juin 2008, une contrainte émise par l'URSSAF pour le recouvrement de la somme de 144000€ représentant 119357€ de cotisations et 24 643€ de majorations de retard ; que la société a formé opposition à l'exécution de cette contrainte devant la même juridiction.
Par deux jugements séparés du 7 novembre 2011, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil a débouté la société Yida Foods de sa contestation et l'a condamnée au paiement de la somme de 144 000€ représentant 119357€ de cotisations et 24643 € de majorations de retard provisoires d'une part et validé la contrainte pour le même montant d'autre part.
La société Yida Foods fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions tendant à infirmer les jugements et débouter l'URSSAF de l'ensemble de ses prétentions à son encontre. A titre subsidiaire, elle demande une régularisation de ses cotisations à de plus justes proportions. En tout état de cause, elle conclut à la condamnation de l'URSSAF au paiement d'une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.
Au soutien de son appel, elle conteste l'évaluation forfaitaire opérée par l'URSSAF sans la moindre justification. En premier lieu, elle estime que l'organisme de recouvrement ne justifie pas des raisons pour lesquelles il a mis en oeuvre une taxation forfaitaire alors qu'une telle taxation n'est possible qu'en l'absence de pièces comptables de l'employeur. En second lieu, elle estime que l'évaluation forfaitaire effectuée par l'URSSAF est à la fois inexacte et excessive. Selon elle, le calcul auquel s'est livré l'organisme de recouvrement repose sur des approximations sur le nombre d'heures dissimulées chiffré à 50h55 par mois et par salarié et sur le nombre de salariés retenus. Elle indique notamment que seuls deux salariés ont déclaré effectuer des heures supplémentaires et critique la motivation du jugement qui énonce sans preuve que les salariés travaillent de 8h à 19h30, sans aucun roulement entre eux durant la journée.
L'URSSAF d'Ile de France conclut oralement à la confirmation du jugement. Elle indique que le travail dissimulé a été reconnu par l'arrêt de la cour d'appel en date du 11 octobre 2011 confirmant la décision du tribunal correctionnel de Créteil ayant déclaré la société Yida Foods coupable de l'infraction de travail dissimulé par dissimulation du nombre d'heures réellement effectuées. Elle relève que cette décision précise clairement que les horaires de travail dépassaient les horaires légaux. Elle ajoute que l'activité de l'entreprise exigeait l'accomplissement d'un nombre d'heures de travail supérieur à celui déclaré et que certains salariés ne figuraient pas sur les DADS transmises par la société. Elle considère qu'en l'absence de pièces comptables retraçant le travail salarié réellement effectué, la taxation forfaitaire prévue à l'article R 242-5 du code de la sécurité sociale s'imposait.
Pour reconstituer la masse salariale éludée, elle a établi un tableau comportant pour chaque salarié, le nombre d'heures dissimulées évaluées à partir des facturations émises durant leur période d'emploi. Elle précise que sa méthode de calcul est justifiée par les constatations recoupées des inspecteurs du recouvrement. Enfin elle fait observer qu'en 2006, il a été tenu compte du salaire que le gérant s'est versé sans respecter ses obligations de déclaration.
Il est fait référence aux écritures déposées pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;
Motifs :
Considérant d'abord qu'en raison de leur connexité, il convient de joindre les instances suivies sous les numéros 12/11538 et 12/12020 afin de les juger ensemble ;
Considérant qu'il ressort de la procédure pénale qu'à l'occasion d'une opération de lutte contre le travail dissimulé effectuée le 15 novembre 2008 dans les locaux de la société Yida Foods, il a été constaté la présence de 29 salariés dont trois n'avaient pas fait l'objet de déclarations préalables à l'embauche ;
Considérant que l'enquête a permis de constater en outre que l'ensemble des salariés recevaient des bulletins de paie comportant un nombre d'heures de travail minoré par rapport à la réalité ; qu'il a aussi été relevé que le gérant avait perçu des rémunérations occultes en 2006 pour un montant total de 15000€ qui n'a pas été déclaré à l'URSSAF ;
Considérant que la société Yida Foods conteste ces faits mais leur réalité est établie par différentes auditions des salariés, l'évaluation des besoins en personnel résultant de l'activité réelle de l'entreprise et l'étude des conditions de travail au sein de cette entreprise, notamment l'examen des horaires de travail ;
Considérant d'ailleurs que l'arrêt du 11 octobre 2011 retient l'existence d'un délit de travail dissimulé par dissimulation du nombre d'heures réellement effectué sur les bulletins de paie et énonce que les horaires réels dépassaient la durée légale du travail ;
Considérant qu'en présence d'une telle dissimulation de travail salarié, l'URSSAF a considéré à raison que la comptabilité de l'entreprise ne permettait pas d'établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations et a reconstitué l'assiette salariale de manière forfaitaire, sur le fondement des dispositions de l'article R 242-5 du code de la sécurité sociale ;
Considérant que les constatations faites par les inspecteurs du recouvrement et les recoupements établis à partir des auditions des salariés et des facturations ont permis à l'URSSAF d'établir pour chaque salarié concerné le nombre d'heures dissimulées ; qu'il en ressort un total de 1162,99 h non déclarées soit une moyenne mensuelle de 50h55 par salarié présent dans l'entreprise au cours de la période de contrôle, compte tenu des plannings d'organisation du travail quotidien de 8h à 19h30 ;
Considérant que la société invoque l'existence d'un roulement des salariés au cours de la journée de travail mais n'en rapporte nullement la preuve ;
Considérant qu'en revanche, il est établi que le gérant a perçu une rémunération entre le 1er janvier et le 31 octobre 2006, sans que la somme correspondante d'un montant de 15 000€ soit déclarée à l'URSSAF ;
Considérant qu'ainsi, la société ne justifie pas du caractère inexact ou excessif de la taxation forfaitaire résultant des calculs de l'URSSAF ;
Considérant que, dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la contestation de la société Yida Foods, accueilli la demande en paiement de l'URSSAF et validé la contrainte émise le 20 juin 2008 ;
Que les jugements seront confirmés ;
Considérant que la société Yida Foods, qui succombe en son appel, sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant que la procédure en matière de sécurité sociale est gratuite et sans frais ; qu'elle ne donne pas lieu à dépens ;
PAR CES MOTIFS
Ordonne la jonction des instances suivies sous les numéros 12/11538 et 12/12020 du répertoire général ;
Déclare la société Yida Foods recevable mais mal fondée en ses appels ;
Confirme les jugements entrepris ;
Déboute la société Yida foods de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;
Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L 241-3 et la condamne au paiement de ce droit s'élevant à la somme de 312,90 €.
Le Greffier, Le Président,