RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRÊT DU 26 Mars 2015
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/05257
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 Juin 2008 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MELUN Section Activités Diverses RG n° 05/00668
APPELANTE
Madame [M] [K]
[Adresse 1]
[Localité 1]
comparante en personne
assistée de Me François BABOUT, avocat au barreau de MELUN, toque : M24 substitué par Me Audrey OBADIA, avocat au barreau de MELUN
INTIMEES
SARL GAEL
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
SA SIFTRA
[Localité 2]
représentées par Me Philippe VOLKRINGER, avocat au barreau de MELUN
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Février 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Patrice LABEY, Président de chambre
Monsieur Bruno BLANC, Conseiller
Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, le délibéré prévu le 19 Mars 2015 étant prorogé au 26 Mars 2015.
- signé par Monsieur Patrice LABEY, Président, et par Mme Naïma SERHIR, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Mme [M] [K] a été engagée par la société SF 2G devenue la SARL GAEL dans le cadre d'un contrat à durée déterminée du 1er juillet 1997 au 12 décembre 1997, puis dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'employée de bureau.
Du 1er décembre 1999 au 31 décembre 2003, Mme [K] a exercé les mêmes fonctions au sein de la société TRANSPELOG devenue SIFTRA, avant d'être à nouveau transférée au sein de la société GAEL à compter du 1er janvier 2004, pour une rémunération de 1439,98 € dans le dernier état des relations contractuelles régies par la convention collective des transports routiers, catégorie transports routiers de marchandises et activités auxiliaires du travail.
Placée en arrêt de travail du 9 mars 2004 au 30 juin 2004, puis en congés maternité de juillet 2004 au 31 octobre 2004, Mme [K] a bénéficié d'un congé parental jusqu'au 28 avril 2005 et repris le travail à compter du 3 mai 2005.
Mme [K] a fait l'objet le 10 mai 2005 d'une convocation à un entretien préalable à licenciement, qui s'est tenu le 16 mai 2005 avant d'être licenciée par lettre du 25 mai 2005 pour motif économique par la société GAEL.
Le 23 août 2005, Mme [K] saisissait le Conseil de prud'hommes de MELUN aux fins de faire juger que le licenciement intervenu le 25 mai 2005 était dénué de cause réelle et sérieuse et à titre principal faire condamner in solidum la SARL GAEL et la SA SIFTRA à lui payer sur la base d'un salaire moyen brut de 1 951,14 € :
- 700 € au titre de la prime de juin 2004 correspondant à la période de juillet à décembre 2003 ;
- 47 610,22 € au titre du rappel de salaire sur la période correspondant du 2 février 1998 au 8 mars 2004 ;
- 506,90 € au titre du rappel de prise en charge conventionnelle par l'employeur du 10 mars 2004 au 24 juin 2004 ;
- 121,39 € au titre de la différence résultant du défaut de prise en charge de la sécurité sociale ;
- 2 131,66 € au titre de la différence résultant du défaut de déclaration de salaires au titre de congés de maternité ;
- 7 747,50 € au titre des heures supplémentaires à 25 % ;
- 27 891 € au titre des heures supplémentaires à 50 % ;
- 1 858,28 € au titre du rappel de salaire de juin 2003 à juillet 2003 correspondant à la reprise de l'ancienneté ;
- 1 937,03 € à partir du 1er juillet 2003 jusqu'au licenciement ;
- 3 370,45 € au titre du salaire des primes de treizième mois correspondant aux arriérés et aux anciennetés ;
- 3 769 € au titre du prorata des congés payés y afférents ;
- 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
- 1 801,05 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure ;
- 31 612,60 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 3 602,10 € au titre du rappel de préavis ;
- 2 013,66€ au titre du complément d'indemnité de licenciement ;
Outre l'exécution provisoire et l'octroi d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Mme [K] demandait au Conseil de prud'hommes d'ordonner sous astreinte la production du livre du personnel à compter du 1er janvier 1998 et sollicite à titre subsidiaire une enquête.
La Cour est saisie d'un appel formé par Mme [K] contre le jugement du Conseil de prud'hommes de MELUN rendu en formation de départage le 27 juin 2008 qui a condamné in solidum la société GAEL et la société SIFTRA à lui payer :
- 9982,04 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 1 426 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure ;
- 700 € au titre de la prime de juillet à décembre 2003 ;
- 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
et l'a déboutée du surplus de ses demandes.
Vu les écritures du 05 février 2015 au soutien des observations orales par lesquelles Mme [K] conclut à la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a jugé que son licenciement était irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse et à son infirmation pour le surplus et demande à la cour de condamner in solidum les sociétés GAEL et SIFTRA à lui verser :
- 31.612,60 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (subsidiairement pour non-respect de l'ordre des licenciements) ;
- 3.097,21 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure (2.550,25 € à titre subsidiaire ; 1.927,73 € à titre infiniment subsidiaire ) ;
- 6.194,48 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à la priorité de réembauche (5.100,10 € à titre subsidiaire, 3.855,46 à titre infiniment subsidiaire) ;
- 6.194,48 € à titre de dommages et intérêts pour violation de la priorité de réembauche (5.100,10€ à titre subsidiaire, 3.855,46 € à titre infiniment subsidiaire) ;
- 8.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive par l'employeur de ses obligations ;
- 64.554,99 € à titre de rappel de salaire, pour la période courant du 1er septembre 2000 au 26 juillet 2005, outre 6.455,50 € au titre des congés afférents (50.510,10 € et 5051 € à titre subsidiaire, 22.519,34 € et 2.251 € à titre infiniment subsidiaire) ;
- 3.609,32 € au titre de rappels de primes d'ancienneté, outre 360,93 € au titre des congés payés afférents (3.255 € et 325,58 € à titre subsidiaire) ;
- 4.917,74 € outre 491,77 € à titre de rappels de primes de 13eme mois (4.201,85 € et 420,18€ à titre subsidiaire, 1.562,73 € outre 156,27 € à titre infiniment subsidiaire) ;
- 34.242,13 € au titre des heures supplémentaires 3.424,21 € au titre des congés payés afférents (22.912,21 € et 2.291,22 € à titre subsidiaire) ;
- 37.666,54 € à titre de dommages et intérêts à titre subsidiaire, en réparation du préjudice résultant de la « perte de chance de pouvoir prouver le nombre d'heures supplémentaires qu'elle aurait effectuées ( 25.203,43 € à titre subsidiaire) ;
- 7.537,17 € à titre de complément d'indemnités de "congédiement" (5.840,97 € à titre subsidiaire, 2.417,79 € à titre infiniment subsidiaire) ;
- 6.222,06 € à titre de complément d'indemnité de préavis et 622,21 € au titre des congés payés afférents, (4.580,58 € et 458,06 € à titre subsidiaire ; 785,89 € et 78,59 € à titre infiniment subsidiaire) ;
- 18.718,86 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'impossibilité de percevoir des indemnités journalières correspondant à son emploi, (9.262,69€ à titre subsidiaire ; 8.630,79 € à titre infiniment subsidiaire) ;
- 9.274,42 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice occasionné par l'impossibilité d'être justement "allotie" par les ASSEDIC au titre de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, (6.154,76 € à titre subsidiaire ; 2.609,28 € à titre infiniment subsidiaire) ;
- 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Vu les écritures du 05 février 2015 au soutien de ses observations orales au terme desquelles les sociétés GAEL et SIFTRA demandent à la cour de débouter Mme [K] de l'ensemble de ses demandes et à la condamner à leur rembourser la somme de 700 € au titre de la prime versée en exécution du jugement du Conseil des Prud'hommes et leur verser 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience ;
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la classification de Mme [K] :
En retenant :
'qu'il résultait des différentes pièces produites aux débats, en particulier de l'organigramme des deux sociétés et des différents témoignages que Mme [K] avait effectué durant l'exécution de son travail, à compter de février 1998, les tâches d'un agent d'exploitation ;
'que la dénomination de l'employeur importait peu dès lors que l'employeur lui-même avait transféré Mme [K] d'une société à l'autre sans lui faire signer de nouveaux contrats de travail ni modifié ses tâches ;
'que ce point était confirmé par l'attestation ASSEDIC, remise le 23.5.2005 par la société TRANSPELOG qui indiquait notamment qu'elle avait été salariée de cette société du 1er juillet 1997 au 31.12.2003, les premiers juges ont par des motifs, dont les débats devant la cour n'ont pas altéré la pertinence, fait une juste application de la règle de droit et une exacte appréciation des faits et documents de la cause.
Il sera seulement souligné, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation, que ni l'évocation par l'employeur d'erreurs commises par la salariée dans l'exercice de ses fonctions, ni la référence au lien de parenté de la salarié avec M. [K] qui a également exercé les mêmes fonctions, ne sont de nature à altérer la pertinence des motifs retenus par les premiers juges.
Au surplus, Mme [K] établit qu'elle assurait effectivement la direction des conducteurs dont elle préparait les tournées, qu'elle assurait la correspondance avec la clientèle, gérait les stocks, prenait les commandes, fixait les rendez vous de livraisons, gérait les repos des chauffeurs et pourvoyait à leur remplacement, gérait la révision des camions, assurait la remise en banque des fonds et assurait la liaison entre les fournisseurs et les clients.
La décision entreprise sera par conséquent confirmée de ce chef.
Sur les rappels de salaires et de primes
Il ressort des débats que la convention collective applicable à l'activité principale de ce groupe est celle des transports routiers, catégorie transports routiers de marchandises et activités auxiliaires du travail.
Mme [K], qui s'est vue reconnaître la qualification d'agent d'exploitation et qui justifie que son emploi comportait des pouvoirs de décision et de commandement ou des responsabilités équivalentes, relevait effectivement de la catégorie des cadres coefficient 145.
N'est pas pertinente l'argumentation opposée par l'employeur qui dénie la portée de l'organigramme produit, pour confiner l'intéressée dans un statut employé, au motif qu'en relèverait le service administratif, commercial, contentieux, technique et exploitation, alors qu'en dépit des transferts du contrat de Mme [K] ou de l'évolution de cette dernière au sein de l'entreprise, il s'est toujours dispensé d'établir les avenants correspondants.
De surcroît, en application du principe "à travail égal- salaire égal" , la salariée est fondée à réclamer le différentiel entre le salaire qu'elle a perçu depuis le 1er septembre 2000 jusqu'à son licenciement et la rémunération servie à M. [K], également agent d'exploitation, sans que la différence de périmètre des fonctions des deux agents soit de nature à faire échec au principe précité.
Dans ces conditions, Mme [K] est fondée en sa demande de rappel de salaire selon les décomptes non autrement contestés, pour un montant total de 64.554,99 € outre 6.455,49 € au titre des congés payés afférents.
En outre, il sera par conséquent fait droit aux autres demandes de rappel formulées par Mme [K] pour les montants non autrement contestés qu'elle aurait dû percevoir en cette qualité, de :
- 3.609,32 € au titre de rappels de primes d'ancienneté, outre 360,93 € au titre des congés payés afférents ;
- 4.917,74 € à titre de rappels de primes de 13eme mois outre 491,77 € au titre des congés payés afférents;
- 7.537,17 € au titre du complément d'indemnité de licenciement avec une ancienneté de 7 ans et 9 mois ;
- 6.222,06 € à titre de complément d'indemnité de préavis ;
- 622,21 € au titre des congés payés afférents ;
Sur le rappel d'heures supplémentaires
Selon l'article L. 3121-10 du Code du Travail, la durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaines civile ; que l'article L. 3121-22 énonce que les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des huit premières heures supplémentaires, les heures suivantes donnant lieu à une majoration de 50 % ;
Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent qui ne peut être inférieur à 10% ;
Aux termes de l'article L.3171-4 du Code du Travail , en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures supplémentaires, d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la preuve contraire ;
La règle selon laquelle nul ne peut se forger de preuve à soi même n'est pas applicable à l'étaiement (et non à la preuve) d'une demande au titre des heures supplémentaires et que le décompte précis d'un salarié, qui permet à l'employeur de répondre en fournissant les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, est de nature à étayer la demande de ce dernier ;
Mme [K] produit des tableaux annuels couvrant sa période d'emploi, au terme desquels elle aurait régulièrement effectué au delà des 17 heures supplémentaires majorées de 10 %, des heures supplémentaires majorables à 25 % et des heures majorables à 50% dans des proportions allant de 16 à 24 heures, corroborés par des attestations indiquant qu'elle était contrainte de travailler en dehors des heures habituelles de l'entreprise pour faire face à sa charge de travail.
Bien que placé en position d'en discuter utilement la pertinence, l'employeur se borne à en contester la réalité et à indiquer que les bulletins de salaire de Mme [K] font effectivement état des heures supplémentaires qui lui ont été réglées, sans produire le relevé des horaires de la salariée et de s'expliquer sur l'origine des heures supplémentaires effectivement réglées.
Il y a lieu dans ces conditions de faire droit aux prétentions de Mme [K] dans les termes du dispositif.
Sur les dommages et intérêts au titre du différentiel d'indemnités journalières et d'allocations chômage
Arguant des conséquences de son absence de requalification sur le montant des indemnités qui lui ont été servies tant à l'occasion de son arrêt maladie suivi de son congé de maternité que des indemnités versées dans le cadre de l'Aide au Retour à l'Emploi et de l'impossibilité d'exercer un recours à ce titre, Mme [K] demande réparation du préjudice qui en est résulté.
Même si la salariée qui a formulé les demandes à ce titre dans le cadre de la présente instance, introduite trois mois après son licenciement, ne démontre pas qu'elle n'était plus à cette date en mesure d'exercer les recours utiles auprès des organismes concernés, la réalité du manque à gagner invoqué, imputable à l'absence de reclassification de l'intéressée est toutefois établie, dès lors qu'il est constant que les indemnités allouées par la CPAM et par Pôle Emploi sont effectivement calculées sur la base du salaire brut, de sorte que les préjudices dont elle se prévaut doivent être indemnisés.
Il y a lieu dans ces conditions, de réformer la décision entreprise et de faire droit aux demandes formulées par la salariée à ces titres.
Sur la rupture
En application de l'article L1233-3 du code du travail, est constitutif d'un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non-inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; lorsqu'une entreprise fait partie d'un groupe, les difficultés économiques de l'employeur doivent s'apprécier tant au sein de la société, qu'au regard de la situation économique du groupe de sociétés exerçant dans le même secteur d'activité, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux sociétés ou entreprises situées sur le territoire national ;
Une réorganisation de l'entreprise ne constitue un motif de licenciement que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe dont elle relève, en prévenant des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi du salarié licencié ;
La sauvegarde de compétitivité ne se confond pas avec la recherche de l'amélioration des résultats, et dans une économie fondée sur la concurrence, la seule existence de celle-ci ne représente pas une cause économique de licenciement ;
Par application de l'article L1233-4 du même code, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; les offres de reclassement proposées au salarié doivent êtres écrites et précises ;
Le reclassement doit en outre être recherché avant la décision de licenciement, au sein de la société comme au sein des sociétés du groupe entre lesquelles la permutabilité du personnel est possible, et l'employeur doit s'expliquer sur la permutabilité et ses éventuelles limites, au regard des activités, ou de l'organisation, ou du lieu d'exploitation; dans le cadre de cette obligation, il appartient encore à l'employeur, même quand un plan social a été établi, de rechercher effectivement s'il existe des possibilités de reclassement, prévues ou non dans le plan social, et de proposer aux salariés dont le licenciement est envisagé des emplois disponibles ; il ne peut notamment se borner à recenser dans le cadre du plan social les emplois disponibles au sein de la société et dans les entreprises du groupe ;
La lettre de licenciement du 25 mai 2005 qui fixe les limites du litige et qui lie le juge est ainsi rédigée :
"j'ai le regret de vous confirmer par la présente votre licenciement pour motif économique.
Notre client Promo Energie a repris la gestion de l'activité ou vous étiez affectée.
Nos propositions de reclassement sur d'autres sites n'ont reçues que des réponses négatives. Vous restez toutefois prioritaire pour une embauche, si un poste venait à se libérer.
Nous vous rappelons que nous vous avons transmis un dossier PARE le 23 mai 2005 et non le 23 avril comme noté par erreur sur le courrier d'envoi."
Par des motifs, dont les débats devant la cour n'ont pas altéré la pertinence, les premiers juges ont fait une juste application de la règle de droit et une exacte appréciation des faits et documents de la cause en retenant que :
- la rédaction et la motivation de cette lettre de licenciement sont particulièrement succinctes dans la mesure où il n'est pas contesté que la société PROMO ENERGIES a repris la gestion de l'activité depuis octobre 2002 ;
- durant l'année 2003, Mme [K] a continué à travailler partiellement pour la société PROMO ENERGIES et pour l'élaboration d'un nouveau logiciel de dispatch ;
- cette fin de contrat n'est donc pas un élément nouveau justifiant le licenciement de Mme [K] ;
- de plus, l'employeur ne démontre pas en quoi la fin de ce contrat a mis l'entreprise en difficulté ;
pour considérer que le licenciement de Mme [K] n'a pas un motif économique réel ;
La décision entreprise sera par conséquent confirmée de ce chef.
Compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise de plus de onze salariés, d'une perte d'ancienneté de sept ans et neuf mois ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, tenant en particulier à l'éviction d'une salariée à son retour de congés de maternité et parental dans des conditions proches de la discrimination et à la difficulté avérée pour l'intéressée de retrouver un emploi ainsi que cela résulte des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l'article L 1235-3 du Code du travail une somme de 29.000 € à titre de dommages-intérêts ;
Sur l'irrégularité de la procédure
Ainsi que le soulignent les sociétés intimées, l'indemnité susceptible d'être allouée à ce titre, n'est pas cumulable avec l'indemnité allouée sur le fondement de l'article L 1235-3 du Code du travail.
La décision entreprise sera par conséquent réformée de ce chef et Mme [K] déboutée de la demande formulée à ce titre.
Sur la priorité de réembauche
L'article L1233-16 du Code du travail dispose que la lettre de licenciement doit mentionner la priorité de réembauche ainsi que les conditions de sa mise en oeuvre. Par ailleurs, l'article 1235-13 du même code sanctionne le non-respect de la priorité de réembauche d'une indemnité qui ne peut être inférieure à deux mois de salaire dans l'hypothèse où le salarié dispose plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise de plus de onze salariés,
L'absence de mention dans la lettre de licenciement des conditions de la mise en oeuvre de la
priorité de réembauche, alors que l'employeur a effectivement procédé à un recrutement d'agent d'exploitation postérieurement au licenciement de Mme [K], constitue un manquement de l'employeur qui a empêché la salariée, restée sans emploi jusqu'en juin 2006, de bénéficier de cette priorité. En application de l'article 1233-16 du Code du Travail, le préjudice subi par Mme [K] doit être indemnisé par l'allocation de la somme de 6.000 €.
Sur la demande de dommages et intérêts
Mme [K] qui impute aux sociétés intimées, une exécution déloyale du contrat de travail et un manquement à leur obligation de sécurité, produit une pièce qui, bien que créée par ses soins, est corroborée par les attestations émanant non seulement de membres de sa famille mais également de collègues qui établissent la réalité de la surcharge de travail qui lui était imposée et de l'attitude de sa hiérarchie consistant à n'accepter qu'elle soit aidée que dans la mesure où elle menaçait de prendre les jours d'arrêt maladie qui lui étaient prescrits.
En outre, il est établi par les débats et les pièces produites qu'elle a bénéficié d'un régime particulier à son retour de congé parental, consistant à être installée dans un bureau dépourvu des éléments nécessaires à l'exécution de son contrat de travail, tels que l'ordinateur, le fauteuil et de matériel ainsi que de travail, avant d'être licenciée.
Le préjudice qui en est résulté pour la salarié doit être évalué à la somme de 7.000 €.
Sur la demande reconventionnelle
Les sociétés GAEL et SIFTRA font valoir que la salariée ne peut réclamer la prime de fin d'année 2004, dans la mesure où elle était absente depuis mars 2004, pour réclamer le remboursement de la prime de 700 € allouée par les premiers juges au titre de la période de juillet à décembre 2003.
Outre qu'il ne ressort d'aucune pièce de la procédure que la salariée sollicite la confirmation du paiement d'une prime de fin d'année, il doit être relevé, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur l'argument tiré de l'absence de Mme [K] à compter de mars 2004, que la demande des employeurs fondée sur cette absence pour le dénier le droit de percevoir une prime versée en 2004 au titre de l'année 2003, ne peut aboutir, de sorte qu'il y a lieu de les débouter de la demande formulée à ce titre.
Sur la remise des documents sociaux
La demande de remise de documents sociaux conformes est fondée ; il y sera fait droit dans les termes du dispositif ci-dessous sans qu'il y ait lieu à astreinte ;
Sur le remboursement ASSEDIC
En vertu l'article L 1235-4 ( L 122-14-4 alinéa 2 ancien) du Code du travail dont les conditions sont réunies en l'espèce, le remboursement des indemnités de chômage par les sociétés GAEL et SIFTRA, employeur fautif, est de droit ; ce remboursement sera ordonné ;
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
DÉCLARE recevable l'appel formé par Mme [K],
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le licenciement de Mme [K] dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné in solidum la SARL GAEL et la SA SIFTRA à lui verser 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
LE RÉFORME pour le surplus ,
et statuant à nouveau
REQUALIFIE l'emploi occupé par Mme [K] en emploi d'agent d'exploitation, relevant de la catégorie des cadres coefficient 145.
CONDAMNE in solidum les sociétés GAEL et SIFTRA à payer à [M] [K] :
- 29.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 6.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de priorité de réembauche ;
- 7.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- 64.554,99 € à titre de rappels de salaire pour la période du 24 août 2000 à son licenciement ;
- 6.455,49 € € au titre des congés payés afférents sur rappel de salaire ;
- 3.609,32 € au titre de rappels de primes d'ancienneté ;
- 360,93 € au titre des congés payés afférents ;
- 4.917,74 € à titre de rappels de primes de 13eme mois ;
- 491,77 € au titre des congés payés afférents ;
- 7.537,17 € au titre du complément d'indemnité de licenciement ;
- 6.222,06 € à titre de complément d'indemnité de préavis ;
- 622,21 € au titre des congés payés afférents ;
- 34.242,13 € au titre des heures supplémentaires ;
- 3.424,21 € au titre des congés payés afférents ;
-18.718,86 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'impossibilité de percevoir des indemnités journalières correspondant à son emploi ;
- 9.274,42 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice occasionné par l'impossibilité d'être justement "allotie" par les ASSEDIC au titre de l'allocation d'aide au retour à l'emploi ;
RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
CONDAMNE les sociétés GAEL et SIFTRA à remettre à [M] [K] une attestation destinée au Pôle Emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de sa signification ;
CONDAMNE in solidum les sociétés GAEL et SIFTRA à payer à [M] [K] à payer à 3.800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE les sociétés GAEL et SIFTRA de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,
ORDONNE le remboursement par les sociétés GAEL et SIFTRA, tenues in solidum, à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à Mme [M] [K] dans les limites des six mois de l'article L 1235-4 du code du travail.
CONDAMNE in solidum les sociétés GAEL et SIFTRA aux entiers dépens de première instance et d'appel,
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
N. SERHIR P. LABEY