Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRÊT DU 23 JUIN 2015
(n° 2015/ , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/07193
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Avril 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/14806
APPELANTE
Madame [P] [O]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Hélène FERON-POLONI de la SCP LECOQ VALLON & FERON-POLONI, avocat au barreau de PARIS, toque : L0187
INTIMÉES
SA GENERALI VIE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Anne-Marie BOTTE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1309
SA SEMAB Société d'Exploitation MAB, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Représentée par Me Marc HENRY de la SDE HUGHES HUBBARD et REED LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J013
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Mai 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente de chambre, entendue en son rapport, Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente
Monsieur Christian BYK, Conseiller
Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Aouali BENNABI
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine LE FRANÇOIS, présidente et par Madame Aouali BENNABI, greffier présente lors de la mise à disposition.
Le 22 décembre 2001, Madame [O] a souscrit par l'intermédiaire de la société de courtage JP MORGAN FLEMING SELECTION un contrat d'assurance vie 'Strategie Fleming Monde II' auprès de la Fédération Continentale. Elle a procédé à un versement de 91.469,41 euros, financé par un prêt in fine du même montant souscrit le 19 février 2002 pour une durée de dix ans auprès de la société de Banque et d'Expansion aux droits de laquelle se trouve la société d'exploitation MAB (SEMAB). Les fonds ont été versés sur le support en unités de compte FCP JMPF Valeurs, Madame [O] ayant en outre choisi l'option 'Plan d'épargne populaire'.
Par acte du 19 février 2002, Madame [O] a délégué à la SEMAB , en garantie du prêt accordé, la créance qu'elle avait sur la Fédération Continentale au titre du contrat d'assurance vie pour un montant de 91 469,41 euros.
Par courrier du 3 février 2010, Madame [O] a sollicité le rachat de ce contrat qui n'a pu être effectué, la banque ayant refusé de donner mainlevée du nantissement.
Par lettre recommandée du 12 avril 2010, reçue par l'assureur le 16 avril 2010, Madame [O] a informé la société GENERALI VIE de sa renonciation au contrat et a sollicité la restitution de la somme investie.
Par courrier recommandée du même jour adressé à la banque, elle s'est prévalue de la nullité du prêt.
Par courrier du 8 juin 2010, la société GENERALI VIE, qui vient aux droits de la Fédération Continentale, lui a répondu ne pouvoir donner une suite favorable à sa demande qui n'avait pas été effectuée dans le délai de 30 jours à compter de la réception par elle de la note d'information le 6 décembre 2007. Madame [O] a contesté avoir reçu cette note.
Par acte d'huissier du 15 octobre 2010, Madame [O] a assigné les sociétés GENERALI VIE et SEMAB devant le Tribunal de Grande Instance de Paris qui, par jugement du 2 avril 2013, a débouté Madame [O] de l'intégralité de ses demandes et l' a condamnée à payer à la société GENERALI VIE et à la SEMAB, chacune, la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par déclaration en date du 10 avril 2013, Madame [O] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 17 avril 2015, elle sollicite l'infirmation du jugement, demandant à la cour de juger que c'est à bon droit qu'elle a renoncé au contrat d'assurance vie 'Strategie Fleming Monde II' , de condamner la société GENERALI VIE à lui restituer la somme de 91.469,41 euros avec intérêts au taux légal majoré de moitié à compter du 16 mai 2010 jusqu'au 16 juillet 2010 puis à partir de cette date au double du taux légal, de dire que les intérêts échus produiront eux-même intérêts à compter de la délivrance de l'assignation et de condamner la société GENERALI VIE à lui payer la somme de 15.000 à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive. Sur les conséquences de l'anéantissement du contrat d'assurance vie à l'égard du prêt in fine souscrit auprès de la société SEMAB, Madame [O] sollicite, à titre principal, le prononcé de la nullité du contrat in fine en raison de son indivisibilité par rapport au contrat d'assurance vie et la condamnation de la société SEMAB au remboursement de la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt soit 54.043,82 euros avec intérêts à taux légal à compter de l'assignation conformément à l'article 1154 du code civil. À titre subsidiaire, elle sollicite le prononcé de la résolution du contrat de prêt in fine et la condamnation de la société SEMAB au paiement de la somme de 54.043,82 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation conformément à l'article 1154 du code civil. À titre infiniment subsidiaire, elle sollicite le prononcé de la caducité avec effet rétroactif du contrat de prêt in fine et la condamnation de la société SEMAB au paiement de la somme de 54.043,82 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation conformément à l'article 1154 du code civil. À titre subsidiaire, sur la responsabilité de la société GENERALI VIE et de la société SEMAB, Madame [O] sollicite leur condamnation solidaire au paiement d'une somme de 54.043,82 euros au titre de son préjudice matériel et d'une somme de 20.000 euros au titre de son préjudice moral. En tout état de cause, elle sollicite la condamnation solidaire des sociétés GENERALI VIE et SEMAB au paiement de la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions signifiées le 31 juillet 2013, la société GENERALI VIE demande, à titre principal, la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et, y ajoutant, la condamnation de Madame [O] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu' aux entiers dépens. À titre subsidiaire, elle sollicite le débouté de la société SEMAB de son appel en garantie formulé à son encontre.
Par ses dernières conclusions signifiées le 30 avril 2015, la société SEMAB sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a retenu que l'action en nullité du contrat de prêt de Madame [O] n'est pas prescrite et, statuant à nouveau, de déclarer irrecevable Madame [O] en son action en nullité du contrat de prêt pour cause de prescription et la débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes. Subsidiairement, elle demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a constaté que la faculté de renonciation de Madame [O] avait déjà expiré lorsqu'elle en a fait la demande et l'a déboutée en conséquence de ses demandes et en ce qu'il a retenu que la société SEMAB n'a pas manqué à ses obligations d'information et de conseil et débouter en conséquence Madame [O] de l'ensemble de ses demandes. Plus subsidiairement, elle demande la condamnation de la société GENERALI VIE à la garantir de toutes sommes en principal, intérêts et frais qu'elle serait condamnée à verser à Madame [O]. En tout état de cause, la société SEMAB sollicite la condamnation de tout succombant au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 mai 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la renonciation au contrat d'assurance vie 'Stratégie Fleming Monde II'
Considérant que Madame [O] soutient que la société GENERALI VIE a violé les dispositions des articles L.132-5-1 et A.132-4 du code des assurances, relatives à l'obligation pré-contractuelle d'information incombant à l'assureur, en ne lui remettant pas une note d'information distincte des conditions générales du contrat, qu'elle affirme que l'assureur ne peut prétendre lui avoir adressé par courrier recommandé avec accusé de réception du 3 décembre 2007 dont l'envoi a été constaté par huissier une note d'information distincte des conditions générales et conforme aux dispositions légales alors que la remise de documents conformes doit faire l'objet d'un récépissé de la part du souscripteur , et que la réception du courrier par son père qui bénéficiait d'une procuration ne dispense pas l'assureur de son obligation de remettre au souscripteur du contrat la note d'information contre récépissé, que l'article L 132- 5-1 exige un récépissé signé par le preneur d'assurance vie et rien n'indique que ce récépissé puisse être valablement donné dans le cadre d'un mandat général , que les dispositions de l'article L 132-5-1 étant d'ordre public, le récépissé ne peut être signé qu'en vertu d'un mandat spécial, qu'il n'est d'ailleurs pas établi que l'accusé de réception ait été signé par son père de sorte que l'assureur ne peut établir que le signataire a bien été mandaté ;
Considérant que Madame [O] ajoute qu'il ne lui a été remis que des conditions générales valant note d'information, ce qui ne répond pas aux exigences légales, que de plus ce document ne contient pas toutes les informations exigées par les articles A 132-4 et A 132-5 du code des assurances, que le bulletin de souscription ne comporte pas de modèle de lettre de renonciation que le prétendu envoi de la note d'information en 2007 par la société GENERALI VIE ne couvre en rien ce manquement et que la note d'information produite par l'assureur n'est pas conforme aux dispositions des articles L 132-5-1, A 132-4 et A 132-5 du code des assurances tels qu'applicables à la date de souscription du contrat de sorte qu'elle a pu valablement exercer sa faculté de renonciation prorogée qui est un droit pour l'assuré dont la bonne foi n'est pas requise ;
Considérant que la société GENERALI VIE rétorque que la note d'infirmation distincte des conditions générales a bien été adressée à Madame [O] le 3 décembre 2007 selon pli recommandée avec avis de réception n° 20 008 726 1852 5, que la signature figurant sur l'accusé de réception est celle de Monsieur [Q] [B] [O] son père, qu'il ne s'agit pas de l'exercice de la faculté de renonciation mais de la réception d'un pli recommandé avec accusé de réception qui ne nécessite pas un mandat spécial, que la notice d'information est conforme aux exigences légales de sorte que cet envoi a fait courir un nouveau délai de 30 jours, qu'un modèle de lettre de renonciation était inséré dans les conditions générales que l'assurée a reconnu avoir reçues et pris connaissance, ce qui correspond aux exigences légales alors qu'il n'existe aucune définition légale de ce que doit être la proposition d'assurance qui comprend la demande de souscription et les conditions générales du contrat et que la note d'information est conforme à l'ensemble des dispositions légales ;
Considérant que la société SEMAB soutient que la société GENERALI VIE ayant adressé le 3 décembre 2007 une note d'information distincte des conditions générales réceptionnée le 6 décembre 2007 par le père de Madame [O] dûment habilité suivant mandat du 30 octobre 2003, le délai de 30 jours pendant lequel Madame [O] aurait pu renoncer au contrat expirait le 5 janvier 2008 ce dont il résulte qu'en informant l'assureur par lettre du 12 avril 2010 de sa volonté de renoncer au contrat d'assurance vie, Madame [O] a agi tardivement et n'a pu valablement renoncer à son contrat ;
Considérant que l'article L.132-5-1 du code des assurances dans sa rédaction antérieure à la loi du 15 décembre 2005, applicable en la cause, dispose que ' Toute personne physique qui a signé une proposition d'assurance ou un contrat a la faculté d'y renoncer par lettre recommandée avec demande d'avis de réception pendant le délai de trente jours à compter du premier versement. La proposition d'assurance ou de contrat doit comprendre un projet de lettre destiné à faciliter l'exercice de cette faculté de renonciation. Elle doit indiquer notamment, pour les contrats qui en comportent, les valeurs de rachat au terme de chacune des huit premières années au moins. L'entreprise d'assurance ou de capitalisation doit, en outre, remettre, contre récépissé, une note d'information sur les dispositions essentielles du contrat, sur les conditions d'exercice de la faculté de renonciation, ainsi que sur le sort de la garantie décès en cas d'exercice de cette faculté de renonciation. Le défaut de remise des documents et informations énumérés au présent alinéa entraîne de plein droit la prorogation du délai prévu au premier alinéa jusqu'au trentième jour suivant la date de remise effective de ces documents. Un nouveau délai de trente jours court à compter de la date de réception du contrat, lorsque celui-ci apporte des réserves ou des modifications essentielles à l'offre originelle, ou à compter de l'acceptation écrite, par le souscripteur, de ces réserves ou modifications. La renonciation entraîne la restitution par l'entreprise d'assurance ou de capitalisation de l'intégralité des sommes versées par le contractant, dans le délai maximal de trente jours à compter de la réception de la lettre recommandée. Au-delà de ce délai, les sommes non restituées produisent de plein droit intérêt au taux légal majoré de moitié durant deux mois, puis, à l'expiration de ce délai de deux mois, au double du taux légal ' ;
Considérant que la société GENERALI VIE ne conteste pas que la remise, lors de la souscription , à Madame [O], d'un seul document intitulé 'Conditions générales valant note d'information' ne répondait pas aux exigences légales qui supposaient la remise d'une notice distincte des conditions générales du contrat ;
Considérant qu'elle établit par la production du procès verbal de constat des 3,7,10, 11,14,17,18,19,20 et 21 décembre 2007 qu'elle a adressé notamment à Madame [O] dont le nom figure dans la liste des destinataires relevée par l'huissier, une note d'information distincte des conditions générales selon pli recommandé avec avis de réception n° 20 008 726 1852 5 ;
Considérant que l'assureur produit aux débats l'accusé de réception de ce courrier signé le 6 décembre 2007, qu'il résulte de la comparaison de la signature figurant sur cet avis avec celle figurant sur la copie de la carte d'identité de Monsieur [Q]-[B] [O] jointe à la procuration du 31 octobre 2003 que la signature figurant sur cet avis de réception est celle de Monsieur [Q]-[B] [O], père de Madame [P] [O], à qui celle-ci, qui vivait à [Adresse 4], avait, suivant acte du 30 octobre 2003,envoyée par télécopie à l'assureur, donné procuration 'pleine et entière' de la représenter dans tous les actes de la vie civile ;
Considérant qu'en vertu de cette procuration, Monsieur [Q]-[B] [O] avait qualité pour recevoir la lettre recommandée du 3 décembre 2007 et sa signature sur l'accusé de réception le 6 décembre 2007, en vertu du mandat général donné par sa fille, vaut récépissé au sens de l'article L132-5-1 du codes assurances de la nouvelle note d'information ;
Considérant que Madame [O] soutient qu'en toute hypothèse l'envoi de la nouvelle note d'information ne couvre nullement le manquement commis par l'assureur en ne faisant pas figurer de projet de lettre de renonciation dans le bulletin de souscription ;
Considérant que selon l'article L 132-5-1 du code des assurances, dans sa rédaction applicable à l'espèce, la proposition d'assurance ou de contrat doit comprendre un projet de lettre destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation ;
Considérant qu'en insérant un projet de lettre de renonciation dans les conditions générales valant note d'information remises à l'assuré, la société GENERALI VIE n'a pas respecté l'article L 132-5-1 du code des assurances qui veut que le projet figure dans la proposition d'assurance matérialisée par le bulletin d'adhésion, seul document qui porte la signature de l'assuré ;
Considérant que l'envoi de la nouvelle note d'information dans laquelle figure le modèle de la lettre de renonciation, ne permet pas de régulariser le manquement de l'assureur à ce titre, que dès lors et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la conformité de la nouvelle note d'information aux dispositions légales, Madame [O], qui n'a pas reçu une information conforme au texte visé, en ce qui concerne le projet de lettre de renonciation, a valablement exercé sa faculté de renonciation par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 12 avril 2010 reçue par l'assureur le 16 avril 2010, que le jugement entrepris sera en conséquence infirmé et la société GENRALI VIE sera condamnée à restituer à Madame [O] la somme de 91.469,41 euros avec intérêts au taux légal majoré de moitié à compter du 16 mai 2010 jusqu'au 16 juillet 2010 puis à compter de cette date au double du taux légal et capitalisation des intérêts depuis l'assignation dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
Sur le contrat de prêt
Considérant que Madame [O] soutient que la prescription quinquennale soulevée par la société SEMAB est inopérante alors que l'article 2262 du code civil prévoit que lorsqu'un contrat est nul d'une nullité absolue le délai de prescription de l'action en annulation est de 30 ans, et qu'en toute hypothèse le terme du prêt n'étant pas survenu avant l'introduction de l'instance, aucune prescription n'a pu commencer à courir, qu'elle affirme que le contrat d'assurance vie souscrit auprès de la société GENERALI VIE et le prêt in fine octroyé par la SEMAB forment un ensemble contractuel indivisible et sont les composantes d'une opération économique globale consistant en un montage financier à effet de levier, que la renonciation au contrat d'assurance entraîne la nullité du contrat de prêt, sa résolution ou sa caducité à effet rétroactif, qu'en toute hypothèse les sociétés GENERALI VIE et SEMAB ont manqué à leurs obligation d'information et de conseil ;
Considérant que la société SEMAB fait valoir que l'action de Madame [O] est prescrite sur le fondement de l'article 1304 du code civil, alors qu'elle a souscrit le prêt litigieux le 19 février 2002 et n'en a sollicité la nullité que par acte du 15 octobre 2010 soit plus de huit ans après et qu'elle n'est pas fondée à invoquer les dispositions de l'article 2233 du code civil alors que l'exigibilité du prêt n'avait aucune incidence sur la possibilité pour Madame [O] de demander la nullité du prêt motif pris de la renonciation à son contrat d'assurance, qu'elle ajoute que la demande de Madame [O] ne peut prospérer alors qu'elle n'a pas valablement renoncé à son contrat d'assurance , ajoutant qu'en tout état de cause les critères d'indivisibilité de l'opération ne sont pas réunis en l'espèce dans la mesure où elle a souscrit son contrat d'assurance et le prêt à des dates éloignées de près de deux mois et pour une durée différente, que le montage n'est pas complexe, que le contrat d'assurance n'a nul besoin du prêt pour subsister, qu'il relève de la nature même de la délégation de créance de lier le prêt au contrat donné en garantie, qu'il n'est nullement établi que le courtier ait eu mandat de représenter la banque et l'assureur qui sont deux entités distinctes n'appartenant pas au même groupe et que la commune intention des parties de lier leurs engagements n'est pas établie par les documents produits ;
Considérant que la SEMAB précise que la nullité du prêt n'est pas encourue dès lors que lors de sa souscription, l'obligation de l'emprunteur n'était pas dépourvue de cause , que la demande en résolution est mal fondée, aucune faute ne pouvant être reprochée à la banque, que la demande de caducité , qui ne peut avoir d'effet que pour l'avenir ,ne peut prospérer alors qe le prêt a été valablement contracté et qu'il n'est pas possible de prononcer la caducité d'une convention qui a déjà produit ses effets, qu'elle ajoute qu'elle a respecté les obligations que lui imposait son activité de dispensateur de crédit dans l'opération litigieuse et ne saurait se voir reprocher d'avoir manqué aux obligations pesant sur les prestataires de services d'investissement et sur les assureurs ;
Considérant que la société GENERALI VIE soutient que l'anéantissement du prêt, qualifié d'indissociable avec le contrat d'assurance n'est retenue que lorsque le souscripteur a valablement renoncé à son contrat d'assurance ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque la renonciation est intervenue hors délai ;
Considérant que le document publicitaire du contrat PEPS produite aux débats, qui porte au verso de la seconde feuille la date de juin 2001 ce qui démontre qu'il était à la disposition de Madame [O] au moment de la souscription de ses contrats, propose ce qu'il présente comme une 'idée neuve' à savoir 'la combinaison astucieuse d'un contrat d'assurance vie option PEP souscrit auprès de la Fédération continentale (groupe GENERALI) et d'une avance consentie par un établissement de crédit', l'avance étant définie dans ce document comme 'une avance sur 10 ans par la société de Banque et d'expansion SBE', aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la SEMAB , le document poursuivant ' Avec PEPS , votre épargne bénéficie d'un important effet de levier', que même si l'octroi du prêt était soumis à l'accord de la banque, il résulte de ce document qu'il était proposé à Madame [O] la souscription d'un contrat d'assurance auprès de la société la Fédération Continentale alimenté par des fonds issus d'un prêt contracté auprès de la SBE devenue la SEMAB nommément désigné comme étant le prêteur de deniers associé à cette opération ;
Considérant que les deux opérations ont été réalisées dans un laps de temps très restreint, que le bulletin de souscription a été signé le 22 décembre 2001, tandis que le contrat de prêt a été signé le 19 février 2002 ce qui suppose nécessairement que la demande de prêt a été faite antérieurement ce que confirme la télécopie de Madame [O] du 5 février 2002 adressé au courtier aux termes de laquelle elle indique qu'elle 'souhaite dorénavant emprunter la somme de 600 000 francs', le bulletin de souscription du contrat d'assurance portant sur un montant de 300 000 francs, provenant d'un 'crédit SBE' et les conditions particulières du contrat en date du 15 mars 2012 portant mention du versement de la somme de 91469, 41 euros correspondant au montant du prêt qui a été modifié par la télécopie du 5 février 2002, que les deux opérations ont été réalisées par l'intermédiaire du même interlocuteur, la société JP MORGAN FLEMING, lié à l'assureur par un accord pour la création de ce contrat ainsi que la société GENERALI VIEle reconnaît dans ses écritures et à la banque par un accord de partenariat ainsi que cela résulte de la lettre de transmission du chèque de la banque SBE à l'assureur en date du 27 Février 2002 ,que l'objet du prêt figurant sur le contrat de crédit est expressément le 'financement de la souscription d'un PEP ASSURANCE', que la somme de 91 469,41 euros a été versée directement par la banque sur le contrat d'assurance sans transiter par le compte de Madame [O] ainsi que cela résulte de la clause III-b) Décaissement du contrat de prêt, que le contrat d'assurance a fait l'objet d'un nantissement au profit de la SEMAB ;
Considérant que nonobstant le fait que le contrat d'assurance vie ait été conclu pour une durée plus longue que le prêt, ces éléments caractérisent la commune intention des parties de lier les deux contrats afin de mettre en place une opération financière globale, la SEMAB n'ayant accordé un prêt à Madame [O] que pour abonder le contrat d'assurance souscrit auprès de la société GENERALI , afin de créer un effet de levier ; qu'il s'agit donc de contrats interdépendants formant un ensemble contractuel indivisible, peu important qu'ils aient été conclus par des personnes morales distinctes ;
Considérant que du fait de cette indivisibilité, l'anéantissement du contrat d'assurance résultant de l'exercice par Madame [O] de la faculté de renonciation entraîne non pas la nullité du contrat de prêt, dont la validité n'est pas viciée par la disparition du contrat d'assurance vie auquel il était lié de sorte qu'il est inutile de rechercher si l'action sur ce fondement inopérant est prescrite, ni sa résolution, aucun manquement de la banque dans l'exécution du contrat de prêt n'étant caractérisé, mais sa caducité avec effet rétroactif, impliquant la remise en état des parties dans l'état où elles se trouvaient avant sa conclusion, peu important que le contrat soit arrivé à son terme pendant la procédure dès lors que la caducité est la conséquence de l'anéantissement du contrat d'assurance auquel il est lié par un lien indivisible et que la demande de Madame [O] tend à la restitution des intérêts versés ;
Considérant qu'il convient en conséquence de condamner la SEMAB à restituer à Madame [O] la totalité des intérêts et frais payés dans le cadre du prêt soit la somme de 54 043,82 euros, qui est mentionnée sur le prêt comme étant le coût total du crédit et au paiement sur cette somme des intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2010 et capitalisation à compter de cette date dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
Considérant qu'alors qu'il est fait droit à la demande de Madame [O] fondée sur l'indivisibilité des contrats, sa demande en paiement de dommages et intérêts pour manquements à leur devoir d'information et de conseil des sociétés GENERALI et SEMAB est sans objet ;
Sur l'appel en garantie de la société SEMAB à l'encontre de la société GENERALI VIE
Considérant que la société SEMAB sollicite la garantie de l'assureur en soutenant qu'un tiers peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage, qu'elle affirme que la société GENERALI VIE a commis une faute en ne remettant pas la notice d'information à sa cliente, qui l'a exposée au risque de voir le prêt annulé ;
Considérant que la société GENERALI VIE fait valoir que cet appel en garantie est infondé puisqu'elle a régularisé la situation de Madame [O] par l'envoi de la nouvelle note d'information et qu'au surplus l'anéantissement du contrat de prêt sollicité par madame [O] ne découle pas du prétendu manquement de l'assureur à son obligation d'information mais de l'exercice discrétionnaire par celle-ci de son droit de renonciation ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 132-5-1 du Code des assurances dans sa rédaction applicable en la cause, le défaut de remise par l'assureur à l'assuré des documents et informations énumérés audit article n'est pas sanctionné par la nullité du contrat d'assurance et n'entraîne que la prorogation de plein droit du délai légal de renonciation ouvert à l'assuré ;
Considérant qu'il s'ensuit que la condamnation de la banque à rembourser à Madame [O] les frais et intérêts du prêt en conséquence de la caducité à effet rétroactif du contrat de prêt, jugé indivisible du contrat d'assurance-vie, procède de la décision prise par l'assurée de renoncer à ce contrat en usant de la prorogation de plein droit du délai légal qui lui était ouverte en raison du manquement de l'assureur à ses obligations d'information précontractuelle, qui ne constituait pour elle qu'une simple faculté, et non de la nullité du contrat d'assurance-vie, qui n'était pas encourue ;
Qu'il n'existe donc pas de lien de causalité direct et certain entre le manquement de la société GENERALI VIE et le préjudice allégué par la société SEMAB ;
Considérant, au surplus, que la société SEMAB n'ignorait pas l'objet du prêt in fine consenti à Madame [O], énoncé au contrat comme destiné au 'financement de la souscription d'un PEP Assurance ', dont le montant a été directement versé à l'assureur et qui était garanti par une délégation de créance du contrat d'assurance et qu'il lui appartient dès lors d'en assumer les risques ;
Considérant que la SEMAB sera en conséquence déboutée de sa demande de garantie à l'encontre de la société GENERALI VIE ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive
Considérant que Madame [O] sollicite la condamnation de la société GENERALI VIE à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande, Madame [O] ne démontrant pas que le droit de l'assureur de s'opposer à sa demande aurait dégénéré en abus , et ne justifie pas de l'existence d'un préjudice distinct de celui réparé par l'allocation des intérêts majorés de l'article L132-5-1 du code des assurances ;
Sur les frais irrépétibles
Considérant qu'il y a lieu d'allouer à Madame [O] la somme de 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de débouter les intimées de leur demande à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition de la décision au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement entrepris,
Dit que Madame [O] a valablement renoncé au contrat d'assurance STRATEGIE FLEMING MONDE II par courrier recommandé avec accusé de réception du 12 avril 2010 , réceptionné le 16 avril 2010,
Condamne la société GENERALI à restituer à Madame [O] la somme de 91.469,41 euros avec intérêts au taux légal majoré de moitié à compter du 16 mai 2010 jusqu'au 16 juillet 2010 puis à compter de cette date au double du taux légal et capitalisation des intérêts depuis l'assignation dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Prononce la caducité avec effet rétroactif du contrat de prêt conclu le 19 février 2002 entre Madame [O] et la Société d'Exploitation MAB,
Condamne la Société d'Exploitation MAB à payer à Madame [O] la somme de 54 043,82 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2010 et capitalisation à compter de cette date dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne in solidum la société GENERALI et la Société d'Exploitation MAB à payer à Madame [O] la somme de 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,
Déboute la société GENERALI et la Société d'Exploitation MAB de leur demande à ce titre ;
Condamne in solidum la société GENERALI et la Société d'Exploitation MAB aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE