Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 1
ARRET DU 14 AVRIL 2015
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/01486
(CONTREDIT)
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2013073475
DEMANDERESSE AU CONTREDIT :
SOCIETE [M] + [L] (AG & CO) KG
prise en la personne de leurs représentants légaux
[Adresse 3]
[K] [O] [P] 1
[Localité 3]
ALLEMAGNE
représentée par Me Philippe GODIN de l'AARPI GODIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259
DÉFENDERESSES AU CONTREDIT :
S.A.S. UNITED PHARMACEUTICALS
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Thierry HIBLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0766
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
TOKIO MARINE EUROPE INSURANCES LIMITED
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Thierry HIBLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0766
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 mars 2015, en audience publique, le rapport entendu, les avocats des parties ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur ACQUAVIVA, président, et Madame DALLERY, conseillère, chargés du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:
Monsieur ACQUAVIVA, président
Madame GUIHAL, conseillère
Madame DALLERY, conseillère
Greffier, lors des débats : Madame PATE
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur ACQUAVIVA, président et par Madame PATE, greffier présent lors du prononcé.
La société française UNITED PHARMACEUTICALS spécialisée dans la conception, le développement et la distribution de produits de nutrition infantile a confié à la société de droit allemand [M] + [L] (AG & Co.) KG (ci-après [M] [L]), commissionnaire de transport, la livraison de ses produits à destination de ses clients.
Le 10 octobre 2012, la société UNITED PHARMACEUTICALS a adressé un bon de commande à la société [M] [L] pour un transport en conteneur de ses produits à durée de vie limitée à partir d'Allemagne en direction du Koweït.
Initialement prévu du 19 au 29 novembre 2012, le transport des marchandises a fait l'objet d'incidents graves et successifs ayant provoqué l'absence de livraison à la destination prévue et le retour des marchandises, devenues périmées, à leur port de départ en Allemagne le 7 août 2013.
La société UNITED PHARMACEUTICALS a assigné la société [M] [L] devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de la voir condamner à l'indemniser des préjudices résultant de la perte des marchandises.
La société [M] [L] a soulevé in limine litis l'incompétence du tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du 15 octobre 2014, ce tribunal a retenu sa compétence motif pris de la stipulation dans les bons de commande de la société UNITED PHARMACEUTICALS, d'une clause d'élection de for.
Le 26 décembre 2014, la société [M] [L] a formé contredit à l'encontre de cette décision.
Par conclusions déposées et reprises oralement à l'audience, la contredisante demande à la Cour d'infirmer le jugement, la dire et juger bien fondée en son exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce de Brême, et condamner la société UNITED PHARMACEUTICALS à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de premières instance et du contredit.
Par conclusions déposées et reprises oralement à l'audience, la société UNITED PHARMACEUTICALS et la société de droit français TOKIO MARINE EUROPE INSURANCES demandent à la Cour de recevoir la seconde en son intervention volontaire, de donner acte à la première de sa demande de radiation du rôle ensuite de cette intervention volontaire, de rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la société [M] [L] comme étant mal fondée, de dire que l'affaire sera soumise au tribunal de commerce de Paris et de condamner la société [M] [L] à payer à la société TOKIO MARINE EUROPE INSURANCES la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR QUOI,
Considérant qu'il convient de donner acte à la société TOKIO MARINE EUROPE INSURANCES de son intervention volontaire ;
Considérant que la société UNITED PHARMACEUTICALS demanderesse à l'action et défenderesse au contredit ne peut solliciter, au motif de l'intervention de son assureur, la radiation de l'affaire du rôle, celle-ci ne pouvant sanctionner qu'un défaut de diligences des parties ;
Considérant qu'au soutien de son contredit, [M] [L] fait valoir que le tribunal de commerce de Paris s'est déclaré à tort compétent au motif que le bon de commande émis par la société UNITED PHARMACEUTICALS, contient une clause attributive de juridiction à son profit alors que chaque expédition confiée par UNITED PHARMACEUTICALS faisait l'objet d'un accord spécifique et que le bon de commande du 10 octobre 2012 a fait suite à une offre tarifaire du 2 octobre 2012 renvoyant expressément aux conditions générales des commissionnaires de transport allemands consultables sur son site internet dont l'adresse était spécifiée lesquelles prévoient que pour ton litige, est compétente la juridiction du lieu du bureau de la succursale du commissionnaire ayant reçu les instructions ;
Considérant que si l'article 23 du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 prévoit la validité des clauses de prorogation de compétence en matière de commerce international, c'est à la condition que la partie à laquelle on l'oppose l'ait acceptée, par écrit ou verbalement avec confirmation écrite ; qu'à défaut, la clause attributive de juridiction doit avoir été conclue sous une forme conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles, ou encore conformément à un usage du commerce international connu et régulièrement observé dans le type de commerce en cause ;
qu'en l'espèce, [M] [L] qui ne soutient ni ne démontre que selon un usage reconnu en matière de transport international de marchandises, l'acceptation d'une offre tarifaire soumise aux conditions générales des commissionnaires de transport du pays de départ de la marchandise emporterait présomption de consentement du donneur d'ordre à la clause de compétence qu'elles contiennent, ne peut valablement opposer à UNITED PHARMACEUTICALS qu'en agréant son offre tarifaire du 2 octobre 2012 qui renvoyait expressément aux conditions générales des commissionnaires de transport allemands, celle-ci aurait accepté la clause d'élection de for stipulée à l'article 30.2 au profit de la juridiction du lieu de la succursale où ont été adressées les instructions au commissionnaire ;
qu'en effet, aux termes du bon de commande du 10 octobre 2012, UNITED PHARMACEUTICALS a elle-même expressément attribué compétence exclusive au tribunal de commerce de Paris pour connaître de tout litige né en rapport avec sa commande, manifestant ainsi sa volonté d'écarter toute autre compétence juridictionnelle;
Considérant qu'il n'est pas contesté que les parties étaient en relation d'affaires régulière, que n'étant pas liées par un contrat-cadre, chaque commande était traitée de manière différenciée, qu'après envoi par le commissionnaire d'une proposition tarifaire, un bon de commande était adressé à ce dernier définissant les conditions de prise en charge, d'acheminement et de livraison des marchandises, que ces bons de commande contenaient en première page et de façon apparente sous « conditions particulières » la mention selon laquelle en cas de litige seuls les tribunaux de Paris sont compétents ainsi que l'indication en langue anglaise et en caractère gras d'une part que la loi française est applicable au contrat et exclut l'application de la convention de Vienne d'autre part que le tribunal de commerce de Paris est compétent pour tout litige lié à la commande ;
qu'en exécutant sans réserve les ordres successifs de UNITED PHARMACEUTICALS qui comportaient tous ces mentions lesquelles dérogeaient à ses propres stipulations, [M] [L] qui en a accepté toutes les conditions, ne peut, dès lors, décliner la compétence du tribunal de commerce de Paris, choisi par sa cliente pour connaître des litiges pouvant naître du contrat liant les parties ;
que le jugement qui a écarté l'exception d'incompétence soulevée par [M] [L] doit être confirmé ;
Considérant que [M] [L] qui succombe doit être condamnée aux frais du contredit sans pouvoir prétendre à une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de ces mêmes dispositions au profit de la société TOKIO MARINE EUROPE INSURANCES, partie intervenante ;
PAR CES MOTIFS,
Donne acte à la société TOKIO MARINE EUROPE INSURANCES de son intervention volontaire ;
Déboute la société UNITED PHARMACEUTICALS de sa demande de radiation de l'affaire du rôle ;
Rejette le contredit ;
Confirme le jugement déféré,
Condamne la société de droit allemand [M] + [L] (AG & Co.) KG aux frais du contredit.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT